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06/11/2007

Marins sur la grève.

« Nous aussi, nous voulons 140% d’augmentation », ont lancé les pêcheurs bretons à Sarkozy qui venait s’enquérir de leurs problèmes (fidèle en cela à sa devise : il faut toujours être là où il se passe quelque chose). Les pauvres, trop occupés à faire leurs comptes après l’augmentation des prix du gasoil, ils ne savaient pas encore que ce n’était pas de 140% mais de 170% que le salaire présidentiel avait été augmenté. L’eussent-ils su qu’ils auraient jeté Sarkozy dans l’océan, il ne faut pas en douter.

Bon, pour les calmer (car l’assemblée des pêcheurs était, paraît-il, aussi houleuse que la mer) que leur a proposé le père Sarkozy ? Ce que propose tout bon néo-libéral :

1) Qu’ils auront une exonération des taxes patronales et salariales (sûr qu’après cela les camionneurs vont se mettre à manifester pour obtenir la même chose, ce qui fera encore une belle pagaille, surtout s’ils choisissent un jour où la SNCF est à l’arrêt).

2) Qu’ils sont invités à moderniser leurs bateaux afin de consommer moins (ce qui permettra aux fabricants de vendre de nouveaux bateaux et aux banques d’octroyer des prêts pour pouvoir acheter lesdits bateaux)

3) Qu’ils pourront répercuter l’augmentation du prix du gasoil sur le prix du poisson (une fois de plus, c’est le consommateur, ce dernier maillon de la chaîne économique, qui paie tout. Comme ce consommateur est aussi un citoyen imposable, il pourra aussi financer à ce niveau le manque à gagner sur les taxes patronales non perçues).

S’il avait eu un bateau à lui, le Président le leur aurait bien prêté (et non pas donné : il ne faut tout de même pas se montrer trop gentil avec des gens qui sont en train de vous reprocher votre salaire), mais même pour ses vacances il est obligé, lui, d’en emprunter un.

Pendant ce temps, au tribunal de Paris, Charles Pasqua reste muet comme une carpe.



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Exemple présidentiel.

Transparence ? Ah ah, je ris. Le grand Calife de Sarkozie, Nicolas I de Nagy-Bocsa, voulait que l’augmentation salariale qu’il s’est généreusement octroyée soit transparente. Et voilà qu’on apprend aujourd’hui qu’elle n’est plus de 140% comme tout le monde l’avait cru, mais de 172% (concrètement, son « salaire » passe de 7.084 euros net par mois à 19.331 euros).
Comment expliquer une telle dérive ? La confusion (voulue ?) provient d’une note de l’Elysée, qui précisait qu’il était « souhaitable que la rémunération du Président soit portée à un niveau comparable à celle du Premier ministre". Or, la rémunération brute annuelle de François Fillon est de 240 000 euros. Tout le monde avait alors comparé ce chiffre avec la "dotation" annuelle du président, fixée elle à 101 488 euros. D’où l’erreur d’appréciation.

L'amendement que l’Assemblée a voté prévoit, que le Président recevra dorénavant, comme les membres du gouvernement, "un traitement brut mensuel calculé par référence au traitement des fonctionnaires occupant les emplois de l'Etat classés dans la catégorie dite hors échelle, au plus égal au double de la moyenne du traitement le plus bas et du traitement le plus élevé de cette catégorie". C’est pourtant bien clair, il n’y a pas à dire.

Pour justifier cette petite augmentation, Le grand Calife a parlé, comme toujours, de « récompense du mérite et du travail bien fait », ajoutant qu’il avait voulu « que la présidence de la République donne l'exemple ». Donc, soit il est persuadé d’avoir bien travaillé, soit il s’octroie une récompense avant même que le public puisse juger du bien fondé de sa politique. Comme les arguments avancés ne semblaient sans doute pas convaincre tout le monde, il a aussitôt ajouté qu’il était pour la "rupture". La rupture, « un mot que j'aime tant", a-t-il précisé. Là, il n’y a pas à dire, pour un changement, c’est un changement, il a raison, bien sûr. Mais pourquoi voulait-il absolument un changement dans son salaire ? Parce que, a-t-il encore précisé, "si l'austérité produisait des résultats, ça se saurait depuis longtemps", ironisant du même coup sur la politique de Chirac qui, lui, avait prôné la rigueur aux Français.

On commence à comprendre la logique. On travaille beaucoup, donc on a un bon salaire. Comme on a un bon salaire, on peut avoir un bon niveau de vie et dépenser beaucoup, ce qui fait tourner la machine économique.

Il était donc normal que, le premier, l’Elysée donne l’exemple de cette nouvelle politique neo-libérale. Allez trouver quelque chose à redire à cela…

Les Français n’ont plus qu’à faire de même. Qu’ils commencent par se lever plus tôt et par travailler davantage et ils verront assurément leur salaire augmenter de 170 %. Avec une telle somme ils ne devront même plus compter sur leurs amis pour passer une semaine au soleil en Méditerranée.



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05/11/2007

Un Conseil des Ministres corsé.

Petite erreur d’interprétation de la part du grand homme (vous voyez de qui je veux parler ?). Récemment, il a voulu présider un conseil des ministres en Corse, histoire sans doute de montrer que la France, qu’on dit si hiérarchisée et si centralisée, est tout de même à l’écoute de ses régions. L’idée aurait pu être bonne en soi si par exemple il avait choisi les Ardennes ou l‘Ariège. Mais la Corse ! Il aurait voulu par sa présence et celle de ses ministres rappeler aux insulaires récalcitrants que l’autorité de la République s’exerce sur tout le territoire sans exception qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Lucide, il devait s’attendre à quelques débordements puisque la présence policière était impressionnante, ce a qui a permis non seulement d’augmenter les frais à charge des contribuables mais aussi de mécontenter tout le monde. Interrogés dans les rues, les habitants d’Ajaccio regrettaient cette manière de procéder peu courtoise et avouaient qu’ils auraient préféré un contact plus direct et plus franc (genre bain de foule et poignées de mains). On les comprend.

Enfin, cela prouve au moins qu’en France (et même en Corse) on peut encore dire du mal de Sarkozy à un journaliste, ce qu’on n’espérait plus étant donné que tous les organes de presse semblent inféodés au pouvoir en place. Méfiance, cependant, cette manière de donner la parole aux citoyens mécontents doit faire partie d’un plan machiavélique visant à nous faire croire que nous sommes encore en démocratie.

Bon, à côté des trois vieilles personnes interrogées, il y avait évidemment des centaines de jeunes beaucoup moins courtois qui s’exprimaient de manière plus directe puisqu’ils étaient en train d’en découdre avec les policiers. Là, les journalistes ne se sont pas approchés pour tendre leurs micros. Cela aurait été bien inutile, car à cause du bruit assourdissant des pétards et des fusées lacrymogènes, on n’aurait quand même rien entendu.

Ceci étant dit, le tsar de Sarkozie, comme les dirigeants des G7 ou G8, ne peut donc tenir sa cour en son Palais sans devoir s’abriter derrière une armée montrant les dents. C’est étrange tout de même la démocratie. Le peuple vote pour quelqu’un qu’il aime bien parce qu’il lui veut du bien et après il irait jusqu’à lyncher l’heureux élu s’il en avait l’occasion. A moins que cet heureux élu n’ait pas tenu ses promesses ? Si, justement, Sarkozy a bien mis en œuvre tout ce qu’il avait annoncé (augmentation de la pauvreté, libéralisation des services publics, réduction de charges patronales, enfermement rapide des récalcitrants, etc.). Le peuple est bien ingrat, je vous le dis, moi.

Heureusement, il y a eu cette affaire de l’Arche de Zoé, qui a permis au petit Nicolas (qui s’ennuie le dimanche depuis que Cécilia est partie) de se faire bien voir (et de se faire voir tout court).
A la télévision suisse (pays neutre s’il en est et donc pas encore inféodé aux idées sarkoziennes), on a admiré son savoir-faire tout en reconnaissant que cette omniprésence médiatique finissait par lasser, surtout qu'elle détournait le citoyen ordinaire des problèmes réels. Les prix de l’alimentation, par exemple, n’arrêtent pas de monter et on nous promet encore de belles augmentations. Je suggère que le SMIG soit revu à la hausse. 140 %, ce serait bien nécessaire, non ?

01/11/2007

De la pension de retraite.

Je reviens sur cette problématique des pensions, évoquée hier. On nous dit donc qu’il est logique de travailler plus longtemps puisque l’espérance de vie augmente. Cette vérité tautologique qu’on nous assène à longueur d’articles de presse mérite d’être décortiquée.

1. Il n’est pas si sûr que l’espérance de vie augmente. Qui dit cela ? Les statistiques du Ministère ? Mais elles sont aux mains de Sarkozy. Des scientifiques, des professionnels de la santé ? Peut-être. Mais on en a déjà vu qui se laissaient acheter. Et puis c’est comme pour les OGM, où il y a autant d’avis favorables que d’avis défavorables, ce qui fait que le commun des mortels ne s’y retrouve plus. Ici, il est à craindre qu’on sera allé interroger justement ceux-là qui disent que l’espérance de vie augmente.
2. Il faudrait ensuite savoir pour qui elle augmente. On se doute bien qu’il vaut mieux être riche, habiter Paris et avoir une villa sur la côté d’Azur plutôt que d’être chômeur d’origine immigrée et de vivoter dans les brouillards de Lille ou de Roubaix.
3. Dans tous les cas, la durée de la vie individuelle tient du coup de poker. Quand on regarde des pyramides d’âge, on se rend compte que le nombre d’habitants reste plus ou moins constant jusqu’à 60 ans, âge où on remarque un recul certain, puis le dessin se termine en flèche jusqu’au sommet. Aux alentours de soixante ans, en effet, il semble bien qu’un petit tiers des vivants aient tiré discrètement leur révérence. Donc, même si, comme on nous le dit et comme c’est bien possible, la moyenne nationale d’espérance de vie est en hausse, rien ne dit que pour moi ou pour vous, chers lecteurs, il en sera de même. Qui peut nous assurer de vivre jusqu’au 82 ans prévus ? Pourtant, il me(nous) faudra bien travailler plus longtemps sans garantie aucune de profiter de ces années supplémentaires, résultat d’un bon niveau de vie et d’une recherche médicale efficace.
4. Par ailleurs, on constate que ces années qui nous sont données en plus, comme un cadeau, doivent être automatiquement consacrées au travail. C’est normal, me direz-vous, puisque les caisses sont vides et que le système actuel n’est pas viable. Tiens, donc et personne ne s’est jamais demandé pourquoi les caisses étaient vides ? Il y aurait beaucoup à dire là dessus. Je soutiens en tout cas que si l’Etat avait été géré en bon père de famille et si on avait constitué une réserve (un fonds de pension ou un fonds de vieillissement, appelez-le comme vous voulez), et bien le système aurait encore perdurer pendant trente ans sans problème (ce qui nous aurait laissé le temps de voir venir et de trouver des solutions acceptables pour tous). Au lieu de cela, on a préféré dépenser, réduire les charges des entreprises (tiens, je croyais que dans le système libéral elles ne devaient bénéficier d’aucun avantage) et s’endetter auprès des banques d’une manière inconsidérée (ce qui fait qu’une bonne partie de nos petits impôts ne sert qu’à rembourser la dette). Non, je crois plutôt que dans notre société tout doit être consacré au travail, c’est une philosophie de vie aussi enracinée qu’elle est arbitraire (les seigneurs du Moyen-Age, par exemple, se considéraient comme déshonorés s’ils devaient travailler). Ainsi donc, les quelques misérables années que je pourrais peut-être gagner sur la mort devront être consacrées à mon asservissement et non à mon épanouissement personnel. Tout qui se rebellera contre cette vérité sera traité de profiteur et de carottier.
5. Enfin, me faire payer pour cette année de vie en plus, cela revient bien à poser l’équation : cotiser ou mourir. Si je veux vivre davantage, je dois payer le prix. C’est donc bien la vie que l’on est en train de taxer là. Je m’étonne que Sarkozy, qui est tout de même un grand homme (si, si, je le pense sincèrement) ait focalisé son attention sur le terme de notre vie. Il aurait plutôt dû en considérer le début et taxer tous les nouveaux nés pour avoir osé exister. Bien sûr, me direz-vous, ces petits êtres n’ont pas demandé à venir au monde, il serait donc illogique de les punir par un impôt. Certes, mais d’un autre côté le catholicisme nous a bien préparés à une faute originelle, alors puisque nous avons bien conscience de notre culpabilité première, autant en profiter et taxer un maximum les nouveaux candidats à la vie. En plus, ils viennent prendre notre place, ce qui mérite assurément une punition exemplaire. Ils veulent vire ? Et bien qu’ils paient. Raisonnement absurde ? Oui bien, sûr, mais pas plus absurde que celui qui nous oblige à payer pour vivre plus longtemps.

31/10/2007

Autre bonne nouvelle

Je lis à l’instant ce communiqué de l’Agence France Presse que les journaux ne semblent pas pressés de répercuter. Alors voici l’information :

« PARIS (AFP) — La cote de confiance de Nicolas Sarkozy baisse de quatre points par rapport à octobre à 53%, et celle de François Fillon chute de huit points à 44%, selon le baromètre TNS-Sofres pour le Figaro Magazine à paraître samedi 3 novembre, rendu public mercredi ».

