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01/11/2007

De la pension de retraite.

Je reviens sur cette problématique des pensions, évoquée hier. On nous dit donc qu’il est logique de travailler plus longtemps puisque l’espérance de vie augmente. Cette vérité tautologique qu’on nous assène à longueur d’articles de presse mérite d’être décortiquée.

1. Il n’est pas si sûr que l’espérance de vie augmente. Qui dit cela ? Les statistiques du Ministère ? Mais elles sont aux mains de Sarkozy. Des scientifiques, des professionnels de la santé ? Peut-être. Mais on en a déjà vu qui se laissaient acheter. Et puis c’est comme pour les OGM, où il y a autant d’avis favorables que d’avis défavorables, ce qui fait que le commun des mortels ne s’y retrouve plus. Ici, il est à craindre qu’on sera allé interroger justement ceux-là qui disent que l’espérance de vie augmente.
2. Il faudrait ensuite savoir pour qui elle augmente. On se doute bien qu’il vaut mieux être riche, habiter Paris et avoir une villa sur la côté d’Azur plutôt que d’être chômeur d’origine immigrée et de vivoter dans les brouillards de Lille ou de Roubaix.
3. Dans tous les cas, la durée de la vie individuelle tient du coup de poker. Quand on regarde des pyramides d’âge, on se rend compte que le nombre d’habitants reste plus ou moins constant jusqu’à 60 ans, âge où on remarque un recul certain, puis le dessin se termine en flèche jusqu’au sommet. Aux alentours de soixante ans, en effet, il semble bien qu’un petit tiers des vivants aient tiré discrètement leur révérence. Donc, même si, comme on nous le dit et comme c’est bien possible, la moyenne nationale d’espérance de vie est en hausse, rien ne dit que pour moi ou pour vous, chers lecteurs, il en sera de même. Qui peut nous assurer de vivre jusqu’au 82 ans prévus ? Pourtant, il me(nous) faudra bien travailler plus longtemps sans garantie aucune de profiter de ces années supplémentaires, résultat d’un bon niveau de vie et d’une recherche médicale efficace.
4. Par ailleurs, on constate que ces années qui nous sont données en plus, comme un cadeau, doivent être automatiquement consacrées au travail. C’est normal, me direz-vous, puisque les caisses sont vides et que le système actuel n’est pas viable. Tiens, donc et personne ne s’est jamais demandé pourquoi les caisses étaient vides ? Il y aurait beaucoup à dire là dessus. Je soutiens en tout cas que si l’Etat avait été géré en bon père de famille et si on avait constitué une réserve (un fonds de pension ou un fonds de vieillissement, appelez-le comme vous voulez), et bien le système aurait encore perdurer pendant trente ans sans problème (ce qui nous aurait laissé le temps de voir venir et de trouver des solutions acceptables pour tous). Au lieu de cela, on a préféré dépenser, réduire les charges des entreprises (tiens, je croyais que dans le système libéral elles ne devaient bénéficier d’aucun avantage) et s’endetter auprès des banques d’une manière inconsidérée (ce qui fait qu’une bonne partie de nos petits impôts ne sert qu’à rembourser la dette). Non, je crois plutôt que dans notre société tout doit être consacré au travail, c’est une philosophie de vie aussi enracinée qu’elle est arbitraire (les seigneurs du Moyen-Age, par exemple, se considéraient comme déshonorés s’ils devaient travailler). Ainsi donc, les quelques misérables années que je pourrais peut-être gagner sur la mort devront être consacrées à mon asservissement et non à mon épanouissement personnel. Tout qui se rebellera contre cette vérité sera traité de profiteur et de carottier.
5. Enfin, me faire payer pour cette année de vie en plus, cela revient bien à poser l’équation : cotiser ou mourir. Si je veux vivre davantage, je dois payer le prix. C’est donc bien la vie que l’on est en train de taxer là. Je m’étonne que Sarkozy, qui est tout de même un grand homme (si, si, je le pense sincèrement) ait focalisé son attention sur le terme de notre vie. Il aurait plutôt dû en considérer le début et taxer tous les nouveaux nés pour avoir osé exister. Bien sûr, me direz-vous, ces petits êtres n’ont pas demandé à venir au monde, il serait donc illogique de les punir par un impôt. Certes, mais d’un autre côté le catholicisme nous a bien préparés à une faute originelle, alors puisque nous avons bien conscience de notre culpabilité première, autant en profiter et taxer un maximum les nouveaux candidats à la vie. En plus, ils viennent prendre notre place, ce qui mérite assurément une punition exemplaire. Ils veulent vire ? Et bien qu’ils paient. Raisonnement absurde ? Oui bien, sûr, mais pas plus absurde que celui qui nous oblige à payer pour vivre plus longtemps.

31/10/2007

Autre bonne nouvelle

Je lis à l’instant ce communiqué de l’Agence France Presse que les journaux ne semblent pas pressés de répercuter. Alors voici l’information :

« PARIS (AFP) — La cote de confiance de Nicolas Sarkozy baisse de quatre points par rapport à octobre à 53%, et celle de François Fillon chute de huit points à 44%, selon le baromètre TNS-Sofres pour le Figaro Magazine à paraître samedi 3 novembre, rendu public mercredi ».

Ainsi donc Nicolas n’était peut-être pas grand par la taille, mais au moins il occupait les sommets dans les sondages. Il semble bien que ce ne soit plus le cas, ce qui fait qu’il ne lui reste plus grand chose. De plus 60 % des Français souhaiteraient un nouveau referendum sur le raccourci de traité européen que l’on est occupé à faire passer derrière notre dos. Lui qui avait cru qu’en votant pour sa personne le bon peuple acceptait de fait ce traité (il l’a dit, je l’ai entendu), il va devoir revoir sa position. Qu’il se dépêche à le ratifier avant de passer en dessous des 50%. Il n’a d’ailleurs pas à le relire puisque le nouveau traité n’est qu’un résumé de l’ancien. Même Giscard l’a dit et il doit savoir de quoi il parle car, jouissant d’une retraite bien méritée dans son château de Chamalières, il a sûrement eu le temps de comparer les deux versions.

Et qu’est-ce que cela implique, finalement, ce traité ? Beaucoup de choses, mais notamment la privatisation des services publics. On s’y prépare déjà. Ainsi en Belgique, il n’y a peut-être pas de gouvernement, mais il y a assurément des idées. On apprend que La Poste a imaginé de se passer des services de 7.000 facteurs (ce qui, vu l’exiguïté du territoire est énorme) et de les remplacer par… des ménagères sans emploi. D’abord elle seront obligées de se lever tôt et ce sera bien fait pour elles mais surtout on pourra les payer beaucoup moins cher, ce qui est assurément intéressant quand on est un patron. Voilà donc un pays où les hommes de lettres ne sont plus à l’honneur…

ceci dit, il y avait moyen de trouver du personnel qualifié encore moins cher:

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Bonnes nouvelles

Dans la presse d’aujourd’hui, rien que de bonnes nouvelles.

