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30/11/2007

Au travail!

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Comme on pouvait s’y attendre, N. Sarkozy a admis qu’il y avait une baisse du pouvoir d’achat.
Comme on pouvait s’y attendre également, il a engagé les Français à travailler plus pour compenser cette perte (due en partie, et cela il ne l’a pas dit, au système ultra-libéral qu’il cautionne et qui consiste dans un premier temps à tout faire passer au secteur privé puis ensuite à ne plus intervenir). Les citoyens auront apprécié ses propositions à leur juste mesure, j’imagine. Ils se plaignent que tout augmente de manière scandaleuse et que leur salaire ne suffit plus et il leur répond : « vous n’avez qu’à travailler plus ». Encore faudrait-il qu’il y ait du travail pour tout le monde, mais cela, c’est une autre affaire. Sans oublier que ceux qui vont mettre en pratique les préceptes présidentiels en redoublant d’ardeur vont faire monter le nombre des chômeurs. Enfin, bon, ceux-là, on n’y intéresse au moment des élections parce qu’ils sont nombreux, mais après, on s’en désintéresse tout à fait. Après tout ils ne se lèvent pas tôt, eux et il est normal qu’ils n’aient pas voix au chapitre.

Non, le comble, c’est que Nicolaous se sert du malheur des gens pour poursuivre dans sa logique. Ainsi, il a parlé de vendre"3 % d'une grande entreprise publique française, EDF, pour faire un plan d'investissement de cinq milliards [d'euros] dans nos universités".

Cette somme serait notamment (mais pas exclusivement) consacrée « à l'amélioration des locaux dans l'enseignement supérieur et la création de logements dans les cités universitaires. » nous dit Le Monde.

Donc, on vend quelques bijoux de famille pour financer un secteur pourtant crucial. C’est un peu comme si un particulier vendait son jardin pour réparer sa toiture ou comme s’il revendait sa voiture pour pouvoir payer le billet d’avion de ses prochaines vacances. Si ce n’est pas s’appauvrir, je ne sais pas ce que c’est. En attendant, cela permet surtout de continuer la logique des privatisations tout en désamorçant la critique.

Ceci dit, on entend aussi parler d’une possible privatisation des universités. Le Président dément. Mais il est à espérer que la restauration des bâtiments n’est pas entreprise (avec l’argent provenant d’EDF, rappelons-le) pour mettre sur le dos de la collectivité des frais structurels importants et cela avant même de privatiser le tout.

On a déjà vu cela dans les chemins de fer par exemple. On privatise ce qui est rentable mais l’entretien des voies reste de la compétence de l’état.

Enfin, pour terminer, tout le monde aura, je pense, noté le néologisme employé récemment par Nicolas. Il s’agit de la « voyoucratie ». Certes le terme a déjà été employé par d’autres, mais le fait d’être prononcé par l’empereur lui-même lui confère une noblesse qu’il n’avait pas. Inscrivez-le vite dans votre dictionnaire car le Président étant compétent en toutes choses, il l’est aussi en matière de langue française. Encore heureux pour nous qu’il ne soit pas trop familiarisé avec l’anglais, cela nous ferait encore plein d’anglicismes…

29/11/2007

Tribunaux en grève.

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Est-ce une idée où l’étau n’est-il pas en train de se resserrer autour de notre ami Sarkozy ? Après les grèves de la SNCF, de la RATP, des enseignants, des fonctionnaires, des universités, voilà que ça brûle de nouveau dans les banlieues. A peine parti en Chine pour nous décrocher quelques contrats (à ce propos on ne sait pas si les firmes françaises bénéficiaires de ces contrats ne vont pas finalement se délocaliser en Chine, ce qui réduirait à la fois les frais de transport et les frais de production), il faut qu’il revienne bien vite afin de menacer de la prison les fauteurs de troubles. Il n’a pas tort, évidemment. Le problème, c’est qu’aujourd’hui, ce sont les juges eux-mêmes qui sont dans la rue afin de manifester leur mécontentement contre les réformes. Donc, si on arrête quelques jeunes incendiaires, il faudra bien attendre que les juges reviennent dans leur tribunal avant d’entamer la procédure de comparution immédiate...

Ceci dit, je me demande si, en cas de manifestation, la police recevra l'ordre de charger et de procéder à des arrestations administratives.

Je me demande aussi ce qui se passera quand les policiers, à leur tour, se mettront en grève.


Mais ne vous inquiétez pas, tout cela va s’arranger. Nicolas, qui n’est tout de même pas bête puisqu’il est président de la République (c’est en effet impossible qu’autant de personnes se soient trompées sur son compte en votant pour lui) a décidé de prendre le mal à la racine. Ce qui coince, c’est le pouvoir d’achat. Cela coince deux fois d’ailleurs, car en devenant plus pauvres les Français non seulement manifestent bruyamment leur mécontentement, mais en plus ils consomment moins, ce qui ralentit l’économie et met en péril la santé de nos entreprises (et, même s’il ne l’a pas dit, c’est tout de même pour augmenter les bénéfices de ces entreprises que Nicolas est venu au pouvoir). Donc, seule solution qui s’offre au Calife : augmenter le pouvoir d’achat. Le problème c’est que les caisses sont vides (on est même en déficit et l’Europe n’arrête pas de le rappeler) et qu’elles ne risquent pas de se remplir puisqu’on vient de faire des cadeaux aux entreprises (toujours elles). A moins d’un miracle, on ne voit donc pas comment Nicolas va s’en sortir. Et pourtant, fidèle à lui-même, il a déjà programmé une belle émission de télévision durant laquelle il va détailler ses recettes pour sortir tout le monde de l’impasse. Emission à ne pas rater pour une fois, car elle risque d’être du plus haut comique.

28/11/2007

FNAC (sous le livre, la télévision)

On apprend que la FNAC va créer des FNAC vertes, Grenelle de l’environnement oblige, sans doute. Cela consiste à acheter des terrains dans la banlieue des grandes villes pour transformer ces espaces verts en espaces commerciaux. Autrement dit, la Fnac, au lieu de rester là où elle s’est toujours trouvée, dans les centres urbains, va tenter de se délocaliser à l’extérieur. Avantage : des magasins plus grands, surtout centrés sur la technologie. Il est vrai qu’on avait remarqué qu’en vingt ans le nombre de rayons consacrés aux livres avait singulièrement diminué. Et il est encore plus vrai que si vous voulez acheter une télévision avec un écran géant pour mieux apprécier les interventions de Sarkozy sur TF1, ce sera tout de même plus pratique de venir avec votre voiture et de bénéficier du parking qui sera, on l’espère, gratuit.

En toute logique, le nombre des livres proposés devrait donc encore diminuer. Dès lors, on se demande bien pourquoi la Fnac parle toujours de produits culturels quand elle veut désigner son secteur d’activité car personnellement je ne vois pas de grande différence entre une machine à laver et une télévision. Il est vrai que je ne comprends jamais rien aux interventions de Sarkozy non plus, dont les propos me semblent souvent étranges. Cela doit être lié à un manque de culture de ma part.

Mais revenons à la Fnac. Dans leurs nouveaux grands magasins, ils pourront toujours vendre le nouveau livre du sénateur américain Ted Kennedy. Enfin le livre n’est pas encore écrit, mais on sait déjà que le jeune frère du président assassiné a signé un contrat avec un éditeur pour un montant équivalant à 5,4 millions d'euros et cela pour la vente de ses mémoires. Et il y en a qui disent que l’écriture ne rapporte rien ! Il est vrai que personne n’a affirmé non plus qu’il allait l’écrire lui-même.

13:50 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : Littérature, Fnac

27/11/2007

Jean VAN EYCK

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Le blogue de Pivoine nous donne une leçon de peinture et nous propose d’admirer "La Vierge au chancelier Rolin" de VAN EYCK.

C’est vrai qu’il est remarquable, ce tableau. On en admirera particulièrement l’équilibre. Ainsi, dans le fond, nous avons trois croisées. Derrière chaque croisée, un paysage particulier (une campagne où prédomine le vert, le fleuve, une campagne où prédomine le jaune). La première colline se situe à gauche du fleuve, l’autre à sa droite. Le fait d’avoir deux tons pour ces collines rompt la monotonie. Le fleuve est l’élément central (il correspond d ‘ailleurs à la croisée centrale) et permet une perspective vers le lointain. Donc, dans l’imagination du spectateur, il est une invitation non seulement à dépasser la chambre, mais aussi le paysage proche, afin de rêver d’un ailleurs. Le bateau symbolise ce voyage de l’imaginaire. On remarquera la présence d’un pont, qui nous rappelle qu’à nos pieds se trouve une ville (nouvel équilibre, donc, cette fois entre la nature et la culture). Le pont marque aussi le passage d’une rive à l’autre et permet donc de relier les deux collines. Par son horizontalité, il rompt aussi la monotonie du paysage qui est surtout représenté dans sa verticalité. Celle-ci est atténuée par les méandres du fleuve (lesquelles, en elles-mêmes, sont aussi une invitation à la flânerie, ce qui contribue à donner à l’ensemble de la peinture une impression de calme et d’apaisement).

