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10/04/2021

Voyages

Il est des noms qui font rêver, comme Tombouctou, Fez ou Samarkand.

Il est des noms qu’on ne prononce que la nuit

A la lueur d’une bougie

Quand dehors la neige recouvre tous les souvenirs.

 

Dans ma jeunesse oubliée j’ai parcouru la grande Ibérie

Et sur les routes poussiéreuses de Castille,

J’ai contemplé Midi à son zénith.

Dans la chaleur de l’été, le temps était immobile,

Ephémère éternité.

 

J’ai franchi le rio Tormes comme un César adolescent

Et c’est en vainqueur que j’ai pénétré dans Salamanque. 

A l’ombre de la cathédrale, j’ai connu l’amour dans des cloîtres oubliés.

Sous les arcades de la Plaza Mayor la bodega Cervantes

Offrait pour quelques pesetas un vin ensoleillé

Qui transformait à jamais le monde.

 

J’ai rêvé sur les routes d’Extremadura

Sous les tours de Cacerés ou encore à Merida,

Au pied du théâtre romain.

La nuit, je m’en souviens, des filles dansaient nues sur la place publique.

L’une d’elle me prit par la main

Et me guida sur les chemins d’Andalousie.

 

Sevilla, Cordoba, Granada,

Les trois perles maures

Aux yeux de feu.

Dans les jardins de l’Alhambra

Une déesse aux longs cheveux

Récitait d’étranges poèmes.

Sa voix était musique

Et son regard énigmatique,

Pythie antique aux troublantes prédictions.

 

Puis, par-delà la Sierra Nevada,

J’ai atteint l’antique mer homérique.

Immobile dans son éternité,

Elle était comme la somme de nos rêves

Aux marches méridionales du continent.  

 

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16/02/2021

Introspection

Il y a tous ces pays que l’on n’a pas visités,

ces mers lointaines où l’on n’a pas navigué,

ces forêts profondes où l’on n’a pas pénétré.

 

Il y a toutes ces rivières que l’on n’a pas traversées,

ces montagnes enchantées que l’on n’a pas gravies,

et ces chemins de traverse que l’on n’a pas empruntés.

 

Il y a tous ces copains que l’on a perdus de vue,

ces cousines charmantes qu’on n’a jamais revues,

et ces frères et sœurs que l’on n’a jamais eus.

 

Il y a toutes ces femmes qu’on a eu peur d’aborder,

celles qu’on a croisées et qu’on n’a pas retenues

et celle qui voulait rester et à qui on n’a rien dit.

 

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24/10/2020

Dernier spectacle

Quand nous aurons joué notre dernier spectacle,

Quand nous aurons rangé les masques et les cothurnes

Et que les feux de la rampe se seront éteints.

Quand les musiciens auront rangé leurs instruments

Et que le public anonyme sera parti dans la grande nuit,

 Il ne restera plus dans notre cœur

Que l’étoile éphémère de tous nos espoirs

Et le souvenir d’avoir un instant été sublime sur scène.

 

Alors nous prendrons la route sans nous retourner,

La route qui conduit à l’océan,

Et là nous contemplerons les vagues éternelles

Qui n’en finissent pas de mourir sur le sable blanc.

 

Littérature

 

02:37 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature

04/09/2020

Les chevaux de la mer

J’ai vu les chevaux de la mer courir sur le sable infini

Et j’ai senti sur mon visage les bourrasques marines

Qui déferlaient sur les falaises, là-bas, au bout du monde.

Des goélands criaient au croisement des équinoxes

Tandis que la marée montait à l’assaut des châteaux de notre enfance.

Dans les prés salés de nos larmes

Des moutons broutaient paisiblement,

Indifférents au bruit de l’océan

Emportant toutes les espérances. 

J’ai vu les chevaux de la mer, ivres d’embruns salés

Courir libres sur l’infini des sables

Et les soirs de tempêtes, quand l’océan mugit dans les grottes sous-marines

On croit entendre une musique étrangère

Qui dit le chagrin des femmes

Labourées par les chagrins d’amour.

 

Littérature

 

 

 

00:01 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature

23/08/2020

Regards

Il est partout des chemins qui ne mènent nulle part,

Et des carrefours dangereux,

Mais il est aussi des rencontres étonnantes,

Des regards qui se croisent 

Et des mains qui se cherchent

Par-delà l’errance qui est la nôtre.

Maintenant que nous avançons masqués,

Il n’y a plus que les yeux

Pour dire le désir de vivre

Et c’est en rêve

Que les âmes se touchent

Et que les corps s’enlacent

Bravant tous les interdits.

 

littérature

 

 

 

 

20:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature

06/07/2020

Migrations

Ils sont partis pour découvrir des ailleurs improbables,

Et pour oublier qu’ils étaient d’ici., de ce pays de brumes.

Ils sont partis pour découvrir ce que l’homme, jamais, n’avait pu contempler.

Leurs voiliers fendirent la mer bleue,

L’océan infini, qui derrière l’horizon touche les cieux.

Pleins d’espérance, ils naviguèrent vers d’inconnues contrées

Aux noms fantastiques et rêvés.

Et là-bas, ce n’étaient que terres vierges et denses forêts,

Animaux étranges et plages infinies.

Sur des chemins de traverse, ils cheminèrent au hasard,

Perdus dans leur désir d’un devenir meilleur.

Ils longèrent des côtes fantastiques,

Dont les falaises abruptes plongeaient dans la mer éternelle,

Ils parcoururent des steppes sans limites,

Des plateaux d’altitude et des montagnes inconnues.

Ils naviguèrent sur des fleuves impétueux aux flots torrentueux

Et les remontèrent jusqu’à leur source ultime.

 

Alors, arrivés au bout du monde, ayant touché du doigt leur rêve,

N’ayant plus rien à espérer,

Ils rebroussèrent chemin,

Eternels migrateurs

A l’âme inconsolable.

 

Littérature, poésie

 

 

 

01:16 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, poésie

13/06/2020

Les chevaux arabes

Sous les remparts de Grenade, quand vient la nuit

Et que la lune est pleine,

Entendez-vous le trot des chevaux arabes ?

 

S’en vont-ils vers la lointaine Syrie, par la route des califes,

Pour rejoindre Damas,

Ou montent-ils la garde dans la torpeur andalouse

Pour défendre les forteresses omeyades ?

 

Entendez-vous le fracas des sabots

Dans la nuit étoilée de rêves,

Quand le vent soulève le sable ardent en gémissant ?

 

Est-ce Abd al-Rahman qui s’en revient de Cordoue

Dans son habit d’or,

Suivi par ses guerriers abbassides,

Ou n’est-ce que le vent de la sierra

Qui rend fous les étalons

Quand sur le désert tombe le crépuscule ?

 

Dans le quartier de l’Albaicin, une femme voilée écoute à sa fenêtre

Les chevaux arabes qui trottent dans la nuit.

Elle rêve au prince des sables sur son alezan

Qui viendrait la ravir et l’emporter dans la nuit.