Ainsi donc Nicolas n’était peut-être pas grand par la taille, mais au moins il occupait les sommets dans les sondages. Il semble bien que ce ne soit plus le cas, ce qui fait qu’il ne lui reste plus grand chose. De plus 60 % des Français souhaiteraient un nouveau referendum sur le raccourci de traité européen que l’on est occupé à faire passer derrière notre dos. Lui qui avait cru qu’en votant pour sa personne le bon peuple acceptait de fait ce traité (il l’a dit, je l’ai entendu), il va devoir revoir sa position. Qu’il se dépêche à le ratifier avant de passer en dessous des 50%. Il n’a d’ailleurs pas à le relire puisque le nouveau traité n’est qu’un résumé de l’ancien. Même Giscard l’a dit et il doit savoir de quoi il parle car, jouissant d’une retraite bien méritée dans son château de Chamalières, il a sûrement eu le temps de comparer les deux versions.

Et qu’est-ce que cela implique, finalement, ce traité ? Beaucoup de choses, mais notamment la privatisation des services publics. On s’y prépare déjà. Ainsi en Belgique, il n’y a peut-être pas de gouvernement, mais il y a assurément des idées. On apprend que La Poste a imaginé de se passer des services de 7.000 facteurs (ce qui, vu l’exiguïté du territoire est énorme) et de les remplacer par… des ménagères sans emploi. D’abord elle seront obligées de se lever tôt et ce sera bien fait pour elles mais surtout on pourra les payer beaucoup moins cher, ce qui est assurément intéressant quand on est un patron. Voilà donc un pays où les hommes de lettres ne sont plus à l’honneur…

ceci dit, il y avait moyen de trouver du personnel qualifié encore moins cher:

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Bonnes nouvelles

Dans la presse d’aujourd’hui, rien que de bonnes nouvelles.

Tout d’abord, le petit Nicolas (prince de Sarkozie et actuellement porteur de couronne au royaume de France), a non seulement demandé une augmentation de salaire de 140 % mais en plus il l’a obtenue. Il n’y a pas à dire, quand on se lève tôt et qu’on parcourt la planète dans tous les sens, on est récompensé. Au moins il y a une justice sociale.

A propos de justice sociale, les syndicats en sont encore à se demander s’ils n’organiseraient pas une nouvelle grève pour défendre les régimes spéciaux de pension. Ils sont en retard. Le gouvernement a déjà expliqué qu’il fallait 40 ans de cotisation pour tout le monde afin d’être équitable. Depuis, il défend déjà l’idée que ces 40 ans doivent devenir 41 ans. Evidemment, si tous les pensionnés veulent vivre un an de plus sur le compte de la collectivité, il ne faut tout de même pas exagérer. Mourir ou cotiser, il faut choisir. Encore quelques semaines et on proposera le chiffre de 45 années pour une carrière normale. Il faut être logique : pourquoi n’y aurait-il que le prince de Sarkozie qui devrait se lever tôt ?

Hier, justement, ledit prince s’était rendu en Corse, qui est manifestement la nouvelle île à coloniser (à moins qu’il n’ait rendu visite à ses anciens beaux-parents et à la mafia locale). «On va vous aider à vous développer et on va faire de la Corse un exemple de réussite républicaine », a-t-il dit sur le même ton qu’il employait jadis dans les banlieues, quand, encore petit candidat, il disait «cette racaille, on va vous en débarrasser ». Il a donc parlé d’investissements. Veut-il investir dans les appartements touristiques de masse et remplacer la côte sauvage par un boulevard digne des bords de Seine tout en faisant plaisir à ses amis entrepreneurs ? Probablement pas. Enfin il n’a rien dit de tel, craignant sans doute qu’on ne place une bombe sous sa voiture (il est sage, car c’est le contribuable qui l’a payée). Non, ce qu’il a proposé, c’est de remettre en question la notion de service public dans les transports. L’Etat n’a plus à assurer des lignes de bateaux régulières (qui coûtent cher), il doit laisser la place à des firmes privées qui font sans doute cela bénévolement puisque le prix de leur billet est moins cher. Donc, en disant, « on va vous aider », Sarko pensait surtout au portefeuille de l’Etat français. Qu’il est brave, tout de même. Les Corses étant presque des Français, ils vont y gagner aussi.

Autre bonne nouvelle, le secrétaire d’Etat à la consommation, Luc Chastel, voudrait privatiser le secteur de l’énergie, afin que le Royaume ne soit plus en retard par rapport aux autres pays européens. Ce serait le principe de l’offre et de la demande, le producteur proposant son prix et le fournisseur l’acceptant ou non. Ce système génial a déjà permis à la Belgique d’augmenter la facture de gaz des particuliers de 30 %, ce qui est remarquable. On aura compris qu’avec ce principe ce n’est pas toujours le consommateur qui gagne, mais au moins il y a toujours un gagnant.

Du côté de l’enseignement, on sait que les élèves du primaire n’iront plus à l’école le samedi et qu’ils pourront donc se lever plus tard. Pourquoi me direz-vous les travailleurs doivent-ils se lever tôt et travailler plus longtemps (voir chapitre des pensions ci-dessus) alors que les enfants doivent faire le contraire ? C’est pour mieux apprendre, nous dit le ministre. Moins on étudie et plus on sait donc. Le système d’apprentissage est donc inversement proportionnel au système de production. Je ne le savais pas (de mon temps on passait encore beaucoup d’heures à l’école) mais le ministre, lui, le savait et c’est ce qui compte. Ce n’est pas pour rien qu’il est ministre. C’est évidemment pour sa compétence qu’on l’a nommé et pas parce qu’il connaissait Cécilia (imaginerait-on une chose pareille ? Il n’y aurait plus de justice).

Les élèves travailleront moins, mais pas les instituteurs, nous a-t-on assuré. Il y a cependant 11.000 postes à supprimer (raison d’économie oblige, c’est normal, il faut être rentable). Oui, mais où et comment ? On imagine déjà de limiter le nombre de redoublement. Ainsi cela fera moins d’élèves au total (puisque la scolarité sera plus courte), moins d’instituteurs et de professeurs et plus d’amour propre pour les jeunes puisqu’ils « n’échoueront » presque plus. Sans doute sortiront-ils avec un diplôme sans avoir maîtrisé toute la matière, mais tout ce qui compte, c’est le diplôme, non ? C’est bien pour cela que Dati avait triché en disant qu’elle détenait celui qu’elle n’avait pas. Mais bon, il faut oser parfois si on veut avoir du boulot. Au moins elle n’est pas chômeuse, elle.

Et les universités dans tout cela ? Les étudiants (surtout ceux de lettres, ces éternels rouspéteurs) continuent à désapprouver le principe de la décentralisation (qui permettra aux régions riches d’avoir un bon niveau d’enseignement et aux régions pauvres de ne plus avoir d’enseignement du tout) ainsi que celui de la responsabilité financière (qui consiste à gérer une université comme une firme privée, autrement dit à ne faire que ce qui rapporte). Ils ont tort, ces étudiants. Quel meilleur moyen de les préparer à la vie des grandes entreprises si ce n’est en rendant leur école semblable à ces grandes entreprises (toutes grandes fournisseuses d’emploi et générant des bénéfices plantureux, comme chacun sait). Vous me direz que les étudiants en lettres ne se retrouveront pas dans ces grandes entreprises mais dans l’enseignement. Comme il n’y a plus de postes de professeurs de prévu, qu’on supprime une fois pour toutes ces sections qui ne servent à rien.

Le groupe franco-américain Alcatel-Lucent, quant à lui, parle de supprimer 4 000 postes, mesure qui viendra s'ajouter à celle déjà mise en oeuvre en février dernier : 12 500 postes avaient été supprimés, dont 1 468 en France. Le but est de réduire les frais afin de dégager (enfin ) des bénéfices (Le sud-coréen Samsung Electronics a de son côté annoncé un chiffre d'affaires de 100 milliards de dollars en 2007, ce qui est nettement mieux). Pour le moment, on ne sait pas encore dans quelle proportion la France sera touchée par ces licenciements. On espère qu’elle le sera beaucoup, ce qui permettra à quelques travailleurs de se lever un peu plus tard. Le libéralisme, en effet, ne vous demande pas des sacrifices toute votre vie, il ne faut pas croire ceux qui vous disent cela.

Dans la presse internationale, on apprend que le barrage de Mossoul en Irak risque de s’effondrer. Cela provoquerait une vague de 20 m de haut qui irait jusqu’à Bagdad et occasionnerait la mort de centaines de milliers de personnes. C’est, paraît-il, les fondations du barrage qui ne sont pas solides. Un petit incident (une bombe américaine larguée là par erreur, par exemple) et c’en est fini des opposants au régime de Bush. Magnanimes, les Américains ont déjà proposé de le reconstruire. Voilà qui va donner de l’emploi et en cette période de crise il faut s’en réjouir. De toute façon les Irakiens ont de quoi payer puisqu’ils ont du pétrole. C’est même nous qui le leur achetons.

Les vrais faux orphelins du Tchad ne seront plus vendus en France pour la modique somme de 2.400 euros. Il faudra attendre la reprise des hostilités pour avoir de vrais orphelins labellisés qu’on pourra revendre plus cher. Kouchner, le sauveur, veut d’ailleurs un couloir humanitaire pour résoudre le problème. Il défend aussi la présence de Total en Birmanie, société, qui, si elle s’en allait de ce pays, laisserait un vide économique sans précédent et fort préjudiciable à la population. Nous n’en avons jamais douté. Le côté philanthropique de Total n’a jamais échappé à personne.

27/10/2007

Le monde comme il va

On apprend que Jean-Marie Colombani, l'ancien président du directoire du Monde, a négocié avec l'actuelle direction des indemnités de licenciement d'environ 950.000 euros. En fait, son contrat prévoyait qu’en cas de rupture il devait rester journaliste tout en conservant son salaire de patron.

Le président de la Société des rédacteurs du Monde (SRM), Jean-Michel Dumay, a jugé ces indemnités "indécentes". "Evidemment, elles représentent un quart du bénéfice d'exploitation du groupe. « C'est impudique sur le plan social, au regard des efforts qu'on a faits et qu'on va sans doute encore devoir faire", a ajouté M. Dumay.

Il a raison. Surtout qu’au même moment Alain Minc annonce que le journal sera déficitaire en 2007. La solution ? Comme d’habitude : prendre des mesures d'économies sur toutes les charges.

Décidément, le monde n’est plus ce qu’il était…

25/10/2007

De l'avant-garde (ou la nouvelle garde du Président).

Il n’y a pas si longtemps, Madame Lagarde était inconnue en France et plus particulièrement en politique. Avocate, elle avait fait toute sa carrière aux États-Unis. Elle fut présidente du Comité stratégique du premier cabinet mondial de droit des affaires (le cabinet Baker & McKenzie à Chicago). En avril 2005, elle entra au Conseil de surveillance de la multinationale néerlandaise ING Groep. Remarquée par JP Raffarin, elle quitta alors les Etats-Unis pour devenir ministre du Commerce extérieur dans le gouvernement de Dominique de Villepin. Cela suppose de sa part un revirement complet, puisqu’elle n’avait rien fait d’autre jusque là que défendre les intérêts des multinationales états-uniennes contre les entreprises françaises et européennes.

Il faut savoir aussi qu’elle a milité au sein du CSIS (Center for Strategic & International Studies), un « lobby » pétrolier. Là, elle présidait une commission USA/UE/POLOGNE, dont les préoccupations étaient la libéralisation du marché polonais. Dans ce cadre, elle a été amenée à défendre les intérêts de Boeing et Lockheed-Martin contre ceux d’Airbus et de Dassault. Tout cela se solda par la vente, à la Pologne, en avril 2003, pour 3,5 milliards de dollars, de 48 chasseurs F-16 Lockheed-Martin dont ce pays n’avait aucun besoin. Pour payer, le gouvernement polonais puisa dans les fonds qu’il avait reçus de l’Union européenne et qui étaient destinés au secteur agricole. On aurait pu espérer une autre attitude de la part de la Pologne, à peine arrivée dans l’Union.

Notons en passant que le président de Lockheed a été par ailleurs le principal bailleur de fonds du Comité pour la libération de l’Irak. Irak où nous avons retrouvé l’armée polonaise derrière Georges Bush. Tout se tient. Cela a permis à Bush d’opposer la « vieille Europe », représentée par la France et l’Allemagne, timide et opposée à la guerre et la « nouvelle » Europe (en gros les pays de l’Est), touts prêts à s’engager à ses côtés pour établir un nouvel ordre mondial. Ce sont donc bien les citoyens européens, avec leurs impôts, qui ont indirectement permis à l’armée polonaise de s’équiper et d’entrer dans un conflit qu’elle désapprouvait, tout cela pour le plus grand profit des USA (puisqu’une des multiples raisons de l’engagement en Irak était d’y supplanter les firmes françaises et allemandes comme Thomson et Siemens).
Mais revenons à Mme Lagarde. Une fois dans le gouvernement de de Villepin, elle a aussitôt déclaré qu’il fallait réformer le droit du travail qui, « constituait souvent un frein à l’embauche et à un certain nombre de décisions d’entreprendre ». Tout un programme.
En juillet 2007, on a pu l’entendre, devant l’Assemblée, faire l’éloge du travail (égratignant au passage Paul Lafargue et son « Droit à la paresse » ainsi que les 35 heures).
Dans un article daté d’hier, Le Figaro s’est félicité de la présence d’une femme au G7. Il s’est cependant montré beaucoup plus discret sur le passé de cette femme, dont la vie a surtout été consacrée aux firmes privées, aux Etats-Unis de surcroît. Et on va nous faire croire qu’elle a renoncé à un plantureux salaire pour venir défendre les intérêts des Français. Il ne faudrait tout de même pas nous prendre pour des naïfs.

