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24/12/2011

Flâner...

Flâner, de préférence en-dehors des sentiers battus.

Flâner et se souvenir de ce que l’on aurait pu être et qu’on n’a pas été.

Refaire à l’envers le chemin des écoliers,

Laisser là le maître et ses cahiers, puis partir et se promener parmi les buissons.

Chercher les paroles perdues, les sourires esquivés, les frissons imaginés,

Puis revivre les souvenirs abolis,

Tous les souvenirs.

Ceux d’hier et d’avant-hier,

Ceux qu’on avait oubliés et qui ressurgissent là, au détour de la route,

Intacts comme au premier jour.

 

Marcher.

Marcher et finir par se perdre le long des falaises à pic,

Dans l’ombre des forêts, ou dans la poussière d’un chemin écrasé de soleil.

Se souvenir qu’un jour on a été ou du moins qu’on a cru être

Se souvenir du parfum d’une femme et de tendresses anciennes

Se souvenir qu’on a tout donné et qu’on a tout perdu,

La jeunesse, les espoirs et les désirs insensés.

 

Souhaiter être libre, enfin, hors du monde.

Partir, seul, et chercher.

Chercher un port, quelque part, où pouvoir se reconstruire et rêver.

Regarder la mer monter et les bateaux partir.

Vouloir se perdre, comme eux, dans l’océan,

Mais rester quand même, ici, et contempler ses pas, sur le sable mouillé,

Signes éphémères de notre présence au monde.


Littérature

00:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature

17/12/2011

Le fleuve

Majestueux et impassible,

Coulant sous mille ponts de pierres,

Tu traverses la ville.

D’où viens-tu, fleuve aux reflets étranges

De quels pays es-tu issu ?

Tu charries, dans tes eaux brunes, des limons venus d’ailleurs

Et des terres argileuses provenant de contrées inconnues.

Sur tes eaux, flottent des troncs d’arbres déchiquetés,

Vestiges d’incroyables catastrophes.

Tu es né en amont, sur les hautes terres inexplorées,

Là bas, il y a, dit-on, des plateaux marécageux

Où vivent des animaux fantastiques,

Et des forêts profondes où nul n’a jamais pénétré.

Toi seul connais ces terres sauvages où commença le monde.

C’est leur âme que tu portes en toi

Et c’est pourquoi tu es si majestueux

Quand tu traverses les grandes villes

Et que tu coules sous leurs ponts de pierres.

Mille passants, sur la berge, te regardent avec respect

Car ils craignent tes colères.

Mais tu passes, impassible, et poursuis ta destinée

Vers les terres de l’aval,

Là où le ciel et la mer, paraît-il, se rejoignent à l’horizon.

Littérature



Paris, la Seine en crue

11:56 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature

14/12/2011

Le Sud

Dans les après-midis d’été, quand le monde est endormi,

C’est un plaisir de se promener, seul, dans les rues du village.

Il suffit d’ouvrir la porte de la vieille bâtisse

Et aussitôt la terrible chaleur vous saute au visage.

Dehors, personne. Pas un bruit. Le silence.

Je descends les ruelles en pente,

Le long de vieilles maisons d’un autre âge.

Le temps, ici, s’est arrêté et rien n’a changé depuis le Moyen-âge

Ou si peu.

Le soleil brûle ma peau et je m’arrête un instant,

A l’ombre de l’église, près de la glycine centenaire.

Des monstres de pierre me fixent de leurs yeux insistants.

Diables, chimères, gorgones et coquecigrues

Semblent me reprocher de troubler leur repos.

Trois coups sonnent au clocher

Rappelant dans le silence, l’éternelle fuite du temps.

Moi je poursuis ma route, sous le ciel azuré,

Vers l’unique place, celle de toutes les Républiques.

Personne.

Pas un souffle de vent.

Rien.

Rien que la fontaine qui murmure doucement

Et dont les quatre lions crachent une eau glacée.

Je trempe ma main dans l’onde. Frisson.

A l’ombre d’un arbre, dort un chien

Qui rêve à ce qu’il fut ou ce qu’il aurait pu être.

Le temps s’est arrêté.

Le village est assoupi.

C’est le Sud, une après-midi d’été.

littérature

07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature

06/12/2011

Dans la forêt profonde

Dans la forêt profonde, j’ai mis mes pas dans ceux d’autrefois.

Rien n’a changé. C’est toujours le même silence, le même calme des origines.

Le petit chemin serpente dans le sous-bois aux senteurs étranges et enivrantes. Parfum indistinct fait de feuilles en décomposition, de champignons, de branches mortes et de menthe sauvage.

Je marche. Voici le carré de pins et aussitôt l’odeur de la résine, qui coule le long des troncs, m’envahit. Souvenirs de jours anciens. Je ferme les yeux, je respire. Rien n’a changé. Eternité.

Je progresse encore.

Le chemin longe maintenant la rivière. Murmure étouffé et discret, clapotis chantant, petite musique dans l’épaisseur du silence.

Je marche toujours.

A un tournant, je quitte le sentier et pénètre au hasard dans le grand bois, à flanc de colline.  Mes pas font craquer quelques branches. Un merle s’envole, donnant l’alerte. Cri perdu qui résonne dans ma solitude.

Je me fraie tant bien que mal un passage à travers les ronces et les myrtilliers. Puis ce sont les fougères, aux grandes feuilles jaunes couchées dans un désordre de fin du monde. Obstacle infranchissable, qu’il faut pourtant franchir.

Il fait sombre. Déjà, le jour décline.

Je tâtonne un peu, j’hésite, reviens sur mes pas, repars dans l’autre sens. Enfin le voici. Seul au milieu de la  clairière, le chêne est là. Il a toujours été là, aussi loin que les hommes s’en souviennent. Je m’assois entre ses racines, sur la mousse tendre. C’est là qu’un jour tu t’es étendue, encore adolescente. C’est là qu’un jour, d’un doigt timide, j’ai effleuré ton épaule nue…

Il y a si longtemps ! Qu’es-tu devenue ? Seul le grand chêne est encore là. Ton rire a disparu, et l’éclair de tes yeux, et la rougeur sur tes joues quand je me suis aventuré vers d’autres chemins.

Aujourd’hui, dans le grand silence de la forêt, il n’y a plus rien. Le soir tombe, bientôt il fera noir. Seul mon souvenir conserve l’image des jours anciens, des jours d’innocence, d’avant la vie.

Il faut rentrer.

Dans l’obscurité, j’erre et je tâtonne. Mes pieds se prennent dans les fougères, je trébuche. Je ne retrouve plus le chemin, le chemin qui traverse la grande forêt et qui mène au village.

Il fait noir. J’écoute. On n’entend que le silence, l’éternel silence, et parfois, dans les lointains, comme le sanglot d’un oiseau de nuit.  

Littérature

07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : littérature

01/12/2011

Sur la route

Sur la route je vais,

Déclinant mon errance.

Je suis parti, il y a longtemps déjà,

Du pays de l’enfance et des songes profonds.

J’ai marché au hasard, par des terres inconnues,

Qui n’avaient pas de nom et jamais n’en auront.

J’ai croisé parfois, au carrefour des chemins,

Des hommes ou des femmes qui me dévisageaient.

