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23/04/2008

Défense de Césaire

Nous avons déjà parlé longuement de Césaire et je ne croyais plus y revenir. Cependant, en lisant le texte qui lui est consacré sur le blogue littéraire le plus lu de Hautetfort, je ne puis m’empêcher de réagir, tant il semblerait que le combat mené par le poète martiniquais est loin d'avoir porté tous les fruits qu'on escomptait et que lui-même comme ses idées doivent encore être défendus.

Selon cet article, Césaire, en revendiquant sa négritude, n’aurait fait que suivre l’air du temps, en l’occurrence la théorie nazie sur l’importance de la race. En bon opportuniste, il aurait profité de la décolonisation qui a suivi la guerre pour afficher son nationalisme. On parle de « la lourdeur de sa plume, la pauvreté de son inspiration et la redondance de ses thématiques » tout en signalant que sa révolte est bien modeste si on la compare à l’action menée par Fidel Castro. Cette dernière remarque politique n’est pas entièrement dénuée de fondement, Césaire n’ayant pas proclamé l’indépendance de son île (ceci dit, il état maire d’une commune, pas dirigeant suprême) mais elle fait sourire quand on sait que le site littéraire en question a généralement pour habitude de fustiger la révolution castriste qu’il prend ici comme modèle.

Plus loin, on nous redit ce que l’on savait déjà, à savoir que ce sont les deux vainqueurs de la guerre 40-45 qui ont plus ou moins obligé les puissances européennes à liquider leurs colonies dans le but, soit d’ouvrir de nouveaux marchés à leurs propres produits (USA), soit d’agrandir leur espace idéologique (Russie). Ceci étant dit, on ne comprend pas :

- pourquoi ce même site littéraire voue habituellement une admiration sans bornes aux Etats-Unis alors qu’il est le premier à reconnaître que ce pays a une bien curieuse conception de l’amitié en faisant passer ses intérêts économiques avant toute chose. Il est vrai que c’est surtout Moscou qui est ici accusé d’aller inciter nos anciennes colonies à la révolte. Il faut bien, dans cette histoire, qu’il y ait un méchant et un bouc émissaire et je me réjouis que l’auteur de l’article ait lu René Girard.

- Pourquoi on passe sous silence le rôle des populations indigènes elles-mêmes, qui ont cependant largement contribué à leur émancipation. Que je sache, ce n’est pas pour rien qu’on a parlé de guerre en Algérie et je ne sais pas ce que diraient les Algériens si on leur disait qu’ils n’ont pris aucune part à leur indépendance.


Poursuivons. Nous apprenons ensuite que Césaire ne fut qu’un bourgeois qui n’était pas prêt à sacrifier son train de vie à son idéal d’indépendance (c’est curieux, je croyais que ce terme de « bourgeois » était habituellement employé dans la dialectique marxiste et voilà que nos « amis » de droite se l’approprient)

« Profitant des subsides de l’État français, il détournera pendant plus d’un demi-siècle cette manne financière contre le pays qui l’a élevé, éduqué et nourri »
On croit rêver. Même au temps du colonialisme le plus dur on a rarement vu des propos aussi outranciers et haineux. Cela se passe de commentaires. Quant au fait que l’Etat français a ouvert ses écoles aux indigènes et a permis précisément cette prise de conscience nationaliste parmi les diplômés, je crois surtout qu’il faut s’en réjouir et y voir un bienfait de l’égalité républicaine plutôt que de venir fustiger ceux qui se sont révoltés. De plus, s’agissant de Césaire, on ne peut pas dire qu’on avait affaire à un terroriste sanguinaire mais plutôt à un homme de grande culture et de grande modération, qui a compris, précisément, ce que son pays avait à gagner à rester français tout en affichant fièrement sa singularité. Et quoi ? Césaire aurait dû prendre les armes et proclamer l’indépendance de son île ? Celle-ci serait aujourd’hui sous la coupe des Etats-Unis et je ne vois pas ce que l’on y aurait gagné.

L’article se termine en affirmant que « Césaire et sa négritude ont été récupérés à d’autres fins. Ce n’est pas un hasard si, de la gauche affairiste à la droite mercantile, l’hommage à Césaire rivalise de grandiloquence avec le culte stalinien de la personnalité. » Là, il faudrait voir s’il n’y a pas un fond de vérité. Moi-même j’ai ironisé sur la présence, aux obsèques, de la gauche et de la droite pour une fois réunies dans une fausse fraternité de façade.

Il se pourrait bien que le grand capital mondial continue son combat contre le colonialisme (et les protectorats qu’il a créés) en rappelant quand il faut aux Martiniquais qu’ils auraient pu être indépendants et aux Français qu’ils ont été d’affreux colonisateurs, le but de tout ceci étant de casser les échanges économiques privilégiés qui se font classiquement entre l’ancienne colonie et sa métropole. Mais au lieu de fustiger ce néocapitalisme, l’article déplore une volonté de « métissage de l’Europe », renouant sans s’en rendre compte avec une identité raciale qu’il convient de condamner fermement et reproduisant inconsciemment les thèses qu’il reprochait lui-même (à tort) à Césaire dix lignes plus haut. Bref, quand un Martiniquais revendique sa négritude, c’est un nazi, mais quand un Français accepte le métissage, c’est un traître qui renonce au prestige de sa race. Il faut savoir ! En attendant, on se croirait revenu dans la période d’avant la guerre, et si je ne me trompe c’est bien comme cela que l’on a commencé avant d’imposer l’Etoile jaune à certains.

Ce que l’on regrette, dans cet article, c’est que Césaire ne soit point resté un noir inculte et soumis, baissant la tête devant le prestige de ces hommes blancs venus de France qui ont daigné lui apporter au compte-gouttes les bienfaits leur civilisation. Comme théorie réactionnaire on ne fait pas mieux. La seule chose qu’il y a à espérer, c’est que ces horreurs ont été écrites dans le seul but de se singulariser et de se faire remarquer en choquant la galerie. Par contre si les vérités ici exposées reflètent l’opinion de leur auteur, il n’y a plus grand chose à espérer de l’humanité.

Pour conclure, je voudrais faire parler Césaire lui-même en reprenant quelques extraits de son Discours sur le colonialisme, publié en 1950 :

« Il faudrait d'abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l'abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu'il y a eu au Viêt-nam une tête coupée et un oeil crevé et qu'en France on accepte, une fillette violée et qu'en France on accepte, un Malgache supplicié et qu'en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s'opère, une gangrène qui s'installe, un foyer d'infection qui s'étend et qu'au bout de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes ces expéditions punitives tolérées, de tous ces prisonniers ficelés et "interrogés", de tous ces patriotes torturés, au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette lactance étalée, il y a le poison instillé dans les veines de l'Europe, et le progrès lent, mais sûr, de l'ensauvagement du continent.

Et alors un beau jour, la bourgeoisie est réveillée par un formidable choc en retour : les gestapos s'affairent, les prisons s'emplissent, les tortionnaires inventent, raffinent, discutent autour des chevalets. »

(…)


« Entre colonisateur et colonisé, il n'y a de place que pour la corvée, l'intimidation, la pression, la police, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la muflerie, des élites décérébrées, des masses avilies.

Aucun contact humain, mais des rapports de domination et de soumission qui transforment l'homme colonisateur en pion, en adjudant, en garde-chiourne, en chicote et l'homme indigène en instrument de production.

A mon tour de poser une équation : colonisation = chosification.

J'entends la tempête. On me parle de progrès, de "réalisations", de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d'eux-mêmes.

Moi, je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, des cultures piétinées, d'institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d'extraordinaires possibilités supprimées.

On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemin de fer.

Moi, je parle de milliers d'hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux qui, à l'heure où j'écris, sont en train de creuser à la main le port d'Abidjan. Je parle de millions d'hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la danse, à la sagesse.

Je parle de millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme.

On m'en donne plein la vue de tonnage de coton ou de cacao exporté, d'hectares d'oliviers ou de vignes plantés.