Les collines, du moins celle de gauche, sont cultivées, ce qui permet une transition douce entre le milieu urbain et les montagnes sauvages de l’horizon. La ville proprement dite (du moins des masses architecturales importantes, genre cathédrales, etc.) se trouve surtout à droite, peinte en jaune, comme la colline (plus sauvage) qui est derrière elle, tandis que pour la campagne cultivée (et donc moins sauvage) du côté gauche, c’est le vert qui prédomine. Nous avons donc une sorte de « chiasme» qui contribue à rompre la monotonie.

Revenons à la chambre où se déroule la scène. Aux trois croisées du fond (et à leurs trois paysages), correspondent trois autres croisées à gauche, perpendiculaires aux précédentes, ainsi qu’un mur à droite (lui aussi perpendiculaire). L’équilibre est donc parfait, géométrique. Pour mettre la pièce en valeur et ne pas donner une impression d’enfermement, un vitrail à gauche (discret, il est blanc et non en couleur; de plus il ne permet pas de voir le paysage qui est derrière lui; on est donc obligé de se concentrer sur la scène centrale) ouvre une perspective dans le prolongement des croisées du fond. Notre pièce centrale, non seulement s’en trouve agrandie, mais on comprend qu’elle fait partie d’un ensemble géométrique dont elle n’est qu’un élément. Comme l’homme, finalement, ce microcosme, qui n’est qu’une partie du macrocosme.

Donc, importance du chiffre trois : 3 croisées, 3 éléments de paysage (colline, fleuve, colline), 3 éléments de profondeur (la pièce, le paysage proche, les montagnes du lointain), 3 « murs » (croisées de gauche, croisées centrales, mur de droite) 3 personnages (le chancelier, la Vierge, l’enfant).

Parlons de ces personnages. Ils s’opposent par les couleurs. Celles-ci sont sombres pour le chancelier (habit et draperie qui recouvre le lutrin), vives pour la Vierge (rouge). Au centre, l’enfant Jésus est mis en évidence par sa blancheur. Remarquons que le carrelage reprend en les mélangeant les tons des habits. On y retrouve en effet à la fois les motifs bigarrés de l’habit du chancelier (en brun) ainsi que des traces de rouge (comme le vêtement de la Vierge), ce qui contribue à les rapprocher et renforce l’impression d’intimité de la scène. Ce carrelage offre aussi une perspective vers le paysage extérieur, dont il préfigure la fuite vers le lointain. Ainsi, l’esprit du spectateur lie les personnages, disposés de part et d’autre du carrelage qui est visible au centre et celui-ci invite le regard à s’échapper vers l’extérieur. Le « choc » mystique que l’on ressent en regardant les personnages enfermés dans la chambre prend de l’ampleur par l’incitation à trouver un ailleurs (vers le paysage extérieur et, via le fleuve, vers le lointain).

Notons que s’il y a trois personnages et trois croisées, il y a deux piliers et deux adultes. A chaque adulte correspond une croisée. A l’enfant, cependant, ne correspond pas la croisée centrale, ce qui aurait été ridicule pour le sens (l’enfant doit être près de sa mère) mais aussi pour la perspective (trop d’équilibre nuit). Par contre, si l’enfant n’occupe pas la croisée centrale, il est remplacé par deux petits personnages qui viennent mettre un peu de vie dans ce tableau fort religieux. Ils servent donc de transition à la fois symbolique (sacré/profane) et géographique (intérieur/extérieur ; proche/lointain).

Pour terminer, concentrons-nous sur le personnage de la Vierge. Elle n’est pas habillée de bleu, comme c’est habituellement le cas (le bleu symbolisant la virginité), mais de rouge. Par contre un ange se tient derrière elle, au-dessus à gauche. Lui, est habillé de bleu (mais un reflet rouge sur les ailes rappelle le vêtement de la Vierge, ce qui assure un rapprochement entre elle et lui : tous deux sont d’essence sacrée).

Cet ange est en fait le quatrième personnage de la scène. On pourrait dire qu’il est en surnombre et qu’il vient rompre le bel équilibre fondé sur la trinité. Il n’en est rien. En effet, il représente un contrepoids à l’enfant Jésus et renforce en fait l’impression d’équilibre. L’enfant est plus bas que le visage de la Vierge, l’ange est plus haut. Chez l’enfant, les couleurs claires prédominent, chez l’ange ce sont les couleurs foncées. N’étant pas humain, il n’appartient pas au trio présent. Par contre, étant d’essence divine, il préfigure la divinité de l’enfant, dont il est en quelque sorte la marque tangible dans le tableau. Notons encore qu’une autre trinité est créée par l’alignement des visages : enfant, Vierge et ange. Alors que sur un plan horizontal on assiste à une scène normale (homme, femme, enfant), sur le plan vertical (ou plutôt oblique), on a une scène mystique (enfant-Dieu, Vierge, ange).

L’ange ne couronne pas l’enfant mais la Vierge. L’esprit divin passe donc de l’ange vers la mère et enfin de celle-ci vers l’enfant.

Si on découpe maintenant le tableau en tranches horizontales, on remarquera trois personnages à l’avant-plan, puis trois croisées (avec trois paysages correspondant) et enfin, au niveau supérieur, deux vitraux colorés et carrés. Les personnages étant plus écartés que les croisées, on a donc une sorte de pyramide : à la base, les trois personnages, au milieu les croisées (déjà plus étroites) et au sommet les deux vitraux (fort rapprochés). Nouvel équilibre, donc, mais sur un autre plan, dans ce tableau qui décidément n’en manque pas. Rien d’étonnant donc, à ce qu’il nous inspire des impressions très fortes.

26/11/2007

Ce temps qu'on dit imparfait.

Tout le monde connaît le dialogue entre Chimène et Rodrigue, dans le Cid de Corneille et surtout la fameuse réplique : « Va, je ne te hais point », qui est souvent citée dans les manuels scolaires comme l’exemple même de la litote (dire moins pour faire comprendre plus)

Cette phrase peut faire sourire, mais c’est que l’expression des sentiments n’a jamais été une chose aisée. Comment, en effet, dire à une personne qu’on l’aime ? La langue, heureusement, semble nous aider dans cette démarche en nous proposant quelques procédés.

Sans vouloir aujourd’hui approfondir ce sujet, qui le mériterait cependant, je me contenterai de reprendre une phrase autrefois citée dans « Langue sauce piquante » et qui concernait les rapports de tendresse entre une mère et son petit enfant : « C’était le bébé à sa maman ».

Pourquoi, dans une telle phrase, employer l’imparfait de l’indicatif ? Pour tenter de répondre à cette question, il faut, je crois, se pencher sur l’aspect de l’imparfait.

D’abord , comme chacun sait, l’imparfait a en lui-même et naturellement un aspect duratif (« je préparais mon repas quand on sonna à la porte »). Il est donc normal qu’on l’emploie dans le genre d’expressions évoquées ici. L’utilisation du présent, tout en assurant l’être cher de votre affection, comporterait un inconvénient : celui que cette affection ne soit finalement que temporaire. L’imparfait permet de rompre avec cet aspect éphémère des choses en situant le locuteur dans un monde atemporel, éternel en quelque sorte. « C’était le bébé à sa maman », c’est-à-dire que ce l’est depuis longtemps et que ce le sera pour longtemps encore. L’aspect d’inachèvement propre à l’imparfait a donc un côté rassurant (ce sera encore pour longtemps le bébé à sa maman). Mais il faut noter l’emploi obligatoire de la troisième personne, un peu comme si, dans notre exemple, la mère se tenait à distance. Elle ne s’adresse pas directement à son bébé en le tutoyant mais parle de lui en rejetant « l’action » dans un passé fictif. Paradoxalement, c’est cette mise à distance qui permet à la part d’affectivité de s’exprimer. Dire son affection en face de la personne, en la tutoyant, est plus difficile. Parler d’elle à la troisième personne en rejetant sa présence dans le passé permet d’avouer ses sentiments.

Nous ne confondrons pas cette démarche avec celle de César, qui, dans sa Guerre des Gaules, parlait de lui-même à la troisième personne. Ceci dit, il s’agissait tout de même de créer la même mise à distance par rapport à un personnage. Le but, cependant, n’était évidemment pas affectif chez le général romain, mais il s’apparentait plutôt à une volonté de glorification. En parlant de lui comme d’un personnage historique important, il entrait déjà dans la légende. Le comble, c’est que c’est lui-même qui s’y faisait entrer, en employant un tel procédé, comme quoi la langue peut se montrer aussi utile que les armes pour asseoir la réputation d’un grand stratège.

23/11/2007

De l'édition de masse

Il n’y a pas que les pots de yogourt que l’on veut vendre aux masses. Les produits culturels, littéraires en particulier, n’échappent pas à la règle. On lit plus, nous dit-on ; on n’a jamais publié autant de livres ; la société n’a jamais eu autant de diplômés. Tout cela est vrai, certes. Et pourtant…

Pourtant on a surtout l’impression que l’on édite ce qui se vend. Sans doute reste-t-il quelques perles rares au milieu de cet océan, je n’en disconviens pas, mais il devient malaisé de les repérer au milieu de toute la masse compacte que forment les livres de la rentrée d’automne.

