Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/11/2009

Ovide dans le "Magazine des livres"

mdl20-couvhdef.jpg

 

Je signale l’existence, dans le « Magazine des livres » n° 20 de novembre-décembre, de mon article sur Ovide, suite à la parution, l’année dernière, de « Tristes Pontiques » ( traduit du latin par Marie Darrieussecq, P.O.L., 2008, 424 pages, 25 euros). A vrai dire, mon texte a été rédigé en janvier 2009 déjà, mais sa publication a plusieurs fois été reportée, les écrivains antiques devant manifestement s’incliner devant l’actualité littéraire, toujours foisonnante comme on sait. Bon, je ne vais pas m’en plaindre et Ovide, qui avait bien attendu 2000 ans, n’était plus à quelques mois près, on est bien d’accord. Mais, tout de même, cette parution tardive est un signe des temps. Ce n’est pas à la revue que je lance la pierre (pour survivre, elle doit s’adapter aux goûts du jour et ses lecteurs cherchent forcément des renseignements en phase avec l’actualité), mais j’en veux à notre époque, toujours pressée, toujours agitée, toujours à la recherche d’une soi-disant nouveauté et qui, à force de courir sans cesse, n’arrive plus à analyser le monde avec calme et tempérance. En d’autres termes, je regrette que l’actualité littéraire tourne toujours autour du dernier roman à la mode ou autour de tel auteur fortement médiatisé, alors que les classiques sont souvent délaissés. Il me semble pourtant qu’ils ont beaucoup à nous dire et beaucoup à nous apprendre.

 

Ainsi, les deux textes d’Ovide dont il est ici question (« Tristes » et « Pontiques ») et qui ont été traduits par Darrieussecq (qui les a joliment dépoussiérés en employant une langue compréhensible par les hommes et les femmes du XXI° siècle), reprennent les poèmes écrits par l’auteur lors de son exil. Banni de Rome par l’Empereur Auguste pour une histoire de mœurs assez trouble, il se retrouve chez les Barbares le long de la Mer Noire (en Roumanie actuelle, dans le  delta du Danube). Ce ne sont donc pas des vers mondains qu’il nous offre, mais une poésie du désespoir écrite avec son sang. Dans un premier temps il se contente de décrire ce qu’il a sous les yeux, en regrettant Rome. Puis, pour survivre, il essaie de repenser aux amis qu’il a laissés en Italie, espérant qu’ils parviendront à fléchir l’Empereur et à le faire revenir sur sa décision. A la fin, les années passant, il se rend compte que son exil sera définitif et qu’il ne reverra jamais les rivages de la mer Tyrrhénienne. Sa poésie devient alors carrément désespérée et c’est à ses lecteurs éventuels qu’il s’adresse (nous en l’occurrence), ce qui rend son texte bouleversant.

 

Extrait de l’article :

 

(…) Cette réflexion constante d’Ovide sur la nécessité d’écrire nous touche énormément. Il ne parle pas en théoricien de l’écriture qui réfléchirait devant sa page blanche sur le sens de sa démarche. Non, pour lui, perdu dans son éloignement, littéralement  nié dans son existence d’homme et d’écrivain, il n’a plus que cette dernière ressource pour ne pas sombrer. C’est le seul fil qui le relie encore à la terre natale et le seul moyen qu’il ait trouvé pour survivre et continuer à être ce qu’il a toujours été, un poète. Ecrire de chez les barbares relève donc pour lui d’une démarche ontologique et on comprend qu’il y va de sa survie.

 

ovide-tristes-pontiques-traduit-latin-marie-d-L-2.jpg

 

 

 

Commentaires

Nous lirons avec intérêt ton article dans le Magazine des livres n°20, (je suis plongée en ce moment dans le Passe Muraille n°79 d'octobre 2009), et bien sûr "Tristes Pontiques" de Marie Darrieussecq.
Un écrivain contemporain, Marie Darrieussecq, que je n'ai jamais lue. Trop de tapage autour de son premier livre "Truismes".

Écrit par : Michèle | 15/11/2009

Je n'ai jamais lu Darrieussecq non plus, sauf cette traduction.

Sur la photo que je donne du livre, on remarquera qu'Ovide est écrit en tout petit au-dessus, "Tristes Pontiques", le titre, en plus grand (notez au passage la confusion voulue avec Tristes tropiques de Lévi-Strauss) et qu'enfin la bandeau publicitaire, lui, est énorme, avec le nom de Darrieussecq bien en vue. On sait donc que personne n'achètera un livre d'Ovide mais on espère que quelques-uns liront ce livre-là pour Darrieussecq.

