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31/01/2014

Nouvelles du monde

On manifeste et on se tue en Egypte, où on n’a le choix qu’entre la peste ou le choléra  (l’armée ou les Frères musulmans), on se bat entre bandes rivales en Libye (belle démocratie que celle apportée par l’OTAN !), on assassine des opposants de gauche en Tunisie avant de se déchirer sur le texte de la Constitution (« les femmes ont-elles une âme ? », voilà à peu près le débat), une grande partie de la RDC est soumise à l’exaction de milices sorties de nulle part (mais surtout quand même du Rwanda voisin), qui tuent et violent à qui mieux mieux, l’armée française n’en finit pas de sécuriser le Mali et semble bien impuissante en Centrafrique, où on tue et pille en pleine ville et en plein midi (chrétiens contre musulmans ou l’inverse). Ne parlons pas de la Syrie, qui lutte depuis trois ans contre une bande d’enragés venus des quatre coins de la planète avec la bénédiction de l’Occident, des enragés qui n’ont que les versets du Coran à la bouche (mais aussi des armes turques en main et de l’argent saoudien dans les poches). Cette guerre s’étend au Liban et maintenant  à la Russie (avec des attentats perpétrés par les musulmans du Caucase), sans doute pour la punir d’avoir soutenu le régime syrien. Comme si cela ne suffisait pas, voilà qu’on l’attaque dans son ancienne  province, l’Ukraine, où l’Occident excite les milices fascistes et nationalistes en espérant annexer cet immense territoire dans son grand marché commercial et financier (et libérer de prison une pauvre milliardaire qui défend le droit des  hommes à s’enrichir).

Bref, il n’y a qu’en France où on ne se bat pas encore. Il est vrai que c’est un état laïque et que dans la majorité des conflits que j’ai évoqués la religion tient une place prépondérante (si pas chez ceux qui tirent les ficelles, du moins chez ceux qui se battent dans la rue) au point qu’on a l’impression d’être revenu aux temps de la Saint Barthélémy et des Guerres de Religion, ce qu’on ne croyait certes plus possible à notre époque. On a l’impression de régresser. La preuve : pendant que notre bon roi François s’amuse avec sa nouvelle maîtresse et répudie publiquement l’ancienne, quelques excités réactionnaires manifestent contre l’école de la République, qui selon eux aurait tendance à oublier qu’un homme est un homme et que la femme est faite pour tenir le ménage et faire des enfants. 

Et pendant ce temps-là, la crise continue, les entreprises ferment et le chômage s’aggrave. La seule bonne nouvelle, paraît-il, c’est que quelques-uns parviennent à s’enrichir  d’une manière absolument scandaleuse. Tant mieux pour eux. Et tant pis pour nous. 

 

La Grande Mosquée des Omeyyades, VIII° siècle (Syrie)

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25/01/2014

Une carte de Provence

Cela faisait longtemps qu’il aimait Fabienne en secret, mais il n’osait pas lui avouer les sentiments qu’il éprouvait pour elle. Ils se voyaient souvent, pourtant. Très souvent, même. Ils se retrouvaient autour d’un verre avec des amis ou allaient au cinéma. C’était gai, ils se parlaient, riaient des mêmes choses ou refaisaient le monde à coup d’idées grandioses, des idées comme on n’en a qu’à vingt ans. Ils étaient toujours d’accord sur tout et au plus fort des discussions, quand les autres, criant et vociférant, en venaient presqu’aux mains, ils échangeaient entre eux des regards amusés qui en disaient long sur leur complicité. Le problème, c’est qu’il n’était pas possible de parler un peu intimement au milieu d’un groupe si agité, même s’il s’agissait de bons amis. Il aurait fallu s’isoler un peu. Pourtant de tels moments arrivaient parfois, notamment quand ils restaient seuls dans le café, vers une ou deux heures du matin, lorsque tous les autres étaient partis. Lors de ces tête-à-tête, la complicité déjà évoquée était plus grande encore, même s’ils restaient là sans rien dire. En effet, ils n’avaient même pas besoin de parler pour se comprendre. Ils se sentaient bien comme cela, l’un avec l’autre, et c’était suffisant.