Dans cette course folle au rythme des sabots

Elle tiendrait la taille de l’homme

Et sous son voile, elle serait déjà nue.

 

litterature

02:12 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : litterature

09/06/2020

Crépuscule

Qui se souvient de la forêt où venaient écrire les adolescents ténébreux ?

Le parfum des pins n’existe plus que dans la mémoire.

Le murmure du vent dans les feuillages a tout emporté

Et les illusions ont fini par s’envoler.

Sur la page blanche de la vie, ils avaient écrit des poèmes d’amour

Mais l’amour lui aussi s’en est allé.

Dans les hautes branches, les oiseaux ont fini par se taire

Tandis que tombe le dernier crépuscule du monde sur la forêt endormie.

C’est au cimetière que dort la belle jeune fille de jadis,

Celle à laquelle il avait tant rêvé.

Reste un ultime poème, qu’il vient déposer sur le marbre froid.

Il dit l’odeur d’un printemps d’autrefois

Et la douceur de la mousse

Où elle lui avait donné sa jeunesse. 

 

Littérature, poésie

01:14 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, poésie

23/05/2020

Nouveau roman

Parution de mon dernier roman, aux éditions Spinelle à Paris.

 

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16/02/2020

Asie

Il était arrivé avec pour tout bagage

Les souvenirs de pays ultramarins.

Il ramenait un peu de sable blond,

Quelques coquillages nacrés

Et une perle océane achetée sur un marché de Bombay.

Dans ses yeux, il y avait tout le soleil des îles sous le vent,

Les nuages de pluie des moussons

Et les cieux rouges des tropiques ensanglantés.

 

Il avait dû faire un terrible voyage.

Après avoir mené bien des combats

Et avoir fui beaucoup de guerres,

Il était revenu,

Conservant pour tout trésor le parfum d’une femme

A la chevelure de nuit.

Elle n’était plus que l’ombre d’un fantôme

Mais il ne pouvait oublier l’odeur de sa peau nue

Quand l’amour les rassemblait

Dans sa case de bambous.

C’était sa sœur aux yeux d’Asie

Assassinée par un soldat inculte

Alors qu’elle était le centre du monde.

Il avait dispersé ses cendres aux quatre coins de l’univers

Puis était sorti de la ronde pour revenir chez lui,

Oubliant ses rêves de grandeur

Et ne se souvenant que de la mort de cette fille

Dont il avait fermé les yeux

Tandis qu’une grande tache rouge

Rougissait la chemise sous son sein gauche.

Fuyant les alizés, reniant tous les dieux,

Il avait marché vers le nord, traversé des steppes infinies,

Franchi des déserts de pierres et des fleuves impétueux

Pour tenter d’oublier la tendresse de son regard,

L’accueil de ses hanches, et la souplesse de son ventre.

Mais il eut beau marcher, toujours il voyait l’éternelle blessure,

La tragique coupure, dissimulée dans la toison bouclée des rêves.   

 

Il est donc arrivé un beau matin,

Ayant perdu toute illusion.

Il s’est assis sur le petit pont de pierres

Et a juste prononcé ces mots : « Me voici revenu ».

Puis il a contemplé l’eau fuyante de la rivière

Qui emportait son dernier rêve.

 

Littérature

23:21 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : littérature

05/02/2020

Les carnets de la vie

Dans les carnets de la vie

Les âmes se livrent

Nues pour l’éternité

Mais les questions demeurent sans réponse,

Interminablement.

 

Au bord du terrible gouffre final

Là où s’agite le grand océan inconnu

Le mystère reste total.

 

Quelques souvenirs survivront,

Un champ de blé sous les chaleurs de juillet,

Une rivière pure et froide dans la Provence éternelle,

Le chant des sirènes dans les oliviers,

Le bruit du tonnerre dans les montagnes catalanes

Et le sable infini des plages

Où tous les pas s’avanouissent.

 

Et puis bien sûr il y eut nos mains

Pour un instant unies

Et ces collégiales que nous visitions,

Amoureux des vitraux aux éclats de couleur,

Là où des saintes dénudées

Chantaient des cantiques mystiques

Sur des harpes de fortune.

 

Oui, que restera-t-il de toute vie

Quand la mer déferlera contre les falaises de la mort

Et emportera dans une gerbe d’écume

l‘inanité de tous les mondes ?

 

Il restera le rêve éternel

Et le désir inassouvi de notre rencontre improbable.  

 

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27/01/2020

La librairie

C’était une librairie où l’on vendait du rêve.

On y trouvait toute la poésie du monde depuis Homère jusqu’à Jaccottet,

Sans oublier Neruda, Pavese et Pessoa.

Il suffisait d’ouvrir un livre pour que les mots s’envolent aussitôt.

Il n’y avait plus qu’à les attraper avec un filet à papillons,

Les regrouper en strophes, et les fourrer dans un sac

Sous l’œil ironique et tendre de la jeune libraire. 

Elle était belle et charmante avec son doux visage et ses petits seins pointus.

Parfois je lui offrais un bouquet de rimes qui la faisait sourire,

Alors elle me donnait quelques livres étranges,

Où l’on parlait d’amour, de voyages, et d’océan.

On respirait les embruns du large rien qu’en humant leur tranche

Et un grand vent marin emplissait soudainement toute la boutique.

Rimbaud n’était pas loin, avec son bateau ivre, guidé par le hasard,

Toujours à la recherche d’improbables Florides.

Derrière ses piles de livres à l’équilibre incertain,

La libraire m’observait à la dérobée.

Je serais volontiers parti avec elle vers ces îles lointaines dont on ne revient pas,

Mais je savais que les rêves étaient ici, entre les pages des vieux livres.

Pourquoi voyager si loin puisque l’ailleurs était dans les yeux, verts comme la mer,

De cette fille au regard tendre et doux ?

Elle dont la chevelure noire tombait en cascades écumantes

Sur sa poitrine secrètement convoitée.

 

C’était une librairie, où l’on vendait du rêve.

 

Littérature, poésie, librairie

01/11/2019

Vol automnal

Un papillon évoluait dans le jardin de l’automne.

Il volait, virevoltait,

Perdu dans le temps,

Perdu dans les souvenirs de son été évanoui.

Chenille verte et trottante, il s’était transformé en éclats de couleurs,

En beauté éclatante,

En souffle léger et passager.

Ephémère présence, conscient de son court passage, il s’obstinait à vivre dans la lumière d’un octobre finissant.

Bientôt la froidure l’emporterait vers l’au-delà des papillons.

Que resterait-il alors, de ce vol de couleurs, de cette légèreté soyeuse, de ces battements d’ailes désordonnés ?

Il ne resterait rien, si ce n’est le souvenir d’une beauté colorée et fragile qui un instant a pu égayer notre vie. 

littérature

 

 

 

 

16:02 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : littérature

24/10/2019

Automne

Le temps passe inexorablement

Et les vieilles tombes elles-mêmes ont perdu leur éclat.

Dans la brume de l’automne, les feuilles s’envolent vers d’autres rêves.