22/10/2007

Une île

« Il n’y a plus de déserts. Il n’y a plus d’îles. Le besoin, pourtant, s’en fait sentir. Pour comprendre le monde il faut pouvoir se détourner ; pour mieux servir les hommes, les tenir un moment à distance. Mais où trouver la solitude nécessaire à la force, la longue respiration où l’esprit se rassemble et le courage se mesure ? »

Camus, l’Eté ("le Minotaure ou la Halte d’Oran")

Je me demande parfois s’il est encore possible de rester soi-même. Le monde, autour de nous s‘agite. Partout, ce ne sont qu’attentats, tueries, révolutions, contestations, répression. Parlant tout à tour de Gaza, de l’Irak, de l’Iran, du Liban, de la Birmanie, de la Turquie, du Kurdistan, les journalistes nous donnent le tournis. Certes, il faut se tenir au courant, mais d’un autre côté, cette immédiateté de l’information nuit à notre jugement. Nous ne faisons plus que « zapper » d’une catastrophe à l’autre, sans avoir même le temps de connaître les tenants et les aboutissants d’une affaire. Nous sommes noyés par la surabondance des informations. Sans compter que celles-ci sont partiales et se veulent telles. Impossible de faire confiance à qui que ce soit. Tout est orienté et déformé afin de nous conduire dans une direction. Rien n’est jamais gratuit. Comment ne pas se méfier quand on sait que les journaux comme les chaînes de télévision appartiennent à de grands groupes proches du pouvoir ? Et en plus de tout cela, on vient nous saouler avec détails sans intérêt, comme le divorce de son éminence Nicolas de Nagybocsa. Il y a fort à parier que demain les magazines « people » seront pleins de photographies nous montrant la nouveau roi de Sarkozie en tain d’échanger un sourire avec quelque star de cinéma ou quelque princesse en mal d’amour. Manière habile de nous faire oublier les vrais problèmes : l’emploi qui se fait rare, la législation sociale qui est revue à la baisse, les salaires qui ne suivent pas l’inflation, les empires financiers qui se créent sur notre dos, etc.

Mais en dehors de tout cela (que ce soit cette actualité internationale omniprésente et désespérante ou nos conditions de vie immédiate), qui sommes-nous, en tant qu’homme ? Où est le vrai fondement de notre être ? Sans vouloir revenir au recueillement des moines du Moyen-Age, moi qui suis bien peu religieux, je me mets cependant à rêver d’un monde où l’on pourrait enfin réfléchir calmement et finalement proclamer, après mûres réflexions, ce que l’on a à dire. Car la vie est courte et comme disait l’autre il n’y en a qu’une. Il est donc important de lui donner un certain sens, du moins à nos propres yeux. Certes, nous ne transformerons pas le monde (ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’engager et combattre toutes les injustices), mais il conviendrait au minimum d’être en paix avec nous-mêmes. La seule manière d’y arriver est d’exprimer ce que nous sommes vraiment. Chaque être est unique et il sent obscurément qu’il est dans ce monde pour clamer sa vérité propre. Pour ce faire, il faut savoir prendre du recul avec les événements, mais pour pouvoir prendre du recul, il faut savoir s’isoler et boucher provisoirement nos oreilles à la rumeur du monde.

Où trouverons-nous une île ? Existe-t-elle seulement ?



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12/10/2007

Voyage en URSS

Monsieur Nicolas de Boca, petit tsar de Sarkozie, a rendu visite au grand Tsar de toutes les Russies. Mal lui en prit car la presse soviétique, au lendemain de sa venue, s’est montrée fort critique envers sa personne. Elle a notamment ironisé sur ses nouveaux talons, qui lui permettent désormais de regarder dans les yeux les plus grands de ce monde. Elle a parlé de ses mimiques disgracieuses et surtout elle a cité, en pouffant de rire, la phrase historique qu’il a prononcée en arrivant au Kremlin : « Cela fait très longtemps que j'avais envie de venir ici. Se réveiller sur la Place Rouge, ce n'est pas rien pour moi ». Phrase courtoise en soi et remplie de bonnes intentions. Le seul problème, c’est que la Place Rouge n’était pas visible des fenêtres de sa chambre d’hôtel. Et le journaliste d’ajouter : « On a commencé à se demander où le président Sarkozy avait bien pu se réveiller pour voir alors la Place Rouge. (…) On peut voir la Place Rouge depuis la fenêtre du Mausolée (de Lénine, au milieu de la place). Mais le Mausolée n'a pas de fenêtre. »

Lors de la conférence de presse qui a suivi sa visite, Monsieur Nicolas de Boca, petit tsar de Sarkozie, a parlé du souhait des investisseurs français d'entrer dans le capital de Gazprom",
Nezavissimaïa Gazeta, a paraît-il résumé ce propos en titrant :"Rêves et fantaisies de Nicolas Sarkozy ». Evidemment ! Qu’espérait-il ? Lui qui avait critiqué Poutine lors de sa campagne électorale et qui, depuis qu’il est élu, ne fait que se rapprocher de ses amis américains, devait-il s’attendre à ce que la Russie l’invite à partager les bénéfices de ses immenses réserves naturelles ? Tout cela au moment même où Poutine nationalise le plus possible… Allons, on a beau être le chantre du libéralisme, il est des pays où on n’est pas écouté.

Si on ajoute à tout cela qu’il n’y a eu, durant cette visite, aucune avancée concrète sur l'Iran, le Kosovo ou la coopération économique, on peut dire que ce fut un déplacement inutile.




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02/10/2007

A contre-courant.

Etonnants ces moines qui défient la junte militaire en Birmanie. Chez nous, l’Eglise catholique ne nous a pas toujours montré de pareils exemples. Ainsi, l’attitude de Pie XII pendant la guerre de 40-45 a été suffisamment ambiguë pour rester dans les mémoires.
Mais ne remuons pas le passé et saluons les moines bouddhistes qui veulent rétablir la démocratie.

Tout cela est très bien, sauf que quand on y regarde d’un peu plus près, on se rend compte qu’il y a lieu de nuancer. Ainsi, il y a tout de même des années que cette junte est au pouvoir et on n’avait jamais vu le clergé manifester beaucoup d’opposition. Pourquoi ce changement d’attitude ? Et bien tout simplement parce que les moines vivent de la charité publique. Ils ne travaillent pas et c’est la population qui les nourrit sous forme d’aumônes (un peu comme l’ordre mendiant des Franciscains chez nous autrefois). Or il se fait que cette population est de plus en plus pauvre, du fait de l’augmentation des prix. Elle a donc tendance à moins donner aux moines, lesquels sont donc obligés de s’opposer au régime en place s’ils veulent survivre. C’est donc moins l’instauration de la démocratie qu’ils recherchent que des moyens de subsistance. D’ailleurs, si on les laissait faire, il y a fort à parier qu’ils instaureraient un régime théocratique (lequel, soit dit en passant, vaudrait sûrement mieux que la pseudo-démocratie que les Etats-Unis ont instauré en Irak, mais ceci est une autre histoire).

Donc, nous voilà déjà un peu refroidis quant à l’attitude des moines. Passons maintenant en revue les échos que la presse occidentale a donné des événements. Chaque fois qu’une dictature vacille, tout le monde applaudit et il faut s’en réjouir. Je n’agis pas autrement et il est clair que si les moines devaient faire tomber ce régime, même si c’est pour des motifs douteux, j’en serais le premier heureux. J’ai assez critiqué ici même l’attitude scandaleuse de Kouchner (lequel n’était pas à l’époque ministre des Affaires étrangères) qui a soutenu et tenté de justifier le rôle ambigu de Total dans ce pays. Donc acte. Si la junte s’écroule (mais elle ne montre pas le moindre signe d’affaiblissement), ce sera une bonne chose pour la population. Mais plus nos journaux parlés ou écrits en parlent et plus je me méfie. C’est un vieux réflexe qui m’est venu au moment de la chute du Shah d’Iran (oui je sais, on commence à vieillir). A l’époque aussi tout le monde se félicitait (en oubliant de dire que ce Shah avait osé s’opposer à l’Amérique en réclamant une partie des bénéfices du pétrole pour son pays). Une fois qu’il fut parti, le régime des Ayatollahs se mit en place et la situation ne fut pas meilleure pour le peuple iranien. Donc, avant d’applaudir, voyons ce qui pourrait se passer en cas de retour de la démocratie en Birmanie.

La chose est assez prévisible. Il doit y avoir du gaz ou du pétrole dans ce beau pays, puisque Total y est déjà implanté. Donc, ce sera la ruée vers l’or (noir). Auparavant, il faudra éloigner les Chinois (car la nouvelle politique est d’affaiblir ses futurs concurrents avant qu’ils ne deviennent trop puissants). Les tentatives américaines à l’ONU pour imposer des sanctions économiques doivent être comprises dans ce sens. On se moque bien du fait que de telles sanctions réduiraient à la misère une population par ailleurs innocente (voir l’embargo imposé à l’Irak avant la deuxième guerre du golfe, dont les enfants furent les principales victimes tandis que la richesse de Sadam Hussein continuait de croître). Ce qui compte, en fait, ce serait d’obliger la Chine à ne plus acheter son énergie dans ce pays et à se retirer purement et simplement, laissant ainsi la place libre pour les firmes occidentales. La Chine, on l’a vu, a prudemment refusé de telles sanctions, arguant du fait que la Birmanie n’était pas une menace pour la région et qu’il n’appartenait pas à la communauté internationale de s’impliquer dans les affaires intérieures d’une nation (elle a sans doute bien peur qu’on ne fasse de même pour elle).

Remarquons en passant qu’une telle attitude prudente est à l’opposé des thèses de Kouchner, lequel a toujours milité en faveur de l’ingérence humanitaire. Il a ainsi justifié par le passé l’intervention en Serbie. C’est d’ailleurs sans doute pour cela qu’on l’a nommé ministre aujourd’hui, sans qu’on sache si on se sert de lui et de ses idées généreuses ou s’il est complice du système.

Mais revenons à la Birmanie. Ce pays a été victime, ces dernières années, de plusieurs attentats. Sont-ils le fait de l’opposition qui veut renverser le régime, de la junte elle-même (qui peut alors prendre prétexte du climat d’insécurité ambiant pour renforcer la répression) ou, pourquoi pas, des Etats-Unis eux-mêmes, lesquels prépareraient ainsi leur arrivée en Asie ? La chute de la junte leur permettrait de couper l’oléoduc chinois et de reprendre le contrôle des voies maritimes de la région. Histoire à suivre, donc.



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01/10/2007

De la gratuité des soins

Mercredi dernier, 26 septembre, mon calendrier m’indiquait que l’on fêtait les saints Côme et Damien. N’étant point trop féru d’histoire religieuse et d’hagiographie, ayant peu lu la Légende dorée, je ne connaissais donc rien sur ces personnages. Cependant, intrigué par le fait qu’on les fêtât le même jour et qu’ils fussent ainsi rassemblés dans une sorte de gémellité spirituelle , je me suis mis à la recherche d’une explication. Voici ce que j’ai trouvé.

Côme et Damien étaient deux médecins inséparables du IVe siècle. Originaires d’Arabie, on pourrait dire qu’ils avaient inventé la Sécurité sociale puisqu’ils soignaient leurs patients gratuitement. Ce comportement digne qu’on le souligne (car en notre époque mercantile, tout s’achète et se vend, autrement dit rien ne se donne), me les rendit aussitôt sympathiques.

Pour notre culture, retenons qu’on les qualifie parfois de «médecins anargyres» ,du grec an (préfixe privatif) et argyrios (argent). Je trouve ce mot très beau. Des médecins anargyres, cela sonne bien. Lors des persécutions de Dioclétien, les pauvres jumeaux subissent le martyre à Cyr, en Syrie, là où ils pratiquaient leur art. Comme quoi le fait d’exercer gratuitement ne plaisait déjà pas à tout le monde, même si nous n’étions pas encore dans la logique du « tout à l’argent ». Par al suite, ils furent considérés comme les saints patrons des médecins et des chirurgiens.

Pour être honnête, il faut ajouter tout de même qu’ils ne manquaient pas de convertir à la foi nouvelle les patients qu’ils soignaient. Cela enlève un peu de panache à la beauté de leur geste, qui n’était peut-être pas aussi gratuit qu’on ne le pense. Reste à savoir s’ils agissaient ainsi pour attirer la sympathie des foules (profitant ensuite de leur renommée pour pratiquer des conversations) ou si au contraire ils voulaient vraiment apporter un remède à la douleur physique des gens, n’agissant que par « amour de l’humanité » (comme le Dom Juan de Molière, lorsqu’il donnait une pièce d’or à un pauvre). Le doute persiste. La double interprétation est possible, ce qui convient bien à des jumeaux, finalement.