Moi, je parle d'économies naturelles, d'économies harmonieuses et viables, d'économies à la mesure de l'homme indigène désorganisées, de cultures vivrières détruites, de sous-alimentation installée, de développement agricole orienté selon le seul bénéfice des métropoles, de rafles de produits, de rafles de matières premières. »


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Commentaires

Avant tout, je tiens à confirmer que monsieur Juan Asensio m'a aimablement ouvert les colonnes de son site Stalker (« le plus lu de Hautetfort », comme le rappelle justement monsieur Feuilly) sans pour autant partager ou cautionner mes idées. Nous avons d'ailleurs tous deux brisé assez de lances sur maints sujets pour savoir que nous ne sommes pas d'accord sur grand chose, si ce n'est sur la nécessité impérative de frotter sa pensée à celle de ses contradicteurs pour la tenir en vie. N’en déplaise à monsieur Feuilly, il est des lieux d’expression où la discussion est encore possible, où le consensus n’est pas encore un oukase, ou l’embrigadement n’est pas requis.

Ceci étant dit, ne cherchez pas ici une réponse point pour point aux élucubrations de monsieur Feuilly à propos de mon texte. En effet, son article travestit bien trop ma pensée pour que je puisse renchérir, et ce serait faire injure à son l'intelligence que de croire qu'il était de bonne foi.

Loin de vouloir entamer un débat d'idées, Feuilly passe rapidement sur mes arguments qui sont, de son propre aveu, dignes d'intérêt (la récupération de la négritude, la stérilité politique du concept...) et préfère affabuler ("Ce que l’on regrette, dans cet article, c’est que Césaire ne soit point resté un noir inculte et soumis").

Or, ce que j'ai écrit, et même explicité en note, c'est exactement le contraire!!! Ce que je reproche à Césaire et à ses prétendus disciples tient en trois points aisément identifiables dans mon discours:

1) Césaire, loin de d’affranchir les cultures africaines et créoles, les a domestiquées définitivement en intégrant la condition de colonisé comme principal élément constitutif de celles-ci.

2) Césaire n'a pas émancipé politiquement ses semblables. Il les a au contraire ancrés dans une relation victimaire et schizophrène avec la nation française, afin d’asseoir son emprise intellectuelle et matérielle sur les Antilles au cours de 56 ans de mandats électifs (le beau démocrate que voilà !).

3) Son oeuvre est dores et déjà réemployée (d'où le titre "Recyclage de la négritude") par les adversaires forcenés des particularismes culturels, ceux qui prêchent le métissage, c'est à dire la dissolution uniformisante et appauvrissante des différentes formes d'expression de l'intelligence humaine.

Mais tout cela, Feuilly l’avait sans doute compris. Il lui fallait, non pas un interlocuteur, mais un faire-valoir, si possible caricaturalement raciste et conformiste afin de mettre en lumière combien lui est « gentil » et original.

Et puisque Feuilly n’a pas jugé bon de me répondre sur le fond mais conclut sur un fastidieux copier-coller de son idole, on comprendra que je réplique de même, le côté indigeste en moins…

Pierre Damiens.


“Récusant frontalement la notion de races pures, l’antiracisme mixophile n’en pense pas moins racialement, favorisant le retour inattendu du mythe du sang par son apologie du sang-mêlé, érigé en quasi-race supérieure.” P.A. TAGUIEFF , Les fins de l’antiracisme.

Écrit par : Pierre Damiens | 25/04/2008

A Pierre Damiens

« savoir que nous ne sommes pas d'accord sur grand chose, si ce n'est sur la nécessité impérative de frotter sa pensée à celle de ses contradicteurs pour la tenir en vie. » Fort bien.

« élucubrations de monsieur Feuilly à propos de mon texte. En effet, son article travestit bien trop ma pensée… » Est-ce si sûr ? Si vous regrettez que Césaire n’ait pas poussé sa logique d’émancipation jusqu’au bout, c’est moins par respect pour le peuple martiniquais que pour pouvoir conserver un monde où les races ne se mélangent pas (et éviter ainsi une société mixte).

« Feuilly passe rapidement sur mes arguments qui sont, de son propre aveu, dignes d'intérêt » Mais je les cite, prouvant par là que je ne suis pas de parti pris

1) « Césaire, loin de d’affranchir les cultures africaines et créoles, les a domestiquées définitivement en intégrant la condition de colonisé comme principal élément constitutif de celles-ci. » Certes, mais il a dénoncé cet état de colonisé, que je sache et il a été un des premiers à le faire. Il représente donc un moment de l’histoire de la pensée, même s’il n’a pas poussé la logique jusqu’au bout.

2) Césaire n'a pas émancipé politiquement ses semblables. Il les a au contraire ancrés dans une relation victimaire et schizophrène avec la nation française ». Pouvait-il faire autre chose ? Étant de cette génération qui a connu la colonisation pure et dure, il a été imprégné de la culture française envers laquelle il a toujours eu une grande admiration. On peut presque dire qu’il est bi-culturel. Il doit être plus facile pour les jeunes d’aujourd’hui de tenir un autre discours, surtout qu’ils y ont été préparés par des gens comme Césaire. Pour lui et à son époque, dénoncer le colonialisme était déjà un grand pas en avant.

3) « Son oeuvre est dores et déjà réemployée (d'où le titre "Recyclage de la négritude") par les adversaires forcenés des particularismes culturels, ceux qui prêchent le métissage, c'est à dire la dissolution uniformisante et appauvrissante des différentes formes d'expression de l'intelligence humaine » Je suis le premier à regretter l’uniformisation ambiante qui appauvrit en effet (en gros : la société de consommation de type libéral calquée sur les Etats-Unis, lesquels sont en train d’imposer leur mode de vie à la planète entière). Mais vous, de votre côté, vous semblez surtout la redouter pour des motifs qui tiennent plus à la race qu’à autre chose. C’est la politique du chacun chez soi. Or, ces peuples des anciennes colonies, qui s’expriment en français, pourraient bien un jour nous surprendre par la richesse de leur approche. Voyez l’Amérique du Sud. Elle possède tout de même des écrivains de grand talent dont l’Espagne n’aurait pas à rougir. Aussi, avant de rejeter ces peuples auxquels l’Histoire nous a attachés, voyons s’ils ne nous proposent pas quelque chose de plus dynamique que ce qui se fait chez nous.

Écrit par : Feuilly | 25/04/2008

Monsieur Feuilly,

Encore une fois, vous ne parvenez pas à vous élever au-dessus du procès d'intention. Commencez par prendre en compte ce que j'ai écrit, avant d'imaginer mes arrière-pensées (à moins que vous ne soyez médium...)

Avant d’aller plus avant et pour resituer l’identité créole dans l’Histoire, il est intéressant de noter qu’hormis les quelques dizaines de descendants d'indiens Arawaks et Caraïbes, tous les antillais sont des colons, les békés l'étant volontairement, les descendants d'esclaves l'étant devenus malgré eux. Il est aussi nécessaire de rappeler que le commerce triangulaire avec la Martinique n'a commencé qu'en 1642. L'île était déjà peuplée par des cultivateurs français et des travailleurs engagés. La période esclavagiste en Martinique a donc duré deux siècles et a pris fin il y a 160 ans. Il serait donc temps de sortir de ses remugles.

Or, à ce titre, Césaire a perpétué la transmission des réflexes ancillaires. La "théorie" de Césaire reposait sur un constat juste: le déracinement et la perte des repères culturels originels sont responsables d'une forme d'aliénation mentale des antillais noirs. Pourtant, loin d'oeuvrer à reconstruire une identité, il n'a fait que stigmatiser les plaies de l'esclavagisme, dans une logique revendicatrice et d'exigence de réparations. A titre de comparaison, jusqu'à l'abolition des privilèges, une partie majoritaire de la population française avait connu le servage. Cette condition n'avait rien de très enviable et a duré près d'un millénaire. Or, ce traumatisme s'est principalement traduit par des aspirations politiques, non par un complexe culturel. Nous avons eu la chance de ne pas avoir notre Césaire métropolitain, sinon nous serions élevés dans la mystique du servage fondateur.