Tout d’abord, le petit Nicolas (prince de Sarkozie et actuellement porteur de couronne au royaume de France), a non seulement demandé une augmentation de salaire de 140 % mais en plus il l’a obtenue. Il n’y a pas à dire, quand on se lève tôt et qu’on parcourt la planète dans tous les sens, on est récompensé. Au moins il y a une justice sociale.

A propos de justice sociale, les syndicats en sont encore à se demander s’ils n’organiseraient pas une nouvelle grève pour défendre les régimes spéciaux de pension. Ils sont en retard. Le gouvernement a déjà expliqué qu’il fallait 40 ans de cotisation pour tout le monde afin d’être équitable. Depuis, il défend déjà l’idée que ces 40 ans doivent devenir 41 ans. Evidemment, si tous les pensionnés veulent vivre un an de plus sur le compte de la collectivité, il ne faut tout de même pas exagérer. Mourir ou cotiser, il faut choisir. Encore quelques semaines et on proposera le chiffre de 45 années pour une carrière normale. Il faut être logique : pourquoi n’y aurait-il que le prince de Sarkozie qui devrait se lever tôt ?

Hier, justement, ledit prince s’était rendu en Corse, qui est manifestement la nouvelle île à coloniser (à moins qu’il n’ait rendu visite à ses anciens beaux-parents et à la mafia locale). «On va vous aider à vous développer et on va faire de la Corse un exemple de réussite républicaine », a-t-il dit sur le même ton qu’il employait jadis dans les banlieues, quand, encore petit candidat, il disait «cette racaille, on va vous en débarrasser ». Il a donc parlé d’investissements. Veut-il investir dans les appartements touristiques de masse et remplacer la côte sauvage par un boulevard digne des bords de Seine tout en faisant plaisir à ses amis entrepreneurs ? Probablement pas. Enfin il n’a rien dit de tel, craignant sans doute qu’on ne place une bombe sous sa voiture (il est sage, car c’est le contribuable qui l’a payée). Non, ce qu’il a proposé, c’est de remettre en question la notion de service public dans les transports. L’Etat n’a plus à assurer des lignes de bateaux régulières (qui coûtent cher), il doit laisser la place à des firmes privées qui font sans doute cela bénévolement puisque le prix de leur billet est moins cher. Donc, en disant, « on va vous aider », Sarko pensait surtout au portefeuille de l’Etat français. Qu’il est brave, tout de même. Les Corses étant presque des Français, ils vont y gagner aussi.

Autre bonne nouvelle, le secrétaire d’Etat à la consommation, Luc Chastel, voudrait privatiser le secteur de l’énergie, afin que le Royaume ne soit plus en retard par rapport aux autres pays européens. Ce serait le principe de l’offre et de la demande, le producteur proposant son prix et le fournisseur l’acceptant ou non. Ce système génial a déjà permis à la Belgique d’augmenter la facture de gaz des particuliers de 30 %, ce qui est remarquable. On aura compris qu’avec ce principe ce n’est pas toujours le consommateur qui gagne, mais au moins il y a toujours un gagnant.

Du côté de l’enseignement, on sait que les élèves du primaire n’iront plus à l’école le samedi et qu’ils pourront donc se lever plus tard. Pourquoi me direz-vous les travailleurs doivent-ils se lever tôt et travailler plus longtemps (voir chapitre des pensions ci-dessus) alors que les enfants doivent faire le contraire ? C’est pour mieux apprendre, nous dit le ministre. Moins on étudie et plus on sait donc. Le système d’apprentissage est donc inversement proportionnel au système de production. Je ne le savais pas (de mon temps on passait encore beaucoup d’heures à l’école) mais le ministre, lui, le savait et c’est ce qui compte. Ce n’est pas pour rien qu’il est ministre. C’est évidemment pour sa compétence qu’on l’a nommé et pas parce qu’il connaissait Cécilia (imaginerait-on une chose pareille ? Il n’y aurait plus de justice).

Les élèves travailleront moins, mais pas les instituteurs, nous a-t-on assuré. Il y a cependant 11.000 postes à supprimer (raison d’économie oblige, c’est normal, il faut être rentable). Oui, mais où et comment ? On imagine déjà de limiter le nombre de redoublement. Ainsi cela fera moins d’élèves au total (puisque la scolarité sera plus courte), moins d’instituteurs et de professeurs et plus d’amour propre pour les jeunes puisqu’ils « n’échoueront » presque plus. Sans doute sortiront-ils avec un diplôme sans avoir maîtrisé toute la matière, mais tout ce qui compte, c’est le diplôme, non ? C’est bien pour cela que Dati avait triché en disant qu’elle détenait celui qu’elle n’avait pas. Mais bon, il faut oser parfois si on veut avoir du boulot. Au moins elle n’est pas chômeuse, elle.

Et les universités dans tout cela ? Les étudiants (surtout ceux de lettres, ces éternels rouspéteurs) continuent à désapprouver le principe de la décentralisation (qui permettra aux régions riches d’avoir un bon niveau d’enseignement et aux régions pauvres de ne plus avoir d’enseignement du tout) ainsi que celui de la responsabilité financière (qui consiste à gérer une université comme une firme privée, autrement dit à ne faire que ce qui rapporte). Ils ont tort, ces étudiants. Quel meilleur moyen de les préparer à la vie des grandes entreprises si ce n’est en rendant leur école semblable à ces grandes entreprises (toutes grandes fournisseuses d’emploi et générant des bénéfices plantureux, comme chacun sait). Vous me direz que les étudiants en lettres ne se retrouveront pas dans ces grandes entreprises mais dans l’enseignement. Comme il n’y a plus de postes de professeurs de prévu, qu’on supprime une fois pour toutes ces sections qui ne servent à rien.

Le groupe franco-américain Alcatel-Lucent, quant à lui, parle de supprimer 4 000 postes, mesure qui viendra s'ajouter à celle déjà mise en oeuvre en février dernier : 12 500 postes avaient été supprimés, dont 1 468 en France. Le but est de réduire les frais afin de dégager (enfin ) des bénéfices (Le sud-coréen Samsung Electronics a de son côté annoncé un chiffre d'affaires de 100 milliards de dollars en 2007, ce qui est nettement mieux). Pour le moment, on ne sait pas encore dans quelle proportion la France sera touchée par ces licenciements. On espère qu’elle le sera beaucoup, ce qui permettra à quelques travailleurs de se lever un peu plus tard. Le libéralisme, en effet, ne vous demande pas des sacrifices toute votre vie, il ne faut pas croire ceux qui vous disent cela.

