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14/11/2007

Alina Reyes (suite)

Nous ne parlerons pas ici de la série des prix littéraires qui est (enfin) en train de se terminer. Qu’en dire, en effet ? Un Goncourt à Gilles Leroy, qui semble bien fade pour assurer la relève après Les Bienveillantes de Littell. Un Renaudot à Daniel Pennac dont je ne comprends toujours pas le succès qu’il peut remporter. Personnellement, je n’ai lu qu’un livre de Pennac et cela m’a suffit. Oui, c’est plaisant et il y a de l’humour. Et après ? Une fois le livre refermé, on s’empresse de l’oublier et on ne retient le nom de l’auteur que pour se souvenir qu’il ne faut plus rien acheter de lui.

Outre le fait que ces deux romans sont publiés (directement ou indirectement) chez Gallimard, on pourrait tout de même se demander sur quels critères se sont basés les membres du jury. La réponse, c’est Patrick Besson qui la donne lui-même : «Pennac, c'était une idée de Le Clézio, reprise par Giesbert. Ce sont mes copains, alors j'ai voté comme eux». Evidemment, vu comme cela, il n’y a plus rien à dire…

Le 6 novembre, Gallimard a encore ajouté le prix Décembre à son palmarès avec « Cercle » de Yannick Haenel.. Les lecteurs de ce blogue se souviendront peut-être de lui car j’avais déjà parlé de cet auteur, non pour ses qualités littéraires, certes, mais au sujet des accusations de plagiat qu’Alina Reyes avait formulées à son encontre.

Où en est cette affaire ? Sur son propre blogue, Alina a patiemment relevé tous les emprunts qui avaient été faits à son livre « Forêt profonde » par ledit Haenel. La liste en est si longue qu’on en reste médusé. Ceci dit, elle ferait peut-être bien d’arrêter là son décompte des emprunts, car, à force de vouloir en trouver, elle finit par fournir des preuves moins évidentes que celles qu’elle donnait au début, ce qui risque de déforcer son dossier. Par ailleurs, elle a contacté un avocat pour estimer ses chances de succès au cas où elle irait en justice. Le chose est faisable, lui a répondu celui-ci en substance, mais pas gagnée d’avance. Evidemment. Ce qui est sûr, par contre, c’est que ce n’est pas elle qui a remporté les 30 000 euros du prix Décembre, l'un des mieux dotés de la saison. Avec cet argent elle aurait au moins pu s’assurer une bonne défense.

Sollers, l’éditeur de Haenel doit être content, lui. Ce qui est amusant, c’est qu’il est par ailleurs un des membres du jury du prix Décembre. Il aurait fallu qu’il soit fou pour ne pas voter pour son poulain. Ainsi va la littérature, entre plagiat, compromission, renvoi d’ascenseur et petits prix que l’on se décerne entre amis.

Quant à Alina Reyes, manifestement, elle ne se trouve plus parmi les amis de Sollers. C’est du moins ce qu’elle avait dit elle-même sur le blogue de Pierre Assouline, le 09 octobre (à 16H 47, pour ceux qui veulent aller vérifier), quand elle se plaignait qu’on (c’est-à-dire Sollers) ne faisait aucune publicité à son roman:

« La vérité c’est que tout ceci tient à des questions d’ordre privé entre Philippe Sollers, l’éditeur de Yannick Haënel, et moi. J’ai longtemps parlé par mail à Sollers, et il m’a répondu à travers des livres, entre autres - entre autres celui de Haënel, qui lui a en même temps servi de contre feu au mien.
La vérité c’est que je l’aime très fort, Sollers, et qu’il ne devrait pas se sentir menacé par mon livre “Forêt profonde”, qui est un roman avec des personnages sortis de mon imaginaire, des personnages inspirés par des personnes réelles mais transformées, amplifiées parfois jusqu’à l’horreur par mon imaginaire.
»
(…)
« Je dis la vérité. Il me déplait d’avoir à évoquer des questions d’ordre privé, mais je n’ai d’autre moyen de défendre mon livre, puisque ce sont ces questions, en grande partie, qui l’empêchent d’accéder à une visibilité normale. »

Moi qui suis en train de lire « Forêt profonde », afin de me faire une idée, je me dis que finalement tout tient aux relations personnelles. Vous êtes en bons termes avec Sollers et on vous propulse au sommet de la gloire, votre étoile décline et vous voilà rejeté aux orties avec vos livres.

Ce qui est plus troublant, c’est que j’en arrive à me demander si le héros de « Forêt profonde » n’est pas Sollers lui-même. L’héroïne du roman est amoureuse d’un ministre avec lequel elle correspond par mail. Visiblement les deux parties trouvent du plaisir à cet échange à distance, jusqu’au jour où une rencontre réelle se solde par échec. Econduite, la femme rejetée sombre dans le désespoir avant d’essayer de se reconstruire. Le problème c’est que ce « ministre », tel qu’il est décrit, ressemble beaucoup à un écrivain (il a d’ailleurs écrit des livres) et fort peu à un homme politique. Il est par ailleurs affublé d’une mégère acariâtre qui lui sert de secrétaire. De là à imaginer un roman à clef et voir Sollers et Savigneau (Le Monde des livres) derrière ces personnages de papier, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas. Mais avouez que les propos-mêmes d’Alina Reyes sont troublants puisqu’elle avoue elle-même avoir eu des échanges de mails avec Sollers (lequel, comme le héros, lui a répondu à travers des livres). Elle ajoute aussi « aimer très fort Sollers » et s’être inspirée de personnages réels, même si son imaginaire les a transformés « jusqu ‘à l’horreur ». Si mon hypothèse est juste (mais ce n’est qu’une hypothèse) cela expliquerait à la fois pourquoi l’auteur regrettait « d’avoir à évoquer des questions d’ordre privé » pour défendre son livre et pourquoi ce livre n’a pas reçu beaucoup de publicité.

Comme quoi, les histoires d’amour avec le Roi Soleil, c’est bien, à condition de ne pas s’appeler Louise de La Vallière.



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