18/01/2014
Réflexion existentielle
Devant tous les malheurs du monde, devant toutes les injustices que l’on voit partout, devant cette montée en puissance de la mondialisation économique qui va de pair avec la restriction de nos acquis sociaux, devant la multitude de clochards qui errent désormais dans toutes nos gares et tous nos lieux publics, devant cette fameuse compétitivité qui écrase à la fois les travailleurs et les petits patrons pour le plus grand profit de quelques multinationales aussi invisibles qu’insaisissables, devant la grande constellation politico-financière qui nous dirige, devant tout cela, dis-je, on peut parfois se demander quelle attitude il convient d’adopter.
Soit je ne vois rien par ignorance et ce serait un peu dommage. Soit je fais semblant de ne rien voir, ce qui est très commode mais ni très glorieux ni très responsable, on en conviendra. Soit je fais quotidiennement l’inventaire de tout ce qui ne va pas sur la planète et je m’en rends malade car à part dénoncer les injustices sur mon site, je n’ai pratiquement aucun pouvoir pour faire bouger les choses (encore qu’on a vu des Assange ou des Snowden faire trembler des empires). Soit… Soit à un certain moment je dois prendre du recul et tout en sachant ce qui se passe, en le dénonçant à l’occasion, en n’étant jamais dupe, j’essaie cependant de trouver un peu de tranquillité au fond de moi car après tout je n’ai qu’une vie (et elle est courte) et il m’appartient de la gérer au mieux pour ma satisfaction personnelle.
Schopenhauer, dans son petit traité « L’art d’être heureux », distingue ce que l’on est (la personnalité), ce que l’on a et ce qu’on représente. Il est clair que le bonheur ne se trouve ni dans les richesses (on a vu des pauvres qui étaient très heureux de leur sort et des riches qui n’étaient jamais satisfaits) ni dans ce qu’on représente pour les autres (car finalement les autres ne savent rien de moi et même s’ils me lancent des louanges, non seulement elles sont souvent éphémères, mais en plus elles ne me rendront pas vraiment heureux). Donc, il n’y a que dans l’affirmation de ce que je suis que je peux trouver le bonheur. Et je crois qu’il a raison : « Ce que quelqu’un possède pour soi, ce qui l’accompagne dans la solitude et que personne ne peut ni lui donner ni lui prendre, voilà qui est beaucoup plus essentiel que tout ce qu’il possède ou ce qu’il est aux yeux des autres. »
Par rapport aux injustices du monde, il me faut donc les connaître, mais, tout en les condamnant, je dois être capable de vivre ce que je suis et d’être heureux avec moi-même. Sans doute cela suppose-t-il une part d’égoïsme, mais comment faire autrement ? M’énerver sans cesse (et me rendre malheureux) pourrait au contraire être considéré comme une trahison envers moi-même car au lieu de m’affirmer avec sérénité dans ce milieu hostile, je ne ferais que le subir. Or je me dois un certain respect à moi-même et si la nature m’a créé tel que je suis (avec mon caractère, mes qualités, mes défauts, mes aspirations, ma sensibilité propre, mes limites) c’est cela que j’ai le devoir d’affirmer. Au moins serai-je content d’être moi, c’est déjà bien, non ?
00:05 Publié dans Errance | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : schopenhauer
Commentaires
Avec la lyre de l’amoureux,
C’est la crécelle du lépreux
Qui chante dans mes mains », écrivait Anna Akhmatova.
Et Ossip Mandelstam :
« Je suis tout grelottant de gel
Et je voudrais me taire.
Mais l’or qui danse dans le ciel
M’intime l’ordre de chanter. »
Écrit par : Michèle | 19/01/2014
Écrit par : Feuilly | 19/01/2014
Écrit par : Halagu | 19/01/2014
Écrit par : Feuilly | 20/01/2014
Écrit par : Michèle | 20/01/2014
Je me retrouve assez dans cette démarche.
Faut-il atteindre l'ataraxie pour être soi-même au milieu du magma ?.
Le commentaire d'Halagu me fait penser à cette chanson que j'aime beaucoup :
http://www.youtube.com/watch?v=vLSjpmEePCU
Écrit par : saravati | 20/01/2014
Écrit par : Feuilly | 20/01/2014
Le quotidien immédiat et les préoccupations ordinaires de la vie, sont parfois envahissants... Même si les mains se séparent, la connivence est toujours là! C'est une raison, et pas la seule, qui me porte à souhaiter que ce blog demeure encore et pour longtemps le lieu où l'on respire.
@ Saravati C'est effectivement une belle chanson. Merci de me l'avoir fait découvrir.
Écrit par : Halagu | 21/01/2014
Quant on a dit ça, on a évidemment tout dit et rien dit car tout dépend de ce qui "nous contente".
Le chaos du monde se reflète forcément en nous car nous sommes avant tout des "êtres sociaux". La solitude n'est pas naturelle chez l'homme. Elle est une déviance du comportement, déviance qui peut être heureuse et qui n'est entachée d'aucun jugement de valeur comme l'est de coutume ce mot.
Il n'y a pas, à mon sens, de dichotomie entre l'individu et le monde. Il y a un affrontement dont le monde ressort le plus souvent vainqueur. En apparence.
Affronter le monde comporte des risques. Aller au bout de ses convictions, les vivre, conduit le plus souvent à l'HP, à la tôle, au caniveau... C'est certain. On ne tient debout que par les concessions que l'on fait à ce monde de misère, d'injustices et de mensonges et le monde ne tient debout que grâce à ces millions et ces millions de concessions faites individuellement.
Le monde n'est pas une entité en soi,mais la somme de ses individus
C'est pourquoi le choix de la solitude, le choix de la simplicité, du non-désir des consommations usuelles, me semble un demi-mal, pas un égoïsme, mais le choix d'un libre arbitre lucide.
Et joyeux...
Écrit par : Bertrand | 22/01/2014
@ Bertrand : la solitude loin des affaires du monde est peut-être une tentative désespérée pour ne pas faire trop de concessions. Ou une lassitude, qui sait …
Écrit par : Feuilly | 22/01/2014
Car aucun cas n'a valeur universelle.
Seule la mort a cette valeur-là.
Écrit par : Bertrand | 22/01/2014
Le monde est plus que la somme des individus, le monde n'est pas le résultat d'une addition. Le monde est relation entre. Enfin ce que j'en dis hein
Les idées et les convictions, je m'en méfie comme de la peste. On a fait les pires crapules avec de belles idées. Je ne suis pas un saint ni une victime. Je ne pleurniche pas sur ce qui s'oppose à moi, ni sur ce que j'ai raté, ni sur mes erreurs, mes injustices, mes mensonges, mes duplicités et mes fautes de jugement. La seule chose que je me refuse, c'est la manipulation (fut-elle au nom des belles idées -et sur la toile c'est monnaie courante, c'est à dire l'instrumentalisation d'autrui à des fins purement narcissiques - l'apitoiement sur soi-même en est une des plus belles formes).
Je vis, toujours vif et joyeux, sur la merde s'il le faut.
Écrit par : cléanthe | 22/01/2014
Écrit par : Feuilly | 22/01/2014
Écrit par : cléanthe | 22/01/2014
Écrit par : cléanthe | 22/01/2014
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