Les Antilles sont un microcosme qui n’aura pas de destin en dehors de l’orbite d’une puissance tutélaire, la France, ou une autre. Le fait que les USA lorgnent depuis toujours sur les Caraïbes ne doit pas nous échapper. Lorsque vous déplorez l'impérialisme américain et la globalisation de l’american way of life, ne voyez-vous pas que le métissage en est l'arme ultime? Ne comprenez-vous pas que le melting-pot mondial est le pilier de la stratégie capitaliste? N'avez-vous pas réalisé que le brassage forcé des populations à l'échelle planétaire permet de faire sauter les verrous identitaires, de supprimer toute capacité de résistance à l'ordre mondial, de standardiser les moeurs, les besoins et les modes de consommation pour le plus grand profit des magnats de la finance??? Je n’ai rien contre les métis. Peut-être en sommes-nous tous ! Mais quand le métissage devient un impératif, une obligation, une norme imposée, il convient de s’interroger sur les motifs de cette mode mixophile qui va à l’encontre de toute tradition…

Souvenez-vous de la phrase du général Wesley Clark, commandant en chef des forces de l'OTAN: "Il n'y a plus de place en Europe pour un peuple non métissé".
En vous faisant l'apôtre du métissage systématique, vous êtes l'idiot utile des multinationales. Renseignez-vous sur l'activité de certaines officines: National Endowment for Democracy, French American Foundation, Council on Foreign Relations, Center for Strategic and International Studies... Consultez la liste de leurs membres, jetez ensuite un oeil sur la biographie de nos gouvernants... Vous constaterez alors qu’il y a anguille sous roche, que les bien-pensants ne sont pas toujours désintéressés, que les professionnels du droit d’asile, de la défense des sans-papiers et du grand mélange des peuples sont rarement bénévoles.

Alors acceptez qu’on puisse se défier du métissage sur ordonnance, non par xénophobie, mais justement par amour des différences, celles-ci ne pouvant être préservées qu’à l’échelle des nations, des peuples, des tribus, non des individus comme on nous le donne à croire. Il ne me plaît pas d’entendre les marchands d’immigrés comme Attali nous vanter les mérites des flux migratoires comme rustine démographique. Il m’est insupportable de me faire sermonner par les « antiracistes » au motif que je serais coresponsable de la colonisation, de l’esclavage, des génocides. A l’époque où Césaire entrait à l’Ecole Normale, mes aïeux gagnaient leur pitance dans les mines du Pas-de-Calais ou les forêts de la Meuse. De mémoire d’homme, mes ancêtres ont toujours travaillé de leurs mains, ils ont versé leur sueur à la tâche et souvent de leur sang sur les champs de bataille. Pourtant, je n’ai hérité de ces générations laborieuses et économes ni richesses, ni biens, ni trésors, si ce n'est celui de la culture. Dois-je m’en sentir coupable ? Dois-je renoncer à cet héritage?

Les immigrationnistes qui se présentent sous des atours humanistes sont en fait la version modernisée et policée des négriers. Voyez nos vaillants « patrons de bistrots » militer pour la régularisation de leur « bois d’ébène ». Ces gens ne vous dégoûtent-ils pas ???

Pour en revenir enfin à Césaire, il est, pour les jeunes martiniquais et les africains qui le connaissent, l'archétype du colonisé. Il na rien de l'éveilleur de peuple et de consciences que vous avez cru voir en lui. Arrachez-vous à la lecture de Confiant, Glissant et autres thuriféraires subventionnés de la négritude. Rencontrez les antillais, voyagez en Afrique... vous verrez que l'on n’y pleure pas longtemps les vieux satrapes. Nos DOM-TOM ont hélas tous connu des roitelets paternalistes: Césaire en Martinique, Lafleur - Tjibaou en Nouvelle-Calédonie, Thien Ah Koon - Vergès à la Réunion, Flosse à Tahiti. Tous ont joué sur le thème de la spécificité territoriale... dans le seul but de se maintenir en place!

Au bilan, il convient de relativiser l'importance de Césaire, de son impact sur le cours du monde, du legs qu’il nous laisse. Le Panthéon est le mouroir de toute rébellion et la négritude n’est déjà plus qu’un gadget pour d’autres nègres, ceux qui tiennent la plume de nos politiciens. Césaire n'était pas Gandhi, ni Luther King, ni même Mandela. Il n'y a chez lui rien d'admirable, ou d'haïssable, rien qui puisse susciter les passions. Qu'il repose en paix.

Écrit par : Pierre Damiens | 26/04/2008

A vous lire, les uns et les autres, et à chercher d'où viennent ces perpétuelles discordances, il me semble trouver un embryon de réponse, qui peut s'exprimer plus clairement de manière imagée.

Asensio, et je crois que je procède de la même démarche, écrit pour se mettre à l'épreuve, pour exposer sa carcasse, se débarrasser de la gangue des connivences qui nous enferment au quotidien, chercher un sentier à défricher. Son écriture est une quête, inséparable de certaines errances. Chemin faisant, il croise la route d'autres chevaliers à la pâle figure, mais son aventure sera toujours solitaire.

A l'inverse, Feuilly, Redonnet, et bien d'autres, écrivent pour assurer leurs positions, pour compter leurs partisans et identifier leurs adversaires. Tout ce qui cherche à les débusquer leur fait horreur et les pousse à s'enterrer plus encore. Leur écriture est celle du choix d'un camp (celui des gentils de préférence), de l'embastionnement, du retranchement. Si vous faites irruption dans leur champ de tir, il faut montrer patte blanche et se rallier, ou ils vous suspecterons d'intelligence avec l'ennemi.

Ces deux conceptions de la littérature, et de l'existence, sont inconciliables, quoique complémentaires, et leur rencontre est généralement stérile, tant leurs mobiles, plus que leurs convictions, diffèrent.

Écrit par : Pierre Damiens | 27/04/2008

Juan,

Devant notre incompréhension mutuelle, votre ami Pierre Damien s'interroge à juste titre. Ceci dit, l'explication qu'il donne ne me satisfait pas. Je n'écris pas pour compter mes partisans, j'écris ce qui me semble juste, même si cela va à l'encontre des idées reçues, comme vous pourriez le croire tous les deux. Par contre, il est vrai que je ne veux pas me singulariser à tout prix en prenant systématiquement le contre-pied de ce qui se dit afin d’attirer l’attention sur ma personne. L’écriture n’est pas pour moi synonyme d’errance. Au contraire, elle me sert à clarifier les idées qui seraient en moi. Derrière elle, il y a donc toujours une base solide. Chez vous, on a l’impression que l’écriture existe pour elle-même et que vous pourriez toujours lancer n’importe quelle idée farfelue, ce serait toujours bon puisqu’il s’agit juste de « défricher un sentier ». Cette « errance » que vous revendiquez explique sans doute pourquoi vous changez souvent d’avis sur les personnes. C’est que vous émettez des hypothèses alors que le sol est mouvant sous vos pieds. Le lendemain, vous rendant compte de votre erreur (je vous reconnais cette qualité, vous êtes capable de reconnaître que vous aviez tort ), vous changez d’avis et vous repartez au combat dans une nouvelle direction.

Mais à cette errance verbale un peu inconséquente, je préfère l’errance existentielle d’un Redonnet qui lui, se coltine avec la réalité dans sa recherche, même si je suis personnellement aux antipodes de cette manière de vivre..

Selon Pierre Damien, si on fait irruption dans mon champ, on est suspecté d’intelligence avec l’ennemi. Pas à priori, évidemment, mais j’ai suffisamment lu d’horreurs sur le blogue du Stralker pour me méfier, effectivement. Quoi qu’on en dise ce texte sur Césaire ne transpirait pas la sympathie et s’il n’est pas une diatribe contre les gens de couleur, il en est une contre une possible société multi-raciale. Je soupçonne donc là une théorie sur les rapports humains qui ne me plait pas (même si je n’aime pas plus que vous la société unique qu’on nous prépare). Procès d’intention, me direz-vous ? Plutôt bon sens paysan.