2463c2907f0fe2c0db4b111444b9dc3c.jpgLe miracle de saint Come et saint Damien de Fra Angelico (Florence)
Les deux saints médecins, saint Come et saint Damien, greffent à un riche marchand toscan amputé la jambe très foncée d'un esclave arabe

Plaques minéralogiques. Vers une nouvelle héraldique?

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A partir du 1er janvier 2009, les numéros de départements figurant sur les plaques d’immatriculation vont disparaître. En effet, il a été décidé d’attribuer un "numéro à vie" à chaque véhicule. La localisation des différents propriétaires éventuels d’un même véhicule devient donc sans intérêt. Cependant, "pour tenir compte de l'attachement des automobilistes à leur territoire, ils pourront, s'ils le souhaitent, faire suivre le numéro d'une identification locale". Cette référence facultative pourra soit être le numéro du département, soit un logo. Elle apparaîtra sur la partie droite de la plaque, symétriquement au logo européen.

Il faut bien vivre avec son temps et on ne va pas ici se répandre en jérémiades sur l’abandon programmé du numéro de département (car dans les faits bien peu de personnes vont l’apposer, même si cela reste permis).

Notons cependant que 64% des Français disent regretter cette décision. Si on n’interrogent que les femmes, on atteint même le chiffre de 67% (ces dames seraient donc plus conservatrices ou simplement plus sensibles à l’héritage du passé ?). Dans les campagnes, on passe même à 70%. Cela veut donc tout de même dire qu’on ne tient guère compte de l’avis des populations dans nos sociétés dites démocratiques.
Le Ministère met en avant des arguments logiques : éviter du travail inutile lors d’un changement de propriétaire et mieux contrôler le nombre réel de voitures en circulation. Evidemment, quand on prend une mesure, il faut bien la justifier. Notons cependant que les arguments avancés ne sont pas très pertinents. En Belgique, par exemple, un propriétaire peut, s’il le désire, conserver la même plaque toute sa vie. Il suffit d’encoder, dans le fichier central du Ministère, les références du nouveau véhicule et de les associer à l’ancienne plaque. Ce système permet donc de limiter l’attribution croissante de nouveaux numéros tout en sachant exactement qui possède quoi (puisque l’ancien véhicule est soit déclassé, soit revendu à un tiers).
La réalité, c’est que ce n’est pas la France qui a décidé toute seule de modifier ses plaques minéralogiques. La mesure, en fait, est européenne. Il faut tenter d’uniformiser les plaques sur tout le continent. Ainsi elles devraient toutes être noires sur fond blanc, avec le logo européen bien en vue à gauche (or on lit de gauche à droite), logo sous lequel on retrouvera la lettre attribuée à chaque pays (F pour la France), mais comme une simple indication. Nous serons donc d’abord européens, puis ensuite français, allemands ou espagnols. C’est donc là une manière habille de nous forcer à dépasser nos anciens clivages nationaux. Dans un tel contexte d’uniformisation, on comprend que les références régionales deviennent superflues.
Quelque part, c’est paradoxal, puisque l’Union européenne n’arrête pas de nous parler de l’Europe des régions. Quand on y réfléchit d’avantage, on voit qu’il y a moyen de trouver une explication. D’un côté, il s’agit d’affaiblir les états nationaux (lesquels ont une fâcheuse tendance, celle de multiplier les règles visant à protéger leurs citoyens, ce qui constitue, du point de vue libéral, une entrave à la libre circulation des biens et des richesses). Il convient donc de mettre en avant les régions, lesquelles seront de toue façon trop faibles pour imposer une législation efficace (sur la protection du travail, par exemple) face à l’appétit des grands groupes financiers ou industriels. De plus, cette émergence des régions permet de rassurer les citoyens, qui commencent à se sentir un peu perdus dans la maison Europe, laquelle ne cesse de s’agrandir. Ils se raccrochent donc à leur région comme à la seule entité qui a encore un sens pour eux sur le plan humain. On sera donc d’abord breton ou auvergnat, puis européen (et éventuellement français pour les attardés qui ne parviennent pas à évoluer). Il est donc logique pour l’Europe de promouvoir les régions, ne serait-ce que pour imposer sa propre autorité supranationale.

Dans le cas des plaques de voiture, cependant, les mentalités n’ont pas encore assez évolué pour faire disparaître l’appartenance nationale au profit de l’appartenance régionale. On a donc joué sur le logo européen et l’uniformisation pour tous (noir sur fond blanc. La Belgique, avec ses plaques caractéristiques, rouge sur fond blanc devrait aussi évoluer). S’agissant d’un signe visible et lisible, la plaque, comme les anciens blasons en héraldique, se veut avant tout un symbole d’appartenance. Nous sommes donc tous européens.

Tout ceci étant dit, personnellement, je regretterai l’absence de référence aux départements. Il y avait quelque chose d’exotique à identifier ainsi des voitures provenant de Corse (2A), du Midi (83, le Var ; 84, le Vaucluse), des monts d’Auvergne (63, Puy de Dôme) ou de ces régions à la nature sauvage, pas encore tout à fait domestiquée (48, la Lozère ; 43, la Haute-Loire), etc. Ce petit plaisir nous est donc enlevé. Il a été sacrifié, comme beaucoup d’autres, sur l’autel de la globalisation. Allons, marchons (ou plutôt roulons) vers le monde meilleur de demain, celui du grand marché qui fera du moins le bonheur de certains (si pas le nôtre).

24/09/2007

Sondages...

« Le président de la République perd 8 points d'opinions favorables. 61 % des personnes interrogées se disent satisfaites de sa politique contre 36 % (+7 %) qui s'estiment mécontentes. Il s'agit de son plus mauvais score depuis son élection en mai dernier. »

Une fois les cent jours passés, c’est classique. L’usure du pouvoir commence à se faire sentir. Certains sont déçus par les promesses non (encore) tenues, d’autres sont en désaccord avec les mesures adoptées, bref tout le monde a un regard plus critique. L’omniprésence médiatique du Président permettra sans doute de retarder un temps ce début de lassitude, mais quand les gens en auront vraiment marre, ils ne supporteront plus du tout sa présence quotidienne sur le petit écran. La chute n’en sera que plus douloureuse.

21/09/2007

Réflexion

Et revoici l’automne qui pointe son nez avec, ironie du sort, un rayon de soleil. Or qu’y a-t-il de neuf, sous ce soleil ? Rien de très bon, assurément.

En effet, que nous promet Monsieur Kouchner ? Qu’il y aura inévitablement la guerre au Proche-Orient et que nous y serons impliqués.
Que nous annonce le sieur Sarkozy-Bocsa ? Qu’il part lui aussi en guerre, mais contre nos honteux privilèges. Il nous faudra désormais travailler plus pour gagner moins et quant à nos retraites, on verra…
Que sait-on de Mme Rachida Dati ? Qu’elle est incompétente.
Comment voit-on le Premier Ministre ? Comme un homme fini.

Alors, si on part en guerre avec des incompétents et des hommes finis, il est fort à craindre que la victoire ne soit pas pour demain.

Quand la France rejoint l'Empire.

Ci-dessous, un article de Bernard Langlois consacré à « Nicolas de Neuilly-Bocsa » et à sa politique internationale. Comme il fait un bon résumé de la situation et que son analyse rejoint la mienne, cela me dispense d’écrire moi-même sur le sujet et de m’échauffer la bile inutilement.

http://www.politis.fr/La-guerre,1940.html

Par ailleurs on ne peut que conseiller de lire de temps à autre (autrement dit tous les jours) la revue POLITIS, fondée par Bernard Langlois et qui offre l'avantage de présenter une infomation qui sort des sentiers empruntés par TF1.
http://www.politis.fr/

19/09/2007

Des contestataires au sein de l'Eglise

"Aussi longtemps que je demandais aux gens d'aider les pauvres, on m'appelait un saint. Mais lorsque j'ai posé la question: pourquoi y a-t-il tant de pauvreté ? on m'a traité de communiste..."
dom Helder Câmara, cardinal brésilien.

Nous parlions hier de la résistance civile, cette attitude qui consiste à refuser les ordres donnés par les autorités. Or, s’il y a bien une institution où on ne s’attendrait pas à trouver ce genre d’attitude, c’est bien l’Eglise. Moi qui me détourne souvent des problèmes religieux, athéisme oblige, j’ai sans doute trop tendance à considérer que l’Eglise est conservatrice et qu’elle est tournée du côté des puissants (manière habile d’asseoir sa propre autorité). Ainsi, je conserve encore en mémoire le discours que le pape précédent (Jean-Paul II donc, plus conservateur encore que toute la Pologne, ce qui n’est pas peu dire) avait prononcé lors de son premier voyage en Amérique du Sud. En gros il félicitait les pauvres d’être pauvres car leur dénuement les rapprochait de Dieu. Il leur demandait surtout de ne pas se révolter car ce serait désobéir aux volontés divines (après tout, si Dieu avait voulu qu’ils soient aussi démunis, il devait avoir ses raisons). Accepter son destin était donc ce qu’ils avaient de mieux à faire. Les portes du paradis ne manqueraient sans doute pas de s’ouvrir un jour pour eux, mettant enfin un termes à leurs misères. A l’écouter, on comprenait que le plus tôt serait finalement le mieux. Enfin pas trop tôt tout de même, le temps de concevoir et d’élever chrétiennement six ou sept enfants, ce qui était sûrement leur mission en ce bas-monde.

Qu’en savait-il, le bougre (comme aurait dit Brassens) ? Il n’en savait rien du tout, évidemment. Mais il savait que l’Eglise ne devait pas jouer le jeu de la révolution dans ce continent où ce n’étaient pas les occasions qui manquaient de se révolter. Par ce discours axé sur la résignation, il faisait comprendre qu’il désapprouvait l’attitude des prêtres contestataires qui s’étaient regroupés dans la Théologie de la libération (à ne pas confondre avec le Sentier lumineux, qui lui est une dissidence du parti communiste). Car il s’est trouvé des religieux pour porter la contestation au sein de l’Eglise et oser critiquer son discours sur la société.

Au départ, la Théologie de la libération, c’est d’abord des écrits et une réflexion théorique et politique. On y retrouve par exemple des figures comme celle du philosophe Gustavo Gutierrez (Pérou). Celui-ci veut lutter contre la pauvreté et il se place dans l’esprit d’ouverture de Vatican II (on en est loin). Ainsi, sa réflexion le conduit à contester l’attitude ancienne de l’Eglise, fondée sur la seule charité. Pour lui et ses émules, les pauvres ne sont plus essentiellement des objets de charité, mais les sujets de leur propre libération. Notons que les organisations humanitaires ne disent pas autre chose : mieux vaut apprendre à pêcher à un homme que de l’entretenir en lui donnant du poisson. Acteur de sa propre destinée, le pauvre retrouve donc sa dignité. C'est ici que s'opère la jonction avec un principe fondamental du marxisme, à savoir que "l'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes". C’est là évidemment un changement radical. Ces prêtres et ces théoriciens chrétiens contestent donc l’attitude classique de l’Eglise et demandent en fait que la réflexion soit portée sur le plan politique. Ce qui ne les empêchent pas de se placer également sur le plan religieux. Ainsi, ils refont une lecture des écritures et arrivent à la conclusion que si la pauvreté doit être combattue, elle peut aussi être une source d’enrichissement spirituel (« Heureux les pauvres car le Royaume de Dieu leur appartient ») La population sud-américaine aurait donc à la fois faim de Dieu et faim de pain. Gustavo Gutierrez voudrait conserver la première et éradiquer la seconde. Car la faim tout court conduit à nier la dignité humaine et donc la part divine que chacun renferme en soi. Il condamne donc tous les discours qui visent à mépriser les pauvres au nom de critères économiques (et dire « développez-vous », c’est encore les culpabiliser), sociaux, culturels ou raciaux.

La pauvreté n’est pas inévitable, elle provient d’une mauvaise organisation de la société. La pauvreté n’est donc pas une fatalité, c’est une condition (ce qui suppose chez les pauvres une manière d’être et de penser qui leur est propre, une culture spécifique en quelque sorte). Le rôle de l’Eglise (et un des buts de ceux qui ont la foi) est donc de changer l’Histoire. L’Histoire doit se voir comme un moyen de créer le Royaume de Dieu sur terre en améliorant sans cesse les conditions de l’homme (matérielles, certes, mais aussi spirituelles car il s’agit non seulement de donner du pain, mais aussi de faire retrouver une véritable dignité). D’où la notion de praxis. La foi doit se comprendre comme un engagement dans l’Histoire et l’Histoire a pour but de rendre les hommes plus hommes, c’est-à-dire débarrassés de leurs soucis alimentaires et donc plus disponibles pour se rapprocher de Dieu et des autres hommes. Autrement dit, au lieu d’attendre un futur meilleur au sens où les Chrétiens le font habituellement (attendre la venue du Christ Roi à la fin des temps), la Théologie de la libération veut construire ici et maintenant ce monde meilleur, non certes dans une perspective marxiste, mais spirituelle. C’est dans la rencontre avec les autres que se trouve le véritable amour de Dieu. Nous sommes donc en présence d’une eschatologie de la praxis.