Je constate surtout :

- Qu’on édite des personnalités déjà connues, même si elles n’ont plus grand chose à dire

- Que si on édite des inconnus, il faut qu’ils aient été recommandés d’une manière ou d’une autre (ce qui souvent, ne présage en rien de la qualité de leurs textes, même si c’est parfois le cas)

- Qu’on édite des livres qui portent sur des thèmes porteurs (ce qui ne présage rien de bon de l’avenir du livre quand on voit ce que la télévision, ce média du grand public par excellence, est devenue)

- Que ce sont souvent les éditeurs qui cherchent des auteurs capables de leur fournir un livre qui aborde tel ou tel thème, livre pour lequel ils auront reçu la consigne d’intégrer autant de pages de ceci et autant de pages de cela. On n’est donc plus tellement loin de la politique éditoriale des éditions Harlequin, lesquelles demandent des histoires d’amour romantiques entre une jeune fille pauvre et un riche médecin, avec juste un peu de sexe, mais pas trop, histoire de pouvoir faire rêver sans tomber dans un dévergondage malséant.

- Que la poésie devient manifestement le parent pauvre du milieu de l’édition au point qu’on se demande si un nouveau Rimbaud parviendrait à s’imposer si par hasard il s’en trouvait encore un.

- Que l’éditeur a tendance à demander à l’auteur de modifier le manuscrit initial, histoire que le livre publié corresponde plus à ce qu’il estime lui, être intéressant. Il est normal qu’il agisse ainsi, guidant les premiers pas de l’apprenti, mais on n’imagine pas Proust modifiant La Recherche du temps perdu pour en faire un roman de gare, ni Hugo donnant une version abrégée de Notre dame de Paris et transformant le personnage d’Esméralda en celui d’une nymphomane perverse, histoire de faire grimper les chiffres de vente.

- Qu’une fois que l’auteur est connu et reconnu (et surtout si ses chiffres de vente sont honorables), le même éditeur n’osera manifestement plus lui demander de modifier quoi que ce soit à son manuscrit. Or il faut bien reconnaître qu’il arrive même aux meilleurs auteurs de proposer des livres plus faibles ou de moins bonne qualité.

Tout ceci étant dit, ils doivent cependant avoir raison quelque part, ces éditeurs, dans la mesure où leur travail est de mettre à la disposition du public des réflexions qui intéressent tout le monde et pas seulement l’égotisme étroit de l’auteur.

D’un autre côté, on se dit que tout est phénomène de mode et qu’après avoir publié le nouveau roman qui consacrait 30 pages à détailler une poignée de porte (selon la théorie du « chosisme ») ou préfère maintenant l’auto fiction, qui n’est quand même qu’une sorte de nombrilisme exacerbé.
Alors, où est la littérature, dans tout cela ? Souvent, désorienté par toute cette agitation, écœuré par les spots médiatiques, déçu par les querelles mesquines entre écrivains, le lecteur ordinaire aura tendance à se retourner vers les classiques, chez lesquels, à l’abri de l’agitation du monde, il pourra savourer le plaisir de lire de grands livres.




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22/11/2007

Le départ de l'artiste.

Maurice Béjart est français (né à Marseille sous le nom de Maurice-Jean Berger), mais c’est à Bruxelles qu’il a créé le Ballet du XX° siècle en 1960, avec lequel il parcourra le monde entier. Suite à un conflit avec le directeur de La Monnaie de Bruxelles en 1987, il se réfugiera en Suisse, où il créera le Béjart Ballet Lausanne. Il aura donc contribué, un peu malgré lui, à donner à l’étranger une certaine image de la francophonie tout en sortant du centralisme parisien.





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Bon appétit

Nous avons parlé l’autre jour de Danone et de ses petits pots de yogourt bons marchés destinés à la population du Bangladesh. Il conviendrait de poursuivre notre réflexion.

La question est de savoir si c’est vraiment de yogourt que cette population a besoin. La réponse est non, évidemment. Pourtant, quand on se penche sur la production agricole, on s’aperçoit que rien n’est fait pour assurer une alimentation saine et équilibrée aux populations. Je ne veux même pas parler ici du marché de la transformation alimentaire, qui fait qu’on retrouve dans les assiettes des produits contenant des colorants, des édulcorants, des conservateurs, sans parler des résidus de pesticides, d’engrais et d’autres nitrates. Non, je parle simplement ici de la quantité de matière première disponible dans un pays. On aurait pu croire que chaque gouvernement aurait pris des mesures adéquates, afin d’éviter une éventuelle famine, or il n’en est rien. On s’alarme sans cesse au sujet des réserves de pétrole (mais plus celles-ci sont basses, plus les prix montent, ce qui doit forcément profiter à quelques-uns) mais on parle bien peu des réserves alimentaires. Or celles-ci sont au plus bas. Elles n’ont même jamais été aussi basses. En Europe même, après l’été pluvieux que nous avons connu, les stocks de blé sont à moitié vides, sans compter que maintenant il faut encore aller puiser dedans pour produire du biocarburant (ce qui rend le blé encore plus rare et donc encore plus cher, ce qui doit une nouvelle fois profiter à quelques-uns).

Or comment est gérée la politique agricole ? Par l’OMC et le principe de la libre concurrence. Autrement dit, il faut laisser faire et tout est supposé se régulariser de soi-même.

Rien n’est plus faut, évidemment. Autrefois, les politiques protectionnistes de chaque état permettaient à la fois de maintenir les prix internes et si pas d’assurer des stocks suffisants du moins de tenter d’y contribuer. Aujourd’hui, c’est le contraire. Le paysan reçoit moins, le consommateur paie plus et nous sommes au bord de la disette. Qui donc a trouvé avantage dans ce système ? Les intermédiaires, évidemment, ceux qui transportent, qui transforment ou qui vendent, quand les trois actions ne sont pas réunies dans une même société. Car vous avez de ces firmes de distribution qui possèdent leurs propres bateaux, leurs propres usines et leurs propres magasins. Devant un tel monopole, rien d’étonnant à ce que les prix montent

Le mensonge fondamental, c’est donc de nous faire croire qu’en laissant faire le secteur privé, la libre concurrence permettra des prix plus accessibles et que tout le monde y trouvera son compte. Rien n’est moins vrai, car aussitôt que les règles du jeu sont appliquées, on voit des monopoles se constituer. Détenant tout, ces firmes peuvent tout. Citons à titre d’exemple Cargill , ADM ou Louis Dreyfus

On peut dire sans trop exagérer que pratiquement tout le blé qui est produit sur terre est acheté par ces trois grandes compagnies. Les paysans n’ont donc pas le choix et les prix leur sont imposés. Ensuite, dans la chaîne de transformation, nous retrouvons des géants bien connus comme Nestlé ou Unilever, qui ont eux aussi un monopole. Ensuite viennent les chaînes de grands magasins, lesquelles exercent aussi une forte pression sur les prix. Prenons l’exemple du café :

« La suppression des accords du café a non seulement fait que les paysans reçoivent deux fois mois pour leur café, mais que les consommateurs paient aussi deux fois plus. Aux Etats-Unis, une étude a montré qu’entre 1970 et 2000, le revenu des fermiers a baissé de 20%, mais que les prix payés par le consommateur ont augmenté en moyenne de 35%. » Cela laisse rêveur.


Que le commerce soit devenu mondial, cela semble inévitable, vu les moyens de transport dont nous disposons aujourd’hui. Et puis, finalement, la route de la soie ou la route des Indes, c’était déjà du commerce mondial. Mais ne conviendrait-il pas que les prix, précisément, ne dépendent pas de ces grandes sociétés qui sont devenues plus puissantes que les états (ou dont le chiffre d’affaire dépasse souvent largement le PIB des pays les plus riches). En dessous d’elles, ce sont des millions et des millions d’agriculteurs dans le monde qui vivent dans l’incertitude. Sans compter que le phénomène est complexe. Gagnant moins, les paysans du tiers-monde abandonnent leurs champs et vont se réfugier en ville, où ils provoquent une baisse des salaires (puisque la main d œuvre y est excédentaire) tout en vivant eux-même dans une pauvreté encore plus grande. La dernière étape, c’est l’exil vers les pays riches, qui ne parviennent plus à gérer cette immigration de masse.

Comme quoi, tout est bien complexe.




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20/11/2007

Gagner plus, toujours plus.

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« Travailler plus pour gagner plus », avait dit Nicolas Sarkozy durant la campagne électorale. Pour le moment, il s’agirait plutôt soit de travailler plus pour gagner la même chose (les cheminots), soit de travailler plus pour gagner moins (les fonctionnaires restant en poste après les pertes d’emploi annoncées devront assumer une charge de travail supplémentaire, mais entre-temps leur pouvoir d’achat se sera érodé), soit de travailler moins pour gagner moins (les grévistes) soit même de travailler au même rythme pour gagner plus (Sarkozy). Allez comprendre quelque chose.