Écrit par : Feuilly | 28/04/2008

Monsieur Feuilly,

Comment pouvez-vous dans le même texte déclarer:
"Je n'écris pas pour compter mes partisans, j'écris ce qui me semble juste, même si cela va à l'encontre des idées reçues, comme vous pourriez le croire tous les deux."
Et quelques lignes plus loin:
"Le fond du problème est idéologique et politique. Partant d’une position que je qualifierais de gaulliste, vous dérivez souvent vers une droite de plus en plus dure où on retrouve le sentiment de supériorité envers vos semblables. On dirait que vous associez tout ce qui concerne l’humain à une gauche lâche et veule, prête à tomber dans un communisme retardataire."

Vous dites tout et son contraire, mais malgré vos dénégations préliminaires, vous corroborez mon interprétation de vos prises de position: vous écrivez et réfléchissez de manière purement idéologique (ce qui n'est pas une tare en soi). Lorsque vous êtes confronté à un argument, vous commencez par vous demander si celui-ci plaide pour votre chapelle ou non, avant de vous questionner sur sa recevabilité et les pistes de réflexion qu'il ouvre.

Ce tri vous permet de ranger vos interlocuteurs dans vos petites boîtes: gauche / droite, humaniste / misanthrope, tolérant / raciste, progressiste / réactionnaire. Ceci étant fait, pas question de tempérer vos jugements. Quand quelqu'un que vous avez catalogué dans "droite, misanthrope, raciste, réactionnaire" déclare que selon lui, le métissage forcené abolit les différences et, par là même, anéantit la richesse du patrimoine ethno-culturel humain, vous ne cherchez pas à répondre sur le fond, vous ramenez immédiatement l'impertinent dans votre bocal à méchants, au motif qu'il est forcément de mauvaise foi et que se propos perturbent votre bel agencement.

Ainsi, vous continuerez à me faire rentrer de force dans vos gabarits, dussiez vous pour cela éluder mes propos, les transformer, les travestir... L'important pour vous n'étant pas de construire une pensée originale, mais de conforter votre vision du monde. De telles dispositions d’esprit, qui montrent de nos jours une efficacité certaine, vous rapprochent plus que vous ne le croyez des ultra-conservateurs et autres néo-cons que vous prétendez abhorrer.

Écrit par : Pierre Damiens | 28/04/2008

Peut-être avez-vous raison, en effet. Mais cette vision idéologique na pas été adoptée sans de nombreuses réflexions préliminaires. Vous, de votre côté, vous dites ne vous adonner qu’à la réflexion intellectuelle pure, sans aucun parti pris initial. Cette démarche vous honore, certes, mais permettez-moi, une nouvelle fois, de douter. Je vous vois plus prompt à critiquer la société mixte qui se prépare (et je n’ai pas dit qu’elle m’enchante) qu’à fustiger ce nouvel ordre mondial mercantile. Vous vous en prenez donc à des individus (ici Césaire) plutôt qu’au système lui-même. Désolé, mais à la longue d’entendre le Stalker se moquer de tous les humanistes, de tous les « droitdelhommiens » (pour reprendre ses néologismes) et de tous les alter-mondialistes qui ne veulent rien d’autre qu’un monde où ils puissent respirer et non une société dont les règles visent à enrichir quelques privilégiés, à la longue, dis-je d’entendre tout cela chez celui qui vous ouvre ses colonnes, je vous ai peut-être assimilé un peu vite à lui. Mais vous ne m’aidez pas beaucoup. Dans vos propos, je perçois surtout la volonté d’établir une société française de souche, où on ne vivrait qu’ente Français (cultivés de préférence). Plus que l’expansion du grand capital, je crois que c’est surtout cela qui vous tracasse. En attendant Sarkozy va faire adopter cette constitution européenne qui donne les rapports économiques comme règle de vie entre les hommes et comme seule vérité métaphysique. Cela me semble beaucoup plus nuisible que les discours victimaires de Césaire. Et je vous vois plus prompt à critiquer ce dernier (sous prétexte, dites-vous, qu’on se sert de son concept de négritude pour asseoir le nouvel ordre mondial) qu’à critiquer le démantèlement des états politiques, France comprise, au profit de la libre circulation des marchandises.

Écrit par : Feuilly | 28/04/2008

Allons, monsieur Feuilly, avouez que tout n'est pas aussi tranché que vous le souhaiteriez! Relisez donc vos propres contradictions!!!

Lorsque vous annoncez:
"Dans vos propos, je perçois surtout la volonté d’établir une société française de souche, où on ne vivrait qu’entre Français (cultivés de préférence)."

...mais que dans le paragraphe qui suit vous dites le contraire:
"Et je vous vois plus prompt à critiquer (Césaire) qu’à critiquer le démantèlement des états politiques, France comprise, au profit de la libre circulation des marchandises".

... convenez qu'il y a une certaine incohérence!!!

Et tout ça pour quoi? Parce que vous n'avez lu de moi qu'un seul texte, et que vous voudriez, sur cette unique pièce, instruire mon procès à charge. Puisque vous vous dites épris de justice, et bien montrez le! Notez cependant que je ne réclame aucune indulgence... cette dernière m'exaspère bien plus que l'hostilité car elle est anesthésiante. Simplement, si vous devez m'attaquer, faites-le franchement, pour ce que je dis, pour ce que je pense, pour ce que je suis, après m'avoir cerné!!!

Vous prétendez que je suis obnubilé par la question du métissage et que je néglige le mondialisme agressif des puissances financières... de grâce relisez mon texte: il s'intitule "Recyclage de la négritude"... pas "Nullité de l’idée de négritude", ni "La négritude ou le complot noir"!!! Dois-je vous l'expliquer pour la quatrième fois?

La négritude est un concept que je trouve morbide, démobilisant et contreproductif pour ses propres adeptes. Mais ce constat, si j'étais un petit blanc protectionniste et égoïste, devrait plutôt me réjouir! Pourtant cela me navre. Et par dessus tout, ce qui m'est odieux, ce que je dénonce, c'est la récupération de la négritude par les apparatchiks du mondialisme triomphant.

Ce qui est en train de se produire avec la négritude, c'est ce qui s'est passé avec toute idée un tant soit peu subversive: sa digestion et son instrumentalisation par le syncrétisme capitaliste, lequel fait feu de tout bois pour détruire les structures économiques culturelles, sociales et politiques qui résistent à sa puissance.

Tout comme l'humanisme a permis de légitimer la colonisation (relisez Blum et Jaurès), tout comme le socialisme a justifié les ethnocides, comme Che Guevara fait vendre des t-shirts, comme Cohn-Bendit a trouvé sous les pavés la moquette du parlement européen, la plupart des idées prétendument généreuses et révolutionnaires finissent dans l'arsenal de la machine à décérébrer les peuples.

Je vous ai précédemment indiqué des sujets de recherche. Les avez-vous seulement effleurés, ne serait-ce que sur le Net??? Si vous cherchez une noble cause, prenez-vous en à autre chose qu'à la muleta que le matador agite narquoisement sous votre mufle... visez le torero, de préférence à la fémorale.

Alors, plutôt que de vous adonner au plaisir facile de déglinguer le franchouillard, le chauvin, le vilain blanc que les médias mainstream vous livrent en pâture quotidiennement, intéressez-vous aux coulisses du théâtre de guignol. Voyez ce que sont le Club du Siècle où Daniel Bouton côtoie Fabius, le Bilderberg Group où Devedjian et Strauss-Kahn fricotent avec David Rockefeller, le National Endowment for Democracy qui soutient l'UCK mais aussi les mouvements islamistes de nos banlieues, la French American Foundation qui finance le CRAN (comité représentatif des associations noires) après avoir été le mécène de Sarkozy, le Council on Foreign Relations où la politique américaine est définie en comité restreint par les pontes de la finance et de l'industrie, le Center for Strategic and International Studies où Zbigniew Brzezinski (conseiller stratégique de Reagan puis de Bush) a formé Christine Lagarde...