Pour justifier ses dires, Gustavo Gutierrez chercha des réponses dans la Bible (aimer son prochain, etc.). Evidemment, beaucoup lui reprochèrent d’annexer la pensée athée marxiste dans son analyse de la réalité sociale. D’autres virent un danger dans sa théorie. Celui de ne proposer qu’une théologie sociale, fondée sur l’instant présent. De plus, il finirait par nier le péché originel (le mal) qui, selon les Chrétiens, gît au fond de chacun de nous (notion par ailleurs assez incompréhensible pour la pensée athée, il faut le préciser). Les autres théologiens reprochèrent donc à cette théorie pourtant séduisante de ne prêcher qu’une révolution sociale autrement dit de n’être pas assez eschatologique. De plus, ils lui reprochèrent également de « collaborer » avec la pensée et le pouvoir marxiste. Attitude assez hypocrite, de mon point de vue, étant entendu que l’Eglise elle-même n’a jamais fait autre chose que de collaborer avec les puissances de ce monde. Il est vrai, à sa décharge, que ces puissances n’étaient pas athées, mais chrétiennes puisqu’elle appuyaient à leur tour leur autorité sur cette même Eglise dont elles avaient besoin (Franco, Pinochet, etc.).

Il reste qu’on a voulu diaboliser cette Théologie de la libération, sur laquelle, en tant qu’athée, je ne me prononcerai pas, mais qui me semble avoir un grand respect pour les hommes en général et les pauvres en particulier. Des phrases comme la suivantes vont très loin :

"Il faut vaincre le capitalisme: c'est le plus grand mal, le péché accumulé, la racine pourrie, l'arbre qui produit tous les fruits que nous connaissons si bien: la pauvreté, la faim, la maladie, la mort. Pour cela, il faut que la propriété privée des moyens de production (usines, terre, commerce, banques) soit dépassée." (Obispos Latinoamericanos, 1978, p. 71).

On a rarement vu une critique aussi acerbe du capitalisme, vu comme source de tous les maux. Partis en croisade contre les faux Dieux (le dieu argent), ces théologiens remettent en question le côté sacrificiel que le capitalisme exige des pauvres (lesquels, si je ne me trompe, doivent accepter de se sacrifier au nom de raisons économiques). Le catholicisme d’un Bush a certes de quoi inquiéter. Non seulement parce qu’il mélange le sacré et la profane, la religion et l’Etat (ce qui débouche sur son conflit des civilisations avec le monde arabo-musulman), mais aussi parce qu’il justifie l’oppression des pauvres au nom d’une théologie de l’économie et de l’argent. On se doute que les deux derniers papes conservateurs qu’a eu l’Eglise ont plutôt condamné cette Théologie de la libération, préférant mettre en avant la piété, la recherche intérieure ou la prière. Ce sont là, pour des croyants, et il faut le reconnaître, des choses certes importantes, mais derrière cette recherche affichée de spiritualité se cache sans doute une autre volonté, celle d’éloigner les prêtres des réalités sociales en leur demandant de laisser les choses dans l’état où ils les ont trouvées, c’est-à-dire d’accepter que les riches soient de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres.

17/09/2007

Utopie sociale?

On a souvent contesté les arguments avancés par les criminels nazis, lesquels se défendaient en disant qu’ils n’avaient fait qu’obéir aux ordres. Au regard des atrocités commises par le régime de Hitler, une telle ligne de défense nous semble bien fragile. Il nous paraît évident, en effet, que ces gens devaient se révolter et désobéir ou en tout cas mettre tout en œuvre pour limiter au maximum l’application d’ordres aussi injustes.

A y réfléchir d’un peu plus près, cependant, on se rend compte que cette attitude de désobéissance civile n’est pas aussi facile qu’on le croit à mettre en place. Certes, avec le recul historique qui est le nôtre, il nous semble évident qu’il aurait fallu faire ceci ou ne pas faire cela. Pourtant, de nos jours, même si beaucoup constatent que le monde dans lequel ils vivent n’évolue pas dans la bonne direction, les décisions politiques étant uniquement prises en fonction des thèses économiques néolibérales à la mode, peu de personnes osent une critique ouverte de la situation. Quant aux quelques courageux qui s’aventurent dans cette voie de la contestation, ils sont rapidement diabolisés, un peu comme l’étaient autrefois aux Etats-Unis les gens soucieux de justice sociale, qui étaient aussitôt catalogués de communistes.

Ainsi en va-t-il des alter mondialistes, qu’on présente facilement comme des doux rêveurs. Une bande d’illuminés en quelque sorte, qui ne parviennent même pas à se mettre d’accord entre eux.

Ainsi en va-t-il également des tenants d’une culture anti-OGN. Des bandits, finalement, qui saccagent des champs pourtant cultivés avec toutes les autorisations voulues et qui refusent finalement le progrès de la science. Des attardés, en quelque sorte, qui luttent à contre-courant pour une agriculture dépassée.

Ainsi en va-t-il encore des opposants au néolibéralisme ambiant. Des attardés eux aussi, qui ne comprennent pas que la France va rater le train du XXI° siècle si elle veut s’accrocher à un état social désuet. Car celui-ci est définitivement mort, étant impossible à financer. Seuls s’en sortiront les pays (et les individus) qui iront de l’avant, osant prendre des risques et récoltant les fruits mérités de leur travail. Assez de tous ces fainéants qui veulent profiter de la société et qui voudraient qu’on leur rembourse leurs médicaments alors qu’ils ont eu le toupet de tomber malade.

Pourtant, quand on reprend ces trois groupes d’opposition, on se rend compte :

Que les alter mondialistes, s’ils sont parfois inconséquents, ont cependant en commun de ne pas vouloir d’une société qui mise tout sur le profit, ce qui est un point de vue légitime.

Que les faucheurs d’ONG sont peut-être fous, mais qu’aucun scientifique n’a pu leur donner une réponse satisfaisante quant à la nocivité ou non de ces nouvelles plantes.

Que les frondeurs anti-libéraux ne font que réclamer un peu de dignité pour les hommes (et les femmes bien entendu) et que réduire en esclavage 90% d’une population pour que les 10% qui restent s’enrichissent scandaleusement ne peut être acceptable sur le plan de l’éthique. Sans compter qu’il n’est pas si sûr que l’Etat social ne puisse perdurer. Plutôt que de faire des dépenses excessives et de tout privatiser (ce qui appauvrit l’Etat à moyen terme en le privant de pas mal de recettes), il conviendrait plutôt de constituer des fonds de pensions ou de sécurité sociale. Evidemment, à partir du moment où on veut qu’une firme privée fasse 100% de bénéfice et qu’elle ne paie plus d’impôts (afin de rester concurrentielle nous dit-on, ce qui apporte de l’eau au moulin des alter mondialistes qui ne veulent pas précisément de cette course à la concurrence) alors il est clair que l’Etat n’a plus d’argent à redistribuer à ses citoyens (sauf ce qu’il aura prélevé sur le salaire de ces mêmes citoyens ou bien en leur imposant une TVA dite sociale).

Le paradoxe ; c’est que l’Union européenne a tout fait pour permettre aux firmes de se délocaliser ou de s’implanter ailleurs (libre circulation des personnes et des biens) et puis après, devant cet état de fait, elle nous dit qu’il faut accepter des baisses de salaires et des horaires accrus sinon on verra ces mêmes firmes quitter notre beau pays. Elle oublie de dire que c’est elle qui a fortement contribué à légaliser la situation actuelle. Avant les syndicats pouvaient encore contraindre un patron à négocier. Aujourd’hui ce n’est plus possible. Où sont les perdants ? Ce sont ceux qui ont dit non au référendum sur l’Europe. Et ce sont les mêmes qui ont voté pour l’ami Sarkozy. Comprenne qui pourra.

11/09/2007

Une femme indépendante.

Dans la Tribune de Genève d’hier, je tombe sur un article intéressant et surtout sur cette phrase, prononcée par une dame exaspérée : « Je ne vois pas au nom de quoi une femme devrait sacrifier son parcours professionnel à celui de son conjoint, surtout quand celui-ci bénéficie d'un emploi précaire"

La phrase est lancée, péremptoire. Pleine de bon sens aussi. Qui oserait contester à la femme qui s’exprime ainsi le droit qu’elle a d’exercer un métier ? Personne évidemment. Elle ne va pas sacrifier sa carrière pour son mari, surtout si celui-ci n’a qu’un emploi précaire. Elle préfère donc miser sur le long terme et ne pas renoncer à un travail stable.

Et pourquoi ce mari macho lui a-t-il demandé d’interrompre ses activités professionnelles ? Qui est-il pour avoir de telles exigences ? Après tout il n’a qu’un emploi précaire. Et qu’était-il avant cela ? Chômeur ? Clochard ?

Non, vous n’y êtes pas. En fait le mari n’a rien demandé du tout à son épouse. C’est la « société » qui en fait conseillerait à l’épouse de démissionner et pour être plus précis, les syndicats.
Alors là, on ne comprend plus du tout. Les syndicats qui se sont toujours battus pour le travail des femmes et contre les emplois précaires, les voilà qui demandent à une femme de renoncer à un poste sûr et bien payé. Convenez qu’ils adoptent une étrange position.

Pour y voir plus clair, examinons la situation calmement et reprenons au début. Que fait exactement le mari ? Quel est cet emploi précaire dont on nous parle ? Et bien le mari est ministre. C’est un des transfuges qui est allé rejoindre l’équipe de Sarkozy. Son nom ? Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères. Son épouse ? Christine Ockrent, qui va lancer sur FR3 une nouvelle émission politique. Et les syndicats ? Et bien ils ont peur qu’elle ne soit pas objective et qu’elle interprète à sa manière les événements politiques qu’elle va présenter. Allons, quelle idée ! Christine est une femme libérée, elle ne va pas se soucier des activités de son mari. Et puis ils ne vont tout de même pas parler boulot le soir sur l’oreiller. Venir dire qu’elle serait partiale ! Il est vrai qu’elle est proche des cercles qui gravitent autour de l’OTAN et membre des amitiés franco-américaines, mais bon, tout cela c’est sa vie privée après tout, non ? Elle pas objective ? Voyons ! C’est comme ceux qui ont reproché à Kouchner, qui investiguait autrefois sur les rapports entre le groupe Total et la junte birmane, d’avoir rendu un rapport biaisé. Tout cela parce qu’il était payé par Total. Ridicule. Il y a vraiment des gens médisants. Il leur a bien répondu d’ailleurs, en expliquant qu’il n’allait pas compromettre sa réputation pour un rapport qui ne lui a presque rien rapporté alors que pour la moindre conférence qu’il donne il se fait payer 4.000 euros la soirée. Enfin, cela, c’était avant qu’il n’accepte l’emploi précaire chez Sarkozy.

Par contre, pour revenir à Ockrent, elle pourrait expliquer tout de même à son cher époux que ce n’est plus JP Raffarin qui est Premier Ministre en France, comme il l’a dit l’autre jour. Ne pas connaître le nom de son patron, c’est quand même étrange. Mais il ne faut pas lui en vouloir, il vient d’arriver et après tout, comme on l’a dit, il n’a qu’un emploi temporaire.

http://www.tdg.ch/pages/home/tribune_de_geneve/info_expre...

Ps. : vous remarquerez que la date de l’article est erronée, puisque celui-ci est daté du 01.01.1970. Et on dira encore que la Suisse est le pays des horloges…

05/09/2007

Tant va la cruche à l'eau...

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Dans la suite logique de l’article d’hier, voici qui va venir mettre un peu de baume au cœur de ceux qui n’apprécient que fort modérément leur nouveau président (si, si il y en a tout de même quelques–uns).

Un professeur en communication politique à l’Institut d’études politique de Paris prédit que Nicolas Sarkozy ne parviendra pas, sur le long terme, à maintenir de lui-même une image positive parce qu’il se montre trop. Il prévoit une usure de cette image.

Il estime que Sarkozy fait du marketing politique, autrement dit qu’il analyse les besoins de certains groupes de citoyens pour répondre aussitôt à leur attente avec une solution. Mais à vouloir trop jouer à ce jeu, on prend des risques. Tant va la cruche à l’eau…

« Il y a bien sûr un revers évident à la saturation médiatique, c'est l'usure de l'image et de la parole, la banalisation de la parole, et le risque de se contredire. » Voilà qui rassure.

« Nicolas Sarkozy est un "voleur de lumière" et il irrite aussi bien son premier ministre que la chancelière allemande. Et cela finira par avoir un coût politique. » Encore mieux. Et notre politologue de comparer Sarkozy à Blair, qui, lors du décès de la princesse Diana, a su faire de la politique compassionnelle. Il avait compris la charge émotionnelle que cette mort avait suscitée dans la population. Pourtant, à la fin de son « règne », il était mal vu de tous et surtout des médias (et pour cause, on ne peut pas oublier ses mensonges sur la nécessité d’envahir l’Irak).

