28/06/2008
De la fonction poétique
Pourquoi la fonction poétique ne semble-t-elle plus avoir droit de cité dans notre société ?
On édite peu les poètes, leurs livres se diffusent d’une manière confidentielle et ceux qui les lisent osent à peine avouer en public qu’ils les apprécient. Imaginez-vous, en plein conseil d’administration d’une banque ou dans le bureau de votre directeur du personnel, dire que vous aimez la poésie. On va vous regarder soit comme un dangereux malade, soit comme un utopiste romantique un peu fou dont il convient de se débarrasser au plus vite.
Pourquoi donc la poésie a-t-elle perdu tout crédit officiel ? Les gens sont-ils moins sensibles qu’autrefois ? Je ne le pense pas. Alors ? Est-ce parce qu’elle se situe en dehors du circuit des échanges marchands qui caractérisent notre époque ? Probablement. La poésie est gratuite et esthétique. Elle n’est finalement qu’un jeu sur la langue, mais comme chacun sait, ce jeu peut être contestataire puisqu’il valorise le monde intérieur de l’individu et fort peu l’instinct grégaire du consommateur. A ce titre, la poésie est condamnable et donc condamnée par les boutiquiers qui nous dirigent. D’abord elle inquiète par sa gratuité, notion impensable pour ceux qui font de l’argent avec tout, ensuite elle recherche la beauté afin d’émouvoir, créant des mondes imaginaires qu’il est difficile de faire contrôler par la police d’état. Elevant l’esprit, proposant un univers différent, parallèle, elle inquiète, aussi préfère-t-on la ridiculiser en évoquant un sentimentalisme qu’on qualifie de ridicule.
Et puis ces gens ne pensent qu’à l’argent, argent qui leur permettra d’acheter des objets destinés à paraître (comme si la possession d’un objet pouvait grandir un individu !). Comment pourraient-ils comprendre la poésie, qui elle vise essentiellement l’être et même la profondeur de l’être ?
Comme ce sont eux qui ont le pouvoir, la poésie a donc pris le maquis, c’est sans doute pour cela que vous ne la rencontrez plus.
04:01 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (35) | Tags : littérature, poésie
Commentaires
faut-il que la poésie acquiert un crédit officiel ?
Une labellisation étatique ?
On voit bien dans l'histoire où cela mène...
Bienheureuse la poésie qui demeure marginale, subreptice, et en dehors des boulevards officiels...
Il y a beaucoup d'illustres inconnus sur le net qui tâtent de la poésie...
Et c'est tant mieux...
Écrit par : alainx | 28/06/2008
Une poésie d'état? Sûrement pas! Mais un monde où on pourrait dire spontanément qu'on adore la poésie sans que personne n'y trouve à redire.
Écrit par : Feuilly | 28/06/2008
La poésie n'est pas juste un jeu sur le langage, la poésie n'est pas que la fonction dit poétique de Jakobson, la poésie peut faire rire et réfléchir. La poésie, c'est la littérature, voilà tout. J'ai justement mis quelques liens à ce sujet:
http://ancion.hautetfort.com/archive/2008/06/27/les-aventures-du-poete.html
Bonnes lectures!
Écrit par : Nicolas Ancion | 28/06/2008
Il reste, heureusement, la bibliothèque la plus formidable pour s'émouvoir: le net.
Écrit par : halagu | 28/06/2008
Tiens, tiens, Nicolas Ancion... Il est logique, finalement, de vous rencontrer sur Internet, vous qui à une certaine époque écriviez vos romans en ligne, allant jusqu'à modifier la suite de l'histoire en fonction des réactions des intervernants. Vive Internet, donc, comme le souligne Halagu.
La poésie n'est pas qu'un jeu sur la langue... Bien sûr, d'ailleurs je dis qu'elle est contestataire par vocation, gratuite par essence et qu'elle crée des mondes imaginaires. Elle a donc bien un contenu et n'est pas qu'une forme.
Certes, elle est aussi un jeu sur la langue, comme l'ont bien montré Jakobson ou le groupe Mu, mais pour moi ce jeu n'est là qu'un moyen permettant d'accéder à une vérité autre.