De mes mains s’échappent des nuages aux formes étranges,

Tandis que sur les falaises de l’infini des océans tempétueux viennent se fracasser inlassablement.

 

Il est dans les villages des églises aux formes floues et aux clochers incertains,

Des rivières qu’enjambent des ponts en pierres de schiste,

Et des passants courbés sous le poids de leurs déceptions.

 

Il est des forêts infinies, où des animaux sauvages survivent depuis l’origine du monde.

Au milieu d’une clairière, se dresse un monastère dont la porte est close.

Dans le silence, s’élève un chant beau et pur, qui dit la beauté de l’univers,

Mais derrière ces voix viriles on devine le désir de la femme éternelle,

Cette Marie des Evangiles, qui se donna par amour.

 

Sa silhouette reste gravée sur les vitraux,

Forme fragile et gracieuse qui rayonne de mille couleurs

Dans l’aube matutinale de l’hiver précoce.

Quand la gelée blanchit les herbes tendres de ma jeunesse. 

 

littérature

22:54 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature

19/09/2019

La page est tournée

J’avais écrit sur le sable de la plage

Des mots éphémères

Qui se sont évanouis lors de la dernière marée,

Lors de la première grande bourrasque d’automne,

Quand l’équinoxe fut de retour

Et que le monde a basculé vers l’hiver et l’horreur.

 

J’avais écrit des poèmes aujourd’hui disparus.

J’en ai oublié les vers

Et leur musique morne et obsédante.

Il ne reste dans mon souvenir que le bruit des vagues

Déferlant en cascade sur l’infini du sable.

 

J’avais écrit des choses terribles

Sur la vie et la mort

Sur la solitude aussi

Ainsi que sur le temps qui passe et qui nous emporte.

 

De ces écrits sur le sable

Il ne reste rien, rien du tout.

Rien que le sentiment d’avoir perdu mon temps,

Ce peu de  temps qu’il me restait à vivre.

 


13/08/2019

Le songe d'une nuit d'été

Dans des draps blancs aux ondulations vagues,

Elle dormait,

En partance vers des mondes oniriques et fabuleux.

Sous les plafonds constellés d’étoiles, le grand voyage nocturne commença,

Tandis que par les fenêtres, un troublant rayon de lune dévoilait toute sa nudité.

Partie pour des contrées ultramarines, elle rêvait à de merveilleux départs,

A des pays lointains, à des îles enchantées, ou à des mers où paraît-il prospérait le corail pourpre.

Les murs de la chambre étaient couverts de tapisseries anciennes

Et s’ouvraient sur des paysages magiques.

Sur des plages infinies, des sirènes à la peau brune et aux longs cheveux noirs

Montaient des chevaux aux yeux bleus et au regard tendre.

Dans le grand silence nocturne, leur chant ravissait la dormeuse.

Captivée par cette mélodie étrange, elle rêvait aux marins d’outre-mer,

A leur barbe drue et puissante, à leur peau salée, et à leurs baisers de feu.

Désir étrange que celui-là, dans un lit voguant au milieu de la nuit noire.

Les draps ondulent comme des vagues, le bateau tangue et le vertige monte.

Avant de sombrer définitivement dans les profondeurs de l’océan et de couler à pic,

Elle effleure son éternelle blessure et doucement gémit.

Puis elle reste là, étendue sur le sable blond, dans la clarté étrange d’une lune de juillet.

Elle dort, éternellement nue, enveloppée de ses draps blancs.

 

litterature

13:23 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : litterature

03/08/2019

Océane

Il y avait des plages infinies et une mer vaste et bleue.

Il y avait des horizons lointains et des navires en partance pour de mystérieuses destinées.

Il y avait des falaises abruptes et des phares qui éclairaient toute la nuit.

Il y avait l’odeur des marées et des coquillages par milliers sur le sable des marées basses.

Il y avait les châteaux de sable de l’enfance et toutes nos illusions perdues.

Il y avait des jeunes filles aux cheveux noirs dont les yeux reflétaient tous les mystères de l’Asie.

Il y avait, dans le port, un bateau échoué, et sur le quai des cordages détrempés.

Il y avait un café où s’assemblaient tous les marins du monde.

Il y avait la lande infinie et les bruyères mauves de la mort.

Il y avait des goélands intrépides qui plongeaient dans les flots noirs.

Il y avait le soleil qui se levait sur le premier matin du monde

Et l’écume blanche qui n’en finissait plus de déchirer les rochers de granite rose.

 

Ô enfance disparue avec la dernière marée.

 

litterature

23:53 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : litterature

04/07/2019

Silence monacal

Dans le silence du monastère vieux

Médite un jeune moine au scapulaire noir.

Sous les arcades du cloitre, il déambule,

Observant le jardin où une rose fragile vient d’éclore.

Laissant là son bréviaire aux pages jaunies,

Il en hume le parfum captivant

Et d’un doigt hésitant, caresse lentement les pétales délicats.

Troublé par cette douceur soyeuse,

Il rêve un instant et sans savoir pourquoi

Au visage féminin et gracieux

Aperçu un dimanche dans la nef cathédrale.

Laissant là la rose, il reprend son cheminement

Et soupire en ouvrant le bréviaire à la page cent fois lue.

 

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24/06/2019

Train de nuit (suite et fin)

Je me sentais proche d’elle et pas seulement à cause de ses propos révolutionnaires. Ce qu’elle m’avait dit de Rimbaud m’avait aussi beaucoup étonné. On sentait qu’elle maîtrisait les textes du poète à la perfection et qu’elle savait en extraire toutes les pépites, depuis les rêves impossibles jusqu’à la révolte. Décidément, c’était là une fille étonnante et je me promis de faire plus ample connaissance avec elle dès le lendemain.     

Mais quand je me suis réveillé au petit matin, le train était à l’arrêt en gare d’Hendaye et les premiers voyageurs commençaient à se diriger vers le terminal ferroviaire espagnol. Sur la couchette en face de la mienne, il n’y avait plus personne ! Mon Dieu, elle était partie sans rien dire ! Peut-être, pleine de sollicitude,  avait-elle eu peur de me réveiller ? Mais cela n’avait pas de sens puisque le train était arrivé à destination. Sans doute avait-elle plutôt voulu disparaître avant que je l’interroge de nouveau sur la Colombie. Du coup, je m’en suis voulu de m’être montré par trop indiscret la veille. Sans ma stupide curiosité, ma compagne serait encore là, et c’est ensemble que nous aurions continué le voyage. Mais si elle allait à Salamanca, comme elle l’avait prétendu, elle devait prendre le premier train pour l’Espagne ! Et moi qui restais là comme un idiot à me poser des questions, alors qu’il fallait courir et essayer de prendre le même convoi qu’elle ! Je sautai en bas de ma couchette et rassemblai mes affaires le plus vite possible.  C’est alors que je remarquai un foulard qui traînait à terre et qu’elle avait manifestement oublié. Je me souvenais qu’elle le portait autour du cou la veille, quand elle était entrée dans le compartiment. Je le respirai et tout son parfum, toute son odeur à elle, me pénétra aussitôt. J’en restai abasourdi, quasi en extase. Il me semblait entrer ainsi dans son intimité et j’en étais tout troublé. Se pourrait-il qu’elle eût fait exprès de perdre ce foulard ou l’avait-elle vraiment égaré ? Peu importait finalement, puisqu’il me restait ainsi un petit quelque chose d’elle. Un « presque rien » comme disent les philosophes, mais qui néanmoins importait beaucoup pour moi. Il me semblait enfouir mon visage dans son cou parfumé et je m’imaginais déjà en train de lui mordiller tendrement l’oreille avant de chercher ses lèvres et de finir par un baiser envoûtant.