« Qui es-tu ? » me demandaient-ils,

« D’où viens-tu et où vas-tu ? »

Mais moi je ne disais rien

Et continuais ma route, éternel étranger,

Devancé par mon ombre aux contours incertains.

Je dormais dans des granges,

Et les nuits de brouillard,

Il me semblait entendre

Des voix aux accents étranges,

Des voix venues d’ailleurs, de plus loin que la tombe.

Alors, perdu dans ma langue,

Etranger à moi-même,

Je reprenais ma route,

Sous la lune de novembre.

Je m’inventais des contes étranges,

Des histoires profondes

Et même des poèmes, aux rimes hallucinées.

Je les notais dans des cahiers bleus

Avec une encre noire

Et dans la forêt obscure

Je les lisais aux loups, assis en rond,

Dans la lumière de l’éternelle lune. 

 

littérature

07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature

11/10/2011

Rivage

Là-bas, après les montagnes, il y avait une plaine.

Et après la plaine, il y avait une bande de terre avec des bruyères et des joncs.

Derrière les joncs, il y avait une lande, plate et herbeuse, qui s’avançait vers l’horizon.

Au bout de la lande, tout au bout, il y avait une plage, aussi infinie que mes rêves.

J’ai marché et j’ai marché pour savoir ce qu’il y avait derrière la plage.

Derrière la plage, il y avait la mer, qui englobait le monde.

Et derrière la mer, il n’y avait rien.

Rien que la limite de mon rêve évanoui.

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Département des Landes (40)

07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature

20/09/2011

Cheminement

Un jour, j’ai quitté ma maison, sur la colline, et j’ai parcouru le monde.

J’ai dit adieu à ma forêt profonde, pourtant si belle…

Au printemps, je m’y promenais souvent, cherchant des rêves improbables.

L’été, lors des fortes chaleurs, elle offrait comme un refuge de paix et de mystère et à l’automne, on entendait bramer les cerfs, dans les longues nuits qui suivent l’équinoxe.

J’ai dit adieu à mes ciels brouillés, chargés de pluie et où le vent pousse les nuages comme des troupeaux en déroute.

Je suis parti sur les chemins sans même me retourner, tant j’étais heureux de marcher vers l’horizon et de connaître enfin ce qu’il y avait de l’autre côté de ma colline.

J’ai donc marché, beaucoup marché.

Des jours et des jours, des nuits et des nuits.

Quand j’étais trop fatigué, je pénétrais dans des granges inconnues et je m’endormais là, parmi la bonne odeur de la paille.  Parfois, dans l’ombre, perché sur une poutre, un chat m’observait, Sphinx éternel qui avait traversé tous les âges. Statue de pierre immobile, il demeurait là, tandis que dans ses prunelles brillait encore l’éclat antique des divinités du Nil.

Je partais le matin dans l’aube froide et mes pas se perdaient dans les premiers brouillards. Personne, jamais, ne remarquait ma présence.

J’ai marché ainsi pendant des semaines, jusqu’au moment où je suis arrivé dans une grande ville.

J’ai demandé quel était son nom. On ne me l’a pas dit, mais on m‘a répondu qu’il n’y avait nulle part de ville aussi grande. J’étais arrivé, parait-il, dans la capitale du monde.

J’ai franchi ses trois murailles et les grandes portes aux herses de fer et je me suis retrouvé parmi la foule. Ca criait, gesticulait, maugréait, tempêtait. Personne, ici, n’avait l’air d’accord.

Pendant trois jours et trois nuits j’ai observé. Je ne disais rien.

J’ai vu des gens se voler, s’insulter ou se tuer. J’ai vu des juges au manteau d’hermine rendre sur la place publique des jugements iniques et des prêtres exaltés vendre des traités de folle espérance. J’ai vu les soldats du prince occire la foule des opposants et le prince lui-même parader dans des carrosses tout en or. J’ai vu des innocents qui pendaient encore à leur gibet et que la pluie avait « débuez et lavez et le  soleil dessechez et noirciz. » J’ai vu des femmes mourir dans les douleurs de l’enfantement, tandis que d’autres se vautraient dans le lit des puissants. J’ai vu tout cela et bien d’autres choses encore, comme la Cour des Miracles , les tours de Notre-Dame et la belle Esmeralda, attachée nue sur son bûcher.

Après trois jours et trois nuits je n’en pouvais plus de tous ces gens civilisés. J’étais d’un autre monde !

Sans rien dire, j’ai repris la route et je suis rentré chez moi. Sur sa poutre, le chat m’attendait dans la grange et au cœur de l’immense forêt, les cerfs bramaient déjà, exprimant tous leurs désirs inassouvis. Je suis monté au sommet de ma colline et je le ai écoutés la nuit durant, puis j’ai ouvert mon huis et je suis entré dans ma maison pour ne plus en ressortir.

Dehors, l’ombre immense des arbres n’en finissait pas de progresser sous la lumière de la pleine lune. 

 

Littérature

07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature

09/04/2011

En ce temps-là

En ce temps-là

 

Il y avait, dans le ciel, des étoiles par milliers,

Une lune rousse

Et d’étranges oiseaux de nuit

Qui criaient leur désespoir

De n’avoir vu le jour qu’en rêve.

 

Sur les plages de l’océan,

Au bord du monde,

Déferlaient des vagues infinies,

Des vagues immenses,

Qui puisaient leurs forces dans les profondeurs abyssales,

Là où des monstres inconnus

S’accouplaient sans retenue

Dans les silences sous-marins.

 

La terre naissait à peine

Et partout des volcans répandaient leur colère. 

Ce n’était que pluie de feu, lave coulante et rivières de sang.

Dans les grottes, d’étranges créatures attendaient,

L’œil aux aguets, que se lève enfin le jour.

Les rochers prenaient des formes étranges,

Sculptés par le vent des déserts

Et dans la moiteur des forêts

Se glissait le serpent fondateur,

Rampant sans répit au milieu de ses rêves.

 

Un cyclone parfois frappait les côtes

Et dans la grande nuit déchirée d’éclairs

On apercevait des plaines infinies

Où couraient les premiers hommes.

 

Nus, hirsutes, le corps tatoué d’étranges signes,

Ils emportaient avec eux les os de leurs ancêtres

Les vénérant comme des dieux immortels.

 

Dans l’ombre, on devinait le souffle des bêtes fauves

Tandis que le sol était ébranlé

Par la fuite éperdue des grands herbivores.

 

Cachés dans les replis de la terre,

Des chamans dessinaient sur les parois

Les animaux fantastiques qu’ils avaient cru voir en songe.

Eclairés par des torches, leurs ombres géantes

S’agitaient dans la nuit,

Fantômes incertains aussitôt évanouis.

 

Parfois, tout en haut du ciel, parmi les nuages,

Planait un oiseau de proie, l’œil implacable et menaçant.

Quelque part aux abords de la grande forêt

Une femme criait, écartelée sur un lit de fougères.

Accroupis autour d’elle, les hommes du clan

Observaient la naissance de l’Histoire.

 

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01:03 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, poésie

08/03/2011

Forêt

Ce n’étaient que feuilles, branches et futaies,

Troncs lisses, nuages et pluie.