Renseignez-vous... et demandez-vous pourquoi ces gangs tout-puissants n'ont jamais été dénoncés par nos braves altermondialistes à la José Bové, ni par Danielle Mitterrand, ni par BHL, ni par Arno Klarsfeld, ni par Rama Yade, tous fervents démocrates, ni Sting ni Bono… pas même Manu Chao... Les seules voix qui s’élèvent, qui sont autorisées à lever un coin du voile, participent plus encore à la mystification, car elles s’expriment de manière volontairement débile, comme cet histrion de Meyssan!

« Le verrou qui maintenant doit sauter, c’est la nation. » écrivait le Baron Edmond de Rothschild, dans la revue l’Entreprise, dès 1970. Mais si je m’avise de rappeler cette annonce prophétique, vous aboierez sans doute, avec une discipline toute pavlovienne : « Théorie du complot ! Antisémitisme déguisé ! », comme le font tous les chiens de garde que l’ordre mondial a bien dressés. Alors, antisémitisme, paranoïa ??? Même pas… Car ce que nous dénonçons comme le « système » n’existe pas. Ce mot n’est qu’un vocable commode qui englobe des hommes et des femmes, de toute nationalité, de toute obédience, mais dont le point commun est d’avoir compris qu’il est impossible de gouverner démocratiquement 6 milliards d’humains. Ils ont convenu qu’on ne peut consulter des millions de gens peu avertis lorsqu’il s’agit de prendre des décisions stratégiques, lesquelles nécessitent par définition un minimum de confidentialité… Ils ont décrété qu’ils ne pouvaient rationnellement pas risquer de perdre des fortunes parce que le sort des urnes pourrait ne pas leur être favorable. Alors ces hommes et ces femmes de pouvoir, par darwinisme social, par cooptation, se sont regroupés en entités multinationales, puis apatrides, tantôt alliées, tantôt concurrentes, mais toujours aussi discrètes que boulimiques.

Aujourd’hui, quelques centaines de consortiums financiers possèdent l’essentiel des avoirs de la planète. Contrôlant les médias (à titre d’exemple, la presse française, toutes tendances confondues, est aux mains de Bouygues, Lagardère, Dassault et Rothschild…), finançant les partis politiques, agissant par lobbying, désinformation, matraquage publicitaire… les poids lourds de l’économie mondiale amusent la galerie : campagne pour le Tibet, Arche de Zoé, commerce équitable, ésotérisme de foire façon Da Vinci code, sectes… tout ce qui détourne l’attention du gogo est bénéfique. Pendant ce temps, les affaires continuent, avec ou sans l’assentiment populaire.

En effet, si le peuple s’obstine à contrarier les desseins des puissants, on passe outre son veto (traité constitutionnel). Mieux encore, on lui substitue, petit à petit, une population déracinée, précaire, hétérogène donc aisément divisible, et sur laquelle il est plus facile de régner. Hélas, les peuples fascinés par une illusoire pureté sont parfois capables de folie sanguinaire… Mais les populations métissées sous contrainte ne sont plus capables de rien, si ce n’est s’entredéchirer et sombrer dans la névrose sécuritaire, car les conflits interethniques y sont reproduits au cœur même de la société, à l’échelle communautaire, clanique, voire individuelle. Les sociétés multiraciales, comme le Brésil, l’Afrique du Sud, les USA et bientôt l’Europe occidentale, ne sont, sous le vernis de l’utopie fraternelle, que des sociétés multiracistes.

Ayant trouvé l’alibi absolu, sous couvert justement d’antiracisme, nos dirigeants sont parvenus à faire ce qu’aucun tyran n’avait réussi auparavant : à mater, peut-être définitivement, toute capacité de révolte, chacun devenant le petit kapo de son voisin, de son cousin, de son frère. Insidieusement, les liens du sang, ceux qui unissent les générations dans une responsabilité réciproque, sont ringardisés, puis proscrits, tandis qu’on nous invente des solidarités chimériques avec les aborigènes, les micronésiens ou les kurdes, lesquels sont tout comme nous, mais guère plus, menacés d’extinction. Et là où le jeu devient vraiment pervers, c’est que plus on prend fait et cause pour les autres peuples opprimés, plus on agit, plus on s’immisce, plus on s’ingère dans leur lutte, plus on précipite leur dilution dans le grand tout, le grand rien, le monde gris, cet enfer que l’on pave de nos bonnes intentions. Derrière les sacs de riz de Kouchner arrivent les firmes pharmaceutiques, les marchands d’OGM, les pasteurs évangélistes, les ingénieurs agronomes, les banquiers du FMI, les téléphones portables. Aucune civilisation, aussi ancienne soit-elle, ne peut résister à un tel traitement. L’ONU et ses sbires dépasse dans sa démence les plus fanatiques des conquistadores.

Est-ce à dire que tout est pourri, foutu, que tout est voué, aux cataclysmes écologiques, aux catastrophes, à la vitrification thermonucléaire ? Peut-être, mais peut-être pas.

Allons monsieur Feuilly, je sais que je ne vous convaincrai pas, et tel n’est pas mon but. Je n’aurai pas perdu mon temps si, après m’avoir lu, vous essayez, juste une fois… d'aller au-delà des apparences... vous verrez, on y prend goût !

Écrit par : Pierre Damiens | 29/04/2008

A Pierre Damiens:
Quelle incohérence ?
D’un côté il y a la phrase sur la société française de souche que vous défendez et de l’autre il y a le fait que je dise que vous critiquez peu le démantèlement des états politiques, France comprise, par le capitalisme mondial.
Tout cela est cohérent. Je dis donc que si vous défendez une certaine idée de la France, pays souverain (et non entaché de mixité raciale), vous devriez aussi fustiger la mondialisation qui met à mal cet état souverain. C’est logique non ?

Or il se trouve que vous me dites que c’est ce que vous faites et je m’en réjouis (non, je suis sérieux, là et on va enfin pouvoir peut-être trouver un terrain d’entente).


Vous n’avez pas tort quand vous affirmez que « la plupart des idées prétendument généreuses et révolutionnaires finissent dans l'arsenal de la machine à décérébrer les peuples » Je le regrette aussi. Mais j’espère que vous ne prenez pas prétexte de cette carence des idées généreuses (la défense du peuple qui finit en dictature stalinienne, Cohn-Bendit qui finit en député grassement rémunéré, etc.) pour renoncer à cet idéal. Moi je serais plutôt pour une révolution permanente, pour éviter précisément cet endormissement des quelques personnalités qui ont osé s’opposer au système. Si au contraire vous prenez prétexte de cet échec systématique pour dire qu’il ne faut rien tenter, alors nous sommes de nouveau en opposition, sinon nous sommes d’accord.