Il n’y avait plus une minute à perdre ! Je rassemblai mes affaires en un tournemain et, le foulard à la main, je me précipitai dans le couloir du train. Une fois à l’extérieur, je courus le plus vite possible vers les barrières qui séparaient la France de l’Espagne. Enfin arrivé  aux guichets, je parvins à me faufiler et à grappiller quelques places. Mon billet en poche, je me suis précipité vers le train qui attendait le long du quai. Je suis monté dans le premier wagon  et j’ai parcouru toute la rame en espérant retrouver ma fascinante amie. Mais j’eu beau refaire le trajet plusieurs fois, je dus me rendre à l’évidence : elle n’était pas là. Pourtant c’était bien le premier train en partance pour Salamanca ! Je n’y comprenais plus rien. Quand le convoi s’ébranla et prit de la vitesse, j’ai fini par m’asseoir. Mon sac à dos sur les genoux, je continuais à respirer l’odeur du foulard, sous l’œil réprobateur d’une vieille douairière, coincée dans son tailleur rose, qui me dévisageait d’un œil morne et méprisant. Qu’elle ne m’adresse surtout pas la parole, la vieille chouette ! Je n’en avais rien à foutre de ses considérations morales, j’étais amoureux et me moquais bien du reste.

Après un bon moment, je repris mes esprits et contemplai le paysage qui défilait à grande vitesse. Déjà nous avions quitté le Pays basque et nous parcourions le plateau monotone et aride de la Vieille Castille. Etais-je une sorte de Dom Quichotte à la recherche de rêves impossibles ? C’était à craindre. C’est alors que mon regard tomba sur la page d’un journal du matin qui traînait sur la tablette. En gros plan il y avait une photo de la fille que je recherchais ! Je n’en revenais pas ! Je lus le titre et en restai abasourdi : « Una Francesa asesinada en Colombia por un grupo de extrema derecha. » Une jeune fille française assassinée en Colombie par un groupe d’extrême-droite. Le journal était daté de ce matin et le meurtre avait été découvert la veille au soir, vers vingt-deux heures, heure espagnole. Pourtant cette même jeune fille avait bien pénétré dans mon compartiment ! Je ne savais plus que penser. Etais-je devenu fou ? Avais-je eu une hallucination ?  Mystère. J’étais incapable de me prononcer. Les yeux dans le vague, j’ai regardé les champs de Vieille Castille défiler avec monotonie, tandis que je continuais à serrer compulsivement le foulard au parfum enivrant.

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23:51 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature

19/06/2019

Train de nuit

J’étais monté dans ce train de nuit à Angoulême, sans billet, et après avoir erré un bon moment dans le couloir, j’étais parvenu à trouver un compartiment vide. Une chance inespérée ! Six couchettes avaient été disposées et je n’avais que l’embarras du choix. J’optai immédiatement pour celle du dessus, histoire de rester le plus discret possible si par malheur un contrôleur zélé se mettait en tête de vérifier les billets. Mais bon, à cette heure, on pouvait quand même espérer qu’il dormirait comme tous les autres voyageurs.

Bien installé dans mes hauteurs, je sortis de mon sac à dos un exemplaire chiffonné des Classiques Garnier et je me replongeai dans la poésie toujours aussi étonnante et ensorcelante des Illuminations de Rimbaud.  Ce sont des villes! C'est un peuple pour qui se sont montés ces Alleghanys et ces Libans de rêve ! Des chalets de cristal et de bois qui se meuvent sur des rails et des poulies invisibles. Il y avait de quoi en avoir le souffle coupé ! Je me mis à rêvasser tandis que mon train filait à toute vitesse vers une Espagne improbable. A la fin, je crois que je me suis endormi, bercé par le bruit monotone des roues. A un certain moment, je me suis réveillé en sursaut : le train était à l’arrêt. Que se passait-il ? Un rapide coup d’œil derrière le rideau de la vitre me rassura : on faisait une halte en gare de Bordeaux- St-Jean. Un coup de sifflet strident m’apprit que le train allait bientôt redémarrer. Et en effet, un peu plus tard, nous roulions à toute vitesse dans les Landes, dont les pins maritimes se dressaient face à l’océan, énigmatiques fantômes dans le clair de lune. C’est à ce moment que la porte du compartiment s’est ouverte et qu’elle est entrée. Elle m’a dit bonsoir avec un merveilleux accent du midi et m’a souri, pas farouche pour un sou, et plutôt enchantée de trouver quelqu’un d’éveillé avec qui faire la conversation. 

Etudiante en lettres modernes à la Fac de Bordeaux, elle s’en allait à Salamanca pour apprendre l’espagnol. Moi qui me rendais en Andalousie officiellement pour essayer de trouver un boulot saisonnier, mais surtout pour entrer en contact avec des camarades anarchistes, je me dis que ses intentions valaient bien les miennes. Nous discutâmes un moment de Rimbaud, dont elle avait repéré tout de suite la couverture fatiguée des Classiques Garnier. Puis ce fut le tour de Verlaine, de Baudelaire et de Léo Ferré. Décidemment cette petite, par ailleurs bien appétissante, semblait loin d’être une idiote, et elle commençait à me plaire. Après la poésie, on aborda les sujets politiques et là également je dois dire que nous étions sur la même longueur d’onde. Il y avait chez elle une sincérité profonde quand elle appelait de tous ses vœux à vaincre la droite capitaliste et à installer une société basée sur des valeurs humaines. On évoqua les guerres coloniales d’Irak, de Libye et de Syrie. On parla de la France de Sarkozy et de celle de Macron, puis de la mainmise de la haute finance sur toute l’économie mondiale. Elle me raconta un voyage qu’elle avait fait l’an passé à Cuba et au Venezuela, voyage qui s’était finalement assez mal terminé en Colombie, d’après ce que je pus comprendre, mais sur cet épisode trouble elle ne voulut rien me dire.  Au contraire, elle se braqua quand je lui posai quelques questions plus précises et décréta subitement qu’il était temps d’aller  dormir. Alors, elle se mit à se déshabiller sans la moindre gêne. J’avoue, moi qui en ai pourtant vu d’autres, que j’en suis resté tout pantois. Une fois le chemisier et le pantalon ôtés, ce fut le tour du soutien-gorge, qu’elle enleva d’un geste précis et gracieux, comme si c’était là l’acte le plus naturel du monde. En petite culotte, elle grimpa dans la couchette en face de la mienne, sous le toit, puis elle me souhaita une bonne nuit avec un petit sourire charmant.