Pourtant, quand il rentrait chez lui dans la nuit noire, le long de la voie du chemin de fer, il s’en voulait de n’avoir pas osé. Une autre fois, c’était juré, il lui parlerait et lui dirait tout ce qu’il avait dans le cœur. Oui, mais c’était risqué quand même ! Si elle prenait peur et si elle mettait un terme à leur amitié ? Bon, c’était vrai qu’elle le regardait parfois à la dérobée, il l’avait bien remarqué et c’était vrai qu’à ces moments-là elle baissait vite le regard, comme si elle avait été prise en faute, mais cela ne voulait encore rien dire. Ou au contraire cela voulait dire  qu’elle avait peur, justement, qu’il ne prît pour un intérêt trop appuyé ce qui n’était finalement que de l’amitié. Bref, plus il se mettait à réfléchir de la sorte et moins il trouvait le courage nécessaire pour avouer cet amour qui pourtant le rongeait intérieurement. Quand enfin il arrivait chez lui, à une heure avancée de la nuit, il se mettait au lit et s’endormait aussitôt, n’ayant pris aucune décision.

Les semaines passaient cependant et bientôt ce seraient les vacances scolaires. Elle partirait un long mois en Provence avec sa famille et Dieu seul sait qui elle pourrait rencontrer là-bas. Il fallait faire vite. Mais plus l’échéance approchait et moins il osait prendre son amie à part et lui dire simplement : « Je t’aime ».

Un matin, pourtant, il lui sembla avoir trouvé la solution. Il lui écrirait ! Une belle et longue lettre où il dirait enfin ce qu’il éprouvait, sans rien cacher. Par écrit, ce serait quand même plus facile. Les mots viendraient les uns après les autres, s’assembleraient, et finiraient par prendre un sens. Il ne sentirait pas son regard de fille posé sur lui, ce regard qui le paralyserait à coup sûr s’il se lançait dans une déclaration amoureuse. Bien au contraire il pourrait s’expliquer en toute quiétude, trouver des arguments, tenter de convaincre…

Evidemment, ce ne fut pas aussi facile qu’il le pensait d’écrire cette lettre, et il dut s’y prendre à trois ou quatre fois, barrant les mots, déchirant le papier, en reprenant un autre, pour le déchirer de nouveau, mais enfin il y parvint. Il ne restait plus qu’à glisser la précieuse missive dans une enveloppe, mais cela aussi  prit du temps. Car écrire, c’était bien, mais rencontrer le lendemain la personne dans le café habituel, au milieu des amis, c’en était une autre. Alors il prit la décision d’attendre un petit peu que sa tendre amie soit partie en vacances pour lui envoyer sa déclaration d’amour en Provence, sur son lieu de villégiature. Cela lui laisserait trois semaines à la fois merveilleuses et angoissantes pour attendre sa réponse. Cela lui laisserait surtout un petit répit avant de savoir si elle répondrait favorablement ou non à son amour.

La lettre était partie depuis trois jours et Fabienne depuis une semaine quand la nouvelle tomba, abrupte, incroyable : lors d’une excursion  dans le massif des Maures, la voiture de ses parents, en voulant éviter un sanglier, était tombée dans un ravin. Il n’y avait pas eu de survivants.

Le jour de l’enterrement, il pleuvait. C’était une petite bruine fine et tenace qui vous faisait frissonner bien qu’on fût en plein juillet. Tout le monde était là, atterré et silencieux. Sa famille à elle, les oncles, les tantes, les cousins, tous ceux qu’on ne connaissait pas et qu’on n’avait même jamais vus. Mais surtout tous les amis étaient là aussi, ceux de l’école et du café, revenus en train express pour la circonstance, qui de Quiberon, qui de Marbella, qui de Florence.

En rentrant chez lui, tout en marchant le long de la voie ferrée, il entendait encore les pelletées de terre qui tombaient sur son cercueil et il avait bien du mal pour ne pas pleurer, là, devant tout le monde. Un train passa, emportant des vacanciers pour des destinations lointaines. Plus rien n’avait de sens. Plus rien n’aurait jamais plus de sens. La vie venait de s’arrêter pour toujours.