Mais le petit Nicolas, qui s’est montré particulièrement discret ces derniers jours (comme cela a dû être dur pour lui !), va, paraît-il, sortir de sa réserve mercredi ou jeudi. On sait déjà en gros ce qu’il va dire (ce qui fait que, finalement, il pourrait se dispenser de parler, ce ne serait pas plus mal).

Il va dire que pour les cheminots, les grèves ne sont pas de sa faute. Il était normal que des gens à qui on demande de travailler des années supplémentaires pour recevoir en contrepartie une pension réduite (et donc bénéficier d’un pouvoir d’achat moindre) manifestent leur mécontentement.. Comme c’était une mesure inévitable (ha bon ?), il n’est donc pas, lui, le Président, responsable. De plus, à la SNCF on a l’habitude des grèves, il n’y a donc rien de plus normal que d’avoir des trains qui ne roulent pas pendant quelques jours. Dont acte.

Pour le reste, il se félicite que GDG et EDF soient déjà sortis du conflit. Lors de la fusion avec Suez, en effet, les syndicats avaient accepté le principe même de la réforme et les discussions avaient porté sur les modalités. Il espère donc qu’il en sera de même pour la SNCF et félicite déjà les syndicats pour leur maturité et leur sens des responsabilités. Il soulignera aussi que la base demande un dialogue. On se demande même finalement qui peut bien se trouver dans la rue en ce moment.

Il est vrai qu’il avait par ailleurs demandé l'évacuation par la police de neuf dépôts bloqués par les actions violentes de grévistes. Mais c’est qu’il n'accepte pas les « jusque-boutistes » (pour reprendre ses propres termes, mais n’allez pas voir dans le dictionnaire, cela ne s’y trouve pas. C’est semble-t-il l’apanage du Président de prendre des initiatives dans tous les domaines, y compris dans celui de la langue française). Ces « jusque-boutistes », donc, empêchent la majorité des salariés de reprendre le travail. Quant à lui, il est le premier président à s'être rendu dans un dépôt de SNCF pour discuter avec les cheminots. Je n’en ai pas eu d’échos. Espérons que l’entretien fut plus cordial que celui qu’il eut l’autre jour avec les marins bretons…

Par contre il ne comprend pas le mouvement de grogne qui anime les universités. Pourquoi ne va-t-il rencontrer les étudiants alors ? La Sorbonne, c’est toujours plus près de l’Elysée que les ports bretons.
D’un autre côté, il se félicite des conflits présents pour pouvoir montrer ce qu’il sait faire (et cela alors même que sa côte de popularité est en baisse). Partant du principe que l'opinion a compris la nécessité des réformes et qu'elle les souhaite (ah bon?), il suffit de rester ferme sur les grands principes mais de dialoguer sur les détails.
Ensuite, une fois cette réforme passée, il faudra faire passer les autres. C’est que Nicolas I entend mener à bien la fusion de l'ANPE-Unedic, de la direction des impôts, du rapprochement DST-Renseignements généraux, et celle de la carte judiciaire. Par ailleurs, le droit social et la démocratie sociale (le financement et la représentativité des syndicats) sont jugés trop lourds. On est Calife ou on ne l’est pas. Après tout c’est lui qui décide, non ?
Petite ombre au tableau : la croissance est en baisse (à la différence de son salaire personnel), mais ce n’est pas bien grave. Qu’on soit avec 2% ou avec 3% de croissance, de toute façon il y aurait eu des grèves. Cela ne change donc rien. Tout va de plus en plus mal, mais il faut continuer les réformes jusqu’au bout, même si cela devient catastrophique pour certains. Après tout, les Français ont voté pour lui, non ? Ils voulaient des réformes, non ? Et bien ils vont en avoir.
C’est à cela qu’on reconnaît un grand Président.

Remarque : on dit que Nicolaou a invité (son ennemi) Hugo Chavez afin de discuter du cas d’Ingrid Betancourt (imaginez sa popularité s’il parvenait, lui si petit, à la faire libérer. On en oublierait presque les grèves). Espérons qu’il ait envoyé le jet privé d’un de ses amis le chercher et que le Président vénézuélien ne soit pas venu avec Air France. Espérons aussi que celui-ci n’ait pas dû prendre le RER à l’aéroport et que la limousine présidentielle l’attendait, sinon il va se demander dans quel pays il est tombé. C’est vrai que toutes ces grèves cela fait un peu désordre. En voyant autant de mécontents dans les rues, Il risquerait de ne pas comprendre par qui, finalement, Nicolas a été élu.

Ecriture

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Enfance


Tante Babette prit une profonde inspiration et s’écria, consternée : « J’ai encore oublié d’acheter du sucre ! » Elle ouvrit donc son porte-monnaie et me tendit deux grosses pièces, avec pour mission de me procurer d’urgence le produit manquant.
Quel bonheur ! Me voilà aussitôt parti pour l’épicerie du village, cette caverne d’Ali Baba où l’on trouve de tout.

Pour aller plus vite, je pris le raccourci près de la maison. Au sommet de ce raidillon, se trouvait l’abreuvoir pour les vaches, à sec depuis toujours et caché dans les hautes herbes. Il fallait ensuite longer la ferme et s’imprégner au passage de l’odeur âcre et chaude des gros chevaux de labour, qu’on entendait parfois remuer tout au fond de leur écurie.

Enfin, on apercevait l’épicerie, toute seule au sommet de la colline, au beau milieu de son jardin fleuri. On y accédait par un petit chemin à flanc de coteau, qu’on gravissait lentement, entouré de centaines de papillons insouciants. Ceux-ci butinaient là le nectar des fleurs et, parfois, l’un d’entre eux venait se poser délicatement sur mon épaule. Une fois arrivé, on ouvrait une porte récalcitrante, déclenchant aussitôt la sonnette mécanique. On se retrouvait alors dans une quasi-obscurité, mais je savais qu’il fallait pendre à droite. C’était une petite pièce remplie d’odeurs diverses, sentant bon les épices, avec des étagères jusqu’au plafond. Après une bonne minute, le plancher grinçait et l’épicière, une dame âgée et courbée, toute vêtue de noir, apparaissait enfin. Mon père assurait qu’elle était déjà vieille quand lui-même était enfant, c’est tout dire ! Avec cela un sourire engageant et la bonté inscrite sur son visage. Je demandai mon kilo de sucre et au moment de partir elle m’invita, comme chaque fois, à choisir un ou deux biscuits parmi les piles qui encombraient le comptoir. Je la remerciai d’un sourire timide et, triomphant, je me retrouvai en pleine lumière, au milieu des papillons, mon précieux trésor enfoui tout au fond de ma poche.


Pour "Paroles plurielles"

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19/11/2007

Philanthropie

Comme tout le monde, j’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de constater qu’il faut se méfier de la presse, surtout si celle-ci est officielle. Du coup, les années passant, je suis malheureusement devenu de nature suspicieuse. C’est mon petit défaut et je n’y peux rien. Ainsi, il suffit qu’on m’annonce quelque nouvelle réjouissante et aussitôt j’ai tendance à chercher la faille. Je me dis qu’une telle nouvelle n’est pas possible.

Ainsi, quand j’ai lu, sur le site–même de Danone (qui n’est pas, il faut l’avouer, mon site de prédilection), que cette firme, sans doute lassée de faire du profit, s’était transformée en société philanthropique, je n’ai pu m’empêcher d’éclater de rire. C’est bien moi, cela, toujours à voir le mal où il n’est pas.

J’ai tort, évidemment. En effet, on apprend que Franck Riboud, le patron de Danone, s’est associé avec Muhammad Yunus (le prix Nobel de la paix, celui qui a inventé le principe des micros crédits). Leur objectif est de fabriquer au Bangladesh des yaourts enrichis en micronutriments et donc de lutter contre la malnutrition, tout en faisant travailler des populations locales particulièrement démunies. Cela permettra à la fois de donner du travail (et donc des salaires) et de produire le yaourt le moins cher du monde. Résultat des courses :les enfants jusqu’ici mal nourris vont recevoir ainsi jusqu’à 30% de leurs besoins énergétiques quotidiens rien qu’avec ce pot de yaourt à bas prix (dans lequel on a ajouté du zinc, du fer, des vitamines et de l’iode). Il fallait y penser.

Les employés de Danone ne s’y sont pas trompés. La larme à l’œil, ils ont même ouvert leur portefeuille pour financer eux-mêmes le projet, à concurrence de 1.500 euros en moyenne par personne. Grâce à Danone, le Bangladesh, enfin, ne mourra plus de faim.

En février 2007, la première usine de Grameen-Danone a été inaugurée en grandes pompes par Zinedine Zidane lui-même, cette forte tête qui visiblement s’y connaît aussi en yaourt (ce que j’ignorais) à moins que ce ne soit en sous-développement (ce que j’ignorais aussi).

La distribution sera assurée par des femmes qui feront du porte à porte. Plutôt que de créer des magasins onéreux qui feraient monter artificiellement le prix dudit pot de yaourt, Danone a donc eu recours à ce moyen simple mais combien efficace pour pénétrer dans les chaumières et répandre ainsi le divin produit.