Il faisait si chaud que je ne suis pas parvenu à m’endormir. Discrètement, je regardais parfois ma voisine qui, elle, semblait bien assoupie et dont la respiration régulière soulevait la poitrine dénudée d’une troublante façon. Le train filait à toute vitesse vers cette Espagne exotique où il me plaisait de construire des châteaux imaginaires absolument merveilleux. Puis j’ai repensé à l’histoire étonnante de cette fille sortie de nulle part et qui m’avait confié sans hésiter ses convictions politiques intimes. Oui, mais d’un autre côté, il y avait cet incident en Colombie, où il s’était manifestement passé quelque chose de tragique et dont elle n’avait absolument pas voulu parler. J’étais intrigué. Qu’avait-elle bien pu faire là-bas ? Avait-elle pactisé avec les FARC et avait-elle commis un attentat ? Avait-elle été emprisonnée et torturée ? A cette idée, je sentais une sorte de révolte monter en moi, tout en regardant les longs cheveux noirs qui se répandaient autour de son beau visage.

 

(à suivre)

 

littérature

21:52 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature

22/05/2019

Parution

Un opuscule reprenant une nouvelle de 5.000 mots parait vendredi 24 mai 2019 aux éditions Lamiroy.

 

https://lamiroy.net/products/91-un-enterrement-pas-ordina...

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17/05/2019

rêverie utopique

Il y aurait une table avec un bouquet de fleurs

Et puis deux assiettes et deux couverts.

Il y aurait, car c’est joli, une bougie allumée au cœur de la nuit

Il y aurait, tout près, une plage de sable fin

Et le bruit de la mer qui arriverait jusqu’à nous.

Il y aurait un peu de vent parfois,

Qui te ferait frissonner.

Il y aurait ma main qui prendrait la tienne

Pour voir si tu n’as pas froid

Il y aurait ton regard qui brillerait dans l’ombre

D’un éclat étrange et troublant.

Il y aurait, à l’horizon, des montagnes

Qu’on ne verrait pas dans la nuit noire

Mais dont on devinerait la présence,

Comme je devinerais, par un frémissement de tes doigts,

Tout le trouble qui t’agite.

 

Il y aurait une table avec un bouquet de fleurs

Et ta voix qui s’élèverait dans l’obscurité.

Tu dirais des choses sans importance

Pour ne pas montrer ton émotion,

Mais dans tes yeux, le reflet d’une flamme vacillerait.

Serait-ce seulement la flamme de la bougie

Agitée par le vent

Qui se réfléchirait là,

Ou bien, serait-ce, au plus profond de toi,

Une émotion étrange qui lentement t’envahirait ?

 

Il y aurait, tout près, une plage de sable fin

Et le bruit de la mer qui arriverait jusqu’à nous.

Il y aurait dans le ciel, autant d’étoiles

Que de grains de sable sur la plage

 

Il y aurait surtout deux êtres qui enfin se trouveraient

Après s’être si longtemps cherchés.

 

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13/04/2019

Ondine

Lui qui marchait au hasard, sur la piste de ses rêves,

Lui qui marchait sans fin depuis tant de jours,

Voilà qu’au bout du chemin, il se trouva soudain devant une rivière.

Des saules en pleurs se penchaient vers l’onde verte, tremblants et émus,

Tandis que le vent caressait doucement leur chevelure murmurante.

L’eau était pure et calme comme au commencement du monde

Et le soleil jouait avec les reflets.

C’est alors qu’entre les joncs il la vit,

Elle, la déesse depuis toujours imaginée,

Elle, la femme dont parlaient tous les mythes,

Celle qu’il avait cherchée depuis toujours sans le savoir.

Elle était là, belle et nue, dans l’eau transparente de cette rivière d’été.

Instant magique, onirique, orphique.

Il regarda ce qu’il n’aurait pas dû voir,

Il contempla la sirène mystérieuse,

La dame chantée par les troubadours sur leurs lyres mystiques,

La muse que Pétrarque pleurait en sa Fontaine de Vaucluse,

Ou cette Eloïse qui fit perdre à Abélard la raison,

Il y a très longtemps, dans un Moyen-Age incertain.

 

 

Il la regardait nager voluptueusement dans l’eau froide et pure,

Ondine aux formes fascinantes, aux courbes envoûtantes.

Seul parmi les mortels il put, un instant, comprendre le mystère sacré,

Celui de la beauté pure, attirante et parfaite.

Les feuilles des saules s’agitaient, tandis que flottait au gré du courant

La longue chevelure noire et soyeuse,

Telle l’ombre de la déesse qui s’en allait, belle et nue,

Emportée par le courant perfide et cruel.

Un instant il rêva d’embrasser ses lèvres soyeuses et entrouvertes

Et ce triangle de tout désir, provoquant et sacré.

Mais déjà la fille s’éloignait et disparaissait derrière les joncs de la rive amère.  

Déjà, il ne restait dans la mémoire du promeneur solitaire

Que le souvenir d’un songe aussi improbable qu’incertain.

 

Littérature, poésie

00:26 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature, poésie

29/03/2019

Amazonie

Ivre, le bateau qui remontait le fleuve,

Eclaboussé d’écume.

Ivres, les marins, qui chantaient et dansaient,

Sur le pont de tous les espoirs.

Ivre aussi, le capitaine,

La main sur une cuisse nue

Et qui cherchait l’éternel port.

 

Il remonte le fleuve, le grand navire,

Sous un soleil radieux

Et fend de son éperon les eaux boueuses des dernières pluies.

Dans les cales, tous les tonneaux sont en perce

Et le vin noir coule dans les jarres.

 

Il vogue vers la source, le beau bateau,

Tandis que dans la forêt, des yeux noirs le regardent passer.

Les voiles claquent, effrayant les grands oiseaux tapis dans les roseaux.

Dans sa cabine, le capitaine a déposé son couteau cranté.

Il caresse l’esclave à la peau brune,

Enlevée hier dans un village de la côte.

Il lui murmure des mots étranges et improbables

Et cherche dans les broussailles

Sa blessure primitive.

 

En a-t-il connu des deltas

Et même des triangles des Bermudes,

Mais maintenant, il s’agit de remonter le temps

Jusqu’aux origines du monde.

 

Les cheveux noirs et fous,

Le regard sombre,

La peau incroyablement nue et brillante,

Cette sirène possède toute la beauté du diable…

 

Il caresse une courbe, se désaltère à la source,

Mais ne voit pas la main brune qui tâtonne et s’empare du couteau.

Arrêté dans sa course, le navire s’est immobilisé dans la mangrove.

Sortant de l’ombre, dix indiens nus avancent sur leur pirogue.

Ils portent sur le front l’insigne vengeur du dieu du fleuve.