Sarkozy finira bien, lui aussi, par se mettre dans une position embarrassante. En attendant le mal sera fait. On le voit envoyer Kouchner en Irak. Outre que celui-ci a dû présenter des excuses au premier ministre de ce pays pour avoir prédit un peu vite son départ pour incapacité, l’homme de l’humanitaire a estimé qu’il était temps pour la France d’être présente en Irak. Comprenez : changeons de politique et soutenons les Américains, nous en retirerons bien quelques bénéfices économiques. Une telle attitude va retourner les opinions arabes contre la France, qui apparaissait pourtant comme une exception parmi les pays occidentaux. Si un jour une présence militaire française devait être présente en Irak, même si c’est sous le couvert de rétablir la paix ou de mener une mission humanitaire, il est clair que les pertes humaines seront lourdes, non seulement parmi les soldats mais aussi parmi les civils à Paris car il y a fort à parier que les attentats reprendront. De plus, s’ils reprennent, ce sera un beau prétexte pour justifier une guerre des civilisations. Après tout les guerres ont toujours fait tourner l’économie, n’est-ce pas ?

Remarquons que la politique africaine de Sarkozy n’est pas meilleure que sa politique au Moyen-Orient. En tout cas les propos qu’il a tenu récemment à Dakar (« l'imaginaire" du paysan africain "où tout recommence toujours" et où "il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès"), qui semble dénier aux Africains la possibilité de se tourner vers l’avenir, ne lui aura pas fait que des amis. Comme quoi les paroles elles-mêmes peuvent blesser. Parions que notre grand orateur national finira par se mettre tout le monde à dos et par se brûler à son propre jeu. Quelle idée aussi de vouloir imiter Bush ! On voit où ses discours et sa politique ont mené ce dernier. Quand il se rend en Australie, qui est tout de même une terre amie pour lui, peuplée d’Anglo-Saxons, il faut couper une ville en deux pour assurer sa sécurité. On croit rêver.

04/09/2007

Nicolas ou de l'éducation

Une nouvelle fois, la famille Sarkozy, au grand complet, fait parler d’elle. En effet, dans Le Monde d’aujourd’hui, les lecteurs médusés et époustouflés peuvent découvrir trois articles sur la nouvelle dynastie qui dirige désormais la France. En fait, il ne se passe pas un jour sans que la presse ne relate les faits et gestes du président ou de son entourage. A croire qu’elle est payée pour cela. Il est vrai que ceux qui en sont les propriétaires sont aussi les grands amis du petit Nicolas. N’avait-il pas lui-même fait des reproches autrefois au fils Lagardère quand ses journaux avaient évoqué la possible séparation de Nicolas et de Cécilia ? « Ou bien c’est un traître, ou bien il ne sait pas tenir son groupe » se serait-il écrié. Cela veut tout dire.

Donc aujourd’hui trois articles.

Le premier consacré à Cécilia, qui s’explique (sans rien révéler, en fait) sur son rôle dans la libération des infirmières bulgares. Non, elle ne veut pas être entendue par la Commission parlementaire car elle était en Libye pour ainsi dire à titre privé. Ce qui ne l’a pas empêchée de dialoguer en anglais avec Kadhafi et sans traducteur encore bien. Si elle n’avait pas été la femme du président, aurait-elle ainsi rencontré Kadhafi et bu le thé avec lui ? Non, évidemment. C’est bien la preuve qu’on joue ici un double jeu. Si elle échoue dans son entreprise, cela n’a aucune conséquence pour la France, puisqu’elle agit en son nom propre. Par contre si elle réussit, c’est Sarkozy qui en sort vainqueur, tout en évitant les questions indiscrètes des parlementaires puisque après tout on est dans la sphère privée. D’ailleurs, quand elle dit : « "J'ai offert à l'hôpital de Benghazi des médecins chargés de former leurs homologues palestiniens, des équipements, des traitements contre le sida et des visas rapides pour que ces cas urgents puissent venir se faire traiter en France", on peut se demander si c’est avec son argent personnel qu’elle comptait payer tout cela. Il faut le supposer puisqu’elle a ajouté : "On ne m'empêchera jamais d'essayer d'aider ou de soulager la misère du monde, dans quelque pays que ce soit." On n’a jamais douté que les riches s’intéressent au pauvres. C’est d’ailleurs bien pour cela qu’on a élu son mari.

Le deuxième article relate les mésaventures du gamin. Celui à qui on avait volé le vélomoteur autrefois et pour lequel toutes les polices de France et de Navarre s’était coupées en quatre. Maintenant qu’il l’a récupéré, son vélomoteur, voilà qu’il tamponne l’arrière d’une BMW à un feu rouge. Il est accusé de délit de fuite et de geste grossier envers le conducteur du véhicule tamponné. Comment interpréter ce fait ? Soit, de nouveau, M. Lagardère ne sait pas tenir son groupe de presse, qui n’aurait jamais dû publier cela, soit au contraire c’est voulu. Dans le plus pur style américain, c’est la famille du politicien que l’on met en avant. Quoi de plus sympathique, de plus proche du peuple, qu’un président qui a, comme tout le monde, des problèmes avec ses enfants ? Ah, ces adolescents ! Incorrigibles… Nicolas nous en deviendrait presque sympathique (j’ai bien dit presque). On l’imagine le soir, autour de la soupe fumante (enfin, quand il n’est pas en croisière ou dans les grands hôtels parisiens), en train de réprimander le geste grossier de son rejeton et de lui donner une leçon de morale sur ce qui se fait et ne se fait pas.

Le troisième article est plus sérieux puisqu’il traite de l’empereur lui-même et de sa fonction de dirigeant. Dans un texte « républicain et fondateur » qu’il adresse à tous les enseignants (c’est la Poste qui va se frotter les mains, dommage qu’elle ne soit pas encore privatisée), il se place dans la droite ligne historique de Jules Ferry. Mais là où son illustre prédécesseur se contentait de répandre le savoir, Nicolas I se risque à une synthèse dialectique digne d’Hegel. Autrefois, dit-il en, substance, on a tout misé sur le savoir au détriment de l’enfant. Par la suite (il ne cite plus mai 68 pour ne pas se mettre à dos ces enseignants auxquels il s’adresse), on a respecté l’enfant au détriment du savoir. Il propose donc une synthèse des deux doctrines, dont l’élève sortirait victorieux puisqu’il serait respecté tout en ayant appris beaucoup de choses. Vu comme cela on ne peut qu’applaudir. Il est vrai que la gauche, trop souvent, a contribué à abaisser le niveau des programmes croyant venir ainsi en aide aux plus défavorisés. Il est vrai aussi, si on s’en tient au seul cours de français, que l’analyse et la grammaire sont à peine effleurées, ce que l’on regrettera évidemment. Mais là où on ne suit plus très bien le discours sarkozien, c’est quand on se rend compte qu’à côté de sa lettre aux éducateurs, il supprime 20.000 postes d’enseignants. N’y aurait-il pas là un petit paradoxe ? Sans doute faut-il attendre quelques jours encore afin que, dans un nouveau discours adressé cette fois « aux éducateurs qui sont restés en place », il ne nous offre une nouvelle synthèse dialectique qui nous fera comprendre comment on apprend mieux avec moins d’enseignants.

Notons en passant qu’il a même plaidé pour la culture générale, ce qui est admirable de la part de quelqu’un qui en possède peu et qui en principe doit surtout viser à ce que le patronat dispose de la main d’œuvre nécessaire en temps voulu. Alors, venir en plus nous parler de culture, c’est là un geste gratuit qu’on n‘attendait pas (plus).

27/08/2007

Pauvre foi

La navigation sur Internet nous livre parfois bien des surprises. Voici ce que je découvre à l’instant :

« Mère Teresa, qui pourrait être canonisée, a souffert dans sa foi tout au long de sa vie et même douté de l’existence de Dieu, selon de nouvelles lettres de la religieuse, qui viennent d’être rendues publiques. « Jésus a un amour tout particulier pour vous. Pour moi, le silence et le vide sont si importants que je regarde et ne vois pas, que j’écoute et n’entends pas », a-t-elle écrit en 1979 à un confident. »

Ce n’est pas moi qui le dis, mais un journal chrétien, qui ajoute, sachant sans doute de quoi il parle :

« Où est ma foi — tout au fond de moi, où il n’y a rien d’autre que le vide et l’obscurité — mon Dieu — que cette souffrance inconnue est douloureuse — je n’ai pas la foi », a-t-elle écrit dans une lettre non datée adressée à Jésus.

Me voilà rassuré. Moi qui n’ai pas la foi et qui n’écris jamais de lettre à Jésus, voilà que je découvre qu’un des chantres du catholicisme doutait sérieusement de l’existence de Dieu. Du coup, cela me rend Mère Teresa beaucoup plus sympathique. D’abord elle nous apparaît ainsi plus humaine puisqu’elle a des doutes et en plus, le seul fait qu’elle ait ces doutes prouve qu’elle a réfléchi et qu’elle n’a pas accepté la vérité toute faite proposée par l’Eglise. Par ailleurs, son action humanitaire, qui est assurément exemplaire, prend un tout autre sens. Ce n’est donc pas pour accéder à un improbable paradis qu’elle a agi en faveur des pauvres, mais par pure humanité.
Je me suis d’ailleurs toujours demandé comment on pouvait côtoyer ainsi la misère la plus noire et continuer à croire en un Dieu juste et bon. Relisez à ce propos la phrase de Camus, dans la Peste, celle par laquelle le docteur Rieux interpelle le père Paneloux : « Je refuserai jusqu’à la mort d’aimer cette création où les enfants sont torturés. »Ceci étant dit, ces gens qui se dévouent jusqu’à l’abnégation pour leurs semblables sont assurément des héros, mais par la démesure de leur action ils m’inquiètent toujours un peu. N’y aurait-il pas chez eux comme une volonté de jouer aux martyrs afin de se grandir à leurs propres yeux et aux yeux des autres ? Difficile à dire. Difficile de juger aussi sans se faire aussitôt taxer de médisant. C’est vrai. Mais enfin, que serait Mère Teresa s’il n’y avait pas tous ces pauvres ? De là à dire que plus il y en a mieux c’est, il n’y a qu’un pas. D’ailleurs je ne comprends pas pourquoi ces religieux qui font dans l’humanitaire ne tiennent jamais un discours politique. En effet, ils pourraient dire que ce sont les régimes mis en place dans le tiers-monde (souvent avec la bénédiction de l‘Occident) qui sont en partie responsable de la misère des populations. Mais non, ils préfèrent dire d’un côté que Dieu est bon et de l’autre que c’est à nous, citoyens ordinaires, de nous bouger pour remédier à toute cette misère. Il est vrai que l’Eglise s’est rarement montrée révolutionnaire. Alors vous comprendrez pourquoi les révélations sur les doutes de mère Teresa (qu’on savait ne pas être une mystique mais plutôt une personne efficace dans la pratique) m’intéressent. D’autant qu’on apprend par-là qu’on pourrait très bien être canonisé sans avoir la foi. Tous les espoirs me sont donc encore permis.

16/08/2007

De la vie privée des hommes publics

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Les admirateurs de Sarkozy Premier (et ils sont forcément nombreux puisque celui-ci a été élu démocratiquement) dénoncent unanimement les critiques qui pleuvent sur leur pauvre président (je n’ai pas dit président des pauvres). Ils regrettent surtout que l’opposition, au lieu de s’en tenir au domaine des idées politiques, semble s’en prendre à la personne-même du petit Nicolas. Il est vrai que ce n’est pas sympathique et pour un peu on verserait une larme sur le sort peu enviable de la vedette. Mais à y bien réfléchir, on se rend compte que c’est Sarkozy lui-même qui a placé le débat sur ce plan-là.

Depuis le début, il se complait à jouer un film devant les caméras. Plutôt que de rester dans le rôle sérieux du Président de la France, comme Chirac ou Mitterrand l’avaient fait avant lui (quitte à être un peu trop guindé et un peu trop protocolaire), il a voulu se montrer décontracté. Sur toutes les photos on le voit soit en training en train de faire de la course à pied, soit torse nu en train de bronzer sur un yacht ou sur la plage d’un lac américain. Manière habile de ne pas se faire oublier et manière encore plus habile de neutraliser les critiques à l’égard de ses décisions politiques. On ne parle donc plus de ce qu’il a fait comme président, on se concentre sur sa personne. D’ailleurs si vous écrivez un article de quatre pages pour dénoncer son projet de loi sur la récidive, personne ne le lira, les gens préférant voir les photos de leur idole en train d’accoster brutalement un bateau de journalistes. En fait, politiquement, il pourra décider à peu près n’importe quoi, il l’emportera à l’esbroufe sur le plan médiatique. Il aurait pu être chef de rayon dans une grande surface, il serait parvenu à vendre très cher des produits de mauvaise qualité tout en ayant l’assentiment de la clientèle.

Dès lors, puisqu’il gagne toujours et qu’il joue de son personnage pour faire passer ses idées, rien d’étonnant à ce que l’opposition (qu’elle en soit consciente ou non) se concentre elle aussi sur sa petite personne plutôt que sur ses idées néo-libérales. Bien entendu, une fois qu’elle a mis le pied dans ce bourbier, on le lui reproche aussitôt : elle ferait du harcèlement en guettant les moindres faits et gestes de l’empereur. Sans doute, mais à qui la faute ? A force de se faire photographier devant le yacht de votre ami milliardaire, il fallait s’attendre à une réaction de ce genre.

