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28/05/2013

Rencontre

J’ai marché des jours et des jours, toujours vers l’ouest.

J’ai marché sans m’arrêter, sur des chemins qui fuyaient sans fin vers l’horizon de mes rêves.

Il y eut des soirs, il y eut des matins.

Il y eut des aubes tristes et des crépuscules flamboyants. 

Parfois, j’avançais courbé sous la force du vent et sur mon visage ruisselait la pluie, comme des larmes d’un autre temps.

Parfois il faisait chaud, étouffant, et dans les lointains s‘élevait sans fin la fumée des pinèdes calcinées.

J’ai marché depuis les commencements du monde, sans m’arrêter.

Je n’avais qu’une idée en tête, celle de te retrouver, mon amour.

 

Et toi, toi, tu t’es mise à marcher vers l’est.

Tu as traversé des rivières et des fleuves, des plaines fertiles et des villes gigantesques.

Tu as contemplé des cathédrales plus hautes que le ciel dont les vitraux ensanglantés disaient la souffrance de tous les peuples.

Sous les voûtes ogivées ou dans l’obscurité des criques, tu as prié à genoux un dieu étranger.

Etendue nue sur les dalles bleues et glacées, le froid déjà gagnait ton cœur quand tout là-haut les grandes orgues se mirent à jouer seules au milieu de la nuit.

Alors tu t‘es levée et tu t’es remise en route.

Tu as marché en aveugle dans les ténèbres et quand soudain la lune est apparue, c’est mon reflet que tu as cru voir dans l’onde d’un étang bleu.

 

Alors tu as souri et tu m’as attendu, assise au bord du monde.

littérature

00:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : littérature

Commentaires

Un poème magnifique... Il y a du Cendrars dans cette poésie.

Écrit par : Halagu | 28/05/2013

@ Halagu : du Cendrars, carrément ? Diable !

Écrit par : Feuilly | 28/05/2013

L’Ouest, le pays du soleil éternel qui n'en finit pas de se coucher...
Qu'est-ce qu'aller vers l'Ouest, sinon essayer de suspendre le déclin du soleil ? Rattraper le soleil et découvrir la terre où on ne vieillit pas...

Écrit par : Michèle | 31/05/2013

...où l'on ne vieillit pas :)

Écrit par : Michèle | 31/05/2013

Oui, la fuite vers l'Ouest est sans doute un rêve d'immortalité. Ce n'est sans doute pas un hasard si dans ce poème c'est en marchant vers l'Ouest que le protagoniste espère rencontrer la femme de ses rêves.

Écrit par : Feuilly | 31/05/2013

De ces rencontres sublimes que l'on imagine si fort et qui disparaissent avec les vents.
Ces sensations du bout du monde, comme on aimerait les partager avec des mots si beaux ...
chacun rivé à un point cardinal ...
"Au sommet de la tempête, mon cœur, sur ce plateau exposé à l’immensité du ciel, mon cœur s’est emballé, quelques secondes aux allures d’éternité, arrêté, douloureux, douleur stridente dans la poitrine, la peur d’avoir atteint mon terminus, de percevoir la vacuité de mon amour, le non-sens de mon existence"
Je ne sais pourquoi votre texte me ramène au bout du monde .
http://saravati.skynetblogs.be/archive/2010/05/27/voyage-au-bout-du-monde.html#comments

Écrit par : saravati | 03/06/2013

@ Saravati : mon texte est plus optimiste quand même, car la rencontre (future) semble possible, pour autant que chacun se déplace vers cet endroit où l'autre devrait se trouver. Chez vous, au contraire, le voyage au bout du monde débouche sur des souvenirs peu réjouissants, ceux d'un amour qui a existé, qui existe toujours chez la narratrice, mais qui ne semble plus vraiment partagé.
Par contre, dans les deux cas, en effet, le déplacement géographique vers un "ailleurs" différent de notre quotidien permet de mettre le thème de l'amour au centre des préoccupations personnelles. Comme si l'amour était d'office "ailleurs", toujours à découvrir ou au contraire toujours à regretter.