Dans la presse internationale, on apprend que le barrage de Mossoul en Irak risque de s’effondrer. Cela provoquerait une vague de 20 m de haut qui irait jusqu’à Bagdad et occasionnerait la mort de centaines de milliers de personnes. C’est, paraît-il, les fondations du barrage qui ne sont pas solides. Un petit incident (une bombe américaine larguée là par erreur, par exemple) et c’en est fini des opposants au régime de Bush. Magnanimes, les Américains ont déjà proposé de le reconstruire. Voilà qui va donner de l’emploi et en cette période de crise il faut s’en réjouir. De toute façon les Irakiens ont de quoi payer puisqu’ils ont du pétrole. C’est même nous qui le leur achetons.

Les vrais faux orphelins du Tchad ne seront plus vendus en France pour la modique somme de 2.400 euros. Il faudra attendre la reprise des hostilités pour avoir de vrais orphelins labellisés qu’on pourra revendre plus cher. Kouchner, le sauveur, veut d’ailleurs un couloir humanitaire pour résoudre le problème. Il défend aussi la présence de Total en Birmanie, société, qui, si elle s’en allait de ce pays, laisserait un vide économique sans précédent et fort préjudiciable à la population. Nous n’en avons jamais douté. Le côté philanthropique de Total n’a jamais échappé à personne.

12/10/2007

Voyage en URSS

Monsieur Nicolas de Boca, petit tsar de Sarkozie, a rendu visite au grand Tsar de toutes les Russies. Mal lui en prit car la presse soviétique, au lendemain de sa venue, s’est montrée fort critique envers sa personne. Elle a notamment ironisé sur ses nouveaux talons, qui lui permettent désormais de regarder dans les yeux les plus grands de ce monde. Elle a parlé de ses mimiques disgracieuses et surtout elle a cité, en pouffant de rire, la phrase historique qu’il a prononcée en arrivant au Kremlin : « Cela fait très longtemps que j'avais envie de venir ici. Se réveiller sur la Place Rouge, ce n'est pas rien pour moi ». Phrase courtoise en soi et remplie de bonnes intentions. Le seul problème, c’est que la Place Rouge n’était pas visible des fenêtres de sa chambre d’hôtel. Et le journaliste d’ajouter : « On a commencé à se demander où le président Sarkozy avait bien pu se réveiller pour voir alors la Place Rouge. (…) On peut voir la Place Rouge depuis la fenêtre du Mausolée (de Lénine, au milieu de la place). Mais le Mausolée n'a pas de fenêtre. »

Lors de la conférence de presse qui a suivi sa visite, Monsieur Nicolas de Boca, petit tsar de Sarkozie, a parlé du souhait des investisseurs français d'entrer dans le capital de Gazprom",
Nezavissimaïa Gazeta, a paraît-il résumé ce propos en titrant :"Rêves et fantaisies de Nicolas Sarkozy ». Evidemment ! Qu’espérait-il ? Lui qui avait critiqué Poutine lors de sa campagne électorale et qui, depuis qu’il est élu, ne fait que se rapprocher de ses amis américains, devait-il s’attendre à ce que la Russie l’invite à partager les bénéfices de ses immenses réserves naturelles ? Tout cela au moment même où Poutine nationalise le plus possible… Allons, on a beau être le chantre du libéralisme, il est des pays où on n’est pas écouté.

Si on ajoute à tout cela qu’il n’y a eu, durant cette visite, aucune avancée concrète sur l'Iran, le Kosovo ou la coopération économique, on peut dire que ce fut un déplacement inutile.




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05/09/2007

Tant va la cruche à l'eau...

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Dans la suite logique de l’article d’hier, voici qui va venir mettre un peu de baume au cœur de ceux qui n’apprécient que fort modérément leur nouveau président (si, si il y en a tout de même quelques–uns).

Un professeur en communication politique à l’Institut d’études politique de Paris prédit que Nicolas Sarkozy ne parviendra pas, sur le long terme, à maintenir de lui-même une image positive parce qu’il se montre trop. Il prévoit une usure de cette image.

Il estime que Sarkozy fait du marketing politique, autrement dit qu’il analyse les besoins de certains groupes de citoyens pour répondre aussitôt à leur attente avec une solution. Mais à vouloir trop jouer à ce jeu, on prend des risques. Tant va la cruche à l’eau…

« Il y a bien sûr un revers évident à la saturation médiatique, c'est l'usure de l'image et de la parole, la banalisation de la parole, et le risque de se contredire. » Voilà qui rassure.

« Nicolas Sarkozy est un "voleur de lumière" et il irrite aussi bien son premier ministre que la chancelière allemande. Et cela finira par avoir un coût politique. » Encore mieux. Et notre politologue de comparer Sarkozy à Blair, qui, lors du décès de la princesse Diana, a su faire de la politique compassionnelle. Il avait compris la charge émotionnelle que cette mort avait suscitée dans la population. Pourtant, à la fin de son « règne », il était mal vu de tous et surtout des médias (et pour cause, on ne peut pas oublier ses mensonges sur la nécessité d’envahir l’Irak).

Sarkozy finira bien, lui aussi, par se mettre dans une position embarrassante. En attendant le mal sera fait. On le voit envoyer Kouchner en Irak. Outre que celui-ci a dû présenter des excuses au premier ministre de ce pays pour avoir prédit un peu vite son départ pour incapacité, l’homme de l’humanitaire a estimé qu’il était temps pour la France d’être présente en Irak. Comprenez : changeons de politique et soutenons les Américains, nous en retirerons bien quelques bénéfices économiques. Une telle attitude va retourner les opinions arabes contre la France, qui apparaissait pourtant comme une exception parmi les pays occidentaux. Si un jour une présence militaire française devait être présente en Irak, même si c’est sous le couvert de rétablir la paix ou de mener une mission humanitaire, il est clair que les pertes humaines seront lourdes, non seulement parmi les soldats mais aussi parmi les civils à Paris car il y a fort à parier que les attentats reprendront. De plus, s’ils reprennent, ce sera un beau prétexte pour justifier une guerre des civilisations. Après tout les guerres ont toujours fait tourner l’économie, n’est-ce pas ?

Remarquons que la politique africaine de Sarkozy n’est pas meilleure que sa politique au Moyen-Orient. En tout cas les propos qu’il a tenu récemment à Dakar (« l'imaginaire" du paysan africain "où tout recommence toujours" et où "il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès"), qui semble dénier aux Africains la possibilité de se tourner vers l’avenir, ne lui aura pas fait que des amis. Comme quoi les paroles elles-mêmes peuvent blesser. Parions que notre grand orateur national finira par se mettre tout le monde à dos et par se brûler à son propre jeu. Quelle idée aussi de vouloir imiter Bush ! On voit où ses discours et sa politique ont mené ce dernier. Quand il se rend en Australie, qui est tout de même une terre amie pour lui, peuplée d’Anglo-Saxons, il faut couper une ville en deux pour assurer sa sécurité. On croit rêver.