Ce n’étaient que forêts, toujours, et horizons bleus,

Bêtes dissimulées,

Sangliers farouches, cerfs aux aguets, brames et amour.

Ce n’étaient que bruissements et rumeurs

Regards et fuites.

Ce n’était que lune, la nuit, en la clairière offerte

Ce n’était que bleu, partout, au profond du silence.

Puis mort jaune et or, automne, en novembre de brume.

Et encore flocons, quand tombe l’hiver, empreinte du loup,

Tache de sang.

C’était renard au printemps, amour et rage.

C’était bave sur la pierre, dans le village, en plein midi.

Et enfant mort, mordu, perdu,

Enfant d’ici, de la forêt, dedans sa tombe.

Tombe la pluie, sur la lune bleue, en son printemps.

Et les flocons, dedans l’hiver, sur le loup gris.

Regard perdu, mort à l’affut, sang répandu.

Oiseau de nuit, oiseau tout noir, dans la forêt.

Cri éperdu, peur du midi, enfant perdu.

Village de pierres, forêt des morts, cimetière tout gris.

Horizons bleus, sangliers noirs, hordes de nuages.

Ce n’étaient que forêts, toujours, branches et futaies

Ce n’étaient que regards, village perdu, renard d’ici

 

Puis l’enfant mort, dans la pluie bleue, sous sa pierre grise.

Puis l’enfant mort, forêt profonde, oiseau de nuit.

 

Littérature

00:01 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature

13/12/2010

Dernière rose

Je me souviens d’un monde où les roses fleurissaient en novembre. C’étaient des fleurs étranges qui gardaient la mémoire de nos amours. Elles étaient belles dans leur ardente robe rouge et avaient en elles-mêmes une grâce et une splendeur incomparables.

Quand il avait plu, elles semblaient fort fragiles, avec une goutte d’eau qui parfois glissait le long de leurs pétales avant d’aller s’écraser dans la boue du chemin. Mais elles, sur leur branche, paraissaient attendre les jours d’un printemps improbable qu’elles ne verraient jamais.

Parfois, j’effeuillais d’un doigt délicat leurs pétales tendres, qui s’ouvraient sans résistance, laissant voir un instant les souvenirs enfermés là, au cœur des ténèbres.

Puis, quand venait décembre, un manteau de neige recouvrait soudain les roses. Immobiles, figées dans l’instant, elles semblaient n’exister qu’en rêve, comme si elles nous avaient déjà quittés.

De temps en temps, une mésange venait se poser sur une branche et, sous l’offense, celle-ci ployait légèrement. D’un bec rageur, l’oiseau effronté picorait alors le givre qui recouvrait la rose, la meurtrissant dans son rêve éternel.

 Plus tard, bien plus tard, quand venait le printemps, la reine des fleurs, desséchée et flétrie, pendait lamentablement. Ballotée au gré des vents de mars, elle finissait par tomber sur le sol humide, où elle disparaissait bientôt sous des pas anonymes.

Il ne restait plus rien alors de la rose, rien qu’un parfum évanoui au plus profond de notre mémoire, rien qu’un souvenir oublié de nos amours adolescentes.

 

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12:30 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature

08/12/2010

Le vent de l'Histoire

Le monde est à genoux

Terrassé par le vent de l’Histoire.

Dans les livres des Dieux,

Un poème s’est écrit

Avec des lettres de feu.

 

Quelque part tombe la foudre

Et dans les jardins d’Orient

Une jeune fille rédige des lettres d’amour.

 

Plus loin, le long des fleuves,

Courent des enfants nus,

Tandis que sur les plages de l’océan

Quelqu’un a tracé ton nom sur le sable infini.

 

Regarde les nuages dans le ciel,

Cet alphabet mystérieux…

On dirait un rêve qui se dessine

Puis qui se transforme en un tableau changeant

Jusqu’à figurer la carte de mondes inconnus.

 

Dans le lointain, les forêts du Sud n’en finissent plus de brûler

Et un épais nuage de fumée occulte tous les soleils.

Maintenant c’est la nuit

La nuit profonde des origines

Et le souvenir revient de guerriers incroyables

Qui pillaient les villages et emportaient nos femmes.

 

Plus loin encore, sur les plages de l’océan,

Des vagues s’inversent et s’échouent

Dans le bruit des tempêtes et du vent,

Gerbes d’écume qui gémissent en glissant,

Grondement rocailleux des rochers déchirés.

 

Ici finit l’Histoire, ses batailles et ses défaites

Ici finit le monde, dans l’éternité d’outre-mer.

 

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07:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature

12/01/2010

Il pleut

Il pleut.

Pas beaucoup, mais il pleut.

Petit à petit tout s’humidifie

et une odeur de terre mouillée,

âcre et envoûtante, épicée même,

emplit l’atmosphère.

 

Le promeneur s’arrête,

attentif à ce presque rien qui l’enivre.

La vie est faite de bonheurs simples, parfois,

qu’il ne faut pas négliger.

 

Sur la feuille d’un noisetier, roule une goutte,

lentement d’abord, puis plus vite.

Quand elle parvient aux bords dentelés,

on croit qu’elle va tomber,

emportée par sa vitesse.

Mais non, elle reste là, hésitante,

suspendue au bord du gouffre,

dans un instant d’éternité.

 

La moindre brise la ferait choir,

mais l’air est immobile,

déjà il ne pleut plus.

Alors elle demeure là,

incertaine, accrochée aux cannelures

vert tendre de la jeune feuille.

 

Quand revient le soleil,

elle brille sous ses rayons,

miroir féerique qui réfléchit le monde.

 

Le flâneur solitaire se penche

et observe, intrigué, la goutte passagère.

 

Microcosme magique, perle de l’univers

elle est tout à la fois rouge, verte et jaune,

et conserve comme le souvenir d’un reflet

qui ressemble au bleu des songes.

 

Impudique, elle laisse voir par transparence

la pureté de son être.

Là sont rassemblés toute l’énigme du monde,

les rêves évanouis et les espoirs déçus.

Dans cette goutte qui hésite à tomber

se trouve la réponse à tout questionnement.

 

Ephémère et belle, elle continue à vivre,

miroir de toutes ces contrées

où défilent les nuages.

En son centre, au cœur de l’onde pure

tu découvriras le joyau de toute chose

y compris ce secret jamais dévoilé

que seul connurent les dieux.

 

Sphère parfaite,

elle tourne sur elle-même, une dernière fois,

avant que de chuter irrémédiablement

Et de s’écraser sur le sol boueux

où elle disparaît à jamais.

 

A-t-elle vraiment existé ?

On pourrait en douter.

D’ailleurs qui se souviendra d’elle

si ce n’est ce promeneur solitaire,

qui s’en va d’un pas lent

vers sa propre destinée…

 

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09:10 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature, poésie, pluie

04/01/2010

La neige

Dans la neige infiniment blanche,

je suis des traces.

Ce sont les traces de tes pas.

Enfin c’est ce que je crois,

mais comment en être certain

dans ce paysage où il n’y a rien,

rien que la neige et le silence,

un silence si grand

qu’on a du mal à imaginer qu’il puisse exister.

 

Voilà longtemps que je te cherche

et maintenant il neige et il fait froid.

J’avais espéré, en voyant tes empreintes,

te retrouver enfin.