Je lis votre texte et relève votre position pour la défense d'une Belgique unitaire. N'est-ce pas là un combat d'arrière-garde? Les francophones de Belgique semblent tenir beaucoup à leur petit pays et on peut les comprendre, mais il semblerait bien que ce soit la majorité flamande qui va décider pour eux. Dès lors, les francophones ne feraient-ils pas bien de commencer à penser à ce qu'ils vont devenir demain quand ils vont se retrouver seuls?
Écrit par : Feuilly | 28/06/2008
On peut défendre une Belgique unitaire et pourtant prendre son destin en main. Ca n'est pas antinomique, au contraire. C'est faire la paix tout en préservant des billes pour demain.
Sinon, en Belgique francophone, il y a la plus grande concentration d'éditions de poésie et de revues consacrées à la poésie, sans compter de maisons de la poésie, du conte ou de la littérature. Beaucoup de grands romanciers belges sont aussi des écrivains de nouvelles et de poésie. Il faut dire qu'on est pas spécialement dans le mouvement de ces "grandes rentrées littéraires" et des clubs parisiens.
Mais quelle qualité que des Adamek, Luc Baba, Alain Bosquet, Harpman, Bauchau, François Emmanuel, Elisa Brune, Tirtiaux, Goffette, Gunzig, Francis Dannemark, Xavier Deutsch, Vincent Engel, Eva Kavian, Otto Ganz, Werner Lambersy, Malinconi, Françoise Mallet-Joris, Nadine Monfils, Colette Nys-Mazure, Françoise Lison-Leroy, Jean-Pierre Otte, Amélie Nothomb, Mimi Quinet, Lucien Noulez ou Liliane Wouters, Philippe Toussain pour ne citer que quelques noms...
On y trouvera aussi, souvent, ces romans à intrigues, poétiques, fantastique, mythologiques, hors norme...
On n'aime pas parler de notre littérature , parce qu'on est pudique et qu'on est conscient de la petite portion de territoire dont on est issu ( et donc peu envieux de la réduire encore en taille) mais en fait, c'est comme la densité de population, on a aussi un densité culturelle, l'air de rien et de pas y toucher.
Autrement, la Belgique unitaire, c'est encore aussi le siège d'une Europe stable. Nos voisin européens feraient peut-être bien de réfléchir aux conséquences sur l'Europe d'une dissolution de la Belgique, siège de ses institutions, et plutôt que d'asséner de grandes vérités péremptoires, se rendrent compte que cette division, vu la géographie linguistique, n'a rien d'évident ni de pacifique, ni pour les belges, ni pour l'Europe.
Enfin, il est une chose qu'on peut reconnaître aux artistes du Nord, c'est d'être plutôt des belges avant que d'être des flamands. c'est bien la moindre des choses pour ceux du Sud de leur rendre la politesse et de sauvegarder l'âme de ce qui reste notre pays (culturellement s'entend).
Écrit par : flo | 30/06/2008
Bienvenue, Flo. J'ai parcouru un peu votre site qui est remarquable. Merci pour toute cette poésie.
Pour le reste, je confirme que la Belgique francophone est riche en écrivains de qualité. Je vois avec bonheur que vous citez Adamek, qui est un grand auteur trop souvent oublié. Par contre vous ne faites pas allusion à Jean-Claude Pirotte, dont la prose est pourtant fort poétique. Ne me dites pas que c’est parce qu’il s’est réfugié en France (mais vous savez qu’il y fut obligé…).
J’apprécie moins Gunzig (qui fait plus dans l’humour), mais par contre j’adore Bernard Tirtiaux (par ailleurs ouvrier verrier) et François Emmanuel (frère du précédent) et je les recommande vivement à ceux qui ne les auraient pas lus.
Sur le plan politique, il est certain qu’un éclatement de la Belgique poserait un problème pour l’Europe, dont le siège est précisément à Bruxelles. Mais ceci dit, c’est un peu l’Europe qui a poussé à la reconnaissance des langues régionales et des particularismes (en principe au nom du droit des peuples, en pratique pour déstabiliser les états, les fragiliser et donc les remplacer plus facilement. Comment une région comme la Sicile, le Pays basque ou la Sardaigne pourrait-elle s’opposer à elle seule à la politique économique de Bruxelles, noyautée à 100% par le néolibéralisme ? )
Maintenant, vous parlez de l’âme culturelle de la Belgique, cela me laisse rêveur. Pour moi, il y a deux cultures qui se côtoient et qui maintenant s’opposent.