04/09/2007

Nicolas ou de l'éducation

Une nouvelle fois, la famille Sarkozy, au grand complet, fait parler d’elle. En effet, dans Le Monde d’aujourd’hui, les lecteurs médusés et époustouflés peuvent découvrir trois articles sur la nouvelle dynastie qui dirige désormais la France. En fait, il ne se passe pas un jour sans que la presse ne relate les faits et gestes du président ou de son entourage. A croire qu’elle est payée pour cela. Il est vrai que ceux qui en sont les propriétaires sont aussi les grands amis du petit Nicolas. N’avait-il pas lui-même fait des reproches autrefois au fils Lagardère quand ses journaux avaient évoqué la possible séparation de Nicolas et de Cécilia ? « Ou bien c’est un traître, ou bien il ne sait pas tenir son groupe » se serait-il écrié. Cela veut tout dire.

Donc aujourd’hui trois articles.

Le premier consacré à Cécilia, qui s’explique (sans rien révéler, en fait) sur son rôle dans la libération des infirmières bulgares. Non, elle ne veut pas être entendue par la Commission parlementaire car elle était en Libye pour ainsi dire à titre privé. Ce qui ne l’a pas empêchée de dialoguer en anglais avec Kadhafi et sans traducteur encore bien. Si elle n’avait pas été la femme du président, aurait-elle ainsi rencontré Kadhafi et bu le thé avec lui ? Non, évidemment. C’est bien la preuve qu’on joue ici un double jeu. Si elle échoue dans son entreprise, cela n’a aucune conséquence pour la France, puisqu’elle agit en son nom propre. Par contre si elle réussit, c’est Sarkozy qui en sort vainqueur, tout en évitant les questions indiscrètes des parlementaires puisque après tout on est dans la sphère privée. D’ailleurs, quand elle dit : « "J'ai offert à l'hôpital de Benghazi des médecins chargés de former leurs homologues palestiniens, des équipements, des traitements contre le sida et des visas rapides pour que ces cas urgents puissent venir se faire traiter en France", on peut se demander si c’est avec son argent personnel qu’elle comptait payer tout cela. Il faut le supposer puisqu’elle a ajouté : "On ne m'empêchera jamais d'essayer d'aider ou de soulager la misère du monde, dans quelque pays que ce soit." On n’a jamais douté que les riches s’intéressent au pauvres. C’est d’ailleurs bien pour cela qu’on a élu son mari.

Le deuxième article relate les mésaventures du gamin. Celui à qui on avait volé le vélomoteur autrefois et pour lequel toutes les polices de France et de Navarre s’était coupées en quatre. Maintenant qu’il l’a récupéré, son vélomoteur, voilà qu’il tamponne l’arrière d’une BMW à un feu rouge. Il est accusé de délit de fuite et de geste grossier envers le conducteur du véhicule tamponné. Comment interpréter ce fait ? Soit, de nouveau, M. Lagardère ne sait pas tenir son groupe de presse, qui n’aurait jamais dû publier cela, soit au contraire c’est voulu. Dans le plus pur style américain, c’est la famille du politicien que l’on met en avant. Quoi de plus sympathique, de plus proche du peuple, qu’un président qui a, comme tout le monde, des problèmes avec ses enfants ? Ah, ces adolescents ! Incorrigibles… Nicolas nous en deviendrait presque sympathique (j’ai bien dit presque). On l’imagine le soir, autour de la soupe fumante (enfin, quand il n’est pas en croisière ou dans les grands hôtels parisiens), en train de réprimander le geste grossier de son rejeton et de lui donner une leçon de morale sur ce qui se fait et ne se fait pas.

Le troisième article est plus sérieux puisqu’il traite de l’empereur lui-même et de sa fonction de dirigeant. Dans un texte « républicain et fondateur » qu’il adresse à tous les enseignants (c’est la Poste qui va se frotter les mains, dommage qu’elle ne soit pas encore privatisée), il se place dans la droite ligne historique de Jules Ferry. Mais là où son illustre prédécesseur se contentait de répandre le savoir, Nicolas I se risque à une synthèse dialectique digne d’Hegel. Autrefois, dit-il en, substance, on a tout misé sur le savoir au détriment de l’enfant. Par la suite (il ne cite plus mai 68 pour ne pas se mettre à dos ces enseignants auxquels il s’adresse), on a respecté l’enfant au détriment du savoir. Il propose donc une synthèse des deux doctrines, dont l’élève sortirait victorieux puisqu’il serait respecté tout en ayant appris beaucoup de choses. Vu comme cela on ne peut qu’applaudir. Il est vrai que la gauche, trop souvent, a contribué à abaisser le niveau des programmes croyant venir ainsi en aide aux plus défavorisés. Il est vrai aussi, si on s’en tient au seul cours de français, que l’analyse et la grammaire sont à peine effleurées, ce que l’on regrettera évidemment. Mais là où on ne suit plus très bien le discours sarkozien, c’est quand on se rend compte qu’à côté de sa lettre aux éducateurs, il supprime 20.000 postes d’enseignants. N’y aurait-il pas là un petit paradoxe ? Sans doute faut-il attendre quelques jours encore afin que, dans un nouveau discours adressé cette fois « aux éducateurs qui sont restés en place », il ne nous offre une nouvelle synthèse dialectique qui nous fera comprendre comment on apprend mieux avec moins d’enseignants.

Notons en passant qu’il a même plaidé pour la culture générale, ce qui est admirable de la part de quelqu’un qui en possède peu et qui en principe doit surtout viser à ce que le patronat dispose de la main d’œuvre nécessaire en temps voulu. Alors, venir en plus nous parler de culture, c’est là un geste gratuit qu’on n‘attendait pas (plus).

16/08/2007

De la vie privée des hommes publics

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Les admirateurs de Sarkozy Premier (et ils sont forcément nombreux puisque celui-ci a été élu démocratiquement) dénoncent unanimement les critiques qui pleuvent sur leur pauvre président (je n’ai pas dit président des pauvres). Ils regrettent surtout que l’opposition, au lieu de s’en tenir au domaine des idées politiques, semble s’en prendre à la personne-même du petit Nicolas. Il est vrai que ce n’est pas sympathique et pour un peu on verserait une larme sur le sort peu enviable de la vedette. Mais à y bien réfléchir, on se rend compte que c’est Sarkozy lui-même qui a placé le débat sur ce plan-là.