La multinationale, qui ne recule décidément devant rien quand il s’agit de la santé des enfants, envisage par ailleurs d’ouvrir jusqu’à 50 usines dans cette région du monde.

On ne peut que se féliciter de cet acharnement à lutter contre la pauvreté et la malnutrition.
Il faut en effet être malintentionné comme moi pour se dire :

- Qu’un pot de yogourt par jour pour un enfant ce n’est quand même pas beaucoup quand on a faim.
- Que Danone, indirectement, va ainsi conditionner des millions de personnes qui actuellement ne consomment pas de yogourt et qui s’en passent fort bien.
- Que par ce procédé, les coûts de fabrication sont réduits au maximum, ce qui n’empêche pas la firme de faire son bénéfice habituel.
- Que quand on dit qu’on achète le lait à un prix fixe, cela veut dire d’une part qu’on l’achète bon marché et d’autre part que ce prix ne sera pas revu à la hausse même si les autres denrées augmentent.
- Que les ménagères qui vont aller vendre les divins petits pots à leurs voisines permettent indirectement à Danone de réduire ses coûts de publicité en les ramenant à zéro tout en assurant la pénétration du produit (y compris chez des habitants qui ne savent même pas ce que c’est que la publicité).
- Que ces enfants élevés aujourd’hui au yogourt seront sans doute demain des consommateurs acharnés.
- Que si les habitants du Bangladesh sont pauvres, leur nombre permet tout de même d’assurer de plantureux bénéfices, même si le petit pot est vendu à un prix démocratique.
- Qu’il est déjà question d’inciter les éleveurs de bétail à améliorer leur cheptel (à leurs frais ?), ceci afin d’assurer une meilleure qualité au lait produit (et acheté à un prix fixe par Danone, rappelons-le).

Bref, avouez que pour raisonner ainsi, il faut vraiment avoir l’esprit mal tourné. Vous voudrez bien m’en excuser, mais on ne se refait pas. Plutôt que de rouspéter, je ferais mieux d’aller acheter des produits Danone afin de soutenir cette firme qui distribue aux pauvres tout ce qu’elle gagne. Au moins je ferais une bonne action dans ma vie.

Ps. : l’histoire ne dit pas ce qu’il advient du bétail, du lait, des vendeuses, des pots de yogourt et des enfants en cas d’inondation.


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14/11/2007

Alina Reyes (suite)

Nous ne parlerons pas ici de la série des prix littéraires qui est (enfin) en train de se terminer. Qu’en dire, en effet ? Un Goncourt à Gilles Leroy, qui semble bien fade pour assurer la relève après Les Bienveillantes de Littell. Un Renaudot à Daniel Pennac dont je ne comprends toujours pas le succès qu’il peut remporter. Personnellement, je n’ai lu qu’un livre de Pennac et cela m’a suffit. Oui, c’est plaisant et il y a de l’humour. Et après ? Une fois le livre refermé, on s’empresse de l’oublier et on ne retient le nom de l’auteur que pour se souvenir qu’il ne faut plus rien acheter de lui.

Outre le fait que ces deux romans sont publiés (directement ou indirectement) chez Gallimard, on pourrait tout de même se demander sur quels critères se sont basés les membres du jury. La réponse, c’est Patrick Besson qui la donne lui-même : «Pennac, c'était une idée de Le Clézio, reprise par Giesbert. Ce sont mes copains, alors j'ai voté comme eux». Evidemment, vu comme cela, il n’y a plus rien à dire…

Le 6 novembre, Gallimard a encore ajouté le prix Décembre à son palmarès avec « Cercle » de Yannick Haenel.. Les lecteurs de ce blogue se souviendront peut-être de lui car j’avais déjà parlé de cet auteur, non pour ses qualités littéraires, certes, mais au sujet des accusations de plagiat qu’Alina Reyes avait formulées à son encontre.

Où en est cette affaire ? Sur son propre blogue, Alina a patiemment relevé tous les emprunts qui avaient été faits à son livre « Forêt profonde » par ledit Haenel. La liste en est si longue qu’on en reste médusé. Ceci dit, elle ferait peut-être bien d’arrêter là son décompte des emprunts, car, à force de vouloir en trouver, elle finit par fournir des preuves moins évidentes que celles qu’elle donnait au début, ce qui risque de déforcer son dossier. Par ailleurs, elle a contacté un avocat pour estimer ses chances de succès au cas où elle irait en justice. Le chose est faisable, lui a répondu celui-ci en substance, mais pas gagnée d’avance. Evidemment. Ce qui est sûr, par contre, c’est que ce n’est pas elle qui a remporté les 30 000 euros du prix Décembre, l'un des mieux dotés de la saison. Avec cet argent elle aurait au moins pu s’assurer une bonne défense.

Sollers, l’éditeur de Haenel doit être content, lui. Ce qui est amusant, c’est qu’il est par ailleurs un des membres du jury du prix Décembre. Il aurait fallu qu’il soit fou pour ne pas voter pour son poulain. Ainsi va la littérature, entre plagiat, compromission, renvoi d’ascenseur et petits prix que l’on se décerne entre amis.

Quant à Alina Reyes, manifestement, elle ne se trouve plus parmi les amis de Sollers. C’est du moins ce qu’elle avait dit elle-même sur le blogue de Pierre Assouline, le 09 octobre (à 16H 47, pour ceux qui veulent aller vérifier), quand elle se plaignait qu’on (c’est-à-dire Sollers) ne faisait aucune publicité à son roman:

« La vérité c’est que tout ceci tient à des questions d’ordre privé entre Philippe Sollers, l’éditeur de Yannick Haënel, et moi. J’ai longtemps parlé par mail à Sollers, et il m’a répondu à travers des livres, entre autres - entre autres celui de Haënel, qui lui a en même temps servi de contre feu au mien.
La vérité c’est que je l’aime très fort, Sollers, et qu’il ne devrait pas se sentir menacé par mon livre “Forêt profonde”, qui est un roman avec des personnages sortis de mon imaginaire, des personnages inspirés par des personnes réelles mais transformées, amplifiées parfois jusqu’à l’horreur par mon imaginaire.
»
(…)
« Je dis la vérité. Il me déplait d’avoir à évoquer des questions d’ordre privé, mais je n’ai d’autre moyen de défendre mon livre, puisque ce sont ces questions, en grande partie, qui l’empêchent d’accéder à une visibilité normale. »

Moi qui suis en train de lire « Forêt profonde », afin de me faire une idée, je me dis que finalement tout tient aux relations personnelles. Vous êtes en bons termes avec Sollers et on vous propulse au sommet de la gloire, votre étoile décline et vous voilà rejeté aux orties avec vos livres.

Ce qui est plus troublant, c’est que j’en arrive à me demander si le héros de « Forêt profonde » n’est pas Sollers lui-même. L’héroïne du roman est amoureuse d’un ministre avec lequel elle correspond par mail. Visiblement les deux parties trouvent du plaisir à cet échange à distance, jusqu’au jour où une rencontre réelle se solde par échec. Econduite, la femme rejetée sombre dans le désespoir avant d’essayer de se reconstruire. Le problème c’est que ce « ministre », tel qu’il est décrit, ressemble beaucoup à un écrivain (il a d’ailleurs écrit des livres) et fort peu à un homme politique. Il est par ailleurs affublé d’une mégère acariâtre qui lui sert de secrétaire. De là à imaginer un roman à clef et voir Sollers et Savigneau (Le Monde des livres) derrière ces personnages de papier, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas. Mais avouez que les propos-mêmes d’Alina Reyes sont troublants puisqu’elle avoue elle-même avoir eu des échanges de mails avec Sollers (lequel, comme le héros, lui a répondu à travers des livres). Elle ajoute aussi « aimer très fort Sollers » et s’être inspirée de personnages réels, même si son imaginaire les a transformés « jusqu ‘à l’horreur ». Si mon hypothèse est juste (mais ce n’est qu’une hypothèse) cela expliquerait à la fois pourquoi l’auteur regrettait « d’avoir à évoquer des questions d’ordre privé » pour défendre son livre et pourquoi ce livre n’a pas reçu beaucoup de publicité.

Comme quoi, les histoires d’amour avec le Roi Soleil, c’est bien, à condition de ne pas s’appeler Louise de La Vallière.



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13/11/2007

La Sarkozie et le petit écran.

Nous parlions hier de la chaîne TV5-Monde, soulignant son originalité puisqu’elle regroupe à la fois la Suisse, la Belgique, le Québec et bien sûr la France. Or voici qu’on apprend aujourd’hui qu’une réunion a eu lieu le 09 novembre à Lucerne sur l’avenir de cette chaîne, réunion qui a été qualifiée de particulièrement « houleuse ».

La France, qui, il faut être juste, « détient 66 % des actions de la chaîne mais la finance à hauteur de 84 % » (selon le journal Le Monde), a été critiquée par ses partenaires qui l’accusent de vouloir faire de TV5 Monde "la voix de la France".