Écrit par : Feuilly | 04/06/2013

" Comme si l'amour était d'office " ailleurs"". Combien cette petite phrase est forte !
L'indéfinissable ailleurs.
En revanche, je ne suis pas trop d’accord avec l’ouest et sa symbolique. Pour moi, le fantasme d'éternité, c'est l'est, une chose qui n'en finit pas de naître et non de mourir.
En avion, par exemple, quand tu files vers l'est, tu remontes le temps. Prosaïquement, sur un même trajet, le susdit avion met moins de temps d'ouest en est que d'est en ouest, parce qu'il vole au-devant du temps.
L’ouest a toujours symbolisé pour moi le déclin et l'est le renouveau, l'éternel retour.
Mais bon, c'est sans doute lié à mon territoire de vie aussi.

Écrit par : Bertrand | 05/06/2013

Bertrand, si tu remontes le temps c'est qu'il est plus ancien que celui dont tu viens.
L'Europe c'est le "Vieux Monde", l'Amérique le "Nouveau Monde". Nous aurons toujours six heures de plus qu'eux :)

La Pologne et la France, toute l'Europe, ont l'Océan Atlantique à l'ouest, l'Amérique l'a à l'est :)

Mais ce qui est essentiel, tu as raison, c'est cette notion de naissance, renaissance.

Et je trouve cocasse de discuter de ça avec toi, l'auteur de "Géographiques" (Le temps qu'il fait, 2010), cette indication pour ceux qui ne l'auraient pas lu.
Je suis nulle en géographie, et en orientation spatiale :)

Écrit par : Michèle | 05/06/2013

Ce qui me fait sourire c'est que je parle comme si la terre était plate. Et j'ai beaucoup de mal à l'imaginer ronde :)

Écrit par : Michèle | 05/06/2013

Comme l’amour est la recherche de l’’autre (de ce qui n’est pas soi mais qui pourrait le compléter), cet autre, dans notre imaginaire, ne peut être qu’ailleurs.

Quant aux notions d’ouest et d’est… Difficile à dire. De toute façon, dans le poème, on a les deux, puisque l’homme marche vers l’ouest et la femme vers l’est. Le principal est qu’ils finissent par se rencontrer.

Écrit par : Feuilly | 05/06/2013

La femme marche vers le renouveau et l'homme vers le déclin, donc . Rencontre poétique qui doit poser problème aux couples de même sexe (!) J'en conclus donc que ce qui est important, comme tu le soulignes, ce n'est pas le voyage mais le point de rencontre.
Michèle, c'est vrai ce que tu dis : ces évidences ne le sont pas toujours du point de vue poétique. L'ouest et l'est, sur la machine ronde, sont aussi des dispositions d'esprit par rapport au point d'où l'on parle, d'où l'on vit, d'où l'on désire... Un homme qui voudrait, dans l'absolu, marcher le plus longtemps possible vers l'est, se verrait contraint de marcher vers l'ouest.

Écrit par : Bertrand | 06/06/2013

Les rencontres sont belles, celle-ci me donne des frissons...

Écrit par : Papillon | 24/06/2013

@ Pappillon : les rencontres sont rares, surtout.

Écrit par : Feuilly | 29/06/2013

Et pourtant tout n'est qu'affaire de rencontres, mais il est vrai qu'elles se raréfient avec le temps, ainsi la vie est un processus de désertification qui rend les nuits froides et les oasis inoubliables.

merci pour ce beau texte

http://epistrophe.skynetblogs.be/

Écrit par : cléanthe | 20/09/2013

@ Cléanthe : ... qui rend les oasis inoubliables. Vous ne croyez pas si bien dire !

Écrit par : Feuilly | 20/09/2013

Ah ? Bon..assurez-vous d'abord que cet oasis ne soit pas un mirage...

Écrit par : cléanthe | 21/09/2013

Hélas, c'est souvent le cas, en effet...

Écrit par : Feuilly | 21/09/2013

Les commentaires sont fermés.