Écrit par : Feuilly | 01/07/2008
Alors, le premier texte, il est de qui ? Bon, je ne cherche pas ! Un peu compliqué, l'origine de la parole sur ce blog (comment appeler cela autrement ? ce mot me donne de l'urticaire dans la bouche !)
Donc, je reviens au premier texte, à son souffle. Oui, la respiration poétique y est toute entière envers et contre toutes les difficultés qu'elle semble avoir pour exister dans la langue de ce temps. Elle est comme un contrebandier, passant son or à dos furtif sur des chemins détournés, de préférence, la nuit pour mieux être confondu avec l'indicible.
Mais elle n'est pas dépendante du livre édité. Même si elle doit mourir sous cette forme-là, un poète ne sait pas écrire autrement. S'il n'y a plus de livre le portant, il écrira sur les murs des villes, sur les troncs d'arbre, sur le vent. Il donnera à tout passant son sang d'encre et il en crèvera, la pauvre Villon, avec ses chaussettes trouées près du gibet de Montfaucon...
Je crois que la langue est sève de multiples radeaux dont la littérature imprimée sur les livres, vendus ou pas, lus ou pas , terriblement malaxée par les pilons de l'ennui et de la satiété. au pire du jour aveugle, est chemin de douleur et d'incommunicabilité pour celui qui a voulu parler avec des mots écrits. Les "blogs", ici ou là, sont comme des cris muets et désespérés : Lis-moi, lie-moi... et le passant ,négligemment, a ouvert celui-ci et celui-là puis referme et vit dans sa langue, celle de l'accoté , celle où l'objet avalé clôt toute bouche, toute faim, toute soif...
Oui, vraiment très beau et nécessaire ce premier frontispice. J'avais promis de lire et je remonte le chemin à l'envers vers une source encore invisible mais l'eau est bonne...
Écrit par : Christiane | 05/07/2008
Maquisard à l'horizon...Pfuit. Oops, il est déjà passé.
dans un brouhaha de plumes...
Écrit par : joruri | 06/07/2008
La fonction du poète
Peuples ! écoutez le poète !
Ecoutez le rêveur sacré !
Dans votre nuit, sans lui complète,
Lui seul a le front éclairé.
Des temps futurs perçant les ombres,
Lui seul distingue en leurs flancs sombres
Le germe qui n'est pas éclos.
Homme, il est doux comme une femme.
Dieu parle à voix basse à son âme
Comme aux forêts et comme aux flots.
C'est lui qui, malgré les épines,
L'envie et la dérision,
Marche, courbé dans vos ruines,
Ramassant la tradition.
De la tradition féconde
Sort tout ce qui couvre le monde,
Tout ce que le ciel peut bénir.
Toute idée, humaine ou divine,
Qui prend le passé pour racine
A pour feuillage l'avenir.
Il rayonne ! il jette sa flamme
Sur l'éternelle vérité !
Il la fait resplendir pour l'âme
D'une merveilleuse clarté.
Il inonde de sa lumière
Ville et désert, Louvre et chaumière,
Et les plaines et les hauteurs ;
À tous d'en haut il la dévoile ;
Car la poésie est l'étoile
Qui mène à Dieu rois et pasteurs !
Victor Hugo, Les Rayons et les Ombres
J'ai passé mon bac oral de Français il y a quelques siècles et pour mon malheur le tirage au sort m'a fait tomber sur ce texte de Victor Hugo, en dernier. L'examinatrice était revêche, ma connaissance de la poésie plus qu'improbable, et j'ai déclaré forfait au bout de 2 minutes accablantes. J'ai ensuite expliqué pourquoi... pendant une heure. Une heure de monologue qui me vit argumenter ma nullité à force d'exemples, de citations, de gesticulations... Tous les bouquins de français que je gardais dans mon cartable y sont passés, tous les Lagarde et Michard et quelques livres personnels d'une grande inutilité, feuilletés page à page, interrogés, empilés sur le petit bureau...