Depuis le début, il se complait à jouer un film devant les caméras. Plutôt que de rester dans le rôle sérieux du Président de la France, comme Chirac ou Mitterrand l’avaient fait avant lui (quitte à être un peu trop guindé et un peu trop protocolaire), il a voulu se montrer décontracté. Sur toutes les photos on le voit soit en training en train de faire de la course à pied, soit torse nu en train de bronzer sur un yacht ou sur la plage d’un lac américain. Manière habile de ne pas se faire oublier et manière encore plus habile de neutraliser les critiques à l’égard de ses décisions politiques. On ne parle donc plus de ce qu’il a fait comme président, on se concentre sur sa personne. D’ailleurs si vous écrivez un article de quatre pages pour dénoncer son projet de loi sur la récidive, personne ne le lira, les gens préférant voir les photos de leur idole en train d’accoster brutalement un bateau de journalistes. En fait, politiquement, il pourra décider à peu près n’importe quoi, il l’emportera à l’esbroufe sur le plan médiatique. Il aurait pu être chef de rayon dans une grande surface, il serait parvenu à vendre très cher des produits de mauvaise qualité tout en ayant l’assentiment de la clientèle.

Dès lors, puisqu’il gagne toujours et qu’il joue de son personnage pour faire passer ses idées, rien d’étonnant à ce que l’opposition (qu’elle en soit consciente ou non) se concentre elle aussi sur sa petite personne plutôt que sur ses idées néo-libérales. Bien entendu, une fois qu’elle a mis le pied dans ce bourbier, on le lui reproche aussitôt : elle ferait du harcèlement en guettant les moindres faits et gestes de l’empereur. Sans doute, mais à qui la faute ? A force de se faire photographier devant le yacht de votre ami milliardaire, il fallait s’attendre à une réaction de ce genre.

Les choses vont plus loin qu’il n’y paraît, cependant. En envoyant sa tendre moitié Cécilia jouer les négociatrices en Lybie, le petit Tsar de toutes les Sarkozies s’est montré très habile. D’une part il a fait intervenir une femme dans une affaire qui concernait surtout les femmes (les infirmières bulgares) et d’autre part il est resté en retrait, ce qui lui a permis de négocier son contrat d’armement en toute discrétion. De ce contrat, il ne dira évidemment pas qu’il fait plaisir à ses amis milliardaires (il en a combien, au fait, d’amis milliardaires ?), il dira qu’il donne de l’emploi aux Français (enfin, à ceux qui veulent bien se donner la peine de se lever tôt). On ne s’étonnera pas non plus de la soudaine discrétion qui a été de mise dans cette affaire, discrétion à laquelle il ne nous a pas habitués lors de ses vacances luxueuses. Par contre on notera l’habileté du procédé. Quand l’opposition demande à voir clair dans cette affaire et réclame que la belle Cécilia soit entendue par une commission parlementaire (puisqu’elle a agi au nom et sur ordre de son président de mari, dont elle était en quelque sorte le porte-parole officiel), on répond que cela relève de la sphère privée. De nouveau, donc, on joue sur le côté personnel pour faire passer une manœuvre politique. Mais comme l’argument ne semble pas tout à fait convaincant, on trouve une autre réponse : Cécilia, ce n’est pas Bobonne (allusion à l’épouse de Charles de Gaulle, qui tricotait des chaussettes à l’Elysée pour passer le temps) s’est écrié André Santini, le secrétaire d’Etat chargé de la Fonction publique :

"Cécilia est une femme très moderne, indépendante. (...) Je suis toujours surpris de l'image qu'elle a chez les femmes, qui disent: "elle a raison, elle ne veut pas être bobonne, elle ne veut pas faire le yucca, le caoutchouc, elle veut pas être là quand on sonne, et bien c'est très bien""

Donc, la nouvelle première dame de France fait elle aussi de la politique. Elle qui n’avait pas été voté en même temps que son mari et qui se moquait pas mal du rôle qu’on voulait lui faire jouer, voilà maintenant qu’elle remplace le Président débordé. Mais, que je sache, ce n’est pas pour elle que les Français ont voté (enfin, certains, pas tous) mais pour Nicolaou. Une nouvelle fois on confond les registres privés et publics et on ne sait plus où est la limite. Cela permet de créer des zones d’ombre et d’éviter les critiques. Si les infirmières sont libérées, c’est grâce à Sarkozy (qui est arrivé juste au bon moment, quand Kadhafi avait suffisamment fait monter la pression afin d’en retirer un avantage : sa réinsertion sur le plan international). Si par malheur les démarches avaient échoué, on aurait dit que Cécilia, en tant que femme, avait fait une simple visite de courtoise.

Enfin, on n’est pas à une contradiction près. C’est comme quand Santini, chargé, comme on l’a dit, de la Fonction publique trouve anormal que 24% de la population soit fonctionnaire. C’est peut-être vrai, mais le fait que ce soit lui qui le dise a de quoi surprendre.

09/08/2007

Essai de sémiotique ou étude de la gestuelle présidentielle.

On sait qu’en littérature, on ne publie que ce qui se vend. On sait aussi qu’on ne vend que ce dont on parle. Autrement dit, le contenu d’un livre a moins d’importance que la publicité qui est faite autour de lui. Plus on en parle et mieux c’est.

Le petit président de la grande Sarkozie a visiblement compris la leçon (il ne me semble pourtant pas un fervent adepte de la lecture) puisque qu’il ne se passe pas un jour sans qu’on ne parle de lui. Après l’affaire du yacht privé qu’un riche ami industriel lui avait prêté (croisière qui, on s’en souvient, avait remplacé la retraite initialement annoncée, laquelle aurait dû avoir pour fonction de réfléchir sur le poids de la fonction présidentielle), le voici, sur son lieu de villégiature, qui passe à l’abordage du canot des journalistes occupés à le photographier. Il s’ensuit des propos assez virulents, du moins peut-on le supposer d’après le ton employé, car pour ce qui est du fond, exclusivement exprimé en français, les pauvres photographes américains n’en on pas compris le sens.

Comment interpréter un tel geste ? On n’avait jamais vu Mitterrand invectiver la presse en maillot de bain ou Giscard apostropher les journalistes en pyjama. Il faut dire que le nouvel occupant de l’Elysée a un style bien à lui, un style qui mérite qu’on s’y attarde.

Faut-il voir dans l’abordage du canot un trait de colère incontrôlé ? Si c’est le cas, ce n’est pas là un geste digne du représentant d’une grande nation. Le sieur Sarkozy aurait dû comprendre, même s’il est en vacances privées, qu’un tel geste risquait d’alimenter la critique et de se retourner contre lui. Un mauvais point pour lui, donc. Mais l’homme aime trop se pavaner devant les caméras pour qu’une autre explication ne puisse être envisagée. Le Président aurait délibérément accosté les journalistes précisément parce qu’il savait qu’on en parlerait. Même en période estivale, il ne faut pas que l’attention médiatique se détourne de sa personne. Eternel candidat, il prolonge la campagne électorale (où il a été excellent puisqu’il est parvenu à ce que les pauvres votent pour lui alors qu’il n’il n’a pas caché qu’il ne travaillerait que pour les riches) en se mettant lui-même sur le devant de la scène, ce qui détourne l’attention des mesures qu’il a prises en tant que Président. De plus, en pleine polémique suite à la signature d’un contrat d’armement avec la Libye (lequel intervenait après la libération des infirmières bulgares, épisode dans lequel c’est surtout Cécilia qu’on avait habilement mise en avant), il n’était pas mauvais de lancer les médias sur d’autres pistes.