Les choses vont plus loin qu’il n’y paraît, cependant. En envoyant sa tendre moitié Cécilia jouer les négociatrices en Lybie, le petit Tsar de toutes les Sarkozies s’est montré très habile. D’une part il a fait intervenir une femme dans une affaire qui concernait surtout les femmes (les infirmières bulgares) et d’autre part il est resté en retrait, ce qui lui a permis de négocier son contrat d’armement en toute discrétion. De ce contrat, il ne dira évidemment pas qu’il fait plaisir à ses amis milliardaires (il en a combien, au fait, d’amis milliardaires ?), il dira qu’il donne de l’emploi aux Français (enfin, à ceux qui veulent bien se donner la peine de se lever tôt). On ne s’étonnera pas non plus de la soudaine discrétion qui a été de mise dans cette affaire, discrétion à laquelle il ne nous a pas habitués lors de ses vacances luxueuses. Par contre on notera l’habileté du procédé. Quand l’opposition demande à voir clair dans cette affaire et réclame que la belle Cécilia soit entendue par une commission parlementaire (puisqu’elle a agi au nom et sur ordre de son président de mari, dont elle était en quelque sorte le porte-parole officiel), on répond que cela relève de la sphère privée. De nouveau, donc, on joue sur le côté personnel pour faire passer une manœuvre politique. Mais comme l’argument ne semble pas tout à fait convaincant, on trouve une autre réponse : Cécilia, ce n’est pas Bobonne (allusion à l’épouse de Charles de Gaulle, qui tricotait des chaussettes à l’Elysée pour passer le temps) s’est écrié André Santini, le secrétaire d’Etat chargé de la Fonction publique :

"Cécilia est une femme très moderne, indépendante. (...) Je suis toujours surpris de l'image qu'elle a chez les femmes, qui disent: "elle a raison, elle ne veut pas être bobonne, elle ne veut pas faire le yucca, le caoutchouc, elle veut pas être là quand on sonne, et bien c'est très bien""

Donc, la nouvelle première dame de France fait elle aussi de la politique. Elle qui n’avait pas été voté en même temps que son mari et qui se moquait pas mal du rôle qu’on voulait lui faire jouer, voilà maintenant qu’elle remplace le Président débordé. Mais, que je sache, ce n’est pas pour elle que les Français ont voté (enfin, certains, pas tous) mais pour Nicolaou. Une nouvelle fois on confond les registres privés et publics et on ne sait plus où est la limite. Cela permet de créer des zones d’ombre et d’éviter les critiques. Si les infirmières sont libérées, c’est grâce à Sarkozy (qui est arrivé juste au bon moment, quand Kadhafi avait suffisamment fait monter la pression afin d’en retirer un avantage : sa réinsertion sur le plan international). Si par malheur les démarches avaient échoué, on aurait dit que Cécilia, en tant que femme, avait fait une simple visite de courtoise.

Enfin, on n’est pas à une contradiction près. C’est comme quand Santini, chargé, comme on l’a dit, de la Fonction publique trouve anormal que 24% de la population soit fonctionnaire. C’est peut-être vrai, mais le fait que ce soit lui qui le dise a de quoi surprendre.

09/08/2007

Essai de sémiotique ou étude de la gestuelle présidentielle.

On sait qu’en littérature, on ne publie que ce qui se vend. On sait aussi qu’on ne vend que ce dont on parle. Autrement dit, le contenu d’un livre a moins d’importance que la publicité qui est faite autour de lui. Plus on en parle et mieux c’est.

Le petit président de la grande Sarkozie a visiblement compris la leçon (il ne me semble pourtant pas un fervent adepte de la lecture) puisque qu’il ne se passe pas un jour sans qu’on ne parle de lui. Après l’affaire du yacht privé qu’un riche ami industriel lui avait prêté (croisière qui, on s’en souvient, avait remplacé la retraite initialement annoncée, laquelle aurait dû avoir pour fonction de réfléchir sur le poids de la fonction présidentielle), le voici, sur son lieu de villégiature, qui passe à l’abordage du canot des journalistes occupés à le photographier. Il s’ensuit des propos assez virulents, du moins peut-on le supposer d’après le ton employé, car pour ce qui est du fond, exclusivement exprimé en français, les pauvres photographes américains n’en on pas compris le sens.

Comment interpréter un tel geste ? On n’avait jamais vu Mitterrand invectiver la presse en maillot de bain ou Giscard apostropher les journalistes en pyjama. Il faut dire que le nouvel occupant de l’Elysée a un style bien à lui, un style qui mérite qu’on s’y attarde.

Faut-il voir dans l’abordage du canot un trait de colère incontrôlé ? Si c’est le cas, ce n’est pas là un geste digne du représentant d’une grande nation. Le sieur Sarkozy aurait dû comprendre, même s’il est en vacances privées, qu’un tel geste risquait d’alimenter la critique et de se retourner contre lui. Un mauvais point pour lui, donc. Mais l’homme aime trop se pavaner devant les caméras pour qu’une autre explication ne puisse être envisagée. Le Président aurait délibérément accosté les journalistes précisément parce qu’il savait qu’on en parlerait. Même en période estivale, il ne faut pas que l’attention médiatique se détourne de sa personne. Eternel candidat, il prolonge la campagne électorale (où il a été excellent puisqu’il est parvenu à ce que les pauvres votent pour lui alors qu’il n’il n’a pas caché qu’il ne travaillerait que pour les riches) en se mettant lui-même sur le devant de la scène, ce qui détourne l’attention des mesures qu’il a prises en tant que Président. De plus, en pleine polémique suite à la signature d’un contrat d’armement avec la Libye (lequel intervenait après la libération des infirmières bulgares, épisode dans lequel c’est surtout Cécilia qu’on avait habilement mise en avant), il n’était pas mauvais de lancer les médias sur d’autres pistes.

On remarquera en passant que le petit Nicolas n’a pas envoyé ses gardes du corps pour faire la morale aux photographes, mais que, tel superman, il s’est déplacé lui-même. D’un côté, il rabaisse donc la fonction présidentielle en la confinant dans des tâches subalternes et secondaires, mais de l’autre il montre qu’il n’a pas peur de donner de lui-même et que comme tout bon citoyen ordinaire il protège sa famille.

Ce côté « démocratique » qui le fait ressembler à monsieur tout le monde, il le cultive volontiers. Quand on ne le voit pas en train de faire son jogging matinal, on le découvre en maillot de bain et torse nu. Il y a là, manifestement, une tendance à l’exhibitionnisme. Le but est donc bien de se faire voir et de faire en sorte qu’on en parle.

De toute façon, qu’il ait été réellement en colère, lassé d’être harcelé par les paparazzis, ou au contraire qu’il ait délibérément provoqué l’incident, le résultat est le même : on ne parle plus que de cela. En ce mois d’août, aucun article de fond sur la TVA sociale (destinée à faire payer par les consommateurs ordinaires les avantages fiscaux accordés aux entreprises), la loi sur la récidive ou le démantèlement programmé de la fonction publique. Il faut savoir à ce sujet qu’on ne remplacera plus tous les fonctionnaires qui partiront à la retraite afin de faire des économies budgétaires. C’est peut-être une bonne idée à court terme, mais sur une longue période cela aura pour conséquence d’empêcher les ministères de remplir leur rôle avec efficacité (ce qui permettra sans doute de proposer des privatisations partielles). A côté de cela on parle de supprimer des milliers de postes de professeurs, ce qui entraînera immanquablement une explosion de la petite criminalité. Cela ne fait rien. Le nombre des gardiens de prison a, lui, été revu à la hausse.

C’est donc de tout cela qu’il ne faut surtout pas parler, en recentrant le débat sur la personne du Président lui-même, cet éternel candidat qui prolonge la campagne électorale en la transformant en campagne de séduction. Et qui dit séduction, dit représentantes de la gent féminine. Or, des femmes, il n’en manque pas dans l’entourage de Sarkozy. D’abord il y a la belle Cécilia, dont la presse « people » s’est emparée et dont on se demande toujours si elle sera toujours là le lendemain. Et puis il y a toutes les femmes du gouvernement et plus particulièrement Rachida Dati, cette superbe étrangère (père marocain et mère algérienne) qui symbolise la réussite sociale promise à la population immigrée (pour autant que celle-ci fasse l’effort de s’intégrer). Choisie précisément pour ce qu’elle incarne, elle aura le triste rôle de mettre en prison ceux de ses frères de race qui n’auront pas respecté les lois françaises.

Nicolas Sarkozy joue donc un rôle en permanence. C’est en acteur qu’il s’est fait élire et c’est en acteur encore qu’il dirige le pays. Rien d’étonnant dès lors à ce que les photographes le harcèlent comme ils le font d’habitude avec les vedettes du festival de Cannes. En rabaissant le prestige présidentiel et en donnant de lui-même une certaine image (genre faux sportif décontracté), le locataire de l’Elysée nous fait oublier son manque de culture, son manque de style et surtout ses idées néo-libérales et pro-atlantistes si déplaisantes. En attendant une bonne partie des Français sont en vacances (les autres travaillent ou ne savent pas partir) et, sous la pluie, dans leur camping en Normandie ou en Auvergne, ils rêvent de cette villa américaine où leur président peut jouir de onze salles de bain. Il l’avait bien dit : l’avenir appartient manifestement à ceux qui se lèvent tôt.

20/06/2007

De l'usage d'Internet.

On connaît la difficulté qu’il y a à lire des textes longs à l’écran. Pourtant, certains journaux sont parfois écrits en petits caractères et les textes qu’ils nous proposent défilent souvent en longues colonnes parallèles. On conviendra que ce n’est pas très reposant pour le regard et pourtant nous lisons tous ces articles. Le confort de l’œil ne serait donc pas seul en cause dans notre refus de rester de longues minutes devant notre écran. La souris qui est à notre disposition en permanence pourrait bien être la responsable. Elle est en effet un incitateur à aller cliquer sur tous les liens qui se trouvent généralement à gauche et à droite de toute page Internet qui se respecte. Distraits dans notre lecture (ce que nous ne sommes pas quand nous lisons un journal puisque nous le tenons en main), nous ne résisterions pas à l’envie de saisir la souris, dans une sorte de geste mécanique machinal. Ensuite, l’esprit, qui est avide de découverte, nous pousserait inconsciemment à aller cliquer sur tous les liens mis à notre disposition, abrégeant du coup la lecture commencée. Celle-ci nous apparaît subitement rébarbative et nous passons à autre chose.
Il faut d’ailleurs souligner le danger qu’il y a à « surfer » ainsi, faisant défiler les écrans les uns après les autres sans rien approfondir, dans une recherche aussi vaine que désespérée. Outre le fait que dans une telle démarche nous n’avons généralement rien retenu des articles entrevus, quand nous quittons notre ordinateur c’est souvent un sentiment d’impuissance qui s’est emparé de nous. Impuissance devant l’impossibilité qu’il y a à lire le contenu des dizaines de sites entrevus. Il est loin le temps de la Renaissance où l’homme s’imaginait encore pouvoir acquérir tous les savoirs. Relégués dans une branche, notre spécialité se réduit habituellement à presque rien. Et pourtant, ce presque rien est encore de trop pour nous puisque nous n’arrivons même pas à prendre connaissance de la millième partie.
D’un autre côté, pour nous rassurer et ne pas finir sur une note trop pessimiste, il faut se dire qu’on trouve de tout sur Internet, le meilleur et le pire. Notre incapacité physique à tout ingurgiter est sans doute un bienfait de la nature, qui nous évite ainsi de nous abrutir sur des sites remplis d’erreurs ou peu dignes d’intérêts.

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22/05/2007

Dire et faire

Peut-on dire une chose et faire le contraire ? En éducation, cela me semble difficile. Expliquez à un enfant qu’on ne met pas les pieds sur la table du salon en regardant la télévision, il comprendra votre discours et approuvera votre point de vue, même s’il lui en coûte. Mais ne vous laissez pas aller à commettre l’irréparable, à savoir étendre vos propres jambes sur ladite table un jour de grande fatigue ou de lassitude, un de ces jours où les événements de la vie sont les plus forts et vous laissent comme anéanti (par exemple quand vous découvrez qu’il y a plus de 53% de vos contemporains qui admirent Sarkozy). Aussitôt, d’une manière implacable, logique et cinglante, on vous rappellera vos propres paroles : « On ne met pas les pieds sur la table du salon en regardant la télévision.» Que répondre à cela ? Rien, si ce n’est que le mieux serait de ne jamais regarder la télévision, cette boite creuse dont la fonction semble être d’abêtir les masses. Mais allez expliquer cela à des enfants ! Allez leur dire qu’ils doivent arrêter de zapper et qu’ils doivent couper définitivement la source des images au moment même où ils vous ont pris en flagrant délit de parjure. Le moment serait mal choisi. C’est que, traître à vos propres paroles, vous avez commis l’irréparable, vous avez transgressé l’interdit, cet interdit dont vous aviez vous-même énoncé les règles d’une voix ferme et implacable.
Rien à redire. L’enfance vit dans un rêve, mais son monde est logique. Les actes doivent suivre les paroles, sinon on prend le risque de se discréditer soi-même.

En politique, apparemment, il n’en va pas de même. Comme les citoyens ne sont plus des enfants, ils peuvent comprendre que dans certains cas ceux qu’ils ont élus peuvent avoir une certaine marge de manœuvre et ne pas faire exactement ce qu’ils avaient dit qu’ils feraient, c’est-à-dire, en fait, faire exactement le contraire.