Je suis sorti halluciné, épuisé, persuadé d'un échec certain, mais heureux d'avoir pu échanger un peu avec cette prof si revêche mais si... attentive.
J'ai appris ensuite que j'avais eu la meilleure note de l'Académie. (19/20. et ça c'est carrément immodeste !)
Cela dit c'est un peu lourd Victor Hugo... on dirait du Nougaro par moments... J'aime pas Victor Hugo.
M'enfin (puisqu'on est en Belgique), malgré la redondance et l'odeur d'encaustique, il est plutôt bien ce texte, non ?
Écrit par : Petrus | 08/07/2008
Comme c'est beau ce poème d'Hugo que j'avais rencontré quand j'étais trop en jachère pour le recevoir. Aujourd'hui, chaque mot se détache et se lie pour que fuse sa lumière mais elle est étrange car elle est faite d'une multitude d'ombres qui se dressent et qui avancent et la langue est portée par chacun comme une écharpe de lumière dans laquelle ils ont posé la terre, notre terre si laide, si belle dont ils sont, si laids si beaux, si courageux, si lâches, sauvés par une plume. Quand ils écrivent, ils sont justifiés et l'or coule dans leurs mains de terreux, de pas grand chose, de vagabonds... Et les dieux, un instant (d'éternité) fâchés contre cette race imbécile, s'attardent et tendent l'oreille.
Ils sont les passeurs, les passeurs de misère aux galoches trouées, aux manteaux effrangés, aux airs de chiens battus sur le chemin de pierres et de déserts que l'on prend sans retour et pour aller là-bas...là-bas au pays du rien... où la joie les attend...
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Petrus,
il y a tant de colère en vous que je n'ose vous dire que ce 19/20, il annonçait ce qui en vous pouvait devenir... et cette prof ne s'y est pas trompée. Si vous êtes le Pétrus que j'ai connu, il y a si longtemps... ou si vous lui ressemblez, elle ne s'est pas trompée. Certains êtres portent au front une étoile comme une couronne d'épines qui leur arrache leurs chants les plus beaux en mots, en notes et en bataille fulgurante de couleurs domptées... mais ici, il se passe quelque chose d'inouï qui m'a d'abord fait répondre (au-dessus) à cet inconnu que j'ai découvert ici et qui n'en finit pas de me héler sur un chemin où les mots s'ouvrent comme une rose tardive et inespérée...
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Frères humains qui après nous vivez..., Christiane, c'est effectivement tout le sens de ces écrivillons du dimanche qui peut-être comme vous ou comme moi souhaitent qu'on les lise et qu'on les lie... Mais il y a tant de cordes et tant d'arcs sur cette belle planète, que l'écriture, la parole ou le Verbe, au sens de narration créative où l'entend parfois exagérément Dantec, peuvent aussi se muer en sculpture, en traces peintes, en signature postillonnées comme à Lascaux ou dans la grotte Chauvet. Il y a tant de possibilités... que je me rallie finalement à cette belle phrase de Raphaël Juldé, "(qu'y a-t-il de plus noble chez l’être humain, que l’inutilité ?) (http://raphaeljulde.blogspot.com/), lachée peut-être par hasard, mais que j'ai attrapée au vol. Elle définit si bien le marchand de sandales anonyme d'une quelconque rue d'Athènes, père de 8 enfants inconnus, au siècle de Périclès, qu'elle ne peut que réjouir l'âme...
Mais quel est donc ce Petrus que vous avez connu ?
Une image, une personne réelle ?
Écrit par : Petrus | 08/07/2008
Petrus, c'est très beau ce que vous venez d'écrire... Oui, l'inutile, le don sans attendre de retour, cela seul entre dans la balance...cela seul crée de l'indicible surtout si cela est jeté, en vivant en pauvre, sur les routes de hasard de la vie, pour faire du bonheur et pour être oublié aussitôt que donné.
Pour ce ...Petrus...je ne peux vous répondre... Disons que c'est quelqu'un de bien, de vraiment très bien, que j'ai connu autrefois et qui semble heureux enfin.
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Mon nom sonne pseudo, mais c'est pourtant mon vrai nom.
Il y a "longtemps" trois familles en France le portaient... A Paris, à Lyon et... ici !
