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27/01/2020

La librairie

C’était une librairie où l’on vendait du rêve.

On y trouvait toute la poésie du monde depuis Homère jusqu’à Jaccottet,

Sans oublier Neruda, Pavese et Pessoa.

Il suffisait d’ouvrir un livre pour que les mots s’envolent aussitôt.

Il n’y avait plus qu’à les attraper avec un filet à papillons,

Les regrouper en strophes, et les fourrer dans un sac

Sous l’œil ironique et tendre de la jeune libraire. 

Elle était belle et charmante avec son doux visage et ses petits seins pointus.

Parfois je lui offrais un bouquet de rimes qui la faisait sourire,

Alors elle me donnait quelques livres étranges,

Où l’on parlait d’amour, de voyages, et d’océan.

On respirait les embruns du large rien qu’en humant leur tranche

Et un grand vent marin emplissait soudainement toute la boutique.

Rimbaud n’était pas loin, avec son bateau ivre, guidé par le hasard,

Toujours à la recherche d’improbables Florides.

Derrière ses piles de livres à l’équilibre incertain,

La libraire m’observait à la dérobée.

Je serais volontiers parti avec elle vers ces îles lointaines dont on ne revient pas,

Mais je savais que les rêves étaient ici, entre les pages des vieux livres.

Pourquoi voyager si loin puisque l’ailleurs était dans les yeux, verts comme la mer,

De cette fille au regard tendre et doux ?

Elle dont la chevelure noire tombait en cascades écumantes

Sur sa poitrine secrètement convoitée.

 

C’était une librairie, où l’on vendait du rêve.

 

Littérature, poésie, librairie

Commentaires

J'étais dans cette librairie pas plus tard qu'hier...;-)
Cette fille aux yeux tendres, aurait pu être moi, si je n'avais subitement décidé de me teindre en rousse...
En tout cas, bravo pour cette magnifique ode à la lecture qui fait rêver..
Je vous embrasse
•.¸¸.•*`*•.¸¸☆

Écrit par : Célestine | 31/01/2020

@ Ainsi c'était donc vous hier, avec ces yeux si tendres ? Et moi qui ne regardais que la libraire
:((

Écrit par : Feuilly | 31/01/2020

Une visite très agréable dans une de ces boutiques qui sont, halas, en voie de disparition. Bientôt, on ne verra plus la jeune libraire au doux visage et aux petits seins pointus. J'aime cette charmante apparition qui capte l'attention du visiteur et lui vend du rêve. ''La simplicité est la sophistication suprême'' disait un grand créateur. C'est cette sophistication que je retrouve dans votre poésie.

Écrit par : Halagu | 02/02/2020

@ Halagu : "C'est cette sophistication que je retrouve dans votre poésie." Voilà assurément un beau compliment. Mais je n'ai aucun mérite, car la libraire a vraiment existé. En moins jolie que dans le poème. Et je n'ai jamais osé lui offrir un bouquet de rimes. J'aurais dû, vraiment. Elle n'attendait peut-être que cela, mais on ne le saura jamais. :)))

Écrit par : Feuilly | 02/02/2020

Dans son avant-dernier livre paru sous le titre ''Nos richesses'', Kaouther Adimi, jeune romancière algérienne, raconte la vie d'un libraire peu connu et pourtant personnage clé de la littérature française contemporaine. Edmond Charlot, avait 20 ans quand il a crée en 1935, une minuscule libraire- bibliothèque sous l'enseigne « Les Vraies richesses », au centre d'Alger (la librairie existe toujours) avant de devenir éditeur dans la même ville et à Paris. Cette librairie est devenue rapidement le lieu de rencontre d'écrivains connus ou inconnus à l'époque. Il fût le premier éditeur d'un jeune journaliste: Albert Camus (il a édité Révolte dans les Asturies, L'Envers et l'Endroit , Noces ...) , mais aussi de Jules Roy, Max-Pol Fouchet, Emmanuel Roblès, Armand Guibert ( le premier traducteur français de Pessoa) ... Le livre de Kaother Adimi raconte, de façon romancée et originale, avec grand talent, l'histoire passionnante de cette petite librairie, un ''lieu pour les amis qui aiment la littérature et la Méditerranée''. Quand j'ai lu votre poème ''La librairie'' ( qui un vrai poème, une faculté de langage et d'imagination qui surprend, indépendamment de la rime. Keats se sentait corseté par ''ces rimes trop avides de se placer''  ), je me suis souvenu du roman ''Nos richesses'', un hommage nostalgique à ce lieu de rencontre des amoureux de la littérature et de la culture, un lieu menacé de disparition.

Écrit par : Halagu | 03/02/2020

@ Halagu : les librairies, c'est toute notre jeunesse estudiantine. En ai-je passé des heures, à flâner entre les rayons et à m'imprégner de tous ces noms et de tous ces titres. C'était un enchantement. Tout cela disparaît malheureusement. Même les meilleures libraires ne survivent que par la vente des 4 ou 5 célébrités du moment.
Merci pour cette histoire sur la librairie d'Alger. je suis justement en train de lire Les Chevaux du soleil de Jules Roy :))

Écrit par : Feuilly | 05/02/2020

Les commentaires sont fermés.