Mais voilà que les flocons, uns à uns,

sont de nouveau en train de tout recouvrir.

 

Le chemin lui-même a disparu

et je marche maintenant au hasard,

ne sachant pas si je te retrouverai un jour.

Je ne sais même pas où je vais

et peut-être suis-je moi-même perdu.

 

Il neige et dans cette grande solitude

on ne distingue plus aucune trace,

rien que tout ce blanc qui a recouvert le monde

comme un linceul d’éternité.

 

 

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Feuilly

09:16 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, la neige

24/11/2009

La musique

La musique me prend dans ses vagues

ses grandes vagues océanes

et m’emporte dans une gerbe d’écumes

aux portes de l’univers

aux confins de moi-même.

Elle m’emporte au pays des songes et des brumes

dans ces embruns laiteux où brille une étoile morte.

Je suis un grand voilier emporté par le vent,

je fends une mer de notes,

j’affronte des récifs,

je glisse au creux des flots…

 

Dans les mers boréales s’est noyé le cygne de Sibelius

alors que sous les tropiques,

Paul Gauguin n’en finit plus de peindre des femmes lascives,

couchées sur des plages d’infini.

 

Dans le vent des tempêtes

j’entends une symphonie de Debussy

tandis que claquent les voiles du grand mat d’artimon.

Puis la nuit est venue,

la grande nuit des commencements du monde.

Le vaisseau souffre, gémit

et se tord au-dessus des gouffres profonds.

La mort n’est pas loin.

Une corde de violon s’est brisée dans un cri.

Ce n’est qu’une mouette qui lutte avec elle-même.

Elle s’est posée là-haut dans les haubans

où elle a trouvé un refuge

et jouit du grand calme enfin revenu.

La mer n’est plus qu’un miroir démesuré

où se réfléchit le monde.

La mer est un miroir

où mon image s’est perdue.

La belle musique est morte,

vaincue par le silence

et quand se tait la dernière note,

il ne reste plus que mon désespoir

et l’éternel silence.

 

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Image Internet

08:39 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature

21/11/2009

Automne profond

Quand est tombée la dernière feuille,
quand il n’est plus resté, dans la forêt,
que des branches nues
et de grands troncs démunis,

quand les pluies de l’automne eurent effacé jusqu’au souvenir du bel été
et que dans les sentiers nos traces eurent disparu,
quand il n’est plus rien demeuré de ce lit de fougères
où nous nous retrouvions pour apprendre à nous connaître,
encore et encore,

quand la boue et le froid eurent transformé le sous-bois en marécage
tandis que des oiseaux migrateurs traversaient le grand ciel noir,
quand il n’y eut plus, pour habiter ces lieux,
que des bêtes inquiètes et sauvages, à la recherche d’elles-mêmes
et fuyant une horde de chasseurs sans cesse à leur poursuite,

quand dans l’immensité de la nuit les étoiles se furent évanouies,
occultées par les nuages, les lourds nuages d’automne,
quand il n’y eut plus, dans la forêt dénudée,
que la présence de la mort,

alors il fut difficile, oui, de croire en un autre printemps,
alors il fut difficile, assurément, d’imaginer que nos mains pussent encore s’effleurer
un jour.

Sentier trempé qui serpente dans la forêt profonde,
silence posthume des êtres qui y vécurent
souvenir des jours passés.
Je marche seul entre les troncs noirs et nus,
Cherchant celui que sans doute je fus.
Il pleut.
Sur le bord de la dernière feuille,
une goutte d’eau hésite un instant puis tombe
dans son propre néant.
Bruit sourd qui marque la fin d’un monde.
Je marche et la nuit envahit
la forêt d’automne
que même les chasseurs ont désertée.
Il ne reste que le silence et la peur de la mort.
Il ne reste que le silence.
Le silence.

 

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Image Internet

00:20 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature, poésie

18/11/2009

Le reflet

Dans la chambre se trouve un miroir, un miroir qui ouvre sur les portes de la mort.

Je m’y contemple souvent mais l’image qu’il me renvoie n’est jamais tout à fait la même.

C’est que le temps, imperceptiblement, a progressé et que la vie, implacable, a déposé dans mon cœur son lot de tracas, usant ce corps qui, il n’y a pas si longtemps, était encore jeune.

 

Je me regarde et c’est un autre que je vois. Un autre qui à chaque fois est un peu différent et qui pourtant me ressemble. Ombre éphémère de moi-même, image évanescente et floue de celui que je suis en train de devenir.

 

Un jour, peut-être, quand je ne serai plus, une sorte de lumière vacillante habitera encore le miroir, une espèce de fantôme qui viendra effrayer les survivants, lesquels regarderont, incrédules, celui que je serai enfin devenu pour l’éternité.

 

                           X

 

              X                        X

                                                         

Dans la chambre il y a des livres, beaucoup de livres.

Certains parlent de pays inconnus où je ne suis jamais allé et où je n’irai jamais (la chambre est une fenêtre ouverte sur le monde).

D’autres racontent des histoires ou parlent de poésie (toutes ces images qui s’adressent à mon cœur…)

Dans la chambre il y a des livres. Ils sont la mémoire du monde et comme une partie de moi-même. J’en ai lu beaucoup, mais il en reste davantage encore à découvrir.

 

Dans le miroir, mon image me dit, ironique, que je n’en aurai pas le temps et qu’il est trop tard déjà. Beaucoup trop tard…

 

                         X

 

               X                    X

 

 

Dans un coin de la chambre, il y a un lit, rien de plus normal en cet endroit.

Un lit où se reposer et partir en rêve vers des pays inconnus, ces pays découverts dans les livres.

Un lit où se réciter intérieurement des poèmes, ces poèmes appris dans les recueils entassés sur les étagères.

Un lit d’où on aperçoit son image dans le miroir. Une image parfois inconnue, comme les pays étrangers qu’on n’a pas visités, une image parfois émouvante, comme les poèmes qu’on récite avant de s’endormir pour l’éternité.

 

 

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11/11/2009

Automne historique

Il y a un arbre, seul au milieu des champs.

Il y a un arbre.

Ses feuilles sont d’un jaune éclatant, avec des reflets rouges et or.

C’est l’automne.

On sait que c’est l’automne parce qu’il y a un arbre, sinon il n’y a rien ici, rien que la plaine, la grande plaine.

La plaine et un arbre, un arbre tout jaune qui dit que c’est l’automne. 

On n’a jamais vu un paysage aussi vide.

Mais c’est l’automne, l’arbre l’a dit et cela explique les tempêtes, le grand vent, les nuages gris amoncelés à l’horizon et puis surtout la pluie, l’éternelle pluie, qui n’en finit pas de tomber.

 

Les feuilles jaunes et or sont emportées par les bourrasques. Elles virevoltent dans le ciel et s’en vont à l’horizon, se perdre dans le gris des nuages.

 

Il n’y a rien ici. Rien que l’arbre. Et bientôt il n’aura plus de feuilles.

 

Je regarde  la plaine, la grande plaine muette, immense, monotone.

Qu’en dire ? Rien. Il n’y a rien à en dire.

 

Alors, devant ce vide de l’espace, j’en viens à réfléchir au temps.