Littérature

 

 

 

17:42 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature

14/02/2019

Promenade champêtre

La vie est une promenade, que l’on fait dans des champs d’amertume. On suit un chemin, sans savoir où il mène, ni pourquoi on a choisi celui-là. Généralement, d’ailleurs, on n’a rien choisi du tout, on s’est retrouvé là par hasard, par habitude, ou par nécessité, parfois suite au conseil d’un ami.

On marche, on suit le chemin, qui s’avance entre les blés blonds. Quelque part, on ne sait pas où, des oiseaux chantent, heureux d’exister. Alors on s’arrête un instant et on les écoute. Quelle mélodie ! Quel hymne à la création ! Allons, la vie semble belle… On reprend sa route, rassuré pour quelques instants. Mais soudain, vous voilà à un carrefour. Aller à gauche ou aller à droite ? Il va falloir choisir. Mais comment trancher, puisqu’on ignore où mènent ces deux chemins. La décision sera forcément arbitraire, autant jouer à pile ou face.

Vous voilà engagé dans une voie qui bientôt se rétrécit. Sans doute vous êtes-vous fourvoyé et aurait-il fallu être plus clairvoyant. Mais vous ne connaîtrez jamais ce qu’aurait été votre vie si vous aviez choisi l’autre chemin. Il vous aurait mené ailleurs, mais où ? C’est là que réside tout le mystère. Vous auriez rencontré d’autres lieux, d’autres personnes… Peut-être même auriez-vous connu un grand amour, qui sait ? C’est tellement agréable, un grand amour… En attendant, vous êtes ici, sur ce chemin de plus en plus étroit et qui se rétrécit encore, finissant par ressembler à un sentier, voire même à une simple piste laissée par des animaux sauvages.

Vous voilà à la lisière d’une forêt. Allez-vous poursuivre votre route et continuer ? De toute façon, il est trop tard pour faire demi-tour. A l’horizon, déjà, le soleil se couche, embrasant l’univers d’une trainée de sang. Il faut y aller, l’heure n’est plus à faire des choix.

Dans les sous-bois, il fait déjà sombre et la nuit ne tardera pas. Où aller ? Il n’y a plus de sentier ou ce qu’il en restait s’est perdu dans l’obscurité. Vous tâtonnez, de peur de vous blesser aux branches sournoises et basses. Parfois, votre pied heurte une racine traitresse. Allons, la belle journée est bien terminée, voilà déjà la fin du voyage. Dans les lointains, hurlent les premiers loups. L’heure est arrivée où il va falloir livrer le dernier combat.

 

litterature

15:36 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : litterature

23/01/2019

Dernière parution

La nouvelle vient de tomber : mon dernier livre est référencé. Après "Obscurité" (roman), "Le temps de l'errance" (poésie) et "Ici et ailleurs" (nouvelles), voici "Sur les traces d'un amour inoubliable".

Il s'agit d'un roman qui, comme son titre l'indique, parle d'amour, mais pas seulement. Et puis cet amour est un peu particulier. D'abord, il s'agit d'une liaison extra-conjugale (madame est célibataire, monsieur est marié) mais surtout un des deux protagonistes est déjà décédé quand on commence la lecture. On l'aura compris, l’héroïne, blessée, va revenir sur les lieux qu’ils ont fréquentés ensemble. Puis, petit à petit, au-delà de la nostalgie qui l’envahit, elle va découvrir des aspects qu’elle ne connaissait pas chez cet être qui était pourtant si proche d’elle. Altermondialiste actif, se pourrait-il que sa mort n’ait pas été naturelle ? Troublée par ces révélations, elle va parcourir l’Ardenne, la région natale de celui qui fut l’homme de sa vie, pour tenter de comprendre qui il était vraiment. 

Au-delà de l’histoire racontée, c’est un  livre où j’ai glissé de nombreux souvenirs personnels et si l’imaginaire les a parfois transformés, ils constituent cependant le terreau où ce livre a puisé ses racines.    

 

 littérature

31/12/2018

Dernier soir

L’année s’achèvera donc sans poème, sans histoire contée ou à raconter.

Dans le grand hiver qui s’avance, règne le silence, celui des forêts de l’enfance.

Sur les branches des sapins, la neige s’accumule.

Elle s’accumule aussi au sol, où les chemins ont disparu.  Il n’y a plus rien, rien que tout ce blanc et le noir des sapins.

Seules apparaissent les traces d’un animal sauvage, qui est passé par là, ce matin, ou hier, ou autrefois, dans un autre temps, dont on ignore tout. Était-ce cette année ou l’année dernière ? Tout se ressemble, je ne sais plus.

La neige continue à tomber, recouvrant inexorablement mes souvenirs.

J’ai tout oublié, même le chemin qu’il me faudrait emprunter.

Il n’y a que du blanc et ce froid qui petit à petit commence à me glacer le cœur.

Le vent se lève, le soir tombe, et tous les horizons s’estompent dans la brume.

Bientôt viendra la nuit et même la forêt aura disparu.

 

 

Littérature 

16:14 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature

03/10/2018

Autrefois, une île

C‘était un pays fabuleux qui peut-être n’avait jamais existé. C’était celui de toutes les enfances et la mer qui le bordait en effritait inexorablement les falaises  lors des tempêtes d’hiver. Fragile, cette île se dressait face aux houles océanes, mais elle résistait depuis toujours et conservait une place de choix dans la mémoire des hommes.

Ses forêts étaient impénétrables et parfois on y entendait les brames de grands cerfs que personne n’avait jamais vus.  

Ses fleuves, nés dans les hauts sommets enneigés, traversaient de larges plaines fertiles avant de se perdre dans des deltas incroyables. Là poussaient des palmiers sauvages, tandis que des animaux étranges, mi-dieux, mi-démons, jouaient à des jeux dont ils étaient les seuls à comprendre les règles.

Il y avait des maisons et des palais, des ruines de temples antiques et des églises à l’abandon. Il y avait des ponts qui enjambaient des rivières à sec et des déserts de sable blanc jusqu’à l’infini.

Il y avait aussi des écoles avec des marronniers dans les cours et des filles jolies aux longs cheveux soyeux qui jouaient à la marelle. Elles bondissaient de case en case avec élégance, et restaient  un instant suspendues dans le vent d’automne aux senteurs de feuilles mortes.

Dans les encriers noirs, l’encre fraîche sentait bon la rentrée et sur les pages blanches couraient les premières plumes. Le maître épelait de mystérieux alphabets que répétaient les voix enfantines, chant primordial qui valait bien celui qui résonnait dans les églises, sous les voûtes ogivales et parmi les senteurs d’encens.

Parfois, c’était le bruit des armées que l’on entendait, des armées qui autrefois avaient défendu ces terres contre des barbares venus du fond de l’Histoire. Les scènes de massacre et de villages en feu étaient encore dans toutes les mémoires et le soir, au coin du feu, on se racontait les atrocités que les femmes avaient dû endurer. Ces soirs-là, la parole était de sang et les hommes tendaient un poing vengeur vers cet horizon marin d’où étaient venus ces étrangers depuis leurs brumes du Nord.