Quant à toutes ces institutions (semi-secrètes et demi-mondaines) que vous citez, j’en connais un certain nombre et ce n’est pas joli joli. Bien sûr que Strauss-Kahn fricote avec David Rockefeller. Quant à la French American Foundation, c’est une horreur, dont le but est de faire basculer la France dans le réseau atlantiste (donc, guerre possible en Iran, etc.).
Lire à ce sujet l’article du réseau Voltaire (vous n‘aimez peut-être pas Meyssan, mais au moins il lève un côté du voile comme vous le dites) :
Dan http://www.voltairenet.org/article146888.html
On retrouve dans cette association des noms comme Nicolas Dupont-Aignan (2001, député UMP, Debout la République), Alain Juppé (1981, député UMP),Valérie Pécresse (2002, député UMP), Jacques Toubon (1983, député UMP), François Hollande (1996, député socialiste), Arnaud Montebourg (2000, député socialiste), Pierre Moscovici (1996, député socialiste), Alain Richard (1981, socialiste, ancien ministre de la Défense), Henri de Castries (1994, Directeur général du groupe AXA assurances), Emmanuel Chain (1999, journaliste), Jérôme Clément (1982, Président d’Arte), Annick Cojean (2000, journaliste au Monde), Jean-Marie Colombani (1983, Directeur de la publication du Monde), Matthieu Croissandeau (2002, rédacteur en chef adjoint du Nouvel Observateur), Jean-Louis Gergorin (1994), Bernard Guetta (1981, journaliste à France Inter), François Léotard (1981, ancien ministre de la Défense), Alain Minc (1981), Laurent Cohen-Tanugi (1996, Sanofi-Synthélabo et membre du conseil d’administration du think tank « Notre Europe » créé par l’ancien président de la Commission Jacques Delors [23]), Christine Ockrent (1983), Olivier Nora (1995, président des Éditions Grasset), Denis Olivennes (1996, président de la FNAC)
Rien que du beau monde, donc : des politiciens (ceux de droite mais aussi ceux qui se disent de gauche), des journalistes (histoire de bien nous influencer), des gens du monde de la culture Grasset, etc.)
Remarquez la place stratégique d’Ockrent, incontournable en tant que journaliste et par ailleurs compagne du ministre des affaires étrangères.
Vous citez aussi le Council on Foreign Relations « où la politique américaine est définie en comité restreint par les pontes de la finance et de l'industrie » et puis Lagarde, issue du Center for Strategic and International Studies

Quant à la citation de Rothschild ( « Le verrou qui maintenant doit sauter, c’est la nation. ») est significative. Les états doivent disparaître pour permettre aux marchandises de mieux circuler. Pourquoi imaginez-vous donc que je vais réagir négativement ? Je ne suis pas un chien si bien dressé que cela.

Ce qui nous différencie, cependant, c’est que je m’oppose à cette société marchande pour des raisons essentiellement sociales (pour simplifier : on démantèle les structures sociales mises en place par les états pour que quelques personnes puissent s’enrichir), tandis que vous, vous me semblez vous y opposer au nom de la dignité de l’Etat (on est plus proche de la phrase de De Gaulle : « la France, c’est moi »).

Quant aux campagnes pour le Tibet, je suis bien d’accord pour dire qu’il s’agit d’amuser la galerie (voir ma note sur ce sujet). On se montre démocrate alors que l’industrie se sert des jeux pour s’implanter en Chine. Sans état d’âme aucun sur le sort du Tibet ou les droits de l’homme en Chine.


Quant au peuple, c’est sûr que le diviser (en lui incorporant des ethnies étrangères) est un moyen facile de l’affaiblir. Vous pourriez citer cependant la crise des banlieues, qui permet de faire peur, ce qui facilite l’élection de Sarkozy (par ailleurs financé par… voir plus haut). Vous devriez aussi parler du concept européen de régionalisation systématique, qui permet d’affaiblir l’état central. Que pourra la Sicile seule (ou l’Ecosse ou la Wallonie) contre les lois du marché ? Rien, elle devra les subir, tandis que de grands états comme la France ou l’Allemagne auront tendance à prendre des mesures visant à protéger leur population (sur le plan social, environnemental, etc.). De plus, en régionalisant, les moyens financiers limités de ces petites entités ne leur permettant pas de mener à bien de grands projets, c’est la porte ouverte aux privatisations (exemple : les universités).



« les populations métissées sous contrainte ne sont plus capables de rien, si ce n’est s’entredéchirer » Oui, mais d’un autre côté, quand l’appartenance raciale ou religieuse est trop forte, cela revient au même. Voyez l’Irak, que l’on a poussé dans la guerre civile pour mieux l’affaiblir.

« Insidieusement, les liens du sang, ceux qui unissent les générations dans une responsabilité réciproque, sont ringardisés, puis proscrits ». C’est vrai. Mais une nouvelle fois je vous sens plus proche de la devise « travail, famille, patrie » que de la solidarité syndicale par exemple.

« Derrière les sacs de riz de Kouchner arrivent les firmes pharmaceutiques, les marchands d’OGM, les pasteurs évangélistes, les ingénieurs agronomes, les banquiers du FMI, les téléphones portables. »
Mais Kouchner a été utilisé de toutes les manières, notamment quand il a soutenu al guerre en Serbie au nom de l’ingérence humanitaire. Et ne parlons pas de son rapport sur les relations entre le groupe Total et la junte birmane, qui visait à rendre une virginité à ce groupe pétrolier un peu trop impliqué avec un régime peu recommandable.

Mais si la presse a soutenu les moines birmans (qui pensaient moins à la démocratisation de leur pays qu’à s’assurer des moyens d’existence : la population ruinée par le régime, ne leur donnait plus d’aumônes), c’est évidemment dans l’espoir de faire tomber ce régime par ailleurs protectionniste (et donc de permettre aux multinationales d’aller s’y implanter).

Bon, je vois qu’à la fin nous tombons d’accord sur certains points. J’en suis ravi. En espérant que vous ne teniez pas le discours que je veux entendre pour mieux m’appâter.

Écrit par : Feuilly | 29/04/2008

Mon cher Juan, vous memettez dans une position délicate. D'un côté j'esasie de faire un effort pour tenter de comprendre ce que dit votre ami Damiens (et je continue à dire que son texte initial n'avait pas la clarté voulue, sauf peut-être pour ceux qui connnaissaient déjà le fond de sa pensée, et qu'il a fallu tous ses commentaires pour commencer à y voir un peu plus clair) et de l'autre vous continuez à invectiver un de mes commentateurs habituels en des termes pour le moins discourtois.

N'y aurait -il pas moyen d'élever un peu le débat et si vous avez des reproches à formuler les énoncer en des termes plus choisis? De plus cette manière de procéder, croyez-moi, vous nuit considérablement aux yeux de tous. Enfin, c'est à vous à voir, moi ce que j'en dis...

A Pierre Damiens: nous trouvons donc un terrain d'entente en fustigeant le type de société mondiale qu'on nous prépare et dans laquelle la culture risque d'être le parent pauvre. Cependant, je ne suis pas sûr que nous ne contemplons pas ce désastre à partir de deux points opposés, l'un se situant à l'extrême-gauche dans mon cas et beaucoup plus à droite dans le vôtre (remarquez que je ne parle pas d'extrême dans votre cas, par respect pour le temps consacré à m'expliquer votre point de vue en des termes pas trop discourtois). Mais enfin il reste tout de même ce point à éclaircir.

Écrit par : Feuilly | 29/04/2008

Ne serait-il pas plus simple que tout lemonde en reste là?

Écrit par : Feuilly | 30/04/2008

"Cependant, je ne suis pas sûr que nous ne contemplons pas ce désastre à partir de deux points opposés, l'un se situant à l'extrême-gauche dans mon cas et beaucoup plus à droite dans le vôtre (remarquez que je ne parle pas d'extrême dans votre cas, par respect pour le temps consacré à m'expliquer votre point de vue en des termes pas trop discourtois). Mais enfin il reste tout de même ce point à éclaircir."
Vous persistez à vouloir vous rassurer en m'enfermant dans votre boîte "extrême droite", drôle de pétaudière où doivent grouiller les ultra-libéraux, les républicains-conservateurs, les socialo-chauvinistes, les jacobins, les poujado-libertariens, les monarcho-gaullistes, les crypto-fascistes... et j'en passe et de plus exotiques!
N'ayez pas peur...

Écrit par : Pierre Damiens | 01/05/2008

Pour ceux qui seraient surpris de ne pas retrouver tous les commentaires qu'ils ont lus, je tiens à préciser que les commentaires du Stalker ont été effacés à sa demande, ainsi que du coup ceux de notre ami Redonnet qui lui répondait du tac au tac.

C'est bien la première fois que j'en arrive à effacer les contributions d'un visiteur, ce qui est déjà en soi significatif.

Je précise, comme je l'ai déjà dit, que cela s'est fait à la demande du Stalker, lequel ne voulait pas, sans doute, que les visiteurs qui se promènent habituellement sur son propre site et qui se seraient perdus par ici, puissent perdre leur temps en lisant des commentaires aussi vains qu'injurieux.