Je change d’axe, j’oublie le présent, l’arbre et son automne et je contemple l’Histoire.

J’imagine la plaine en d’autres temps.

 

Il faut pour cela faire un effort de mémoire et d’imagination et mettre bout à bout les récits des grands-parents et les pages lues dans les livres, à l’école ou plus tard.

 

Et voilà que tout s’anime, que la plaine se peuple de milliers et de milliers de personnes.

 

Car c’est bien ici qu’ils sont tous passés autrefois.

Ici, dans cette plaine, dont il n’y a rien à dire, si ce n’est justement qu’ils y sont passés.

 

Il me  semble les voir, venant d’Est ou d’Ouest et ne faisant que passer.

Ils sont des milliers, des millions, à traverser la plaine, d’un côté ou de l’autre, tuant, violant, massacrant.

Ils sont des millions à se rendre ailleurs, à conquérir un ailleurs, et à passer par ici, traversant la plaine, la plaine avec son arbre.

Cet arbre-ci ou un autre avant lui, peu importe.

Il y a toujours un arbre, dans la plaine. On s’assoit, on s’appuie contre son tronc et on contemple de loin la marche de l’Histoire.

 

Et je les vois s’avancer. D’abord les plus récents : les panzers de 1940 avec leurs croix gammées. Ils viennent de l’Est et s’en vont vers l’Ouest.

Ils passent et rien ne les arrête car il n’y a jamais personne ici.

Un enfant peut-être les regarde passer. Assis comme moi contre cet arbre, il regarde. Et eux ils passent.

 

Avant, leurs pères étaient déjà venus. En 1914. Ils étaient à pied et marchaient aussi vers l’Ouest. Guerre de tranchées. Le soir, on entend le canon de Verdun, là-bas, plus loin, où on n’est jamais allé. On entend le canon et on sait que notre armée les a arrêtés.

Alors on attend. On attend qu’ils repassent. Mais il a fallu du temps: quatre longues années au moins, pour les revoir dans l’autre sens, fatigués, épuisés, vaincus. Ils passent et rentrent chez eux.

 

Avant encore, ce sont les pères de leurs pères. 1870, la fin de l’Empire. Ils arrivent, baïonnette au canon, sûrs de leur victoire. Celle-ci est écrite dans les livres ou va l’être très bientôt. Ils passent et ne s’arrêteront que devant Paris.

 

Plus on remonte dans le temps, plus les faits sont imprécis, comme si un brouillard était tombé sur la mémoire des hommes.

 

Mais c’est toujours la même plaine et le même arbre. Cette fois ils viennent de l’Ouest et s’en vont vers l’Est. Ce sont les nôtres qui vont conquérir la Russie, emmenés par Napoléon. Bientôt, on les verra aussi repasser dans l’autre sens. Enfin, ceux qui ont pu revenir, quelques-uns seulement, fourbus, crottés, malades. Il n’aura fallu qu’un hiver pour les voir à nouveau, mais quel hiver !

 

Avant cela, c’étaient les troupes de la Révolution et avant encore celles de Louis XV, qui suivaient de peu celles de Louis XIV. Ancien Régime ou Révolution, c’est du pareil au même : des soldats qui passent dans la plaine et qui vont combattre les autres, ceux de l’Est, parce qu’ils ne pensent pas comme nous.

 

Assis contre son arbre, l’enfant les regarde. Il n’en revient pas. Voilà déjà trois siècles que les troupes traversent sa plaine, dans un sens ou dans l’autre. Quel est le sens de tout cela ? Quel est le sens de l’Histoire, s’il faut toujours tout recommencer et refaire passer les mêmes soldats dans la même plaine et devant le même arbre ?

 

Et avant ? Avant Louis XIV ? Plus personne ne sait trop. La mémoire est incertaine. Les Autrichiens, sûrement. Les Espagnols peut-être. Puis les Français entre eux : Catholiques contre Protestants. Sedan, la petite Genève. Et des massacres, encore et toujours.

 

Plus loin encore, dans la nuit des temps, les Carolingiens, les Mérovingiens, les Francs. Attila, aussi, en route pour ses Champs catalauniques. Ils sont tous passés ici, absolument tous. Dans cette plaine où il n’y a rien, sauf un arbre où s’appuyer. Personne ne s’en souvient vraiment, pourtant ils sont bien passés par ici. C’est que dans la poussière du chemin, les pas de leurs chevaux se sont effacés. Il y a si longtemps !

 

Et avant eux, il y avait eu les légions romaines, avec leurs manipules et leurs centuries. Des soldats bien ordonnés, ceux-là, des soldats faits pour gagner et pour agrandir les empires. En ce temps-là la grande plaine fut un peu méditerranéenne. En ce temps-là l'arbre rêva d’être comme un olivier. Des routes furent construites, de Rome à Colonia Agrippa, la place forte à la frontière, sur le Rhin. Des routes furent construites, mais pas ici. La plaine resta une plaine, où il ne se passe jamais rien. Enfin presque rien.

 

Au-delà de Rome il n’y a pas d’écrits pour nous dire les migrations celtes. L’enfant imagine quelque barde, appuyé contre son arbre, et chantant des hymnes à la gloire de son peuple. Là-bas, un village aux toits de chaume et un laboureur avec sa charrue, déjà. Le premier, peut-être, à fendre cette terre avec un soc, le premier peut-être, à semer un grain de blé, ici même, dans l'immensité de la plaine.

 

Quant aux peuples néolithiques, qui pourrait en parler ? Bien sûr qu’ils passèrent aussi par ici. L’enfant le sait, qui retrouva un jour dans une grotte, près du fleuve, d’étranges dessins. C’était comme une ronde d’animaux fantastiques, des animaux comme on n’en avait jamais vu : des ours, des bisons, des aurochs. Et puis des mammouths aux grandes défenses. Eux aussi semblaient marcher dans la plaine ou courir, poursuivis par les chasseurs. Eux aussi étaient donc passés par ici, prédateurs ou victimes, attaquants ou attaqués. Comme les hommes et bien avant eux, ils s’étaient déplacés, à la recherche d’un ailleurs. C’est pour cela que le peintre les a immortalisés sur la paroi de la grotte et qu’il en a fait des dieux. C’est parce qu’ils ont marché dans la chaleur des tropiques ou dans la neige des grandes glaciations, c’est parce qu’ils ont marché vers un ailleurs, sans jamais s’arrêter.

 

L’enfant est appuyé contre le tronc de l’arbre et il regarde à l’horizon comme un tourbillon de poussières. Est-ce le vent d’automne qui emporte quelques feuilles ? Est-ce un peu de terre arrachée à la plaine et qui tourne sans raison ? Ou est-ce un peuple en marche pour une autre destinée ?

 

L’enfant ne le saura pas, lui qui reste assis contre son arbre, dans la grande plaine où il ne se passe jamais rien.