Avez-vous parcouru le blog d'Alina Reyes ?
feed://amainsnues.hautetfort.com/index.rss
Bonne lecture sinon !
Écrit par : Petrus | 08/07/2008
... à moins que vous n'écriviez du paradis ? J'y ai une Christiane...
Écrit par : Petrus | 08/07/2008
Petrus, pour moi c'est plutôt un prénom, celui de Pierre-Paul... Je vais lire ce que vous me conseillé et je reviens.
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Petrus, pour moi, c'était plutôt un prénom , Pierre-paul en France, Petrus, en Corse... Vous, cela a plutôt l'air d'être un nom. C'est très nouveau pour moi. Je n'appelle jamais un ami par son nom ! Je vais lire ce que vous me conseillez et je reviens.
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Tiens, le premier message s'était envolé...le revoilà avec sa faute d'orthographe ! amusant !
Me revoilà... J'ai lu un peu, pas tout. J'en garde une étrange impression : une langue familière, des images qui tissent parfois, aussi, mon imaginaire, une relation mystique au monde plus affirmée que chez moi (J'ai beaucoup plus de doutes et je n'aime pas nommer dans une écriture poético-romanesque les références du catholicisme, je préfère évoquer la conscience du sacré. Cela va très loin chez elle quand elle parle de Lourdes, de la Vierge, de Dieu.) Je crois que comme cela je ne pourrais pas l'écrire sauf dans un cercle plus fermé réservé à des croyants qui me sont proches. je crois qu'il faut inventer un autre langage de la foi qui puisse relier avec ceux qui ont d'autres croyances ou pas de croyances...
Mais le plus fort d'elle, que j'ai capté là-bas, c'est sa transparence. On voit la nature à travers elle simple et magnifiée. j'aime aussi comme elle dit les choses de l'amour, sans fausse pudeur avec une vraie pudeur. Une parole libre et saine.
Bon, tout cela ne m'explique pas vraiment vos remarques . Qui est cette christiane ? Pourquoi vous la placez au Paradis ? Dante et Béatrice ?
Quel rapport y a-t-il entre votre histoire et la mienne ? Nous connaissons-nous ? avons-nous partagé quelque chose ensemble sous d'autres noms ?
Le seul lien étrange avec tout cela c'est un certain blog (que je ne nommerai pas pour ne pas blesser l'homme étrange qui le tient). Je l'ai découvert, pas tout à fait par hasard, en partant d'un autre blog... un jour où j'ai cliqué sur un lien. j'ai été subjuguée par la beauté, inclassable que je trouvais là. C'était un homme à la sexualité particulière (dans ses fictions) mais habité d'une pureté extraordinaire, et de multiples dons (peinture, musique). Mais un jour dans son écriture, j'ai retrouvé, non pas de mon écriture, mais de ma vie et cela m'a effrayée, étonnée, mise mal à l'aise. C'était un peu humiliant, comme si quelqu'un (même avec une langue extraordinaire), donnait en pâture mon intimité. Et là il s'est passé une inversion extraordinaire et inattendue : il a réveillé, intact, un amour vieux d'une quarantaine d'années... De com en com j'ai pu écrire comme un journal (qui serait une fiction) ce que j'aurais pu dire et écrire à cette époque et maintenant. Puis il a claqué la porte de son blog et je n'ai pas compris...
Voilà ce que m'évoque l'aventure de votre amie où j'ai lu en passant une histoire étrange "d'oeuvre plagiée". En vérité, lisant les deux écritures, je trouvais qu'elles se complétaient et que cela aurait fait un bouquin extraordinaire, le balancement de leurs deux écritures, imbriquées l'une dans l'autre.
Mon dieu tout ce temps nécessaire pour vous répondre ! Je ne recommencerai pas. J'espère avoir répondu à vos questions. Que va penser notre hôte ? mais il y avait une réponse impérative attendue, n'est- ce pas ? J'espère que cette page de son blog ne sera pas lue par d'autre que vous et bien sûr, lui.