Il a raison, bien entendu. Je regrette cependant qu'il ait mis du temps avant de se rendre compte de l'inutilité de ce genre de débat agressif. Comme je regrette qu'il ne tienne finalement compte que de ses propres lecteurs et non des miens, qui ont dû supporter toute cette agitation stérile.

En toute logique, j'ai également supprimé les commentaires de Redonnet avec qui la dispute avait éclaté. Il a été averti de cette modification.

Je redis cependant ici que je conserve toute mon amitié à Redonnet, dont les idées sont proches des miennes. S'il a pu parfois se laisser emporter, il ne l'a fait qu'en voulant soutenir ces idées-mêmes.

L'incident est donc clos sur ce site. Ma réponse à Pierre Damiens devrait être publiée sur le site du Stalker, puisque c'est là que l'intéressé avait publié son article. En agissant de la sorte, je réponds à la fois à son désir (il en avait fait la demande ici-même) mais aussi au mien: il convient en effet de toucher les lecteurs de son texte afin de leur présenter un autre point de vue.

Écrit par : Feuilly | 02/05/2008

Cher Feuilly,

Tu as également toute mon amitié.
Tu es le patron ici et tes décisions y sont absolument souveraines.
Je veux tout de même apporter une précision capitale. L'incident et les invectives sont de mon fait exclusif, je le revendique, puisque c'est moi qui ai commencé à dire que ce monsieur était un c...
J'ai fait cela uniquement pour qu'il se démasque et la hauteur de ses crachats, insultes, balbutiements, grotesques contradictions n'ont pas déçu mes attentes.
Fi de la belle plume critique et hautaine dispensant ses accesits ou ses anathèmes ex cathedra !
Il a compris - un peu tard et c'est curieux pour une intelligence supérieure - que le masque et lui-même étaient tombés dans le piège.
C'est la raison pour laquelle il vous a demandé de supprimer. Dommage... La vérité sur la toile y gagnait beaucoup.
Amicalement

Écrit par : Redonnet | 05/05/2008

En réponse à ceux que l'altérité répugne (texte adressé au Stalker le 7 mai 2008, en réponse à l'article http://stalker.hautetfort.com/archive/2008/05/03/de-la-peur-que-certains-eprouvent-face-a-une-societe-reponse.html.)

J’apprécie la persévérance avec laquelle vous avez cherché à me répondre. Pascal, dans ses Provinciales, disait « J’ai été long parce que je n’ai pas eu le temps de faire court ». Je vais donc essayer de répliquer sans trop me disperser.

Il me faut tout d’abord préciser que vous déformez trop souvent mes propos, usant d’approximations (« colonialisme » pour « esclavagisme », « immigration » pour « métissage »…) et que vous cherchez par là à caricaturer mes idées afin de les faire entrer de force dans vos gabarits idéologiques. Vous vous référez en permanence aux notions de « droite » et de « gauche ». Convenez que je n’utilise que rarement ces termes, fourretouts commodes mais dépourvus de toute pertinence pour les sujets qui nous intéressent ici. En effet, les questions d’identité culturelle, de Nation, de souveraineté, et de submersion de ces notions dans le maelstrom de la mondialisation, transcendent les clivages politiques classiques. Il y a des nationalistes et des souverainistes de gauche, des mondialistes de droite (ils sont légion !), ou des racistes socialistes (l’essence même du fascisme). Il y a surtout des opportunistes et des idéalistes. Et si Césaire est un métis, c'est bien de ces deux dernières espèces qu'il tire sa filiation. Mais puisque le vieux pape du ressentiment n'était qu'un prétexte à notre échange, poursuivons sans lui.

Vous ne me verrez jamais prendre une position partisane lorsqu’il s’agit de juger un fait, un évènement ou un homme. En revanche, j’applique fidèlement la règle suivante : toujours jauger une idée en fonction de ses effets, non de ses intentions, et considérer un homme à l’aune de la cohérence entre sa pensée, ses paroles et ses actes. C’est en cela que nous divergeons fondamentalement, et c’est pour cela que je peux penser plus librement que vous. A titre d’exemple, j’utilise le terme de « bourgeois » pour son acception littérale, tandis que vous y entendez immanquablement une connotation marxiste.

Mon premier regret, quand je lis votre prose, c’est l'hémiplégie de votre sens critique. A quoi bon, monsieur Foulon, étaler votre connaissance des officines qui mènent aujourd’hui réellement le monde, tandis que les gouvernements démocratiques ne sont plus qu’un théâtre de marionnettes, si c’est pour rabâcher les poncifs avec lesquels l’intelligentsia mondialiste étend subrepticement son pouvoir ???

A quoi bon vous « insurger » contre ma prétendue lecture ethno-raciale du monde si vous nous resservez l’antienne des hordes germaniques abruties, que la lumière arabe aurait extirpées de la barbarie ??? Avez-vous entendu parler de Constantinople, monsieur Foulon ? Vous savez, l’empire romain d’Orient, celui qui a préservé l’héritage gréco-latin jusqu’à son anéantissement par… les Turcs !!! Savez-vous, monsieur Foulon, que les moines de Gaule, puis de France, ont reçu des monastères byzantins les écrits des philosophes grecs ? Relisez donc Georges Duby et Pierre Riché… Allez au musée du Moyen-âge, dans l’Hôtel de Cluny… vous y verrez les vestiges, bien peu mis en valeur (la mode est à l’exposition de valises en carton…), de ce qu’il faut bien appeler la renaissance carolingienne. Les clichés sur les inventions arabes, le zéro (découverte indienne), la boussole (trouvaille chinoise, comme les cartes), les étriers (les musées d’antiquités romaines en regorgent), l’astronomie (pratiquée par tous les peuples antiques), la médecine (Hippocrate était-il arabe ???) sont des sornettes. Sans parler des philosophes chrétiens syriaques, un peu vite convertis à l’Islam par nos champions de l’antiracisme !

Vous prenez encore de drôles de libertés avec l’Histoire lorsque vous nous narrez par le menu l’épopée du totalitarisme rouge. Ainsi, selon vous, il y avait de bons motifs pour être communiste jusqu’en 1956, tandis qu’il n’y avait que de mauvaises raisons pour être fasciste. «Les purges staliniennes et le goulag n’étaient pas connus comme ils l’ont été par la suite… », dites-vous pour toute justification ! Ainsi, faudrait-il reprocher aux collaborationnistes d’avoir sous-estimé l’ampleur du phénomène concentrationnaire national-socialiste, mais cependant absoudre les communistes d’avoir ignoré les crimes du stalinisme ! Pourtant, les « purges » staliniennes ont débuté dès 1924… et elles ont fait au bas mot vingt millions de victimes ! Et tout cela avait été dit, écrit, dès les années trente... Les invités de l’Intourist eux-mêmes avaient tenté de percer le silence, mais ils n’ont récolté que l’opprobre et la censure (voyez Gide et son Retour d’URSS). Vous nous expliquez que, s’il est condamnable de coopérer avec les allemands en 1944 (sous la contrainte d’une armée d’occupation et sous la menace du sort réservé à 1 million et demi de prisonniers…), il est en revanche acceptable de continuer à prôner la dictature du prolétariat, alors que même l’URSS se déstalinise !!! Mais si les crimes du communisme ont été jusqu’ici méconnus, monsieur Foulon, ce n’est que parce que leurs complices régnaient jusque dans les années 70 sur la sphère intellectuelle française, et que leurs héritiers sévissent encore ! Alors de grâce, ne vous dites pas humaniste si vous continuez à colporter des bobards visant à disculper les compagnons de route du PCF, ce temple légal de l’idéologie la plus criminelle à ce jour ! La vision du monde national-socialiste hiérarchisait les hommes en fonction de leur race ; le communisme les oppose en fonction de leur classe. Quand les fascistes dénonçaient leurs voisins juifs, les komsomols dénonçaient leurs propres parents ! Je ne vois pas en quoi il s’agirait d’un moindre mal… Votre humanité est-elle à géométrie variable ?