 

 

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06/11/2009

Microcosme

L’arbre

Le ciel

La rivière et la terre

 

Etre

 

La forêt

Sa faune et sa flore

L’éternité du monde

L’infini

 

Demeurer

 

Les vagues sur les rochers

L’écume de ma vie

La mer, l’océan

 

Espérer

 

La grande ville

Ses artères, ses boulevards

Le chaos des choses

L’agitation

 

S’imposer

 

Un café quelque part dans la cité

Deux verres sur une table

La nuit profonde

Ton regard perdu

 

Aimer

 

Des trains qui traversent l’obscurité

Ma main qui cherche en vain la tienne

La chaleur de l’été

Un orage soudain

La pluie sur la vitre

 

Accepter

 

Les rues dans l’aube mouillée

Les premières voitures, les premiers camions

Un oiseau qui chante sur le toit d’une maison

Un pont, un fleuve, une traversée

 

Continuer

 

Une clef longtemps cherchée

La porte qui s’ouvre en grinçant

Un café noir qu’on prépare

Le lit où sombrer dans le rêve

 

Oublier

 

 

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13/10/2009

Nocturne (autrefois, une nuit)

Il y a une grande ville qu’un fleuve traverse de part en part

et le reflet de la lune qui scintille et disparaît.

Il y a des ruelles étroites où les gens mangent et boivent

et des pavés mouillés de pluie, où je marche sans savoir pourquoi.

Il y a une place avec une cathédrale

et l’immense silence du cœur de la nuit.

Il y a des boulevards qui mènent au bout des rêves

et des arbres partout aux frondaisons mouvantes.

Il y a un temple de la musique qui reste muet

et un violon abandonné sur un banc public.

Il y a une librairie au fond d’une ruelle

où jamais personne ne se rend.

Il y a une faculté où on enseigne les lettres

et des étudiants qui rêvent des reflets de la lune sur le fleuve

Il y a, dans les ruelles, des restaurants qui sont maintenant fermés

et dans les cafés, des garçons qui mettent les derniers clients dehors.

Il y a cette impasse où je cherche mon ange

et cette porte qui reste fermée ce soir.

Il y a un grand pont qui enjambe le fleuve

et cette eau noire et profonde que je regarde et regarde encore.

Il y a un train qui passe dans un bruit d’enfer

et deux lumière rouges qui s’évanouissent dans la nuit.

Il y a une colline avec une forêt profonde

et des bêtes de la nuit qui gémissent dans l’ombre.

Il y a dans le lointain la rumeur de la ville

et comme une grande lumière rouge dans les nuages.

Il y a ce banc sur lequel je suis assis

et la musique intérieure qui me parle de toi.

Il y a tout ce noir quand je ferme les yeux

et ton visage qui apparaît comme dans un rêve.

Il y a une lueur à l’horizon

et un oiseau qui s’éveille en chantant.

Il y a une impasse où dort mon ange

et une porte qui s’est refermée sur tous mes espoirs.

 

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15/09/2009

Le promeneur solitaire

Le promeneur solitaire parcourt la dune, perdu dans ses pensées, entre la rumeur de la mer et les montagnes empourprées du couchant.

 

Il marche, rêveur, dans l’infini des sables, et songe à ces cités englouties dont parlait le poète.

Vivent-elles encore au fond de l’eau, les belles sirènes d’autrefois ou ne sont-elles plus qu’un souvenir dans la mémoire des hommes ?

 

Il marche le promeneur, dans le bleu du soir et pense à tous ces peuples qui ont foulé le même sable, depuis la nuit des temps, depuis que le monde est monde. Que reste-t-il aujourd’hui de leurs conquêtes, de leurs rêves, de leurs aspirations ? Il n’en reste rien et tout cela ne fut qu’un reflet éphémère, comme ce scintillement passager au crépuscule, sur la mer.

 

Il fait noir maintenant et le mendiant s’est arrêté sur le sommet de la dune. Il a tout perdu, même son ombre, qui s’en est allée rejoindre les flots verts qui s’agitent dans l’obscurité.

 

Le voilà perdu, le promeneur solitaire, en ce désert de sable. Sur les rivages de la nuit, il cherche son chemin, n’ayant pour se guider que l’éternel grondement de la mer et la rumeur des vagues.

 

D’autres sont passés avant lui, qui ont disparu. D’autres passeront après lui, qui découvriront peut-être dans le sable les os blancs anonymes d’un promeneur éphémère. C’est sa mémoire, sans doute, qu’honore le vent, quand il siffle en gémissant, les soirs de tempête et qu’il emporte le sable en tourbillons fantastiques.

 

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02/09/2009

La mer (suite)

Derrière la dune que je gravis pieds nus, des cris se font entendre, sorte de gémissements plaintifs tels ceux d’une fille en pleurs. Mais je suis loin, si loin.

 

Derrière la dune que je gravis aussi vite que je  peux, je perçois la plainte du vent et le claquement des câbles contre le mat des navires. C’est du moins ce qu’il me semble.

 

Derrière la dune, tandis que mes pieds n’en finissent plus de s’enfoncer dans le sable, j’imagine des départs vers des ailleurs ultramarins, des tropiques incroyables, des caps Horn mystiques. Trois grands bateaux prennent le large, tandis qu’une femme, sur la plage, pleure l’absence de son capitaine, seule, irrémédiablement seule. C’est que c’est un voyage sans retour et elle le sait.

 

Quand j’arrive au sommet, quand je franchis la ligne, quand je laisse enfin derrière moi la dune et son sable, je découvre la mer et la plage immense, déserte comme au premier jour. Il n’y a personne ici. Dans le ciel, seule plane une mouette, dont le cri strident, tel un long sanglot, se répercute à  l’infini dans ce lieu solitaire.

 

A l’horizon, trois petits points, comme trois voiles mystérieuses, semblent voguer de concert avant de disparaître dans l’immensité bleue.

 

C’est du moins ce qu’il m’a semblé.

 

 

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 Photo Internet : Bruno Monginoux / 
Photo-Paysage.com (cc-by-nc-nd)

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12/08/2009

La mer

Je marche pieds nus sur le chemin sablonneux. Devant, ce seront bientôt les dunes et leurs herbes folles, indomptées, un peu coupantes aussi (il va falloir faire attention). Et puis ce sera la mer, celle qu'on ne voit jamais, celle dont on ne fait que rêver. Enfin, d'habitude. Derrière, se dressent les montagnes, je le sais, inutile de me retourner. Hier encore je gravissais leurs pentes, avec de solides bottines et un sac à dos. C'est de là-haut, tout là haut, que j'avais vu la mer, véritable toile de fond dans un tableau de la Renaissance. Malgré la chaleur, elle était d'un bleu intense et semblait éternelle. Les Grecs déjà, l'avaient parcourue, puis les Romains et tous ces autres venus du Nord, issus de ces pays sans soleil où la neige et le froid tiennent lieu de paysage.

La mer était donc là, comme dans le poème de Valéry, sorte de « toit tranquille où marchent des colombes », et soudain l'envie m'était venue d'aller la voir de plus près, de sentir son odeur, de la toucher du bout des doigts et de goûter la saveur du sel sur ma peau.

Je suis redescendu des sommets dans la nuit qui tombait déjà et qui n'en finissait plus d'effacer les contours et les distances. Ce n'est qu'en franchissant le pont de la petite rivière que j'ai su que j'étais tout en bas. La chaleur était intense, obsédante, enveloppante aussi, comme dans ces rêves qu'on fait parfois et dont on sort au réveil trempé de sueur. Dans le lointain des forêts, un hibou solitaire hululait.

Aujourd'hui, je marche pieds nus sur le chemin sablonneux.