On remarquera en passant que le petit Nicolas n’a pas envoyé ses gardes du corps pour faire la morale aux photographes, mais que, tel superman, il s’est déplacé lui-même. D’un côté, il rabaisse donc la fonction présidentielle en la confinant dans des tâches subalternes et secondaires, mais de l’autre il montre qu’il n’a pas peur de donner de lui-même et que comme tout bon citoyen ordinaire il protège sa famille.

Ce côté « démocratique » qui le fait ressembler à monsieur tout le monde, il le cultive volontiers. Quand on ne le voit pas en train de faire son jogging matinal, on le découvre en maillot de bain et torse nu. Il y a là, manifestement, une tendance à l’exhibitionnisme. Le but est donc bien de se faire voir et de faire en sorte qu’on en parle.

De toute façon, qu’il ait été réellement en colère, lassé d’être harcelé par les paparazzis, ou au contraire qu’il ait délibérément provoqué l’incident, le résultat est le même : on ne parle plus que de cela. En ce mois d’août, aucun article de fond sur la TVA sociale (destinée à faire payer par les consommateurs ordinaires les avantages fiscaux accordés aux entreprises), la loi sur la récidive ou le démantèlement programmé de la fonction publique. Il faut savoir à ce sujet qu’on ne remplacera plus tous les fonctionnaires qui partiront à la retraite afin de faire des économies budgétaires. C’est peut-être une bonne idée à court terme, mais sur une longue période cela aura pour conséquence d’empêcher les ministères de remplir leur rôle avec efficacité (ce qui permettra sans doute de proposer des privatisations partielles). A côté de cela on parle de supprimer des milliers de postes de professeurs, ce qui entraînera immanquablement une explosion de la petite criminalité. Cela ne fait rien. Le nombre des gardiens de prison a, lui, été revu à la hausse.

C’est donc de tout cela qu’il ne faut surtout pas parler, en recentrant le débat sur la personne du Président lui-même, cet éternel candidat qui prolonge la campagne électorale en la transformant en campagne de séduction. Et qui dit séduction, dit représentantes de la gent féminine. Or, des femmes, il n’en manque pas dans l’entourage de Sarkozy. D’abord il y a la belle Cécilia, dont la presse « people » s’est emparée et dont on se demande toujours si elle sera toujours là le lendemain. Et puis il y a toutes les femmes du gouvernement et plus particulièrement Rachida Dati, cette superbe étrangère (père marocain et mère algérienne) qui symbolise la réussite sociale promise à la population immigrée (pour autant que celle-ci fasse l’effort de s’intégrer). Choisie précisément pour ce qu’elle incarne, elle aura le triste rôle de mettre en prison ceux de ses frères de race qui n’auront pas respecté les lois françaises.

Nicolas Sarkozy joue donc un rôle en permanence. C’est en acteur qu’il s’est fait élire et c’est en acteur encore qu’il dirige le pays. Rien d’étonnant dès lors à ce que les photographes le harcèlent comme ils le font d’habitude avec les vedettes du festival de Cannes. En rabaissant le prestige présidentiel et en donnant de lui-même une certaine image (genre faux sportif décontracté), le locataire de l’Elysée nous fait oublier son manque de culture, son manque de style et surtout ses idées néo-libérales et pro-atlantistes si déplaisantes. En attendant une bonne partie des Français sont en vacances (les autres travaillent ou ne savent pas partir) et, sous la pluie, dans leur camping en Normandie ou en Auvergne, ils rêvent de cette villa américaine où leur président peut jouir de onze salles de bain. Il l’avait bien dit : l’avenir appartient manifestement à ceux qui se lèvent tôt.

17/05/2007

Résistance

La première sortie de notre nouveau président aura donc été un devoir de mémoire envers la Résistance. Curieux. On savait déjà qu’il avait incorporé dans ses troupes les centristes de Bayrou et qu’il était en tain de grignoter un à un les élus du PS. On ignorait par contre qu’il lorgnait aussi sur les communistes, au point d’aller se recueillir sur les lieux de leur exécution par les fascistes.

Trêve de plaisanterie. Quel symbole peut bien cacher ce geste, si ce n’est celui de vouloir s’inscrire lui-même, Sarkozy, dans l’Histoire de France. Après avoir déposé une gerbe en souvenir de Clemenceau et de De Gaulle, le voilà qui verse une larme sur ces jeunes gens qui sont morts pour notre liberté. Manière habile de se réconcilier une partie de la gauche, toute prête à entrer précisément en résistance ? Peut-être. Ou bien s’agit-il de souligner l’importance de ces immigrés juifs qui ont fait la France au point de mourir pour elle ? De bons immigrés, donc, pas comme cette racaille qui brûle les voitures parce qu’elle conteste le vote démocratique… C’est que Nicolas a besoin de montrer qu’il aime la France lui aussi, peut-être pas au point de lui sacrifier sa vie, mais au moins tout son temps libre. D’origine hongroise par son père (un petit noble qui dut fuir la Hongrie devant l’avancée soviétique. On se demanderait bien en passant quelle avait été sa réaction quand  les Allemands envahirent sa belle terre de Bohème), juif français par sa mère, ayant épousé une jeune fille corse en premières noces, notre bon Nicolas ne semble pas à priori incarner le « Français de souche » qu’il a promis de défendre pendant sa campagne. Il lui faut donc en rajouter en usant de la symbolique. Jeanne d’Arc était déjà prise. Il s’écarte donc de la pucelle pour se tourner vers ces jeunes gens virils qui ont combattu contre les nazis. Rien à redire.

Rien à redire si ce n’est précisément qu’il en fait trop. Personne ne lui conteste le droit de représenter la France, pays d’ailleurs où il est né. La France de 1789 est trop démocratique pour venir lui reprocher ses origines hongroises ou juives. Là où le bât blesse, c’est que cette terre qui a accueilli son père, il ne veut plus qu’elle en accueille d’autres. Dehors tous ces étrangers qui ne travaillent pas et qui viennent épuiser la mère patrie. Seuls les méritants (comme lui) pourront rester. Et c’est vrai qu’il est méritant, le petit Nicolas. Toujours le premier (enfin, sauf à l’école, mais passons), il a dépassé tout le monde, ayant bien travaillé et surtout pour lui. D’où sans doute sa théorie sur le capital et sur les gens qui se lèvent tôt. Soyez méritants comme moi, nous dit-il et l’avenir vous sourira.   En attendant, il nous invite à verser une larme sur ceux qui ont fait l’Histoire de France. Il se fait même professeur en proposant de faire lire dans toutes les écoles la dernière lettre de Guy Môquet, poignante à souhait, il est vrai.  Sur le site de Champignac (http://champignac.hautetfort.com/), Dominique nous fait remarquer qu’il eût été plus subtil de proposer la lettre de Manoukian, tout aussi émouvante, mais beaucoup plus profonde.

