27/08/2014
Enfance du désir
L’eau descend, claire et pure,
Cascadant sur les rochers noirs.
Dans le ciel, un nuage passe, nonchalant,
Chargé de tous les rêves d’enfance.
Au cœur de la forêt courent les loups,
Aux longues foulées inquiétantes.
Quelque part, un chien aboie
Dans le silence du soir.
Derrière l’église, Marie m’attend
Dans sa petite robe bleue.
Ses yeux de louve me fixent,
Quand je caresse sa joue
Dans le silence du soir.
00:45 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature
22/08/2014
Qu'est-ce qu'un barbare ?
Je ne sais plus où j’ai lu que le rôle actuel mené par l’Amérique dans le monde pourrait être comparé à celui des barbares à la fin de l’empire romain. En effet, si un pays civilisé en annexe un autre (comme l’Europe l’a fait très souvent à l’époque coloniale), il apporte de facto au pays annexé sa propre civilisation (supposée être supérieure) et une structure politique et administrative. On peut donc critiquer le fait de se rendre ainsi maître d’un pays tiers et d’y imposer sa loi, mais on ne peut pas qualifier cet acte de barbare puisque le pays ainsi soumis à l’autorité d’un autre Etat est administré et dirigé (souvent d’ailleurs pour le plus grand profit du colonisateur). Par action barbare, on entend plutôt le fait de piller et de détruire tout ce qui existe dans un pays sans rien lui apporter en échange. Ce fut le cas, par exemple, des invasions germaniques qui ont petit à petit fait vaciller l’Empire romain jusqu’à sa chute finale (destitution de Romulus Augustule par Odoacre en 476)
L’auteur de mon article, en voyant comment l’Amérique avait détruit des pays comme l’Afghanistan, l’Irak, la Libye et la Syrie, en ruinant leur économie et en abattant les structures politiques et administratives en place pour ne laisser subsister que le chaos, parlait à juste titre d’acte barbare. Si au moins les USA avaient apporté la paix et la prospérité, on leur aurait pardonné à moitié leur ingérence, mais à part tuer et détruire ce qui existait, ils n’ont rien fait. Ils ont détruit les structures qui existaient et n’ont rien mis à leur place.
Soit, ce raisonnement se tient assez bien. Pourtant, en y réfléchissant bien, je me demande au contraire si la position des USA n’est pas plutôt comparable à celle de l’Empire romain lui-même, quand celui-ci, en pleine décadence, ne parvenait plus à endiguer les nouvelles forces montantes. En effet, devant la pression constante et incessante de ce déferlement des Barbares, Rome a dû se résoudre, à un certain moment, à en laisser entrer quelques-uns sur son territoire. Ces Germains, au contact des Celtes autochtones romanisés, ont commencé à se romaniser à leur tour. Ce qui fait qu’un ou deux siècles plus tard, quand des hordes entières et incessantes venues de l’Est se sont pressées aux frontières, Rome, qui n’avait plus la capacité militaire de les endiguer, a fait appel à ceux qui occupaient le terrain, à savoir les Gaulois et les Germains romanisés (on parle de Gallo-romains dans nos livres d’Histoire). Pour le dire autrement, ils ont délégué à d’anciens ennemis le soin de défendre leur empire.
Toute proportion gardée, je me demande donc si ce n’est pas ce que sont en train de faire les Etats-Unis. Après avoir subi de cuisants échecs militaires en Afghanistan et en Irak (non pas comme Rome pour protéger leur empire, mais pour tenter de l’agrandir encore davantage), ils se servent maintenant des populations locales, qu’ils dressent les unes contre les autres. En Libye déjà, on a vu que l’action militaire de l’Otan avait fait suite à un soulèvement spontané de la Cyrénaïque. En réalité, il s’agissait d’une révolte commandée à distance par Washington avec l’aide d’Al Quaïda (groupe terroriste que les USA combattaient par ailleurs depuis une décennie en Afghanistan). En raison de ses échecs militaires antérieurs, Washington se sert donc de l’ancien ennemi musulman qu’il n’est pas parvenu à vaincre et le dresse contre d’autres musulmans pour accroître sa propre influence. En Syrie, cette tactique a été poussée beaucoup plus loin puisqu’officiellement aucun soldat occidental n’a mis un pied dans ce pays et que ce sont les djihadistes qui ont fait tout le travail (il paraît même qu’ils faisaient du « bon boulot » comme disait à une certaine époque Laurent Fabius, même si aujourd’hui il critique fermement les exactions de ces mêmes djihadistes en Irak)
Bref, que les USA (et les Occidentaux en général) soient des barbares puisqu’ils ruinent les pays où ils mettent les pieds ou qu’ils se servent de barbares pour arriver à leur fin, où est la différence, finalement ? Faut-il les comparer aux Huns d’Attila ou aux Romains de la décadence ? Ne seraient-ils pas un peu tout cela à la fois ?