Il est vrai, ère sarkozienne oblige, que le gouvernement français avait fait part d’une « prochaine réorganisation de son audiovisuel extérieur » et qu’un comité, composé de conseillers de l'Elysée, des ministères des finances, des affaires étrangères et de la culture avait été mis en place. Ce comité, qui doit remettre un rapport à Sarkozy, doit réfléchir à une réforme de l'audiovisuel extérieur français. Parmi les changements envisagés, un possible rapprochement entre TV5 Monde, France 24 et Radio France internationale.

Le risque est donc de transformer TV5 "en un instrument essentiellement au service du rayonnement international de la France » et cela, évidemment, au détriment des autres partenaires.

A cette réunion de crise, était présent M. Benamou, conseiller pour l'audiovisuel de Sarkozy, lequel a suggéré que « TV5 Monde rejoigne une "marque ombrelle" regroupant tout l'audiovisuel extérieur français. » Adieu donc la chaîne dans son état actuel, et adieu les partenaires non français, qui vont soit claquer la porte, soit se retrouver en train de faire de la figuration dans des émissions dont le but sera de proclamer les mérites de la grande Sarkozie. Pourquoi ces états, en effet, continueraient-ils à financer une télévision dont l’objectif unique serait de glorifier la seule France (dans un but de propagande évident), et surtout son représentant maximus, le sieur de Sarkozy, actuellement grand calife. Comme quoi, quel que soit le domaine qu’il touche, le petit Nicolas a le don d’exaspérer.

Pour essayer de dé-dynamiter le conflit qui s’annonce, les petits pays ont accepté d’augmenter leur participation financière de 2,5% chacun. Ils ont surtout réaffirmé « leurs engagements dans ce grand projet multilatéral francophone" et ont souligné "les principes fondateurs de TV5 : le pluralisme, le caractère généraliste multilatéral et la diversité culturelle." Qu’on se le dise, TV5-Monde ne veut pas devenir le relais officiel et international des grandes œuvres sarkoziennes. Car il y a fort à parier que derrière l’apologie de la seule France, c’est à la glorification de son Président qu’il s’agira de travailler. Qui oserait encore parler de liberté de la presse ? Mais mieux vaut réagir avant que Nicolas ne place un de ses chefs de cabinet comme directeur général. Ila juste oublié une chose, le petit Nicolas, c’est qu’il a ici devant lui des pays souverains et non le public qui a voté pour lui. Ceci dit, il suffit de voir comment il parle des Africains pour comprendre l’idée qu’il se fait des pays souverains.

12/11/2007

BHL

Pour opérer une transition douce entre mes derniers propos, fort politiques, et le monde des livres, je souhaiterais faire allusion à une interview de Bernard-Henri Lévi entendue l’autre jour à la télévision suisse (via TV5-Monde, qui nous offre ainsi un regard sur la Suisse, la Belgique et le Québec, ce qui contribue à rassembler un peu les pays dont la langue maternelle est le français).

D’une manière générale je n’aime pas BHL, son « Testament de Dieu » étant un des seuls bouquins que je n’ai pas terminé. Je trouve que derrière ses grands airs d’intellectuel engagé, il ramène tout à des questions personnelles. Souvent, tout tourne chez lui autour du thème de la judaïté, ce qui est certes légitime, mais pour autant qu’on annonce clairement la couleur. Quelqu’un qui me dit : « en tant que Juif, Arabe, Kosovar, Corse, Basque, Marocain, musulman, bouddhiste (…), je pense que… », je suis toujours disposé à l’écouter avec attention. Mais BHL, lui, joue toujours au grand penseur objectif alors qu’en réalité il fait une lecture de la réalité qui va dans le sens qui l’arrange. C’est ce qu’on appelle du sophisme et cela me dérange.

L’autre jour, donc, il n’a pas dérogé à ses habitudes. Interrogé sur la problème de l’aide humanitaire au Darfour, il a soutenu sans retenue la position de l’Arche de Zoé, ce que même Sarkozy n’avait pas osé faire (Sarkozy avait dit, lui, qu’ils étaient coupables mais qu’ils avaient fait cela pour la bonne cause, que c’était une bande d’illuminés et qu’on devait les libérer ou du moins les juger en France).

Défendre un point de vue humanitaire, c’est toujours louable, mais dans cette histoire du Darfour, on se demande toujours ce qu’il y a derrière (un sous-sol fort riche par exemple, ou des ennemis musulmans dans les pays limitrophes). Alors BHL est-il manipulé quand, de bonne foi, il demande l’intervention de l’Occident au Darfour ? Peut-être. Mais peut-être aussi sait-il ce qu’il fait.

Interrogé sur Nicolas Sarkozy, lui l’homme de gauche (enfin, il se présente comme tel), a dit (sans se justifier), qu’il y avait de bonnes choses et de moins bonnes chez le Président. Parmi les bonnes, il y a le rapprochement avec les Etats-Unis, dont il se réjouit (mais pourquoi ? Il ne l’explique pas, il se contente d’user de son autorité d’intellectuel reconnu pour dire que c’est une bonne chose), ainsi que le rapprochement avec l’OTAN et l’adoption du traité européen. On aurait pu s’attendre à ce qu’un Français de gauche ait une autre opinion. Pour comprendre, il faut deviner que BHL se place du point de vue du gouvernement israélien, qui ne peut que se réjouir d’avoir un nouvel allié pour s’opposer à l’Iran (et pour intimider la Syrie). Ce sont là des opinions qui se défendent. On les admet du point de vue de Jérusalem, on veut bien les admettre aussi du point de vue de BHL, mais pour autant qu’il annonce la couleur. Or il ne le fait pas. Il se contente de dire où est le mal et où est le bien, en grand seigneur qu’il est, sans entamer la moindre démonstration. Derrière tout cela, on retrouve toujours son opinion personnelle qui, dans son cas, tourne autour du sionisme. Il défendrait la religion musulmane ou les témoins de Jéhovah que ce serait encore la même chose pour moi. Certes, son opinion est légitime, je ne dis pas le contraire, mais cela m’embête que la grille de lecture qu’il applique sur la réalité est toujours celle-là, qu’il ne dit pas que c’est celle-là (avec Tariq Ramadan, par contre, on sait à quoi s’attendre) et qu’il veut nous influencer pour aller dans un sens qui l’arrange lui seul. Cela devient un peu lassant et je trouve finalement que ce grand intellectuel a des œillères.

Et puis toutes ces opinions qui tournent autour d’une race et d’une identité ont toujours de quoi inquiéter. Qu’on regarde ce qui se passe en Flandre, où un nationalisme exacerbé, poussé par l’extrême droite (et repris par la droite traditionnelle, puis par les autres partis démocratiques), est en train de se réveiller. On ne peut pas dire que c’est ce qui favorise le dialogue et la compréhension entre les peuples.




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10/11/2007

Sarkophobie

Un lecteur attentif s’étonne de mon silence. Celui-ci n’est pourtant que de deux jours. C’est que je n’ai pas la forme physique de Nicolas, moi! Oui, je sais, je devrais me lever plus tôt (encore plus tôt ?) et faire un petit jogging matinal, mais bon, après tout je ne suis pas Président et on ne m’en demande pas tant. Mais c’est vrai que notre ami Nicolas s’agite si vite que je n’arrive plus à le suivre avec mes commentaires. A peine ai-je rédigé quelques lignes qu’il est déjà ailleurs, occupé à régler une autre affaire. Je me demande bien comment font les journalistes pour le suivre ainsi à la trace. Sans compter qu’ils ont intérêt, eux, à être au rendez-vous sinon, fini leur contrat. Et puis ils doivent écrire leur article. Ca ne doit pas être facile, parce que, pour ne pas être virés, ils doivent évidemment, à tout instant, faire l’apologie du Tsar de Sarkozie. Or, comment voulez-vous qu’ils parviennent à faire croire qu’il ait pu dire des choses intéressantes ? Car non seulement il nous assène des horreurs, mais en plus il ment.

Ainsi je l’ai entendu l’autre jour dire à Bush qu’il s’exprimait au nom de tout le peuple français. C’est vrai qu’il avait fait un beau score aux élections, mais bon, il y avait tout de mêmes quelques isolés qui s’étaient montrés un peu réfractaires. Et puis, en fait, Chirac avait fait mieux que lui, même si c’était dans des circonstances particulières. Ceci dit, le peuple français n’a rien contre le peuple américain, bien sûr, mais là où ça commence à déraper, c’est quand le petit Nicolas, comme un gamin, donne une claque amicale sur l’épaule de Bush et l’assure qu’il est disposé à aller jouer en Iran avec lui. En quoi consiste le jeu ? A lancer quelques bombes atomiques afin d’empêcher les Iraniens d’avoir eux-mêmes la bombe, ce qui risquerait de polluer quelque peu la planète. (C’est sans doute comme cela qu’il faut comprendre son message sur le réchauffement climatique). Croyez-vous vraiment que les Français aient envie d’aller jouer à la guéguerre là-bas ? Monsieur le Président, vous êtes bon apôtre, s’il faut donner sa vie, allez donner la vôtre.