Rappelons que tout cela déboucha sur l’Affiche rouge, de laquelle s’est inspiré Aragon pour son célèbre poème. Qu’il nous soit permis de redonner ici ce beau texte, puisque nous aussi, en quelque sorte,  nous entrons en résistance.

 

« Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l’orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n’éblouit pas les yeux des Partisans.

Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbes et de nuit hirsutes menaçants
L’affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants.

Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour voir le jour durant
Mais à l’heure de couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE
Et les mornes matins en étaient différents.

Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février pour vos derniers moments
Et c’est alors que l’un de vous dit calmement

Bonheur à tous bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand.

Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie Adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan.

Un grand soleil d’hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée O mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d’avoir un enfant.

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant.
 »

07/05/2007

La France du changement

Tout va enfin changer a promis le candidat Sarkozy. Il était temps et c'est pour cela que plus de la moitié de la population a voté pour lui. Voici donc ce qui pourrait bien se passer demain. L'édification d'une société digne du Meilleur des mondes de Huxley ou du 1984 d'Orwell. Politique fiction? Pas si sûr.

- Baisse des impôts pour les riches et pour les entreprises, creusant encore plus le déficit public et l'endettement de la France, une mesure purement idéologique et totalement irresponsable.

- Démantèlement du droit du travail, CPE pour tout le monde, précarité généralisée, avec un licenciement possible pendant 2 ans, sans justificatif ni recours.

- Retraite à 70 ans, et encouragement des retraites privées (fond de pension) pour ceux qui souhaitent partir plus tôt à la retraite et dans de meilleures conditions

- Semaine de 48 heures (alignement sur la norme européenne), et autorisation des heures supplémentaires jusqu'à 70 heures par semaine (opt-out, comme en Angleterre)

- Suppression des charges sociales sur les heures supplémentaires, ce qui encouragera les entreprises à recourir aux heures supplémentaires plutôt qu'embaucher

- Obligation d'effectuer un "travail d'utilité collective" (des travaux forcés payés moins que le SMIC) pour les bénéficiaires de minima sociaux

- Restauration du service national obligatoire pour les jeunes

- Adoption de la constitution européenne par le parlement, sans consulter les Français par référendum

- Privatisation d'EDF, de la SNCF, de la Poste. ANPE remplacée par des agences privées pour le placement des chômeurs.

- Autorisation des OGM. (Nicolas Sarkozy est le seul candidat à la présidentielle à ne pas s'être engagé à un moratoire sur les cutures d'OGM).

Immigration choisie, c'est à dire appel à l'immigration quand le rapport entre l'offre et la demande sur le marché du travail est défavorable aux entreprises, risquant ainsi de les obliger à augmenter les salaires

- Suppression de la séparation des églises et de l'état, pour permettre aux lieux de culte d'être financées par l'argent du contribuable

- Réduction du nombre d'enseignants, réduction du budget de l'éducation nationale, l'argent restant devant être partagé avec les écoles privées (suppression de la loi Falloux)

- Augmentation du budget militaire pour renforcer les capacités de la France à participer aux guerres des Etats-Unis, au grand bénéfice des multinationales de l'armement, notamment Dassault (dont le PGD Serge Dassault est député UMP et sarkozyste convaincu), et Lagardère (dont le PDG Arnaud Lagardère est le parrain d'un fils de Sarkozy).

- Extension des pouvoirs présidentiels, au détriment du premier ministre et du parlement

- Généralisation des machines à voter, afin de pouvoir truquer les futures élections

- Modification probable du jeu électoral en autorisant à nouveau les entreprises à financer les partis politiques, et en légalisant les publicités politiques à la télévision (comme aux USA), afin de donner l'avantage au parti le plus riche, c'est à dire le plus favorable aux intérêts des multinationales afin de bénéficier de leur "générosité"

- Généralisation de la vidéosurveillance "intelligente", avec détection automatique des comportements
interdits ou jugés suspects y compris pour les infractions anodines, comme allumer une cigarette dans un lieu public. La vidéosurveillance "intelligente" aura pour effet de multiplier les bavures policières (comme l'assassinat d'un jeune brésilien par la police à Londres après les attentats)

- Fichage des enfants dès la maternelle, pour repérer les "futurs délinquants".
(En tant que ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy avait prévu de faire adopter cette mesure début 2007, mais il l'a finalement retirée à cause de la polémique qu'elle pouvait susciter avant l'élection présidentielle)

- Création de prisons privées, comme dans le film "Fortress". Aux Etats-Unis, un tiers des prisons sont déjà privées, et l'un des buts de la répression est désormais de gonfler les profits des sociétés qui gèrent ces prisons et qui sont rémunérées en fonction du nombre de prisonniers.

Et à plus long-terme:

- Arrestations préventives, comme dans "Minority Report", avec emprisonnement des personnes en raison des crimes qu'elles "pourraient commettre" en fonction de probabilités établies par la police grâce au recoupement des fichiers informatiques publics et privés. Ces fichiers enregistrent de multiples données qui permettent de presque tout savoir sur chaque individu (consommation, déplacements, fréquentations, situation professionelle, financière, familiale, santé, horaires et habitudes de vie, lectures et sites internet consultés, caméras de surveillance, etc)

- Utilisation du terrorisme comme prétexte pour rendre obligatoire le marquage de chaque citoyen avec une puce électronique insérée sous la peau et lisible par un scanner ou par satellite. (voir l'article sur les implants)

Avec Nicolas Sarkozy, vivre en France deviendra un cauchemar digne des visions les plus sombres de la science-fiction, comme "1984" de George Orwell ou "un bonheur insoutenable" d'Ira Levin. Une minorité de privilégiés vivront dans l'opulence et à l'abri de la répression, tandis que le reste de la population vivra dans la misère et dans la peur (peur de la répression, peur des délinquants, peur des attentats, peur de perdre son misérable emploi ou son logement


- http://www.syti.net/SarkozyDanger

27/04/2007

Le candidat des pauvres

Il n’est pas facile d’être candidat, c’est un fait. Cela demande beaucoup de savoir-faire. Or, Monsieur Sarkozy (vous aurez remarqué que je ne dis plus le petit Nicolas car il sera bientôt à la tête de l’Etat, ce qui tout de même n’est pas rien), Monsieur Sarkozy donc, qui fut un mauvais ministre et qui sera demain un plus mauvais président encore, se trouve être un excellent candidat.

Comment, en effet peut-on défendre le patronat et réclamer des baisses d’impôts pour les sociétés et en même temps se faire le porte-parole du peuple contre les élites (condition nécessaire à toute élection si on veut avoir des voix) ? C’est là un tour de force qui requiert une certaine intelligence, il faut l’avouer.