13:42 Publié dans Actualité et société | Lien permanent | Commentaires (10)
18/08/2014
Les guerres de l'Empire (suite)
Je vous invite à lire cet article, où on voit bien que l'invasion de l'Irak par les djihadistes qui ont combattu en Syrie (avec notre appui et notre bénédiction) est bien voulue par les USA. Si l'aviation US procède à quelques bombardements actuellement, c'est uniquement pour bien délimiter les zones (kurdes, sunnites et chiites) et non pour affaiblir le nouveau Califat de l’Émirat islamique en Irak et au Levant.
http://www.voltairenet.org/article185073.html
Le problème, c'est que ces djihadistes, s'ils sont financés par les Etats-Unis à qui ils rendent des services (grand projet de remodelage du Moyen-Orient), reçoivent aussi de l'argent des monarchies du golfe. Leur but final est évidemment d'établir un califat musulman le plus étendu possible et quelque part ils se servent des USA autant que les USA se servent d'eux. En jouant à l’apprenti-sorcier, Washington prend des risques car ses anciens alliés pourraient très bien demain perpétrer des attentats en Europe ou même aux Etats-Unis. C’était bien la peine d’aller combattre Al Quaïda (organisation qui est, elle aussi, un pur produit de la politique US) pour ensuite soutenir des terroristes encore plus enragés.
Enfin, tout cela n’est pas bien grave. Quelques centaines de victimes innocentes sur le sol européen permettraient de faire basculer l’opinion publique en faveur de nouvelles guerres. Il faut bien relancer l’économie.
14:19 Publié dans Actualité et société | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : irak
15/08/2014
Les guerres de l'Empire
Les hommes sont devenus fous et la planète est en guerre un peu partout. Malheureusement, quand on y regarde d’un peu plus près, on s’aperçoit que l’Occident est généralement à la base de tous ces conflits, lui qui pourtant ne fait que parler de paix, de démocratie et de droits de l’homme, lui qui par ailleurs s’était vu décerner le prix Nobel de la Paix il n’y a pas si longtemps (comme Obama, d’ailleurs).
En Libye, c’est bien l’Occident qui a attaqué, outrepassant les directives de l’ONU (lesquelles avaient été adoptées sur base de mensonges éhontés, puisque les déclarations des quelques personnes qui ont affirmé que l’armée avait bombardé 6.000 civils n’ont même pas été vérifiées et que ceux qui ont tenu ces propos se sont retrouvés comme par hasard ministres dans la nouvelle équipe dirigeante) et faisant tomber un régime en s’ingérant dans les affaires intérieures d’un pays au nom du droit humanitaire. On a vu ce que ce droit humanitaire a donné. L’Otan est responsable de la mort de plus de 70.000 citoyens suite au bombardement systématique de grandes agglomérations. De plus, depuis la chute et l’assassinat de Kadhafi, le pays est en proie à une véritable guerre civile et les ressources du pétrole ne profitent plus au bien-être général.
Les djihadistes d’Al Quaïda que la France et les USA ont soutenus et armés en Libye se sont ensuite déplacés vers l’Afrique subsaharienne, ce qui a permis à notre cher président Hollande d’aller faire la guerre au Mali, toujours pour protéger la population. L’opération qui devait durer quelques semaines s’éternise, comme celle de la Centrafrique, où nos troupes combattent comme elles peuvent et avec bien du mal ceux que nous avons armés hier en Lybie. Ces djihadistes sont vraiment du pain bénit pour l’Occident puisque nous nous en servons pour détruire les pays qui nous sont hostiles et ensuite nous prenons prétexte de leur présence dans les pays amis pour y envoyer notre armée et faire perdurer la colonisation pour le plus grand profit des sociétés multinationales. Car il faut bien comprendre que lorsque Hollande envoie nos soldats se faire tuer en Afrique, il ne le fait ni pour le bien des peuples maliens et centrafricains, ni pour le bien du peuple français. Il le fait pour faire plaisir aux sociétés privées qui vont aller exploiter les richesses naturelles présentes sur place. C’est donc bien plus grave encore qu’une guerre coloniale, puisque là au moins cela profitait aux sociétés françaises.
Mais reprenons. Après la Libye, l’Occident s’en est pris à la Syrie, avec les conséquences que l’on sait. Là aussi on a financé et armé des enragés dont on connaît aujourd’hui les exactions incroyables sur la population. Tout cela au nom des droits de l’homme et de la démocratie, bien entendu. Rappelons en passant les propos du sieur Fabius qui a affirmé à un certain moment que le front Al Nostra « faisait du bon boulot ». Du bon boulot pour qui ?