Au-dessus de moi le ciel est bleu, immense, d'encre profonde et de désir.

La lumière est aveuglante.

Je marche et dans ma tête défilent toutes les attentes et tous les espoirs. Une légère brise, déjà, se fait sentir. Voici les dunes et leurs herbes coupantes. Qu'y aura-t-il derrière ?

 

IMGP0239.JPGPhoto personnelle

 

 

24/06/2009

Le grenier

Maison poème...

Dans le grenier des rêves j'ai retrouvé mon enfance.

Dans une grande malle, sont rangés les jouets et des puzzles incomplets. Sous la tabatière, le cheval à bascule contemple les étoiles.

En hiver, on faisait sécher en ce lieu la lessive des lundis et c'était comme de grands fantômes blancs immobiles qui semblaient dormir là, énigmatiques et muets. Je me faufilais entre eux, respirant à pleins poumons, les yeux fermés, la bonne odeur du large que le savon avait laissée. Dans mon cœur, des tempêtes faisaient rage et les vagues de l'Atlantique déferlaient sous le vent des équinoxes. Contre ma joue, les draps humides et froids mouillaient ma peau. Frisson délicieux. Envoûtement...

Du bout des doigts je touchais ces êtres mouvants, mais ceux-ci, rebelles, se dérobaient sans fin.

Dans les coins reculés trottinaient les souris. Leurs yeux interrogateurs parfois luisaient dans l'ombre et c'était ensuite des courses éperdues dans l'épaisseur du plancher. Monde mystérieux, inaccessible. Quelle vie palpitait là, sous mes pieds ?

Sur une boîte en carton, une trappe tendue attendait, inutile, son fromage ayant été dévoré au siècle passé.

Dans une housse transparente pendaient des vêtements d'un autre âge. Portés par qui ? Mystère.

Sur un journal de l'année passée sèchent des oignons. Le bruit de papier quand on effrite la pelure dans les mains... Elle retombe en poussière d'or emportée au moindre courant d'air.

Près de la cheminée (celle du père Noël ?) un vieux lustre gît à terre. Quelles fêtes d'un autre âge a-t-il dû éclairer ? Quelles jeunes filles en fleur ont dansé dans sa clarté ? Elles doivent être mortes, maintenant. Qui étaient-elles ? Une de ces mères-grands entr'aperçues un jour sur de vieilles photos en noir et blanc ? Bien droites, raides et dignes dans leurs habits du dimanche, figées pour l'éternité, avec sur les lèvres un sourire si las... Suis-je leur descendant, moi qui suis maintenant à genoux, cherchant entre les lattes du plancher une épingle à cheveux inaccessible ?

Dans la vielle armoire dont la porte grince, il y a, je le sais, des lettres du temps jadis, venues tout droit des tropiques. Zanzibar, Tananarive et les îles sous le vent surgissent dans le grenier.  Sur les timbres dentelés, des négresses aux dents blanches sourient devant les mers du Sud. Qui a envoyé ces lettres ? Quel oncle disparu, jamais croisé ? A-t-il acheté des esclaves le long du fleuve Zaïre ou vendu des armes à Tombouctou ? De quel désert du Hogar     a-t-il écrit ? De quel village abyssin ? Je ne le saurai jamais, un cadenas maintenant condamne la porte. Il me reste à rêver et à imaginer des voiliers remplis de pirates ou des îles enchantées.

Craquement dans l'escalier. On vient me chercher car on sait que c'est ici que je me réfugie souvent, pour contempler dans la lumière de la tabatière les mille grains de poussière d'or qui volent au moindre souffle, formant comme des nuages énigmatiques dont nul n'a le secret.

 

 

04/05/2009

La femme et la louve

Toi, la louve aux yeux en amandes

où se réfléchissent tous les lointains,

tu désires un ailleurs où tu n’iras jamais :

l’étendue de la plaine éclairée par la lune,

le firmament des étoiles, les rumeurs de la forêt

et les steppes infinies de toute l’Eurasie.


La vie sauvage est là et la proie qui palpite

entre tes blanches canines

agonise sans comprendre le pourquoi de sa mort.


Hurlement de la meute au cœur de la nuit sacrée,

cauchemar qui devient rêve, puis songe…


La louve est là, sa toison, son regard.

L’amande de tes yeux

et ta tresse que tu défais d’un geste ample et souple

au cœur de la nuit ténébreuse.

Dans le rayon de la grande lune, dévêtue,

tu t’offres comme une proie

et ton cœur sauvage palpite

comme si c’était la mort qui s’avançait dans la profondeur de la forêt,

tandis que les loups n’en finissent plus de hurler.


Par la fenêtre ouverte tu contemples le firmament étoilé

Tu cherches un ailleurs,

un au-delà de toi-même.

Etendue dans la nuit sacrée,

Tu attends dans ta nudité, dans l’aura de ta chevelure d’or

et ton désir n’a d’égal que la peur de la mort qui approche

à pas de loups.


Tu as des yeux en amandes,

de beaux yeux qui pleurent, parfois,

quand l’aube pointe derrière la vitre

et que toute la meute a disparu

dans l’immense plaine de la vie.


Et tu restes là, seule,

à contempler les lointains inaccessibles

comme une louve

qui n’aurait pas trouvé sa raison d’être.


Tu es une louve, perdue dans le firmament des étoiles.







00:22 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature, poésie

19/04/2009

L'antivoyage

Les gares, ces lieux où l’on n’existe pas
au milieu d’une foule qui ne fait que passer.
Endroits de transit pour des départs vers d’autres possibles.
Rêves de voyages, retours désespérés.
Dans la salle d’attente, mes pas se sont perdus.
Je regarde ces rails qui ne mèneront nulle part.
Je suis un voyageur en attente, qui sait qu’aucun train ne passera plus.

Déambulent des gens en ce lieu qui semble à peine exister.
Impossibilité d’une rencontre dans cette foule en transit.
Dans mon désespoir, je rêve encore de voyages
et passe devant un train en attente sans pourtant monter dedans.

Je suis en partance vers d’autres possibles
et voyage en rêve sur des rails d’éternités.
Tout cela ne mène nulle part
et je perds mon temps à attendre une voyageuse qui ne viendra plus.

Dans la gare, la foule n’existe pas
et moi, je ne fais que passer,
voyageur éphémère
qui n’a nulle part où aller.