D’un côté, il peut prononcer dans un discours à Toulouse le 12 avril dernier : « Si je suis élu président, tout ce que la droite républicaine n’osait plus faire parce qu’elle avait honte d’être la droite, je le ferai », ce qui, on en conviendra, rassurera les investisseurs qui ne savent que faire de leur argent. On n’avait jamais vu quelqu’un de droite avouer jusqu’à quel point il était à droite.

De l’autre il pourra dire : "Je veux parler d’une(…) souffrance, bien réelle, qui ne doit pas être sous-estimée :celle de la France qui n’est pas dans la précarité, qui se lève tôt, qui travaille dur, qui se donne du mal pour nourrir sa famille et élever ses enfants, qui elle aussi je l’affirme est à la peine, et qui entend qu’on le sache et qu’on réponde enfin à son appel. » Là, il s’adresse aux Français ordinaires, autrement dit à la majorité de la population(et donc à sa réserve d’électeurs).
Comment ceux-ci ne vont-ils pas lui reprocher de soutenir le patronat ? Tout simplement en déviant leur regard vers les autres, vers ceux qui ne font rien, autrement dit les chômeurs et les abonnés au RMI. Vous, Français qui travaillez, leur dit-il, vous êtes honorables précisément parce que vous travaillez et même souvent durement, je le sais. Et il ajoute aussitôt, perfide :

« Je n’accepte pas qu’il y ait des gens qui soient au RMI et qui, à la fin du mois, aient autant que des gens comme vous qui se lèvent tôt le matin. »

Bien joué. Les citoyens ne pensent plus aux fortunes colossales que le candidat Sarkozy va aider encore à accroître, ils regardent en dessous d’eux (ce qui fait toujours plaisir de savoir qu’il y a encore plus bas que vous).Et là ils voient des gens qui ont à peu près les mêmes revenus que les leurs en ne faisant rien. Les rentiers, ce sont ceux-là, finalement, pas les patrons, qui après tout travaillent.

Et l’ami Sarko continue à enfoncer le clou : « L’assistanat généralisé est une capitulation morale. L’assistance est une atteinte à la dignité de la personne. Elle l’enferme dans une situation de dépendance. Elle ne donne pas assez pour une existence heureuse et trop pour inciter à l’effort. » Manière habille de suggérer que l’Etat peut réduire ses dépenses et même qu’il le doit. Car aider de telles personnes, ce n’est pas leur rendre service, c’est même pour ainsi dire immoral. Fini donc l’Etat providence (ce qui permettra au passage de réduire les impôts des sociétés). Votez pour moi et tout ira mieux.

Bien sûr il y a les fils de riches, qui eux aussi ne font rien et qui vivent de l’argent que papa a amassé en spoliant les autres. Mais à la limite, c’est moins grave car c’est de l’argent privé, ce n’est pas la collectivité qui paie. Argument imparable.

Et est-ce que le capital, plutôt que d'amonceler des euros dans des grands coffres, ne pourrait pas plutôt venir en aide à tous ces nouveaux pauvres ? C’est là une solution qu’il faut écarter d’emblée et le futur calife a trouvé la phrase qu’il fallait : : « Ils disent : faisons payer le capital ! Mais si le capital paye trop, il s’en ira ».

Ah, il n’y a pas à dire, il est peut-être petit, mais il es t très fort, l’ami Nicolas. En tout cas il a réponse à tout. Pour un peu on voterait pour lui !

24/04/2007

Des deux France.

La France coupée en deux ? Pas vraiment, en fait, dans la mesure où les socialistes genre Ségolène ne sont socialistes que par le nom et par la bonne conscience. Il est plus facile, évidemment, de se dire de gauche que d’avouer qu’on veut exploiter le bon peuple.

Ceci étant dit, on est toujours à la gauche de quelqu’un. Mettez Le Pen au pouvoir et Sarkozy prétendra mener une opposition de gauche.

Pour le reste, il ne faut pas se faire d’illusions. C’est chou vert et vert chou. Disons simplement que l’un est un peu plus vert et l’autre un peu plus chou. L’un privatise en douceur, l’autre le fait à toute vapeur. L’un veut faire perdurer quelque temps encore un système social au bord de la faillite, l’autre veut le supprimer tout de go. L’un se contentera d’une présence militaire française en Afghanistan, tandis que l’autre irait bien soutenir l’oncle Bush jusqu’en Irak ou en Iran s’il le fallait.

A ce propos, connaissez-vous la French American Foundation ? Cette association, fondée avec l’accord de Giscard d’Estaing du temps de sa présidence, a un siège a Paris et un autre à New York. Son but était de renforcer les amitiés transatlantiques. Cela pouvait se comprendre du temps de la guerre froide, mais aujourd’hui ? En attendant, depuis trente ans cette fondation tente de recruter de jeunes leaders dont on peut supposer qu’ils occuperont des postes importants (elle agit un peu comme l’Opus dei, finalement, ou la Franc-maçonnerie). On retrouve parmi ces leaders (excusez ce terme franco-anglais, mais il est de mise ici) des membres de l’UMP, bien sûr, mais aussi du PS.

Sarkozy avait fait un discours à New York devant la fondation le 12 septembre 2006. On peut imaginer à quel point Bush a dû être ravi et comment il a dû mettre en lui tous ses espoirs. Ceci dit, s’il n’avait pas été élu (certes, il ne l’est pas encore, me direz-vous, mais il a déjà une main sur le dossier du trône), il n’y aurait pas eu de problème, puisque parmi les autres membres on retrouve François Hollande.

C’est qu’il n’y a que du beau monde, dans ce milieu. Citons en vrac Nicolas Dupont-Aignan (UMP), Alain Juppé (UMP), Jacques Toubon (UMP), Alain Richard (PS), Arnaud Montebourg (PS), Jérôme Clément (Arte), JM Colombani (Le Monde), Annick Cojean (Le Monde), Sylvie Kaufmann (Le Monde), François Léotard, Alain Minc, Christine Ockrent et, puisque nous sommes sur un blogue prétendument littéraire, Olivier Nora (Grasset) et Denis Olivennes (Fnac). Je passe sous silence, pour ne pas être lassant, différents journalistes de France-Inter, du Nouvel Observateur, des Echos et de Libération.
La Fondation organise de temps en temps des colloques, histoire de permettre à ses membres de se rencontrer et de décider entre eux des politiques qu’il serait bon de mener. Les thèmes choisis concernent par exemple la défense, le journalisme, l’éducation ou encore la santé. Parmi les orateurs, on retrouvera des noms comme François Bayrou (tiens tiens), Bernard Kouchner (toujours très utile puisqu’il défend la thèse de l’intervention militaire pour des raisons humanitaires) Jean-François Copé (porte-parole du gouvernement Chirac) Michel Barnier (conseiller politique de sarkozy)