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Alina Reyes est authentiquement croyante et cette authenticité coule de ses mots fluides, simples et de façon romanesque parfois. Romanesque au sens où la réalité passée au filtre de son regard donne à voir ce qui est réellement là, ce qu'on a sous les yeux mais que faute de temps, d'attention, de négligence, de sensibilité ou d'absence, on ne remarquait pas auparavant.
D'où le supplément d'âme qu'on en retire.
Litérallement. Cela touche à tous les sujets qu'elle aborde, à toutes les choses qu'elle décrit...
Avec de temps en temps un petit côté Giono, sauvage, sanguin...
Un peu trop terre-à-terre, j'oublie souvent de m'arrêter, pour faire ce rappel de soi, pour suspendre un peu le vol du temps... c'est pourquoi sa lecture est si agréable.
Rassurez-vous, nous ne nous connaissons pas mais je vous remercie de votre agréable présence !
Je vous souhaite, ainsi qu'à Feuilly, une bonne soirée !
Écrit par : Petrus | 08/07/2008
Petrus, ce qui me gêne c'est qu'elle n'affronte pas le problème du mal, de la souffrance, des prières non entendues, de l'incroyance...mais je respecte...
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Christiane,
dans La dameuse, que je n'ai pas encore lu, elle raconte le viol et la difficulté de vivre et renaitre quand le Mal a fait irruption.
Il me semble que sur son blog de propos délibéré elle ne tient pas à trop parler de la laideur... se considérant comme porteuse d'un plus beau message... c'est peut-être ce qui donne trop de transparence à la personne qu'elle affiche...?
Écrit par : Jacques | 08/07/2008
Jacques ? Vraiment vous m'intéressez. Cela oriente différemment mon regard de lectrice. J'ai été très gênée de découvrir ses mots sur un écran, car il y avait beaucoup à lire. Le support papier me serait plus naturel. Mais quand même, malgré cette lumière que j'ai parfaitement perçue, je ne peux pas viscéralement entrer dans cette forme d'expression religieuse (pélérinage, Rome du Pape, exubérance des références christiques). Tout cela j'ai mis trop de temps à le déblayer de mon éducation religieuse pour y revenir. "Etre authentiquement croyant" cela ne veut RIEN dire pour moi. je suis trop dans l'absurdité des choses de ce monde , dans leur cruauté, dans les combats contre l'injustice, le racisme, la pauvreté pour donner un blanc-seing à l'Eglise. Je reste plutôt sur le seuil avec les "mécréants".
Toutefois en cas d'urgence, pour un autre qui va mal, il m'arrive de l'interpeler avec force et Il répond intensément... mystérieusement.
J'ai eu cette expérience-là, écrasante de puissance, lors d'un procès récent où j'étais citée comme témoin. Une expérience qui a bouleversé ma vie intérieure et mon rapport à Dieu (ou ce qu'on nomme comme tel...)
Jacques et Petrus, c'est la même personne ?
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Christiane,
Je vous comprends tout-à-fait... Il est pour le moins surprenant de voir une personne s'exprimer de cette façon... Après avoir fait un grand ménage moi-même je ne refuse plus cette forme d'exubérance... Mais Alina Reyes est loin de n'être que cela ! La bigoterie n'est pas ce qui la définit le mieux. Elle est comme nous tous, garde une âme d'enfant, mais se défend également, intente un procès à son plagiaire, réagit de toutes les manières, n'hésite pas à se montrer nue sur son blog, ce qui lui vaut quelques contrariétés avec certaines bien-pensances, sans qu'elle s'en offusque, bien qu'elle en soit affectée...
Elle incarne finalement en grande partie ce que j'aurais aimé trouver dans l'environnement religieux de mon enfance... franchise, absence de non-dits, légereté...
Son mari, que l'on découvre en filigrane, ajoute à cette impression.
Dieu est sur le toit, tous les moyens sont bons pour y accéder !