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01:44 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : littérature, poésie

06/04/2009

Comparaison

Comme l’oiseau qui prend son envol et qui plane tout la-haut dans son éternité,

Comme les bateaux qui quittent le port et prennent le large pour des voyages dont ils ne reviendront pas,

Comme la fontaine qui n’en finit pas de chanter par les beaux jours d’été et dont le murmure se termine en sanglots une fois la nuit venue,

Comme les oliviers qui chuchotent dans les collines andalouses quand le solstice est au rendez-vous,

Comme le duvet de pêche de ta joue quand je la caresse d’un doigt tremblant,

Comme la rosée dans l’herbe fraîche du matin avant qu’elle ne s’évanouisse dans la chaleur du jour,

Comme cette jeune fille aimée autrefois et qui a disparu dans les tourments de la vie,

Comme la neige qui se met à recouvrir la campagne, lentement, lentement, mais aussi sûrement, très sûrement,

Comme la marée qui vient détruire encore une fois le château de sable construit patiemment par l’enfant,

Comme le soleil qui disparaît à l’horizon et qui entraîne le monde entier dans sa mort,

Comme ce chant d’opéra écouté en plein milieu de la nuit alors que la lune s’avance dans sa plénitude,

Comme ces chevaux qui galopent dans la plaine et qui sont encore un peu sauvages,

Comme l’oiseau qui chante au matin, étonné d’être toujours parmi les vivants

Comme la biche atteinte par une balle et qui sait qu’elle va mourir dans un instant,

Comme ces guerres qui par le monde massacrent de parfaits innocents,

Comme tout cela, notre vie s’écoule, heure après heure et nous n’en conservons qu’un poème écrit sous la voûte étoilée de nos rêves. Ce ne sont que quelques vers à lire debout devant le grand espace vide de la nuit.

09:49 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : littérature, poésie

25/03/2009

Peu importe

Peu importent les jours et les nuits, les saisons qui défilent et l’équinoxe qui revient s’abattre sur nous en tempête de pluie battante et froide.

Peu importent la mer qui mugit et ses vagues en colère qui déferlent contre les falaises de la mort.

Peu importent ces navires au large qui tanguent dans la tourmente et pour qui tous les ports sont désormais hors d’atteinte.

Peu importent les heures qui passent et qui repassent au cadran de l’espoir.

Peu importent, vous dis-je, les départs sans cesse différés, les voyages toujours reportés et ces mille pas inutiles qui ne nous conduisent nulle part.


Parfois, une corne de brune hurle dans le noir et annonce des dangers imminents, tandis qu’un phare, au bout du monde, tente de trouer l’obscurité.


Peu importe, ils ne reviendront plus les exilés, ils auront péri en mer avant d’atteindre le port. Le poème sera leur tombeau et s’ils survivent, ce sera dans une chanson de marins, un de ces refrains qu’on reprend en pleine mer pour se donner un peu d’espoir, quand l’attente est trop longue et que la cause est perdue.

Peu importe la nuit au cœur de mon texte, peu importent cette page et ces mots qui s’envolent.

Peu importent ton cœur et ton sexe et tous tes mots qui m’ont fait rêver.

Peu importent les jours et les nuits.

Peu importe.

Reste le poème.

Je te le dédie.


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16:03 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature, poésie

18/03/2009

Printemps, le retour

J’avais, au cours de ce long hiver, passé mes nuits à écrire. Que faire d’autre, en écoutant siffler le vent ? Rien, si ce n’est raconter ce que l’on a vécu ou imaginer ce que l’on pourrait vivre.

Un à un, les mots sont tombés dans mon cahier comme les flocons dans le jardin. Encre noire, tapis blanc, de longues phrases ont rempli les pages tandis que dehors s’épaississait la couche de neige.

Puis, un soir, le temps s’est soudain arrêté. Nature figée, immobile, au cœur du solstice.

Dans le petit matin gelé, un oiseau s’est envolé, effrayé de sa propre fragilité. Cri éphémère dans la pureté de l’azur. Blancheur et éternité.
De mon petit cahier, mes pensées frileuses se sont éparpillées, disant la beauté du monde, mais aussi ma peur et mon angoisse.

Ainsi donc, dans le grand silence de l’hiver, j’écrivais.

J’écrivais et décrivais ce que j’aurais voulu que fût le monde : un endroit où nul oiseau, le matin, ne serait effrayé par la blancheur éternelle de la mort. Un endroit où nul cri, jamais, ne devrait retentir si ce n’est pour dire la beauté fragile de l’azur.

Puis les jours, les semaines et les mois passèrent et un grand matin, ce fut le printemps. C’est l’oiseau qui me l’a dit avec ses mots à lui, qu’il inscrivait dans le grand cahier du monde. Alors j’ai déposé mon stylo, je suis sorti dans la douceur nouvelle et j’ai observé : le vol du premier bourdon, la beauté de la première fleur, la senteur du premier bourgeon. Tout était là, offert, donné, sans raison aucune.

Quand la nuit est tombée et que je suis rentré, toutes mes phrases, soudain, m’ont semblé bien vaines. Etalées là, noires sur le papier blanc, elles n’avaient ni la présence imposante du bourdon, ni l’éclat de la fleur, ni le parfum du bourgeon. Elles n’étaient finalement que des mots, des mots insignifiants et un peu tristes, qui cherchaient sans y parvenir à dire le manque, le vide et l’absence. Toute cette masse de papier inerte n’avait pas un grand intérêt et elle m’apparut pour ce qu’elle était dans toute sa futilité : un grand bavardage inutile, une logorrhée sans fin, un discours interminable.

Alors, tandis que la blanche lune se levait dans la nuit bleue, j’ai jeté dans les flammes de la cheminée le petit cahier avec toutes ses pages et toutes ses phrases devenues inutiles. Il s’ensuivit une grande chaleur qui pendant un instant m’a réchauffé le cœur.



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25/02/2009

Une vie

Toi qui es assise au bord du monde
et qui regardes la mer
a quoi penses-tu quand descend le soir
et que la marée monte?

Rêves-tu du temps infini de l’enfance
quand il te semblait voir dans l’onde du fleuve
des châteaux merveilleux
aux reflets troubles et bleus ?

Revois-tu la jeune fille que tu fus
et qui s’en allait par les chemins,
cueillant des fleurs étranges
qui ressemblaient un peu à l’amour ?

Penses-tu à l’amante des mille nuits
qui se donnait au roi
en son palais d’outre-mer ?

Es-tu, pour un instant, la mère jeune et belle
qui offrait à l’enfant nouveau né
la couronne de son sein ?

Toi qui es assise au bord du monde
et qui regardes la mer
a quoi penses-tu quand la nuit est venue
et que la marée a fini de monter ?

Es-tu de nouveau la jeune adulte
qui s’en va sur des chemins solitaires
chercher d’autres châteaux
dans une Espagne de rêve ?

Ressembles-tu à celle qui cueillit enfin une fleur
au bord du fleuve
en souvenir de son enfance
et de ce que peut-être elle fut ?

Ou bien, lassée de tout,
as-tu été séduite par l’onde merveilleuse
au reflet trouble
où disparaissent tous les châteaux ?

Que cherches-tu encore et toujours
dans la nuit noire, devant la mer
quand la marée déjà
n’en finit plus de descendre
et que tu restes là, au bord du monde ?

Oui, que cherches-tu, belle étrangère ?



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24/02/2009

Nocturne

Par les soirs d’été
je contemplais la mer
sa masse ondoyante
et ses vagues déferlantes.

J’y cherchais les traces du souvenir,
d’un temps qui n’est plus
ou qui peut-être jamais ne fut.

Comment savoir si ce qui fut
a été ailleurs que dans les rêves ?
Tout n’est-il pas inventé ?
Aboli aussitôt qu’apparu ?

Reste ma mémoire
garante du néant
pour témoigner de ces êtres
qui se sont tus.

Grosses déferlantes sur les rochers,
vagues ondoyantes, écume de la nuit.
Il faut scruter la mer, les soirs d’été
quand tombe la nuit…


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00:39 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature, poésie