 

Il ouvrit la porte de sa maison et machinalement regarda dans la boîte aux lettres. Il y avait une carte du Lavandou. De sa belle écriture ronde, Fabienne disait : « il y a si longtemps que j’attendais ce moment ! Moi aussi je t’aime ! Je pense tout le temps à toi. A très bientôt mon ange. » 

 

 

Littérature

 

Massif des Maures 

22:47 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : littérature

18/01/2014

Réflexion existentielle

Devant tous les malheurs du monde, devant toutes les injustices que l’on voit partout, devant cette montée en puissance de la mondialisation économique qui va de pair avec la restriction de nos acquis sociaux, devant la multitude de clochards qui errent désormais dans toutes nos gares et tous nos lieux publics, devant cette fameuse compétitivité qui écrase à la fois les travailleurs et les petits patrons pour le plus grand profit de quelques multinationales aussi invisibles qu’insaisissables, devant la grande constellation politico-financière qui nous dirige, devant tout cela, dis-je, on peut parfois se demander quelle attitude il convient  d’adopter.

Soit je ne vois rien par ignorance et ce serait un peu dommage. Soit je fais semblant de ne rien voir, ce qui est très commode mais ni très glorieux ni très responsable, on en conviendra. Soit je fais quotidiennement l’inventaire de tout ce qui ne va pas sur la planète et je m’en rends malade car à part dénoncer les injustices sur mon site, je n’ai pratiquement aucun pouvoir pour faire bouger les choses (encore qu’on a  vu des Assange ou des Snowden faire trembler des empires). Soit… Soit à un certain moment je dois prendre du recul et tout en sachant ce qui se passe, en le dénonçant à l’occasion, en n’étant jamais dupe, j’essaie cependant de trouver un peu de tranquillité au fond de moi car après tout je n’ai qu’une vie (et elle est courte) et il m’appartient de la gérer au mieux pour ma satisfaction personnelle.

Schopenhauer, dans son petit traité « L’art d’être heureux », distingue ce que l’on est (la personnalité), ce que l’on a et ce qu’on représente. Il est clair que le bonheur ne se trouve ni dans les richesses (on a vu des pauvres qui étaient très heureux de leur sort et des riches qui n’étaient jamais satisfaits) ni dans ce qu’on représente pour les autres (car finalement les autres ne savent rien de moi et même s’ils me lancent des louanges, non seulement elles sont souvent éphémères, mais en plus elles ne me rendront pas vraiment heureux). Donc, il n’y a que dans l’affirmation de ce que je suis que je peux trouver le bonheur. Et je crois qu’il a raison : « Ce que quelqu’un possède pour soi, ce qui l’accompagne dans la solitude et que personne ne peut ni lui donner ni lui prendre, voilà qui est beaucoup plus essentiel que tout ce qu’il possède ou ce qu’il est aux yeux des autres. »

 

Par rapport aux injustices du monde, il me faut donc les connaître, mais, tout en les condamnant, je dois être capable de vivre ce que je suis et d’être heureux avec moi-même. Sans doute cela suppose-t-il une part d’égoïsme, mais comment faire autrement ?  M’énerver sans cesse (et me rendre malheureux) pourrait au contraire être considéré comme une trahison envers moi-même car au lieu de m’affirmer avec sérénité dans ce milieu hostile, je ne ferais que le subir. Or je me dois un certain respect à moi-même et si la nature m’a créé tel que je suis (avec mon caractère, mes qualités, mes défauts, mes aspirations, ma sensibilité propre, mes limites) c’est cela que j’ai le devoir d’affirmer.  Au moins serai-je content d’être moi, c’est déjà bien, non ?

Schopenhauer

00:05 Publié dans Errance | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : schopenhauer

15/01/2014

Les îles

Tous les jours il regardait la mer et les vagues infinies.

Tous les jours il contemplait l’horizon et les bateaux qui voguaient vers des îles inconnues, des îles dont personne, jamais, ne revenait.

Tous les jours, du haut des falaises, il respirait les vents du large, chargés d’embruns salés et de saveurs épicées.