Contre toute attente, le régime de Bachar el Assad a résisté et on a demandé aux djihadistes de se retourner contre l’Irak (on avait peut-être peur qu’ils ne rentrent en Europe pour perpétrer des attentats). Ca tombait bien, l’armée américaine venait justement de quitter ce pays. Le but est évidemment d’affaiblir encore un peu plus cet Etat autrefois si puissant. L’idée de Washington est de le diviser en trois : une zone kurde autonome, une zone sunnite contrôlée par les djihadistes, avec un islam pur et dur, et enfin une zone chiite aux confins de l’Iran. Pour le pétrole, il n’y aura pas de problème, les Kurdes et les djihadistes ont trop de mercis à dire aux USA pour ne pas leur vendre l’or noir à un prix raisonnable. D’ailleurs de son côté, Israël a déjà salué la naissance d’un nouveau Kurdistan indépendant. On peut supposer que l’étape suivante consistera à soulever le Kurdistan syrien, ce qui affaiblira la Syrie dont personne n’est encore venu à bout. Comme une autre partie de cette Syrie appartiendra aux djihadistes, les anciennes frontières issues de l’époque coloniale auront volé en éclat. L’idée finale est évidemment d’avoir des Etats arabes basés sur des confessions religieuses, ce qui permettra à Israël de se définir comme un Etat exclusivement juif. Reste la question palestinienne. A Jérusalem, on rêve de vider la bande de Gaza de ses habitants (et d’annexer cette bande de terre côtière ainsi que les gisements de gaz situés en Méditerranée), lesquels iraient se réfugier dans le Sinaï égyptien, où ils fondraient avec le Hamas un autre Etat islamique. C’est ce qui était prévu du temps où les Frères musulmans étaient au pouvoir au Caire. Malheureusement pour Washington, le peuple égyptien s’est réveillé et l’armée a pris le pouvoir.
Bref, résumons-nous. Après avoir apporté le chaos en Libye, en Tunisie, en Egypte et en Syrie, voilà que l’Occident en remet une couche en Irak. Et comme si cela ne suffisait pas, le voilà à l’œuvre en Ukraine. Le régime fasciste mis en place par l’Amérique n’hésite pas à bombarder d’autres citoyens ukrainiens. Il y a déjà 2.000 morts mais on en parle bien peu dans la presse. Pourtant utiliser l’armée pour bombarder sa propre population, n’est-ce pas ce qu’on reprochait à Bachar el Assad (lequel, lui, se battait surtout contre des djihadistes étrangers venus envahir son pays). Bref, l’Occident semble vouloir déstabiliser la planète entière pour le plus grand profit de quelques oligarques et de quelques grandes compagnies internationales. La vie et le bien-être des citoyens, on s’en moque complètement. La preuve c’est que l’Europe est obligée d’appliquer des sanctions contre Moscou au risque de faire perdre des milliards d’euros à son économie. Et de leur côté nos nouveaux amis de Kiev n’ont rien trouvé de mieux que d’interdire le transit du gaz russe sur son territoire. On peut donc supposer que les prix vont flamber en Europe cet hiver, pour le plus grand profit du groupe Suez, soit dit en passant.
Mais ce qui m’énerve encore plus, ce sont les mensonges répandus partout et dont notre presse se fait honteusement la porte-parole. Parvenir à faire croire que les djihadistes défendent la démocratie quand ils s’en prennent au régime syrien, puis nous parler (enfin) de leurs exactions abominables quand ils s’en prennent au nouvel Etat kurde (et non quand ils ont envahi le tiers de l’Irak qui leur avait été attribué, notez-le bien en passant), cela relève quand même d’un sophisme incroyable. Et parler de la révolte du peuple ukrainien sur le Maïdan quand il s’agit en fait d’un coup d’état visant à mettre au pouvoir un oligarque milliardaire avec l’aide de troupes paramilitaires fascistes, il faut oser, quand même.
Mais à quoi bon dire tout cela ? Cela ne changera quand même rien à la marche du monde. Sauf qu’à force de provoquer l’ours russe, Washington pourrait bien déclencher une guerre en Europe-même. Le comble c’est que l’Amérique aura encore le toupet de dire qu’elle vient nous défendre (ce qu’elle a déjà dit en 1944, alors qu’à l’époque il s’agissait d’abord d’empêcher la Russie d’étendre sa zone d’influence. Aujourd’hui il s’agit plutôt de grignoter des pans entiers de son territoire avant de l’annexer purement et simplement).