Maintenant, je me faisais une autre réflexion. Ce blogue, qui se voulait un tantinet littéraire, est en train de ressembler à Paris-Match avec mes articles sur Nicolas. On ne parle plus que de divorces, de voyages en avion, de réceptions ou du prix du poisson. Mais qui est fautif ? Est-ce moi qui me suis laissé entraîner ou bien est-ce Nicolas qui est tellement présent qu’on est toujours occupé à réagir ? S’il sortait de son beau Palais de l’Elysée une fois par mois, cela irait, mais avouez qu’il est toujours sur les routes ou dans les airs. Cela m’épuise. C’est sans doute cela son truc. User l’adversaire par des déplacements de plus en plus rapides.

En attendant, je n’arrive plus à prendre du recul et à réfléchir. Ainsi, par exemple, une chose me tracasse. On dit que les prisons sont surpeuplées en France. On dit que loin de résoudre le problème, Nicolas est en train de les remplir encore davantage. Par contre, dès qu’il voit un prisonnier quelque part dans le monde (français ou non d’ailleurs), il va le libérer. Pourquoi vider les prisons étrangères et remplir les siennes ? Il y a des jours où je ne le comprends pas bien.

07/11/2007

Le voyage en Amérique

Après la Corse, le Tchad et les ports bretons, le voici aux Etats-Unis, où il sera, paraît-il, le bienvenu. « Il », c’est Nicolas I, bien entendu. On est heureux pour lui qu’on lui ouvre les bras outre-Atlantique. Voilà qui le changera de l’accueil houleux des marins bretons ou des conseils des ministres insulaires sous escorte militaire. Comme quoi, les grands hommes sont toujours mieux compris loin de chez eux.

Il faut dire aussi que c’est un peu normal qu’il soit bien vu là-bas, puisqu’il a adopté carrément leur point de vue sur tout. On nous dit que le clou de sa visite sera son discours devant les deux chambres réunies du Congrès. C’est un "très grand honneur" en effet et qui est salué à juste titre du côté français. Rappelons-nous que la Chambre des représentants et le Sénat ont tenu leur première session commune en 1824 et que c’était pour y entendre le discours de Lafayette. Voilà qui n’est pas rien et qui vous hisse aussitôt sur les marches de l’Histoire.

Ceci dit, il me semble bien que le dernier dirigeant européen à s’être exprimé devant ces prestigieuses assemblées était Aznar, le Premier ministre espagnol, celui qui avait décidé de suivre Bush en Irak (ce qui sera à l’origine des attentas du 11 mars à Madrid, mais ceci n’est qu’un détail). C’est sans doute pour cela qu’il avait été applaudi à tout rompre, d’autant plus qu’il aurait bien vu aussi une île de Cuba sans Castro. C’est donc bien ce que je disais. Il suffit d’exprimer ce que votre public a envie d’entendre. Comme le petit Nicolas aime les applaudissements et qu’il n’en a pas eu beaucoup ces derniers temps (pour rappel sa côte de popularité est un peu en baisse), on n’ose imaginer jusqu’où ira son discours afin d’emporter le cœur des députés. Proposera-t-il de bombarder l’Iran ? De livrer le Liban au feu et au sang ? D’envoyer 20.000 militaires en Afghanistan ? C’est à craindre. Mais en habille homme qu’il est, il va certainement parler d’Ingrid Betancourt (à moins qu’il ne réserve ce thème pour son tête-à-tête privé avec Bush) puisqu’il est passé maître dans les libérations de prisonniers. C’est facile, rapide et cela marche à tous les coups. Après cela, votre prestige s’en trouve rehaussé, ce qui est toujours bon à prendre. Ceci dit, je ne sais pas si L’Amérique va accepter son aide dans ce dossier. Après tout elle était un peu gênante, la petite Ingrid, quand elle faisait campagne contre la corruption. Où elle est, elle est beaucoup moins dérangeante, il n’y a pas à dire. Et puis cela permet d’accuser la guérilla marxiste et de se prouver une fois de plus qu’on est dans le camp des bons. Mais Nicolas a dit par ailleurs qu’il ramènerait en France tous les Français prisonniers, où qu’ils se trouvent. Pour faire plaisir à un ami, l’Amérique pourrait l’appuyer dans ce dossier. En contrepartie la France n’aurait qu’à approuver le bombardement de l’Iran et le tour est joué. C’est qu’à Washington on n‘aime pas trop voir ces Arabes fanatiques jouer avec des centrales nucléaires, surtout si elles sont aux frontières d’Israël. Un accident est si vite arrivé. Il suffirait donc de leur casser leur jouet vite fait bien fait et on n’en parle plus.

Mais j’y pense, est-ce qu’il va leur dire, aux députés, le petit Nicolas, qu’il a vendu des armes à la Libye ? Non j’espère ! Et que la France a l’habitude d’installer des centrales nucléaires un peu partout dans le monde, y compris dans les pays arabes ? Non, pourvu qu’il n’aille pas dire cela !

J’imagine déjà le ton qui monte, les députés qui se lèvent, qui désignent Nicolas du doigt. Et lui qui, comme à son habitude, se rebiffe, montre le poing, tutoie, insulte. « Toi, le député, si t’es pas content, t’as qu’à venir le dire ici ». Oh non, pas cela. Qu’est-ce qu’on dirait de la France et de sa vieille culture après un tel discours ?

06/11/2007

Marins sur la grève.

« Nous aussi, nous voulons 140% d’augmentation », ont lancé les pêcheurs bretons à Sarkozy qui venait s’enquérir de leurs problèmes (fidèle en cela à sa devise : il faut toujours être là où il se passe quelque chose). Les pauvres, trop occupés à faire leurs comptes après l’augmentation des prix du gasoil, ils ne savaient pas encore que ce n’était pas de 140% mais de 170% que le salaire présidentiel avait été augmenté. L’eussent-ils su qu’ils auraient jeté Sarkozy dans l’océan, il ne faut pas en douter.

Bon, pour les calmer (car l’assemblée des pêcheurs était, paraît-il, aussi houleuse que la mer) que leur a proposé le père Sarkozy ? Ce que propose tout bon néo-libéral :

1) Qu’ils auront une exonération des taxes patronales et salariales (sûr qu’après cela les camionneurs vont se mettre à manifester pour obtenir la même chose, ce qui fera encore une belle pagaille, surtout s’ils choisissent un jour où la SNCF est à l’arrêt).

2) Qu’ils sont invités à moderniser leurs bateaux afin de consommer moins (ce qui permettra aux fabricants de vendre de nouveaux bateaux et aux banques d’octroyer des prêts pour pouvoir acheter lesdits bateaux)

3) Qu’ils pourront répercuter l’augmentation du prix du gasoil sur le prix du poisson (une fois de plus, c’est le consommateur, ce dernier maillon de la chaîne économique, qui paie tout. Comme ce consommateur est aussi un citoyen imposable, il pourra aussi financer à ce niveau le manque à gagner sur les taxes patronales non perçues).

S’il avait eu un bateau à lui, le Président le leur aurait bien prêté (et non pas donné : il ne faut tout de même pas se montrer trop gentil avec des gens qui sont en train de vous reprocher votre salaire), mais même pour ses vacances il est obligé, lui, d’en emprunter un.

Pendant ce temps, au tribunal de Paris, Charles Pasqua reste muet comme une carpe.



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Exemple présidentiel.

Transparence ? Ah ah, je ris. Le grand Calife de Sarkozie, Nicolas I de Nagy-Bocsa, voulait que l’augmentation salariale qu’il s’est généreusement octroyée soit transparente. Et voilà qu’on apprend aujourd’hui qu’elle n’est plus de 140% comme tout le monde l’avait cru, mais de 172% (concrètement, son « salaire » passe de 7.084 euros net par mois à 19.331 euros).
Comment expliquer une telle dérive ? La confusion (voulue ?) provient d’une note de l’Elysée, qui précisait qu’il était « souhaitable que la rémunération du Président soit portée à un niveau comparable à celle du Premier ministre". Or, la rémunération brute annuelle de François Fillon est de 240 000 euros. Tout le monde avait alors comparé ce chiffre avec la "dotation" annuelle du président, fixée elle à 101 488 euros. D’où l’erreur d’appréciation.

L'amendement que l’Assemblée a voté prévoit, que le Président recevra dorénavant, comme les membres du gouvernement, "un traitement brut mensuel calculé par référence au traitement des fonctionnaires occupant les emplois de l'Etat classés dans la catégorie dite hors échelle, au plus égal au double de la moyenne du traitement le plus bas et du traitement le plus élevé de cette catégorie". C’est pourtant bien clair, il n’y a pas à dire.

Pour justifier cette petite augmentation, Le grand Calife a parlé, comme toujours, de « récompense du mérite et du travail bien fait », ajoutant qu’il avait voulu « que la présidence de la République donne l'exemple ». Donc, soit il est persuadé d’avoir bien travaillé, soit il s’octroie une récompense avant même que le public puisse juger du bien fondé de sa politique. Comme les arguments avancés ne semblaient sans doute pas convaincre tout le monde, il a aussitôt ajouté qu’il était pour la "rupture". La rupture, « un mot que j'aime tant", a-t-il précisé. Là, il n’y a pas à dire, pour un changement, c’est un changement, il a raison, bien sûr. Mais pourquoi voulait-il absolument un changement dans son salaire ? Parce que, a-t-il encore précisé, "si l'austérité produisait des résultats, ça se saurait depuis longtemps", ironisant du même coup sur la politique de Chirac qui, lui, avait prôné la rigueur aux Français.

