16/02/2010
Obscurité (6)
A la fin, n’y tenant plus, il sentit la nécessité de sortir de la voiture et de faire quelques pas, dans l’espoir qu’il trouverait ensuite le sommeil. C’était étrange ce besoin inexpliqué, c’était comme si le fait de rester là, étendu, lui était devenu insupportable. Il devait partir, bouger, marcher, éliminer toute cette énergie qu’il percevait en lui, toute cette angoisse qui l’avait imperceptiblement envahi et qui avait atteint une telle intensité qu’il devait absolument faire quelque chose. Il fallait vraiment qu’il y fût contraint par une force intérieure, car d’un autre côté l’idée de s’extraire de la chaleur de son sac de couchage pour affronter les ténèbres n’avait rien de réjouissant en soi, comme on peut s’en douter. L’être humain n’est pas à une contradiction près et les enfants n’y échappent pas plus que les adultes.
Voir le livre paru aux éditions Chloé des Lys
13:12 Publié dans Prose | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : littérature
Commentaires
Parfait, cette suite! J'avais peur que vous soyez découragé par vos horribles lecteurs. C'est extra! Et bien sûr, j'ai envie de savoir ce qui va se passer! Merci!
Écrit par : Natacha | 16/02/2010
Un vrai régal de retrouver nos fuyards. Se laisser porter par l'histoire et le voyage. M'intrigue quand même sans que je voie comment c'est fait, comment l'enfant est toujours au premier plan. Même quand le narrateur parle des autres personnages d'une manière un peu extérieure, c'est comme si c'était toujours du point de vue de l'enfant. Je suis subjuguée.
Écrit par : Michèle | 16/02/2010
Vos lecteurs ont le sentiment d'être conduits de billets en billets comme ces deux enfants le sont en voiture par leur mère, de lacets de route en méandres de rivière. Un peu comme ces enfants questionnent leur mère, on a donc envie de vous demander : mais où va-t-on depuis quelques jours ? le savez-vous au moins? ou bien devons-nous nous-mêmes imaginer une suite ?
Par cet artifice-là, votre texte épouse bien le support qu'est la publication par blogue, beaucoup mieux en tout cas, que maints textes longs que j'ai pu lire ça et là et qui avaient besoin - me semble-t-il - de la continuité. Nous bouclons donc notre ceinture à nouveau, puisque ça redémarre. Et nous faisons silence en attendant l'arrivée.
Écrit par : solko | 16/02/2010
The wood is full of shining eyes,
the wood is full of creeping feet,
the wood is full of tiny cries:
you must not go to the wood at night...
on en frémit déjà
et puis bof, le métal rassurant de l'auto.
un peu frustré cette fois, enfin, plus on tarde à camper le noeud de l'intrigue, plus le suspense monte, mais quand même... faut pas trop tirer sur...
Et toujours un grand bravo pour l'écriture !
Écrit par : giulio | 16/02/2010
J'oubliais. Bravo aussi pour l'idée du brainstorming mnémonique des enfants.
Écrit par : giulio | 16/02/2010
@ Natacha : pas de panique, je ne me décourage pas si vite.
@ Michèle : en effet, j’essaie de me concentrer sur l’enfant et pas trop sur les autres personnages, histoire de respecter le première histoire, celle de l’écurie et de son obscurité, dont tout ceci se voulait le développement.
@ Solko : où va-t-on ? Je n’en sais trop rien en fait et c’est sans doute pour cela que le texte épouse bien le support du blogue. En écrivant juste ce qu’il faut pour le billet suivant, l’histoire suit malgré elle le rythme du blogue.
@ Giulio : déçu donc? Ah, mais c’est votre faute, aussi. J’ai eu peur, quand l’enfant s’est retrouvé dans le noir au bord de son fossé, de m’embarquer dans une aventure qui m’aurait irrémédiablement classé dans la littérature enfantine (sourire). Non, plus sérieusement, disons que je voulais juste que notre héros fasse connaissance d’un peu plus près avec cette nuit particulièrement obscure (et qui caractérise la vraie campagne). Elle est un passage aussi, une initiation. Alors qu’au chapitre un le noir était pour lui un refuge et qu’il craignait la lumière (la porte qui allait s’ouvrir sur le beau-père en colère), ici, après avoir assimilé cette obscurité à l’utérus maternel, j’inverse les valeurs puisque le noir le perturbe et qu’il est au contraire très content de retrouver la lumière du soleil.
Écrit par : Feuilly | 17/02/2010
"Où va-t- on ?" Mais mon cher Feuilly, c'est le voyage qui importe, davantage que la destination ! Merci pour nous livrer ce récit aux allures de "road movie".
Écrit par : Le Photon | 18/02/2010
Bine sûr que c'est le voyage qui compte. C'est comme dans la vie en fait, on n'est pas pressé d'arriver au terme du voyage.
Écrit par : Feuilly | 18/02/2010
Rigoureux géologue, grand voyageur, vieille France, Gracq a traversé un jour Millevaches, noté l'immuabilité des mamelons couverts de bruyère, la fraîcheur des sources et ramassé les impressions recueillies au passage dans une jolie formule - "Il est toujours dix heures du matin".
(L'héritage, Pierre Bergounioux)
Écrit par : Michèle | 24/02/2010
Ah, Gracq, dans les "Carnets du grand chemin" nous fait redécouvrir la France, du Nord au Sud et des montagnes jusqu'aux plaines océanes. Un livre à lire.
Écrit par : Feuilly | 27/02/2010
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