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10/07/2008

Numérisation des livres

On apprend que la ville de Lyon serait sur le point de choisir Google pour numériser les 500 000 livres anciens de sa bibliothèque municipale.
Google s’occupe déjà de la numérisation de l'université d'Oxford.

D’un côté, il faut se réjouir de cette numérisation, qui, d’une part, offre une solution au fait que les livres se dégradent et qui, d’autre part, les rend accessibles à tous. D’un coup de souris, il vous est alors possible de consulter des ouvrages situés à l’autre bout du monde, des ouvrages dont nous n’aurions même jamais soupçonné l’existence autrefois.

Il avait été question également de numériser la Bibliothèque nationale de France (BNF), mais certains avaient fait remarquer, à juste titre, que le choix des livres ne devait pas être fait par Google lui-même, qui travaillait dans un esprit trop « américain ». C’est vrai que nous sommes là devant un dilemme. Soit laisser nos livres prendre la poussière et rester inconnus (or à l’ère du numérique, il faut se montrer et être visible), soit en sortir un certain nombre de l’oubli, mais savoir que d’autres seront sacrifiés. Le problème est donc celui du choix. Quel critère retenir et qui va décider de ce critère ?

Mine de rien, c’est un débat idéologique qui s’engage ici. Prenons la période de la fin de l’Ancien Régime. Vais-je privilégier les livres conservateurs ou au contraires ceux qui annoncent la Révolution ? On le voit, selon le choix que j’aurai fait, j’orienterai la perception que l’on aura de cette époque. Voire même j’orienterai nos conceptions actuelles. Imaginons que les créationnistes détiennent majoritairement les actions de Google, il y a fort à parier qu’ils ne vont pas numériser les œuvres de Darwin ou en tout cas qu’ils censureront les passages les plus compromettants pour leur théorie. On pourrait d’ailleurs imaginer qu’on ne numérise qu’une partie d’un ouvrage, faussant ainsi la diffusion de certaines idées. Bon, je vais peut-être trop loin dans mon raisonnement, mais on n’est jamais assez prudent quand il s’agit de la diffusion du savoir.

De toute façon, les carottes sont déjà cuites, si je puis m’exprimer ainsi. Il est clair que les oeuvres américaines et finalement européennes vont se retrouver sur la Toile. Mais qu’en est-il des autres cultures ? Verra-t-on les contes africains (qui appartiennent encore souvent à la littérature orale) faire partie des pages consultables ? Non bien sûr. Et s’il existe en Amérique latine des bibliothèques qui possèdent des livres rares (sur la découverte du Nouveau Monde, par exemple), les pays qui les possèdent auront-ils les moyens de faire numériser leurs archives ? Probablement pas. Du coup, n’étant pas présents sur Internet, ces livres resteront dans l’ombre, ce qui permettra à une seule culture (occidentale, mais surtout américaine) de s’imposer dans le monde.



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Commentaires

Tout ce qui touche à la conservation de la culture pose de toute façon problème. C'est un domaine trop sensible - trop sensible en tout cas pour être laissé à la seule charge de Google; mais la BNF existe qui, je l'espère, aura son mot à dire quant à cette numérisation.

Écrit par : The Boy Next Door | 10/07/2008

Ces livres, mes livres et ceux des autres... Que d'amour partagé dans ces pages lues, relues, tournées. Un dialogue de silence , "une rencontre de silences" qui fait se rencontrer un auteur, une lectrice, des lecteurs. Un livre qui se donne, un livre qui se reçoit, qui commence une vie insoupçonnée de l'auteur quand il coule dans les yeux et dans le coeur du lecteur. Cela demande des noces de papier et d'encre, la peau des livres, l'odeur des livres, le poids très doux qu'ils ont dans une main, les traversées d'insomnies où ils attendent patients,ouverts à une page que le sommeil a suspendue. Vous vous voyez poser votre ordinateur sur votre oreiller ? Non, mais ! Place réservé au livre, à sa présence accordée.
Même les sables du désert n'ont pu les empêcher ces lecteurs des oasis de les garder près d'eux comme une mémoire fragile.
Une bibliothèque est toujours inachevée, une lecture est toujours inachevée comme "l'écriture est inachevée, juste suspendue" au point d'orgue de la nuit, ces mots qui basculent dans un silence de mots qui est germination de mots.
Les livres aimés pour qui les a goûtés, sont un pacte de sang (qui laissera passer la vague du numérique et ses richesses documentaires) pour perpétuer ces noces secrètes de mots écrits à mots lus et attendus comme une eau lustrale...

Écrit par : Christiane | 11/07/2008

Le conseil municipal à voté l'accord cet après-midi.

Écrit par : solko | 12/07/2008

La roue du temps se met en marche...je regarde mes livres...

Écrit par : Christiane | 12/07/2008

Feuilly, vous êtes la plus jolie rencontre "virtuelle" que j'aie pu faire sur internet depuis quelques semaines. Quel plaisir cela a été. Je vais profiter de votre absence pour redescendre sur terre et peut-être pour écrire, vous m'en avez donné l'envie. (et aussi pour lire sans rien écrire quelques uns de vos autres billets. (Votre pensée est vraiment épatante !)
Très bonnes vacances.
Cordialement et à un des ces jours.

Écrit par : Christiane | 12/07/2008

Me voilà rassuré. Vous faites de telles rencontres au moins une fois par mois, ce qui relativise déjà beaucoup mon propre génie. Ouf!

Écrit par : Feuilly | 13/07/2008

Oh, il y en a beaucoup plus si je promène dans les archives encore inexplorées. J'y trouve la trace d'une voix qui dit un regard, une sensibilité, parfois même une colère. L'essentiel, c'est que rien ne soit achevé, n'est-ce pas...dans la vie comme dans les livres.

Écrit par : Christiane | 13/07/2008

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