On commence à comprendre la logique. On travaille beaucoup, donc on a un bon salaire. Comme on a un bon salaire, on peut avoir un bon niveau de vie et dépenser beaucoup, ce qui fait tourner la machine économique.

Il était donc normal que, le premier, l’Elysée donne l’exemple de cette nouvelle politique neo-libérale. Allez trouver quelque chose à redire à cela…

Les Français n’ont plus qu’à faire de même. Qu’ils commencent par se lever plus tôt et par travailler davantage et ils verront assurément leur salaire augmenter de 170 %. Avec une telle somme ils ne devront même plus compter sur leurs amis pour passer une semaine au soleil en Méditerranée.



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05/11/2007

Un Conseil des Ministres corsé.

Petite erreur d’interprétation de la part du grand homme (vous voyez de qui je veux parler ?). Récemment, il a voulu présider un conseil des ministres en Corse, histoire sans doute de montrer que la France, qu’on dit si hiérarchisée et si centralisée, est tout de même à l’écoute de ses régions. L’idée aurait pu être bonne en soi si par exemple il avait choisi les Ardennes ou l‘Ariège. Mais la Corse ! Il aurait voulu par sa présence et celle de ses ministres rappeler aux insulaires récalcitrants que l’autorité de la République s’exerce sur tout le territoire sans exception qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Lucide, il devait s’attendre à quelques débordements puisque la présence policière était impressionnante, ce a qui a permis non seulement d’augmenter les frais à charge des contribuables mais aussi de mécontenter tout le monde. Interrogés dans les rues, les habitants d’Ajaccio regrettaient cette manière de procéder peu courtoise et avouaient qu’ils auraient préféré un contact plus direct et plus franc (genre bain de foule et poignées de mains). On les comprend.

Enfin, cela prouve au moins qu’en France (et même en Corse) on peut encore dire du mal de Sarkozy à un journaliste, ce qu’on n’espérait plus étant donné que tous les organes de presse semblent inféodés au pouvoir en place. Méfiance, cependant, cette manière de donner la parole aux citoyens mécontents doit faire partie d’un plan machiavélique visant à nous faire croire que nous sommes encore en démocratie.

Bon, à côté des trois vieilles personnes interrogées, il y avait évidemment des centaines de jeunes beaucoup moins courtois qui s’exprimaient de manière plus directe puisqu’ils étaient en train d’en découdre avec les policiers. Là, les journalistes ne se sont pas approchés pour tendre leurs micros. Cela aurait été bien inutile, car à cause du bruit assourdissant des pétards et des fusées lacrymogènes, on n’aurait quand même rien entendu.

Ceci étant dit, le tsar de Sarkozie, comme les dirigeants des G7 ou G8, ne peut donc tenir sa cour en son Palais sans devoir s’abriter derrière une armée montrant les dents. C’est étrange tout de même la démocratie. Le peuple vote pour quelqu’un qu’il aime bien parce qu’il lui veut du bien et après il irait jusqu’à lyncher l’heureux élu s’il en avait l’occasion. A moins que cet heureux élu n’ait pas tenu ses promesses ? Si, justement, Sarkozy a bien mis en œuvre tout ce qu’il avait annoncé (augmentation de la pauvreté, libéralisation des services publics, réduction de charges patronales, enfermement rapide des récalcitrants, etc.). Le peuple est bien ingrat, je vous le dis, moi.

Heureusement, il y a eu cette affaire de l’Arche de Zoé, qui a permis au petit Nicolas (qui s’ennuie le dimanche depuis que Cécilia est partie) de se faire bien voir (et de se faire voir tout court).
A la télévision suisse (pays neutre s’il en est et donc pas encore inféodé aux idées sarkoziennes), on a admiré son savoir-faire tout en reconnaissant que cette omniprésence médiatique finissait par lasser, surtout qu'elle détournait le citoyen ordinaire des problèmes réels. Les prix de l’alimentation, par exemple, n’arrêtent pas de monter et on nous promet encore de belles augmentations. Je suggère que le SMIG soit revu à la hausse. 140 %, ce serait bien nécessaire, non ?

01/11/2007

De la pension de retraite.

Je reviens sur cette problématique des pensions, évoquée hier. On nous dit donc qu’il est logique de travailler plus longtemps puisque l’espérance de vie augmente. Cette vérité tautologique qu’on nous assène à longueur d’articles de presse mérite d’être décortiquée.

1. Il n’est pas si sûr que l’espérance de vie augmente. Qui dit cela ? Les statistiques du Ministère ? Mais elles sont aux mains de Sarkozy. Des scientifiques, des professionnels de la santé ? Peut-être. Mais on en a déjà vu qui se laissaient acheter. Et puis c’est comme pour les OGM, où il y a autant d’avis favorables que d’avis défavorables, ce qui fait que le commun des mortels ne s’y retrouve plus. Ici, il est à craindre qu’on sera allé interroger justement ceux-là qui disent que l’espérance de vie augmente.
2. Il faudrait ensuite savoir pour qui elle augmente. On se doute bien qu’il vaut mieux être riche, habiter Paris et avoir une villa sur la côté d’Azur plutôt que d’être chômeur d’origine immigrée et de vivoter dans les brouillards de Lille ou de Roubaix.
3. Dans tous les cas, la durée de la vie individuelle tient du coup de poker. Quand on regarde des pyramides d’âge, on se rend compte que le nombre d’habitants reste plus ou moins constant jusqu’à 60 ans, âge où on remarque un recul certain, puis le dessin se termine en flèche jusqu’au sommet. Aux alentours de soixante ans, en effet, il semble bien qu’un petit tiers des vivants aient tiré discrètement leur révérence. Donc, même si, comme on nous le dit et comme c’est bien possible, la moyenne nationale d’espérance de vie est en hausse, rien ne dit que pour moi ou pour vous, chers lecteurs, il en sera de même. Qui peut nous assurer de vivre jusqu’au 82 ans prévus ? Pourtant, il me(nous) faudra bien travailler plus longtemps sans garantie aucune de profiter de ces années supplémentaires, résultat d’un bon niveau de vie et d’une recherche médicale efficace.
4. Par ailleurs, on constate que ces années qui nous sont données en plus, comme un cadeau, doivent être automatiquement consacrées au travail. C’est normal, me direz-vous, puisque les caisses sont vides et que le système actuel n’est pas viable. Tiens, donc et personne ne s’est jamais demandé pourquoi les caisses étaient vides ? Il y aurait beaucoup à dire là dessus. Je soutiens en tout cas que si l’Etat avait été géré en bon père de famille et si on avait constitué une réserve (un fonds de pension ou un fonds de vieillissement, appelez-le comme vous voulez), et bien le système aurait encore perdurer pendant trente ans sans problème (ce qui nous aurait laissé le temps de voir venir et de trouver des solutions acceptables pour tous). Au lieu de cela, on a préféré dépenser, réduire les charges des entreprises (tiens, je croyais que dans le système libéral elles ne devaient bénéficier d’aucun avantage) et s’endetter auprès des banques d’une manière inconsidérée (ce qui fait qu’une bonne partie de nos petits impôts ne sert qu’à rembourser la dette). Non, je crois plutôt que dans notre société tout doit être consacré au travail, c’est une philosophie de vie aussi enracinée qu’elle est arbitraire (les seigneurs du Moyen-Age, par exemple, se considéraient comme déshonorés s’ils devaient travailler). Ainsi donc, les quelques misérables années que je pourrais peut-être gagner sur la mort devront être consacrées à mon asservissement et non à mon épanouissement personnel. Tout qui se rebellera contre cette vérité sera traité de profiteur et de carottier.
5. Enfin, me faire payer pour cette année de vie en plus, cela revient bien à poser l’équation : cotiser ou mourir. Si je veux vivre davantage, je dois payer le prix. C’est donc bien la vie que l’on est en train de taxer là. Je m’étonne que Sarkozy, qui est tout de même un grand homme (si, si, je le pense sincèrement) ait focalisé son attention sur le terme de notre vie. Il aurait plutôt dû en considérer le début et taxer tous les nouveaux nés pour avoir osé exister. Bien sûr, me direz-vous, ces petits êtres n’ont pas demandé à venir au monde, il serait donc illogique de les punir par un impôt. Certes, mais d’un autre côté le catholicisme nous a bien préparés à une faute originelle, alors puisque nous avons bien conscience de notre culpabilité première, autant en profiter et taxer un maximum les nouveaux candidats à la vie. En plus, ils viennent prendre notre place, ce qui mérite assurément une punition exemplaire. Ils veulent vire ? Et bien qu’ils paient. Raisonnement absurde ? Oui bien, sûr, mais pas plus absurde que celui qui nous oblige à payer pour vivre plus longtemps.