Alors il croyait voir d’immenses plages dorées où des enfants nus jouaient sous les soleils des tropiques. Derrière les grandes dunes blondes s’étendaient des forêts incroyables, où, depuis mille ans, des arbres exotiques embaumaient l’air de parfums troublants et poivrés. Parfois, il lui semblait apercevoir, couchées dans des pirogues noires, des femmes dolentes et lascives qui évoquaient Gauguin. Plus loin, dans des cases de palmes, leurs sœurs donnaient de l’amour à des guerriers féroces venus oublier, sous leurs caresses tendres, les blessures des combats.

Et lui restait là, sur la falaise, contemplant les nuages en déroute qui traversaient le ciel, s’imaginant parfois que c’étaient là les voiles d’un immense bateau en partance pour ces îles dont personne jamais ne revenait.  

 

 Littérature

01:19 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature

13/01/2014

De la manière de conserver le pouvoir

Je poursuis mes lectures et je tombe sur cet extrait, qui me semble dans la suite logique du texte précédent, qui traitait des moyens employés par certains hommes pour arriver au pouvoir. Il s’agit ici de réfléchir à la manière dont ils s’y prennent pour conserver ce pouvoir une fois qu’ils s’en sont emparés. L’auteur n’est plus Platon, cette fois, mais Etienne de la Boétie, l’ami de Montaigne. Voici ce qu’il écrit dans le « Discours de la servitude volontaire »  :  

Pauvres gens misérables, peuples insensés, nations opiniâtres à votre mal et aveugles à votre bien ! Vous vous laissez enlever sous vos yeux le plus beau et le plus clair de votre revenu, vous laissez piller vos champs, voler et dépouiller vos maisons des vieux meubles de vos ancêtres !

Vous vivez de telle sorte que rien n’est plus à vous. Il semble que vous regarderiez désormais comme un grand bonheur qu’on vous laissât seulement la moitié de vos biens, de vos familles, de vos vies. Et tous ces dégâts, ces malheurs, cette ruine, ne vous viennent pas des ennemis, mais certes bien de l’ennemi, de celui-là même que vous avez fait ce qu’il est, de celui pour qui vous allez si courageusement à la guerre, et pour la grandeur duquel vous ne refusez pas de vous offrir vous-mêmes à la mort. Ce maître n’a pourtant que deux yeux, deux mains, un corps, et rien de plus que n’a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes. Ce qu’il a de plus, ce sont les moyens que vous lui fournissez pour vous détruire. D’où tire-t-il tous ces yeux qui vous épient, si ce n’est de vous ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s’il ne vous les emprunte ?

Les pieds dont il foule vos cités ne sont-ils pas aussi les vôtres ? A-t-il pouvoir sur vous, qui ne soit de vous-mêmes ? Comment oserait-il vous assaillir, s’il n’était d’intelligence avec vous ? Quel mal pourrait-il vous faire, si vous n’étiez les receleurs du larron qui vous pille, les complices du meurtrier qui vous tue et les traîtres de vous-mêmes ? Vous semez vos champs pour qu’il les dévaste, vous meublez et remplissez vos maisons pour fournir ses pilleries, vous élevez vos filles afin qu’il puisse assouvir sa luxure, vous nourrissez vos enfants pour qu’il en fasse des soldats dans le meilleur des cas, pour qu’il les mène à la guerre, à la boucherie, qu’il les rende ministres de ses convoitises et exécuteurs de ses vengeances. Vous vous usez à la peine afin qu’il puisse se mignarder dans ses délices et se vautrer dans ses sales plaisirs. Vous vous affaiblissez afin qu’il soit plus fort, et qu’il vous tienne plus rudement la bride plus courte. Et de tant d’indignités que les bêtes elles-mêmes ne supporteraient pas si elles les sentaient, vous pourriez vous délivrer si vous essayiez, même pas de vous délivrer, seulement de le vouloir.

Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres. Je ne vous demande pas de le pousser, de l’ébranler, mais seulement de ne plus le soutenir, et vous le verrez, tel un grand colosse dont on a brisé la base, fondre sous son poids et se rompre.