Ainsi, on a vu le petit Nicolas réclamer un état impartial, qui fonctionnerait avec plus de transparence. Il a raison et je l’approuve quand il parle comme cela (tout en en comprenant pas bien pourquoi en même temps il demande plus de liberté pour les firmes privées et donc moins de lois contraignantes, c’est-à-dire moins d’Etat, mais bon, c’est sans doute moi qui n’arrive pas à emmagasiner tout ce qu’il dit car il dit tant de choses…). Donc, il faut un état fort, qui se fasse respecter et qui mette tous les citoyens sur le même pied. Plus de manœuvres louches, plus de passe-droit, rien que la légalité. Enfin ! A peine élu, le futur président, conscient de la tâche qui l’attend et de la difficulté qu’il y a à remplir une telle mission, nous annonce qu’il va se retirer pour prendre toute la mesure du poids qui pèse maintenant sur ses épaules. Voilà qui est digne d’un homme d’Etat, ce qui laisse loin derrière lui tous ces petits politiciens qui ne pensent qu’à leur carrière personnelle. De Gaulle est de retour et la France dans de bonnes mains.

Dommage qu’après avoir annoncé tout cela, le petit Nicolas a fait exactement le contraire. La retraite mystico-étatico-présidentielle est en effet devenue des vacances au soleil. Bon, pourquoi pas ? Moi aussi je prends des vacances. Il a sans doute voulu montrer par-là, par un geste fort, qu’il se rapprochait de la majorité des Français. Il agit « comme tout le monde » en quelque sorte. On applaudit encore, même si c’est un peu moins fort.

Le problème, c’est que ces vacances sont payées par un industriel richissime. A ce dernier, on ne va pas reprocher sa fortune puisqu’il s’est levé tôt pour l’acquérir. Mais enfin, en ce qui concerne le futur président, cela fait un peu tâche de s’afficher ainsi ouvertement avec le monde des affaires. Tant pis. Comme je l’ai dit, il y a ce que l’on dit et ce que l’on fait. Les citoyens étant adultes, ils ne vont pas s’en émouvoir comme des enfants.

Evidemment, une fois que le pli est pris, on continue. Ainsi, après avoir volé les voix de Le Pen en lui prenant ses idées et après avoir proclamé que la droite ne devait plus avoir peur d’être la droite, voilà qu’il recrute au centre et à gauche, au plus grand étonnement de son propre électorat qui ne l’avait pas élu pour qu’il mette des ministres socialistes au gouvernement. Mais il va plus loin encore, en nommant Juppé comme ministre de l’écologie. Là on rigole franchement. Juppé qui avait toujours travaillé pour les grands groupes industriels, voilà qu’il va aller leur mettre des taxes parce qu’ils polluent. Allons, qui va croire cela ? Et puis, en tant que ministre intègre, il laisse un peu à désirer, lui qui avait été inéligible pendant quelque temps. Qu’est-ce qu’il avait fait encore ? N’est-ce pas lui qui avait franchi le portillon du métro sans payer ? Non, je confonds, ce devait être un autre.

Enfin, bon, pour ce qui est de notre Etat de droit, propre et intègre, cela commence plutôt mal. Mais je vous l’ai dit : l’électeur est adulte et il ne va se formaliser pour ces petits revirements. Il faut dire que l’habitude rend la chose aisée. On avait déjà vu Mitterrand mener une politique de droite, alors on est blindé. Et puis, finalement, tout est dans la parole. « Au commencement était le Verbe », lit-on dans la Bible. C’est ce que l’ami Sarkozy a bien compris, en demandant de lire aux élèves des lycées la lettre de Môquet. Plutôt que de réformer les programmes qui en ont bien besoin (comme il l’avait annoncé), il commence par faire pleurer la jeunesse. Ce n’est pas que Nicolas ait l’intention de mourir lui aussi pour la France. Non pas du tout, ce n’est pas le style de se laisser exterminer. Il repartirait plutôt en croisière sur son yacht, surtout si les frais sont payés... Par contre, les jeunes, il est bon qu’ils connaissent le prix du sacrifice. Et puis comme cela, si la France se trouve engagée en Iran, au Liban, en Afghanistan ou ailleurs (en fait partout où Bush va mettre les pieds et la liste est longue), il n’est peut-être pas mauvais de la préparer à mourir, cette jeunesse oisive, qui n’a rien d’autre à faire que de brûler des voitures.

21/05/2007

De la culpabilité

La France, nous dit Sarkozy, ne doit plus avoir honte de son passé. Donc acte. Nos guerres étaient donc justes et la colonisation une bonne chose. Soit. Pourquoi, dès lors, avoir mis à la politique étrangère une personne passée maître dans l’art de la culpabilité ?
Car c’est bien Kouchner qui fut jadis à l’origine du slogan en faveur des enfants de Somalie ou en tout cas qui le cautionna fortement. Souvenez-vous. On voyait un petit Africain squelettique à côté d’un kilo de riz. La légende était : « Un enfant de France donne un paquet de riz pour un enfant de Somalie.»

Je ne dis pas ici qu’il ne fallait pas aider la Somalie, je dis que ce slogan racoleur ne posait pas les vrais problèmes, à savoir :
1) pourquoi la Somalie était-elle dans cet état ?
2) pourquoi les pays occidentaux ne faisaient rien pour l’aider à sortir de cette situation ?
3) pourquoi il revenait finalement aux citoyens occidentaux, à titre individuel, de secourir la population somalienne ?

Il était donc quasiment impossible de ne pas se sentir coupable si on ne donnait pas un kilo de riz. Mais pourquoi les chômeurs ou les « RMIstes » de France et de Navarre devaient-ils ainsi suppléer aux carences des dirigeants africains, lesquels avaient été mis en place pour le plus grand profit des gouvernements occidentaux ?

De plus, on sait qu’une assistance humanitaire de ce type, qui ne résout pas les problèmes de fond, ne sert pas à grand chose, tant son action est ponctuelle et limitée dans le temps. De plus, elle fait de l’assistanat plutôt que d’aider le peuple en détresse à s’en sortir vraiment.

Dans le cas de évoqué de la Somalie, quelques mois après cette campagne de Kouchner (qui en fut le grand bénéficiaire médiatique, asseyant ainsi sa réputation d’homme au service de l’humanité), les Américains, sur mandat de l’ONU, débarquaient avec 30.000 soldats, soi-disant pour des raisons humanitaires. Il s’ensuivit une guerre civile qui se solda par des milliers de morts. On peut se demander d’ailleurs si la raison de l’intervention ne tenait pas plus à la situation stratégique de la Somalie qu’au désir d’aider sa population. Auquel cas l’opération médiatique de Kouchner n’aurait été qu’une manière (consciente ou inconsciente) de préparer les esprits à cette intervention.

Il y a fort à parier que le Darfour sera une des prochaines zones où le « French Doctor » pourra montrer son savoir-faire.

07/05/2007

La France du changement

Tout va enfin changer a promis le candidat Sarkozy. Il était temps et c'est pour cela que plus de la moitié de la population a voté pour lui. Voici donc ce qui pourrait bien se passer demain. L'édification d'une société digne du Meilleur des mondes de Huxley ou du 1984 d'Orwell. Politique fiction? Pas si sûr.

- Baisse des impôts pour les riches et pour les entreprises, creusant encore plus le déficit public et l'endettement de la France, une mesure purement idéologique et totalement irresponsable.

- Démantèlement du droit du travail, CPE pour tout le monde, précarité généralisée, avec un licenciement possible pendant 2 ans, sans justificatif ni recours.

- Retraite à 70 ans, et encouragement des retraites privées (fond de pension) pour ceux qui souhaitent partir plus tôt à la retraite et dans de meilleures conditions

- Semaine de 48 heures (alignement sur la norme européenne), et autorisation des heures supplémentaires jusqu'à 70 heures par semaine (opt-out, comme en Angleterre)

- Suppression des charges sociales sur les heures supplémentaires, ce qui encouragera les entreprises à recourir aux heures supplémentaires plutôt qu'embaucher

- Obligation d'effectuer un "travail d'utilité collective" (des travaux forcés payés moins que le SMIC) pour les bénéficiaires de minima sociaux

- Restauration du service national obligatoire pour les jeunes

- Adoption de la constitution européenne par le parlement, sans consulter les Français par référendum

- Privatisation d'EDF, de la SNCF, de la Poste. ANPE remplacée par des agences privées pour le placement des chômeurs.

- Autorisation des OGM. (Nicolas Sarkozy est le seul candidat à la présidentielle à ne pas s'être engagé à un moratoire sur les cutures d'OGM).

Immigration choisie, c'est à dire appel à l'immigration quand le rapport entre l'offre et la demande sur le marché du travail est défavorable aux entreprises, risquant ainsi de les obliger à augmenter les salaires

- Suppression de la séparation des églises et de l'état, pour permettre aux lieux de culte d'être financées par l'argent du contribuable

- Réduction du nombre d'enseignants, réduction du budget de l'éducation nationale, l'argent restant devant être partagé avec les écoles privées (suppression de la loi Falloux)

- Augmentation du budget militaire pour renforcer les capacités de la France à participer aux guerres des Etats-Unis, au grand bénéfice des multinationales de l'armement, notamment Dassault (dont le PGD Serge Dassault est député UMP et sarkozyste convaincu), et Lagardère (dont le PDG Arnaud Lagardère est le parrain d'un fils de Sarkozy).

- Extension des pouvoirs présidentiels, au détriment du premier ministre et du parlement

- Généralisation des machines à voter, afin de pouvoir truquer les futures élections

- Modification probable du jeu électoral en autorisant à nouveau les entreprises à financer les partis politiques, et en légalisant les publicités politiques à la télévision (comme aux USA), afin de donner l'avantage au parti le plus riche, c'est à dire le plus favorable aux intérêts des multinationales afin de bénéficier de leur "générosité"

- Généralisation de la vidéosurveillance "intelligente", avec détection automatique des comportements
interdits ou jugés suspects y compris pour les infractions anodines, comme allumer une cigarette dans un lieu public. La vidéosurveillance "intelligente" aura pour effet de multiplier les bavures policières (comme l'assassinat d'un jeune brésilien par la police à Londres après les attentats)

- Fichage des enfants dès la maternelle, pour repérer les "futurs délinquants".
(En tant que ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy avait prévu de faire adopter cette mesure début 2007, mais il l'a finalement retirée à cause de la polémique qu'elle pouvait susciter avant l'élection présidentielle)

- Création de prisons privées, comme dans le film "Fortress". Aux Etats-Unis, un tiers des prisons sont déjà privées, et l'un des buts de la répression est désormais de gonfler les profits des sociétés qui gèrent ces prisons et qui sont rémunérées en fonction du nombre de prisonniers.

Et à plus long-terme:

- Arrestations préventives, comme dans "Minority Report", avec emprisonnement des personnes en raison des crimes qu'elles "pourraient commettre" en fonction de probabilités établies par la police grâce au recoupement des fichiers informatiques publics et privés. Ces fichiers enregistrent de multiples données qui permettent de presque tout savoir sur chaque individu (consommation, déplacements, fréquentations, situation professionelle, financière, familiale, santé, horaires et habitudes de vie, lectures et sites internet consultés, caméras de surveillance, etc)

- Utilisation du terrorisme comme prétexte pour rendre obligatoire le marquage de chaque citoyen avec une puce électronique insérée sous la peau et lisible par un scanner ou par satellite. (voir l'article sur les implants)

Avec Nicolas Sarkozy, vivre en France deviendra un cauchemar digne des visions les plus sombres de la science-fiction, comme "1984" de George Orwell ou "un bonheur insoutenable" d'Ira Levin. Une minorité de privilégiés vivront dans l'opulence et à l'abri de la répression, tandis que le reste de la population vivra dans la misère et dans la peur (peur de la répression, peur des délinquants, peur des attentats, peur de perdre son misérable emploi ou son logement


- http://www.syti.net/SarkozyDanger

Discours royal.

Dans son premier discours après les élections, l’ancien candidat devenu le nouveau président a insisté sur son désir de rassembler tous les Français. C’est la moindre des choses quand on est à la tête d’un pays. Cependant, je ne sais pas s’il va y parvenir dans la mesure où il a déjà eu bien du mal à faire venir sa femme Cécilia place de la Concorde. Enfin, il y est arrivé, c’est l’essentiel. Il est vrai qu’elle ne semblait pas écouter le discours de son président de mari et qu’elle s'entretenait plutôt avec les autres personnes présentes, mais bon, je suppose que les baratins du petit Nicolas, elle doit déjà les connaître par cœur.

04/05/2007

Un président royal

Rappelons, au cas où nous l’aurions oublié, que sous la V° République, le Président :
1. choisit le chef du gouvernement (le Premier ministre)
2. commande les armées (et donc décide de la guerre nucléaire)
3. dirige la politique étrangère
4. possède le droit de dissoudre l'assemblée législative
5. jouit du droit de grâce
6. dispose du droit de désigner les hauts fonctionnaires (qui deviennent un peu ses vassaux)
7. l'article 16 de la Constitution de la Ve République permet au président de s'emparer des pleins pouvoirs «lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacées d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu».

Ce n’est tout de même pas rien. Il y a donc intérêt à bien réfléchir avant d’aller voter.