Ukraine (© Photo: RIA Novosti/Alexandr Maksimenko
Lire la suite: http://french.ruvr.ru/2014_08_14/Ukraine-Occident-une-lon...
Irak (Uncredited/AP/SIPA)
00:05 Publié dans Actualité et société | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : syrie, irak
10/08/2014
Enfance (1)
J’avais cinq ans et je venais d’arriver chez un oncle que je ne connaissais pas. Tout ce qui m’entourait m’étonnait. D’abord il faisait chaud, incroyablement chaud, malgré l’heure déjà tardive. J’étais dans le Sud et pour la première fois j’avais franchi la ligne symbolique de la Loire. Il faisait si chaud qu’on avait sorti de la cuisine la table et les chaises et c’est dans la cour que le dîner a été servi, à une heure incroyable pour l’enfant que j’étais : vingt-et-une heures. Sur un guéridon à roulettes, on avait même sorti la télévision. C’était la première fois de ma vie que j’en voyais une ou en tout cas c’est la première dont je me souviens. Elle était en noir et blanc évidemment et le journal parlé proposait la rétrospective du défilé du 14 juillet sur les Champs Elysées, qui avait eu lieu le matin-même. Paris, la fête nationale… Je n’en revenais pas ! Pendant que je restais fasciné devant le petit écran, mes nombreuses cousines s’affairaient à mettre la table. Ca grouillait dans tous les sens et toutes ces grandes filles de 10 ou 12 ans que je n’avais jamais vues auparavant m’intimidaient un peu.
Pendant ce temps-là, ma mère parlait avec son frère, celui dont on m’avait dit qu’il était mon oncle, et qu’elle n’avait revu qu’une fois depuis la fin de la guerre. Comme tout le monde, il avait fui les combats en 1940 et il s’était retrouvé là, à l’autre bout de la France, avec ses frères et soeurs. La différence, c’est qu’il n’était jamais revenu dans son village natal du Nord-Est et était resté là. L’amour, visiblement, avait été la cause de tout. Il faut dire qu’il venait d’avoir vingt ans et très vite il avait épousé une fille du coin. Mais quelques mois après son mariage, comme c ‘était quand même la guerre, il s’était retrouvé en Allemagne, comme travailleur soi-disant volontaire (tous les garçons qui auraient dû faire leur service militaire en 1941 ou 1942 étaient envoyés en Allemagne, l’occupant ne souhaitant pas qu’on leur apprenne le maniement des armes et préférant de loin voir ses usines tourner à plein rendement). Six mois après son départ, la jeune mariée était morte d’une étrange maladie. Alors il était revenu, la rage au ventre et les larmes au bord des yeux. Il était allé se recueillir sur la tombe de celle avec qui il n’avait vécu que quelques semaines, puis il avait pris le maquis, plein de haine contre les injustices de l’Histoire. C’est plus tard, bien entendu, que j’ai appris tout cela. Il était pudique et discret et il n’a jamais beaucoup parlé de cet engagement dans la Résistance. Je sais juste qu’il a fait sauter des ponts du côté de Bordeaux et que le jour de son enterrement, en 1983, les anciens combattants étaient là, avec le drapeau français et tout.
Une fois la guerre terminée, il s’était remarié et était resté là, dans ce village de l’Ouest, tout près du marais poitevin, pas très loin de l’océan. Il était resté où la vie l’avait mené, où il avait aimé et trouvé la force de combattre et de résister. Et voilà pourquoi à cinq ans, un soir de quatorze juillet, je me retrouvais moi aussi dans ce village, vingt-cinq ans après que les hasards de la guerre y avaient amené mon oncle.
20:52 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : littérature
01/08/2014
Souvenir
Quand je t’ai rencontrée
Je marchais dans la nuit.
Je t’ai habillée de mes rêves
Et t’ai conduite au bord de la mer.
Sous la lune, les vagues nous parlaient d’infini
Et c’était là le discours que nous voulions entendre.
Je dis « c’était » car depuis les marées ont effacé les traces de tes pas
Et le vent a emporté tes paroles.
Désormais, je marche seul sur la plage, indécis.
J’écoute la plainte monotone des vagues
Ou bien je regarde les grands oiseaux blancs
Qui tournent lentement en lançant leurs cris de désespoir.
Je marche sans fin et mes pieds s’enfoncent dans le sable.
Quand vient la nuit et qu’apparaît la lune,
Je me souviens soudain du goût salé de tes lèvres.
Il me semble aussi percevoir la musique de tes mots,
Mais ce ne sont que les sanglots de la mer
Qui résonnent dans l’infini de la plage désertée.
13:43 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (2)