Sarlat, maison natale de La Boétie

littérature

00:06 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : littérature

05/01/2014

De l'art oratoire

Au fil de mes lectures, je tombe sur le dialogue suivant (les protagonistes parlent des discours tenus par les politiciens de leur ville) :

 S*

Bon. Mais la rhétorique qui s’adresse au peuple (…), c’est-à-dire à des hommes libres, quelle idée faut-il en prendre ? Te paraît-il que les orateurs parlent toujours en vue du plus grand bien et se proposent pour but de rendre par leurs discours les citoyens aussi vertueux que possible, ou crois-tu que, cherchant à plaire aux citoyens et négligeant l’intérêt public pour s’occuper de leur intérêt personnel, ils se conduisent avec les peuples comme avec des enfants, essayant seulement de leur plaire, sans s’inquiéter aucunement si par ces procédés ils les rendent meilleurs ou pires ?

 

C*

Cette question n’est plus aussi simple. Il y a des orateurs qui parlent dans l’intérêt des citoyens ; il y en a d’autres qui sont tels que tu dis.

S*

Il suffit. S’il y a deux manières de parler au peuple, l’une des deux est une flatterie et une déclamation honteuse ; l’autre est l’honnête, j’entends celle qui travaille à rendre les âmes des citoyens les meilleures possible, qui s’applique à dire toujours le meilleur, que cela plaise ou déplaise à l’auditoire. Mais tu n’as jamais vu de rhétorique semblable, ou, si tu peux citer quelque orateur de ce caractère, hâte-toi de le nommer.

C*

Non (…), je ne peux t’en nommer aucun, du moins parmi les orateurs d’aujourd’hui.

 

Voilà assurément un texte qui me semble bien d’actualité. Nous vivons dans une société tronquée, où le terme démocratie ne veut plus dire grand-chose. Certes, il  y a des élections et des campagnes électorales, certes les citoyens peuvent voter pour le candidat de leur choix, mais au final, on voit bien que les politiques qui sont menées sont toujours les mêmes. Qu’on vote à droite ou à gauche, ceux qui ont accédé au pouvoir font toujours le jeu du grand Capital, car c’est l’argent en fait qui dirige le monde (il suffit pour s’en convaincre de compter le nombre de guerres coloniales que le très socialiste président Hollande a déclarées, en Afrique ou ailleurs, dépassant dans le cynisme son prédécesseur, le très haï Sarkozy).  Bref, le tout pour ces gens est d’arriver au pouvoir et de faire carrière.  Une fois bien installés sur le trône où nous les avons mis, ils ne dirigent pas le pays mais vont dans le sens de l’Histoire. Communistes si la mode est au communisme, capitalistes si la mode est à l’économie de marché. Nos intérêts à nous, ils s’en moquent bien. Le tout est de jouer le jeu et de nous endormir pour arriver au pouvoir. A ce titre, les discours politiques proférés pendant les campagnes électorales sont de toute première importance puisqu’il s’agit de gagner notre confiance pour avoir notre vote. Dans ces discours, il convient donc de flatter le bon peuple et de lui dire ce qu’il a envie d’entendre.  Non, il n’y a plus de véritable démocratie et on regrettera l’époque bénie où celle-ci avait vu le jour, dans la belle cité d’Athènes.

 

Sauf que là aussi note conception repose sur une illusion. D’abord parce qu’Athènes n’a pas toujours connu la démocratie et que celle-ci a parfois été remplacée par une dictature (je pense à l’épisode des « Trente Tyrans » par exemple). Ensuite parce que même lorsque la démocratie régnait, les orateurs les plus habiles, qui avaient suivi les leçons de rhétorique des sophistes, parvenaient à manipuler leur public pour s’emparer ensuite du pouvoir. En fait c’est de cela que traitait le texte ci-dessus. Ce que je vous ai donné à lire, c’est un extrait du « Gorgias » de Platon, qui met en scène Socrate et son interlocuteur Calliclès. Ce dernier soutient que la rhétorique est le plus important de tous les arts puisqu’elle permet à tous les coups de convaincre les interlocuteurs, même quand celui qui parle ne connaît rien au problème exposé et même quand il a tort. Socrate, lui, soutient que c’est là un art dangereux et que tout homme qui voudrait prendre les commandes de la cité devrait le faire pour le bien de celle-ci et non pour s’enrichir ou pour tromper. Comme quoi, il n’y a rien de neuf sous le soleil. Et du coup je me rends compte que j’ai vécu dans l’illusion en croyant que la démocratie athénienne était exemplaire. C’est à désespérer.

Littérature

18:47 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : littérature