Écrit par : Jacques | 08/07/2008
Pour ne pas ennuyer notre hote
contact@jacquespetrus.net
Écrit par : Jacques | 08/07/2008
Là, je crois que je peux commencer à parler de Dieu avec vous, mais par pitié, dénudé de tout ce décorum ! Et laissons à cette Alinina Reyes se dire elle-même. J'aimerais la lire dans un vrai livre avant de porter des jugements hâtifs...Chacun a son itinéraire et réagit comme il peut aux cloaques que la vie lui réserve.... Je garde Dieu et le Diable à distance (dans les habits sur mesure qu'on leur a fait pour mieux dominer le peuple et lénifier). Il s'est présenté à moi sous un autre visage qui me plaît et ou je peux faire face , en ma vérité, et ce ne doit pas être.... de tout repos pour Lui mais de toute façon , il aime assez les cas désespérés !!! Et puis parfois, pour son honneur, mieux vaut ne plus croire en lui ...( Shoah )
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
"Il s'est présenté à moi sous un autre visage qui me plaît ..."
Eh oui, mais c'est le même !
Écrit par : Jacques | 08/07/2008
Cela ça reste à vérifier ! Vous et moi, parlons-nous du même ? Pour le rencontrer , une seule voie, tous les pauvres, les paumés, les rejetés, les mal jugés,les détenus, les "sans"..., ceux qui n'y croient plus, ceux qui ont des raisons de ne plus y croire, ceux qui sont libres, ceux qui sont doux, ceux qui ne jugent pas, ne condamnent pas, ne veulent pas convertir...et la liste est encore longue...
Un point commun : quand ils le peuvent encore ils donnent tout dans la force d'aimer et d'être solidaire...et souvent ils ne Le nomment pas...et NE FONT JAMAIS LA GUERRE EN SON NOM !
Écrit par : Christiane | 08/07/2008
Oh ! là! là! Nous avons mis un tout-fou de Dieu sur votre page dédiée à dame poésie ! vous allez être très fâché, je le comprendrais. Genre squatters illuminés sur une terre de contrebandiers : les poètes...
A moins que Dieu, comme dans le poème de Hugo, participe à tout cela comme le chef, méconnu, des contrebandiers ! Pour moi, le Christ est inclassable, infréquentable, prodigieusement choquant pour les religieux de son époque, drainant après lui une cohorte de pauvres types à commencer par ses apôtres, pas vraiment fufûtes et plutôt lâches. j'aime bien tous les cabossés qu'il choisit : prostituée, collecteur d'impôt, boîteux, lépreux, femme stérile, fou à lier... C'est "la cour des miracles" !!!!
Écrit par : Christiane | 09/07/2008
Il y a déjà quelque temps que je ne fais plus la guerre....
Écrit par : Petrus | 09/07/2008
Jacques,
la phrase sur la guerre ne vous visait nullement, mais les intégristes de toutes les religions qui, au nom d'un dieu, ont tué, torturé, éliminé, converti de force, brûlé sur des bûchers, déporté....
Cette méditation, que vous avez amenée, a libéré en moi tous mes NON et celui-ci, que vous citez, est celui qui me fait souvent haïr les religions.
Écrit par : Christiane | 09/07/2008
Effectivement. 25 millions de chrétiens sont morts pour leurs opinions depuis le début du 20ème siècle...
Écrit par : Petrus | 09/07/2008
Y compris les cathares...Tués par qui ?
Écrit par : Christiane | 10/07/2008
Et les Indiens d'Amérique? Etait-ce chrétien d'envahir leurs terres dans le but de les évangéliser (alors qu'on s'est surtout contenté de les tuer au travail)
Écrit par : Feuilly | 10/07/2008
Quand les hommes se croient guidés par Dieu, souvent ils font taire l'autre, ne l'écoutent pas, veulent l'assimiler (souvent avec violence) alors que cela devrait être pour eux, l'heure du plus grand respect, du plus grand silence, de la plus grande écoute de l'autre, du plus grand apprentissage par l'autre...s'il y a vraiment eu rencontre.
les chemins du passé sont pleins de ces contre-sens, de ces prises de pouvoir révoltantes qui devraient éclairer l'obscurantisme sectaire d'aujourd'hui. Je pense à ces communautés où on brouille les pensées de jeunes enfants (le créationnisme !), oubliant que l'intelligence et la raison doivent toujours cohabiter avec la...foi et surtout avec le doute et l'humilité et le droit pour des gosses de se frotter à de multiples philosophies, à la science, à la liberté.
Heureuse, encore une fois, de trouver notre hôte lucide et pertinent, à contre-courant.
Écrit par : Christiane | 10/07/2008
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