A propos d’un passé plus proche, vos œillères idéologiques vous masquent encore la complexité des problèmes que vous évoquez. Ainsi, lorsque vous faites allusion à la « grotte de Nouméa » pour dire en substance que « Chirac = tueur de kanaks » et « Mitterrand = retour à la paix », vous sombrez dans l’erreur mensongère. Tout d’abord, il n’y a pas de grotte à Nouméa, ville que je connais bien. Il en a une à Lourdes, mais votre cas n’est pas si désespéré, et une autre à Ouvéa, une des Iles Loyautés. C’est cette dernière qui a été le théâtre de l’opération Victor le 5 mai 1988. Cette action des commandos français a été menée contre les preneurs d’otages indépendantistes, lesquels détenaient 22 prisonniers (dont un procureur de la République). Auparavant, ils avaient tué quatre gendarmes à coups de machette à Fayaoué, sous les yeux de leurs épouses qui ont ensuite été violées. Or, l’intervention brutale (mais néanmoins efficace) des forces de l’ordre a été décidée, en pleine cohabitation, conjointement par François Mitterrand (constitutionnellement le chef des armées) et son premier ministre (responsable de la politique de défense), après l’échec des tentatives de négociations (lesquelles se sont soldées par la capture des six émissaires du gouvernement). Ce que vous ne discernez pas, dans cette triste affaire, c’est qu’encore une fois les hommes de terrain et la population ont fait les frais d’une conduite politique calamiteuse. La Nouvelle-Calédonie a été la victime des manipulations politiciennes sur fond de campagne présidentielle : le PS instrumentalisait le FLNKS (Front de Libération National Kanak Socialiste) pour faire échouer la politique de Bernard Pons (ministre RPR), tandis que Chirac manigançait avec Lafleur pour conserver une majorité gaulliste sur le « Cailloux ». Au bilan, des dizaines de vies ont été sacrifiées pour de petits calculs électoraux. Les Kanaks n’en sont d’ailleurs pas dupes, et ont célébré leur réconciliation avec les gendarmes il a maintenant dix ans, loin des regards des criminels en col blanc.

Je pourrai rectifier ainsi toutes vos « erreurs », mais allons à l’essentiel. Vous lâchez le morceau en disant : « On sent précisément que vous n’êtes pas disposé à vous sentir coupable » ! Hé bien non, en effet ! Pour une fois vous ne vous égarez pas ! N’étant coupable de rien, en tout cas pas des crimes que vous m’imputez héréditairement, je ne me sens pas condamnable le moins du monde. Mais à la différence de madame Dufoix, je ne suis pas coupable parce que pas responsable, sauf à prétendre qu’une communauté puisse collectivement avoir à répondre des méfaits d’une partie infiniment minoritaire de ses ancêtres. Si cela était votre avis, monsieur Foulon, vous seriez le digne disciple d’Alfred Rosenberg et de Martin Bormann ! Hé oui, monsieur Foulon, je me sens parfaitement dédouané de ce qui m’est ici sournoisement reproché : l’esclavagisme, le colonialisme (positif ou non !), les guerres qui ont émaillé notre Histoire… La logique d’une procédure inquisitoire est de toujours chercher à qui profite le crime… Elémentaire mon cher Foulon… Or, si crime il y a, je n’en ai pas touché le moindre dividende. A l’heure où Aimé Césaire pavanait sous les lambris de la république, mes aïeux trimaient à la mine, aux champs, ou dans les futaies de notre beau pays. Des générations qui m’ont précédé, je n’ai hérité d’aucune rente, d’aucun privilège, d’aucune richesse, si ce n’est d’une culture et d’un patrimoine national. Celui-là même que l’on prétend aujourd’hui diviser, démembrer, partager avec la terre entière… Or, monsieur Foulon, ce bien là ne nous appartient pas, nous ne pouvons pas en disposer comme bon nous semble, car les générations à venir en sont autant que nous les légitimes bénéficiaires.

Ma conception du monde, que vous toisez du haut de vos bons sentiments, postule que chaque peuple participe à sa façon à l’aventure humaine, et que, si le métissage n’a rien d’aberrant à l’échelle individuelle, il devient un mode politiquement correct d’ethnocide lorsqu’il est organisé sur une grande échelle, comme c’est le cas aujourd’hui. Je vous mets d’ailleurs au défi de me citer un seul exemple de société multiraciale qui ne soit pas en proie à une criminalité de masse et à la névrose sécuritaire qui l’accompagne toujours. Le Brésil, l’Afrique du Sud, les Etats-Unis d’Amérique battent tous les records en ce domaine. Et nous ne tarderons pas à les rattraper. Cela non pas parce que telle ou telle race est plus criminogène que telle autre, mais parce que le déracinement, le regroupement communautaire, la concurrence interethnique vouent immanquablement les utopies multiculturelles aux échecs les plus sanglants. Les billevesées sur « tous des immigrés, tous nomades » sont les slogans d’une propagande odieuse que vous reprenez sans même en comprendre la portée. Un individu isolé n’est qu’un modèle théorique, et les solidarités naturelles, celles du sang, de la filiation, de la communion entre les générations d’un même lignage, sont des ciments sociaux irremplaçables. L’individu déraciné, déculturé, est par définition fragile, malléable, vulnérable, c’est à cet égard qu’il est devenu l’homme idéal que les magnats de la finance rêvent d’élever en batterie. Il est, en effet, le consommateur ultime, l’homo consumens absolu : sans patrie, sans racines, sans famille, il est contraint de tout acheter, même l’amour.

L’Amour, voilà le mot juste. Etes-vous capable, monsieur Foulon, de concevoir qu’on veuille préserver son identité culturelle, non par peur, non par égoïsme, non par frilosité, mais par amour des siens, lequel n’est pas exclusif. J’ai déjà pas mal bourlingué savez-vous… et ce qui a constitué l’attrait de mes périples, plutôt que de beaux paysages, c’est de découvrir un véritable « ailleurs », lequel n’est que le parèdre d’un véritable « ici ». La biodiversité que nos écolos sacralisent lorsqu’il s’agit de plantes ou de batraciens, j’en étends l’impérieuse nécessité à l’homme. L’espoir de l’humanité réside non pas dans un modèle unique et standardisé de bipède, mais dans une infinie diversité. Cette altérité que j’ai rencontrée, loin de me faire peur, elle me renforce. Ce n’est qu’au contact des autres peuples que j’ai commencé à comprendre ce que c’est que d’être français et européen. Je n’ai pas la prétention d’avoir percé les secrets des cultures et des civilisations que j’ai côtoyées. Loin de là. La cérémonie du kava des mélanésiens, le bwiti d’Afrique équatoriale, les prières psalmodiées du bouddhisme sud-asiatique me resteront à jamais hermétiques. Mais j’ai toujours respecté ces pratiques lorsqu’elles étaient l’affirmation d’une tradition authentique, originale. Elles deviennent en revanche ridicules et méprisables lorsque le modernisme de bas étage les transforme en folklore pour touristes ou en survivances communautaristes pour ghettos. Et, cela va sans doute vous surprendre, ce qui m’a toujours ouvert les portes, jusque dans les recoins les plus improbables de notre vaste monde, c’est d’avoir toujours assumé mes origines, de n’avoir jamais singé les coutumes locales que je ne comprenais pas, de n’avoir jamais joué au « citoyen du monde ».

C’est en étant soi-même que l’on est respecté des autres, et qu’en définitive, on se respecte aussi. C’est en assumant ses responsabilités envers son prochain, avant d’imaginer des solidarités lointaines, que l’on est un homme digne de ce nom. Cela, tous les peuples que l’individualisme n’a pas encore contaminés le savent. Ce n’est qu’en cultivant ses propres racines que l’on peut s’élever et peut-être parvenir, dans ses plus hautes aspirations, à rejoindre l’universel.

Écrit par : Pierre Damiens | 13/05/2008

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