Puis s’avançait la nuit avec ses oiseaux aux longs sanglots. Parmi les ténèbres, on croyait alors entendre battre le cœur de la terre, qui parfois tremblait à des profondeurs incroyables.

Enfin, c’était le matin, et il suffisait de rester là, au bord du monde, à regarder la vie. Dans la plaine, des chevaux sauvages couraient, ivres de liberté, tandis que des papillons se rassemblaient par milliers, attirés par le parfum suave des premières fleurs du printemps.

Sur les plages infinies, face à la mer qui s’était retirée jusqu’à l’horizon, les jeunes filles se dénudaient et apprenaient l’amour.

L’enfance était terminée et il n’en restait que quelques échos dans la mémoire. Souvenir du crissement de la plume sur la plage blanche, odeur des feuilles mortes dans la cour de récréation, jeu de la marelle, innocence des chansons, et puis quelques contes cruels dans lesquels apparaissait immanquablement le  loup des légendes.

La mer est revenue aux grandes marées d’équinoxe et a emporté tous mes souvenirs. Il ne reste, enfouie au plus profond de moi, que l’odeur de ta peau et le son de ta voix, tandis que sur le sable la trace de nos pas s’est irrémédiablement effacée.

 

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14/09/2018

Silence nocturne

Nous avons été jeunes sous tes frondaisons, ô forêt.

Je me souviens de tes clairières mystérieuses et des lacs bleus sous la lune.

Les branches entremêlées de tes arbres étaient plus noires que la nuit et de curieux oiseaux traversaient le néant en appelant la mort.

Parfois, la brise s’élevait dans le grand bois sonore et c’était là une musique étrange, comme venue d’un autre monde.

Dans l’obscurité, nous parlions à demi-mots de choses impossibles, t’en souviens-tu mon amour ?

Nous avions cet âge où l’on croyait encore qu’une caresse sur une peau nue pouvait ouvrir les portes de l’impossible. Ta voix était douce et inquiétante comme celle de la forêt, pleine des mystères de ta féminité.

Ta voix était la nuit et depuis toutes ces années j’en cherche encore le chemin.

Par les sentiers sinueux, j’erre en vain, troublé à l’idée qu’un soir, peut-être, je te retrouverai là, assise en silence au bord du lac bleu. Sur tes épaules nues la lune tracera la marque de l’au-delà et moi je me cacherai dans l’ombre pour mieux contempler celle que j’ai tant aimée et que je n’ai jamais revue.

 

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14/08/2018

Le faucheur et sa faux

Il faisait chaud, terriblement chaud. Ils avaient travaillé toute la journée dans les champs, à couper le blé blond et à le lier en gerbes plus ou moins égales. Puis le soleil, enfin, s’était couché derrière l’horizon, ensanglantant la campagne et jetant sur les meules une couleur rouge sang. Alors, ils avaient repris leurs outils tranchants à la lame maintenant un peu élimée, et s’étaient  dirigés vers le village, par groupes de quatre ou cinq. Ils devisaient en chemin et parlaient de la cambrure de reins des juments et de la beauté des femmes. Ils disaient la soif qu’ils avaient et à quel point leur gosier était sec, après ce dur labeur. Ils racontaient des blagues un peu salaces, par lesquelles ils exprimaient  leur envie de finir le nuit près d’une fille brune au regard de feu, une belle fille qui les aurait attendus depuis toujours, et dont la langueur lascive ne pouvait laisser personne indifférent. Ils imaginaient sa peau douce et la manière dont elle gémirait quand ils l’embrasseraient dans le cou. Alors, doucement, ils déboutonneraient son chemisier et moissonneraient à pleines mains les tendres fruits de la passion.   

Devisant de la sorte, ils étaient arrivés devant le premier cabaret, où ils firent une halte bien méritée. Le vin rosé coula à flot, ainsi que la bière blonde aux saveurs de houblon. Ils burent plus que de raison, mais on pouvait les comprendre. La journée avait été rude, sous la canicule, et là-bas, les gerbes bien alignées témoignaient de leur dur labeur. Ils parlèrent de nouveau de la qualité des juments et de la courbure des reins des femmes, puis s’en allèrent dans un autre établissement, manger une omelette au lard copieusement arrosée de vin.

Il faisait chaud, très chaud. La nuit était parfois déchirée par un éclair lointain. Un orage était possible et on l’espérait presque, tant la chaleur était étouffante et pour ainsi dire accablante. Après le repas, quelques-uns s’endormirent dans un coin de l’établissement, tandis que la plupart sortirent pour aller s’étendre dans le fenil, où ils s’assoupirent bientôt, écrasés de fatigue. Trois rudes gaillards, cependant, restèrent encore un moment à fumer et à deviser de tout et de rien. Ils commandèrent une nouvelle cruche de vin, tant leur soif semblait inextinguible. Ils parlèrent, comme c’est normal, de leur paie, qui était bien maigre, et de la radinerie des patrons. De fil en aiguille, ils se mirent à comparer les différentes fermes où ils avaient travaillé. Hector, le plus âgé, avait roulé sa bosse aux quatre coins du pays et il avait de l’expérience, aussi l’écoutait-on avec attention. Chaque année, après la moisson dans le Nord, il descendait faire les vendanges dans les Pyrénées Orientales, puis quand l’hiver arrivait, il remontait en Provence pour la cueillette des olives. Il se déplaçait à pied, mais trouvait souvent un attelage charitable qui lui permettait d’épargner ses vieilles chaussures. Une fois, il s’était même aventuré jusqu’en Espagne, où on disait qu’il y avait beaucoup de travail. Il s’était ainsi retrouvé dans les grandes haciendas au fin fond de l’Andalousie. Ah du travail, il y en avait, ça c’était sûr ! Et de la chaleur aussi ! Mais pour ce qui était de la paie, c’était encore pire que partout ailleurs. Là-bas, les patrons, qui possédaient des centaines d’hectares, embauchaient à la journée. Chaque matin il fallait faire la file et c’était le contremaître qui choisissait qui il voulait parmi la centaine de pauvres villageois qui attendaient là, certains presque en guenilles. Chacun espérait être pris, mais il y avait forcément des déçus. Et si on avait la chance d’être accepté, il y avait intérêt à se montrer plein d’ardeur au travail si on voulait avoir la possibilité de travailler de nouveau le lendemain. Bref, c’était de l’exploitation pure et simple et le salaire était une vraie misère. Face à cette injustice, Hector n’avait pas réagi. Qu’aurait-il pu faire face à ces puissants propriétaires ? Rien du tout. Mais il en avait gardé un sentiment de haine et une volonté farouche de vengeance. Il s’était mis à fréquenter des gens proches des syndicats et finalement il était devenu une sorte d’anarchiste. Quand il parlait, tout le monde l’écoutait, tant il s’exprimait avec fougue, mais il fallait bien reconnaître que ses interlocuteurs avaient toujours un petit sourire aux lèvres. Sans doute ne comprenaient-ils pas vraiment le sens profond de ses propos et n’étaient-ils frappés que par sa véhémence outrancière, qui en effet avait un côté comique. Plus il parlait en essayant de convaincre son auditoire, plus celui-ci se montrait ironique à son égard, ce qui avait le don de l’exaspérer.

