Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

08/11/2013

La mer

Il aimait la mer comme d’autres aimaient les femmes et trouvait dans les immensités océanes ce que d’autres cherchaient dans des yeux bleus ou verts.

La grande plaine liquide, ses vagues ondulantes, ses senteurs troublantes, tout le fascinait, jusqu’aux tempêtes rageuses qui parfois venaient se fracasser contre les rochers, les enlaçant dans des remous redoutables.

Le va et vient des marées, surtout, l’intriguait et il cherchait à comprendre quel plaisir la nature trouvait à ce jeu sans cesse recommencé.  La mer avançait, conquérante et lascive, pour toujours revenir en arrière, avant de repartir à l’assaut de ces rivages inaccessibles qu’elle semblait vouloir posséder sans y arriver jamais.

Souvent, il s’asseyait sur le sable et regardait dans le ciel pur le vol des cormorans, dont les cris pleins de désespoir convenaient bien à son âme sombre et ombrageuse.  

Ou bien il parcourait la plage infinie, rêvant à changer de vie, et ses pieds, sur le sable humide, laissaient des traces qui s’effaçaient  aussitôt.  

A l’horizon, dans des lointains improbables, passait parfois un bateau, seule présence humaine dans cette immensité. Alors il songeait à des voyages lointains, se demandant soudain si la mer, sous d’autres cieux, avait la même couleur, cette couleur verte ou bleue que d’autres trouvaient dans les yeux des femmes.   

 

littérature

10:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : littérature

Commentaires

Voilà trois splendides Petits Poèmes en prose de Baud... Pardon, je voulais dire de Feuilly, qui mériteraient d'être les premiers d'un fort beau recueil !

Écrit par : giulio | 09/11/2013

Qui c'est ça Baud ? :) Giulio, je plaisante :)

Ah ! Les traces qui s'effacent ... :)

Écrit par : Michèle | 09/11/2013

@ Michèle
Evidemment sur la plage le fond d-elaire est frais. J'aime bien votre texte romantique, Feuilly, et la boucle de fin avec les yeux des femmes, j'aime les fins qui rejoignent les commencements.
L'horizon, aussi, bien sûr. Comme ligne évanescente.

Écrit par : cléanthe | 09/11/2013

Merci Giuilio pour ces encouragements :))
@ Cléanthe : oui, les fins qui rejoignent les commencements. Une manière inconsciente, sans doute, de croire que le temps n'a pas fait son oeuvre. C'est le mythe de l'éternel retour des Anciens.

Écrit par : Feuilly | 09/11/2013

L' anaplodiplose figure le cycle de la mer, celui de la vie et l'éternel recommencement de l'amour... :)

Écrit par : Michèle | 09/11/2013

Mais la mer la plus parfaite, la plus achevée, la plus chargée d' embruns est souvent celle que l' on s' invente.
Dans un ciel au couchant, les sillons d' une terre grasse... ou les yeux en furie de quelqu' un que l' on aime :)

Écrit par : agnès | 10/11/2013

@ Michèle : anaplodiplose ? Quel joli mot quand même :))
A ne pas confondre, bien entendu avec l'épanadiplose qui concerne, comme chacun sait, un seul mot qui est répété en début et fin de phrase. Quant à l''anadiplose, c'est une figure de style consistant en la reprise du dernier mot d'une proposition à l'initiale de la proposition qui suit.

Bref, je suis un peu comme Monsieur Jourdain. Je faisais des anaplodiploses sans le savoir !!! Je m'étonne moi-même :))))

Écrit par : Feuilly | 10/11/2013

la mer la plus parfaite (...) est souvent celle que l' on s' invente...
J'aime bien votre phrase, Agnès. C'est tellement vrai.

Écrit par : Feuilly | 10/11/2013

La mer n'est-elle pas chérie par l'homme libre ? Et la liberté ne réside-t-elle pas dans l'imagination ? Et cette imagination n'est-elle pas le refus et la négation de la vie "réelle", "concrète" ? Et cette vie "réelle", "concrète" n'est-elle pas le rejet de la présence effective aux choses ? c'est à dire le rejet de l'étonnement devant l'incroyable présence du monde ?

La mer, c'est le monde, dans sa plénitude lumineuse, ouverte et indicible.


C'est pourquoi elle est chérie par l'homme libre.

Écrit par : cléanthe | 10/11/2013

Faites bien m'avertir. Autrement s'il arrivait à quelqu'un de me traiter d'anaplodiploseur, je ne lui adresserais peut-être plus la parole...

Écrit par : giulio | 10/11/2013

Formons une section anaplodiplosophile !! De toute urgence, car, comme dirait un tel, le temps est sorti de ses gonds!

Écrit par : cléanthe | 10/11/2013

@ Cléanthe : la mer et son infini nous renvoient à nos rêves de liberté, c'est clair. Le monde dans lequel nous vivons nous heurte et nous scandalise, alors nous compensons par le rêve ou par l'écriture.

@ Giulio : quant à moi, je ne me serais jamais permis de vous traiter d''anaplodiploseur! Quand même, il y a des limites !

Écrit par : Feuilly | 10/11/2013

Je trouve votre texte si musical...
Oui, nous compensons par le rêve ou/et par l'écriture, ne sont-ils pas l'un et l'autre liés ?

Écrit par : Blue | 12/11/2013

@ Blue : musical ? Vous ne croyez pas si bien dire car quand j’écris, je relis sans arrêt les phrases précédentes et c’est finalement à l‘oreille, en fonction des sonorités « entendues », que je choisis les mots suivants. Et si je corrige, c’est surtout lié au balancement de la phrase beaucoup plus qu’au sens de tel ou tel mot.

Rêve et écriture sont liés, absolument, puisque l’écriture nous permet de construire le monde dont nous rêvons.

Écrit par : Feuilly | 12/11/2013

Je ne sais pourquoi votre texte me fait penser à "Profondeurs" de Mankell, peut-être la solitude qui s'en dégage ...La mer, en effet, n'est jamais l'amie définitive de personne.
La nature est toujours source de solitude, parfois de poésie aussi à celui qui ressent les choses de l'intérieur.

Écrit par : saravati | 13/11/2013

@ Saravati : solitude, oui, puisque là où certains recherchent la compagnie des femmes pour donner un sens à leur vie, celui dont on parle ici préfère s'isoler devant l'infini de la mer, ce qui lui permet de rêver à un "ailleurs" (même si cette mer est finalement hostile). Mais on sent que ses rêves sont illusoires, aussi illusoires que ses pas dans le sable, qui s'effacent après son passage.

Écrit par : Feuilly | 13/11/2013

@ Feuilly
Parfois les rêves sont ce qui reste pour se tenir debout !

Écrit par : saravati | 14/11/2013

@ Saravati : c'est vrai. Si on ne rêvait pas à un avenir meilleur, pourquoi continuerait-on ? Le désir (au sens large) est ce qui nous fait avancer.

Écrit par : Feuilly | 14/11/2013

La mer "conquérante et lascive", et les traces toujours recommencées, l'infini, la solitude et les couleurs, comme vous l'avez bien décrit, cet homme seul sur la plage!

Écrit par : Nicole Giroud | 31/01/2014

@ Je n'imagine pas la mer sans solitude. Ca me pose pas mal de problèmes en juillet...

Écrit par : Feuilly | 31/01/2014

Les commentaires sont fermés.