Ce soir-là, cependant, il ne parla pas de politique ni de lutte des classes. Non, il raconta une belle histoire d’amour. Il expliqua comment lui, l’éternel voyageur sans attaches, l’anarchiste contestataire de l’ordre établi, avait finalement craqué pour une fille qui l’avait ensorcelé au point qu’il avait voulu se marier avec elle. Oui, il aurait été prêt à mener une existence des plus rangées et même à passer devant le curé pour faire bénir les anneaux, c’était tout dire. Elle était belle, délicieusement belle, avec une longue chevelure noire qui descendait en cascades jusqu’au milieu du dos. Elle avait des yeux de braise et quand elle vous regardait, on se sentait transpercé jusqu’au plus profond de son être. N’allez pas croire pour autant qu’elle était provocante. Non, au contraire, elle avait un petit côté timide et réservé qui était tout à fait charmant et qui faisait qu’on avait envie de la protéger.

Il l’avait connue l’année dernière, au moment de la fenaison. C’était la fille du fermier pour lequel il travaillait et c’était elle qui venait vers midi apporter le déjeuner, généralement de grandes tartines de pain gris avec une omelette et du vin rosé qui vous chatouillait la gorge quand vous le buviez. Peut-être d’ailleurs était-ce ce vin qui lui avait tourné la tête et qui lui avait donné le courage de parler à la belle. Oh, avec les autres femmes, il n’avait jamais eu peur, et il n’était pas le dernier à leur faire des sourires ou à leur pincer la taille derrière une meule de foin, mais avec celle-là, c’était différent. Il la trouvait tellement belle et tellement « comme il faut » qu’il n’aurait jamais rien entrepris sans la douce ivresse du vin. Certes, il avait bien remarqué qu’elle le regardait à la dérobée quand elle arrivait avec ses paniers chargés de victuailles, mais il l’idéalisait tellement qu’il la considérait comme inaccessible. Pourtant, un jour de grande chaleur, après avoir mangé, pendant que les autres ouvriers faisaient une sieste à l’ombre des haies, il l’aida à tout remettre en place dans ses paniers et là, par hasard, leurs mains se frôlèrent. Ce simple geste suffit et le regard qu’ils échangèrent alors contenait en germe tout ce qui allait suivre. Le lendemain, ils eurent une longue conversation, ponctuée de sourires complices, et le surlendemain fut le jour du premier baiser. La suite, il n’est pas besoin de la raconter. Pendant que tout le monde faisait la sieste, eux deux allaient s’isoler dans un champ voisin, où une petite cabane servant à ranger les outils leur offrait un lieu idéal pour s’aimer tout à loisir. Il se souviendrait toute sa vie du trouble qui fut le sien en déboutonnant pour la première fois le beau chemisier bleu qu’elle portait avec élégance et qui l’avait tant fait rêver. Il se perdit dans la douceur de ses bras et en ressortit tout hébété, amoureux comme il ne l’avait jamais été.

Les jours passèrent les uns après les autres, et arriva le moment fatal de la fin de la moisson. Il allait falloir partir, trouver un autre travail, et abandonner ce paradis terrestre, où l’Eve éternelle s’était donnée sans retenue. L’idée d’une séparation était intolérable, aussi décidèrent-ils de se voir durant les trois nuits qui restaient à leur disposition. Pour elle, ce n’était pas là une chose facile, car elle devait quitter discrètement le logis paternel sans se faire remarquer et le réintégrer à l’aube, ce qui était encore plus compliqué. Elle le fit pourtant sans hésiter, tant sa passion était forte. Ils dormirent dans les meules de foin ou plutôt dormirent bien peu, car chacun voulait faire le plein d’émotions et conserver de l’autre le plus de souvenirs possible. Ils n’en finirent plus de s’aimer, alliant caresses tendres et fougue érotique.

Mais vint le moment, après la troisième nuit, où le soleil pointa irrémédiablement derrière l’horizon, illuminant de ses rayons les champs remplis de gerbes fraîchement fauchées. L’heure du départ avait sonné et elle fut douloureuse. Ils n’en finissaient plus de se dire adieu, de se quitter pour aussitôt revenir s’embrasser dans des étreintes qu’ils auraient voulu voir durer toujours. Mais c’était la dure réalité, il fallait partir, abandonner ces lieux enchanteurs et cet être fragile qui vous regardait avec désespoir, des larmes plein les yeux.

Il fut le plus fort et finit par s’en aller, non sans avoir assuré qu’il reviendrait dès qu’il le pourrait. Oui, mais quand ? Cela, c’était impossible à dire. Il avait beau promettre, il ne pouvait fixer aucune date avec certitude et quand il se retourna une dernière fois, il vit que les larmes coulaient sur le beau visage de celle qu’il aimait. Alors, pour ne pas pleurer à son tour (ce qui assurément ne lui était jamais arrivé), il fonça vers la forêt, où il disparut bientôt. Une page de sa vie venait de se tourner, mais il ne le savait pas encore.

 

Le lendemain, il était déjà loin, ayant marché toute la journée et toute la nuit pour tenter d’oublier son chagrin. Il marcha ainsi une semaine entière et finit par trouver du travail dans une petite exploitation assez pauvre dont les champs remplis de pierres ne semblaient pas fort propices à la culture du blé. Il y resta dix jours, le temps de faucher le peu qu’il y avait à récolter, puis il revint d’où il était parti, afin de faire une surprise à sa bienaimée (et surtout afin de pouvoir la tenir une nouvelle fois dans ses bras). C’est en arrivant au village qu’il apprit la nouvelle. De désespoir, la jeune fille s’était jetée dans un étang et on venait de l’enterrer la veille. On disait (mais les gens sont tellement médisants…) on disait que la pauvrette était enceinte et qu’elle avait commis cet acte de désespoir après avoir été chassée du domicile familial par ses parents.

De tels propos étaient évidemment une pure calomnie. Si elle était morte, c’était de désespoir parce qu’elle s’était imaginé ne jamais revoir celui qu’elle aimait. Il le savait bien, lui. Sans rien dire, il se dirigea vers la maison des parents. Il frappa à la porte, mais il n’y avait personne. Alors, il entra discrètement et déposa sur la table de la cuisine l’argent de ses deux dernières paies. Sur l’enveloppe froissée, il écrivit ces simples mots : « Pour Marie », puis il s’en alla.

Quand il eut terminé son histoire, les deux autres se turent, ne sachant que dire. Lui se leva sans un mot et décida d’aller dormir, mais avant de disparaître dans la nuit, il ajouta encore ceci : « Ca s’est passé ici et elle repose au cimetière du village. Si vous allez voir, vous reconnaîtrez sa tombe, j’y ai dessiné un champ de blé avec un faucheur tenant sa faux. Tout le monde croit que ça représente la mort, mais non. C’est une allusion à notre amour au milieu des moissons.»

 

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