Écrit par : Feuilly | 15/11/2009

Si cela permet de bien lire Ovide, on ne va pas bouder notre plaisir. Ceux qui lisent pour Darrieussecq risquent de n'y pas trouver leur compte :-)

Écrit par : Michèle | 15/11/2009

Je me souviens de "Truismes" comme d’une série télé mise en livre pour passer une heure dans le métro, avec une scène de livreur de pizza très violente. J’ai oublié le reste.
Je reviens du site Fabula où se trouve l’interview de ce fabricant opportuniste de best seller.
«Ma mère étant prof de français, j'ai échappé au grec mais pas au latin. Je trouvais que c'était un pensum, une matière ingrate et résistante. Les traductions étaient rébarbatives, pâteuses, avec des conjonctives partout. Jamais elles ne faisaient des textes une littérature destinée à être lue. J'ai aimé le latin quand je n'ai plus été obligée de l'étudier. »
http://www.fabula.org/actualites/article26752.php

Parler du latin comme elle le fait (« j’ai échappé », « pensum »…)! Et quel orgueil ("jamais elles ne faisaient du texte... ") !
Ce n’est pas comme ça qu’elle aidera ce qu’elle prétend défendre. Belle cochonnerie, plutôt ! Belle imposture ! On ne peut pas compter sur ce genre de starlette narcissique, vous savez. Combien de fois dit-elle « je », dans cet article prétendument consacré à Ovide ? Pauvre Ovide entre les mains de pareils gens !
Et puis son jeu de mots à la Libé... Bref.
Je lirai cependant votre article avec plaisir.
Malgré l’agacement profond que j’ai pour ce genre de personnage.
Je préfère, et très loin, Jacqueline de Romilly. Un vrai esprit. Une vraie érudition. Une véritable humilité. Le contraire d'une truie...

Bon dimanche à vous.

Écrit par : solko | 15/11/2009

Ca, c'est sûr qu'on ne peut pas la comparer à Jacqueline de Romilly, on est bien d'accord. Et comme je l'ai dit, je n'ai jamais rien lu de Darrieusecq, sauf cette traduction. Quant aux livres de J. de Romilly, ils nous font comprendre tout ce que nous avons perdu dans notre enseignement en nous éloignant progressivement mais inéluctablement des textes antiques.

Je ne connaissais pas cette interview que vous citez. C’est assez inquiétant, en effet. Disons qu'ici, comme le souligne Michèle, c'est qu'elle rend le texte limpide en le simplifiant un peu et en renonçant aux tournures spécifiques au latin, qui sont parfois un peu lourdes et qui découragent les lecteurs contemporains. On y perd en authenticité, on y gagne en lisibilité.

Ce n'est certes pas ici une traduction scientifique d'universitaire érudit, mais un produit destiné à faire découvrir Ovide. C'est déjà cela, si cela pouvait inciter les gens à le lire.

Reste le problème de fond: pourquoi faut-il toujours tout simplifier pour que nos contemporains s'intéressent à quelque chose?

Regardez les musées: plus personne ne se déplace pour aller voir un squelette de dinosaure, mais mettez dans votre musée un dinosaure animé en plastique et qui crie quand on pousse sur un bouton, et vous avez des foules qui se pressent au guichet. Tout doit être ludique et superficiel. Triste époque dans laquelle je me reconnais de moins en moins.

Écrit par : Feuilly | 15/11/2009

L'interview que signale Solko refroidit l'enthousiasme. Voilà que Darrieussecq choisit de remplacer les conjonctives par ce qu'elle appelle "une expression plus naturelle". Elle estime que les traducteurs des textes latins n'ont jamais obéi au souci de faire une littérature "destinée à être lue" (sic)
Il y aurait donc une littérature dont la destination ne serait pas la lecture ?

Je lirai ton article avec grand intérêt, dès demain. Je verrai ensuite si je peux trouver ces textes dans les Classiques Garnier. Je sais qu'ils ne se font plus ; tu en déplorais la disparition dans les prémices de ton blogue. Mais les bouquinistes. Et puis peut-être l'édition bilingue de Danièle Robert chez Actes Sud (mentionnée dans le lien donné par Solko).

Écrit par : Michèle | 15/11/2009

Point n'est besoin d'aller si loin, chère Michèle:

http://remacle.org/bloodwolf/poetes/Ovide/tristes.htm

Écrit par : Feuilly | 15/11/2009

Vous êtes cher ami un homme de ressources.
Merci de ce lien précieux. Ne nous reste plus qu'à nous munir d' I-phones et autres bêtes numériques ...

Écrit par : Michèle | 15/11/2009

J'ai un peu de mal à comprendre le tollé sur Darrieusecq, auquel je ne participerai pas pour ne l'avoir jamais lue, et en même temps la référence à sa traduction...
Un mauvais écrivain, une pute tranchons le mot, peut-il être un traducteur de référence ?
Tu critiques souvent - et avec juste raison - le tintamarre fait autour des livres nouveaux qui n'ont de nouveau que le papier sur lequel ils sont couchés, les préférences, les modes (je suis bien placé pour savoir et même dans ces milieux prétendument éclairés et honnêtes de la critique numérique qu'on parle d'abord des auteurs bien connus et accessoirement, si on a cinq minutes, de quelques autres), alors gardons-nous bien de l'amalgame. Une foule d'auteurs de grand talent sont passés à la trappe, qui valent mieux qu'Ovide, et là, en plus, ce que je vois, en fait, c'est qu'on discute plus de Darrieusecq que de ce pauvre Ovide...
Comme quoi ,parfois, la totalité du cercle en vient à effacer la cible.
Mais peut-être que l'important, c'est de discuter.
Pourquoi pas ?

Écrit par : Bertrand | 16/11/2009

Le but de l'article est moins d'ouvrir la voie à la discussion que de faire découvrir cet Ovide-là. Ce n'est plus le poète mondain de "L'art d'aimer", mais un homme exilé, qui souffre de sa solitude et qui voit la mort approcher. Un homme qui n'a plus grand monde à qui parler (il en arrive même à oublier son latin à force d'entendre le scythe) et qui essaie de survivre en écrivant. N'ayant plus personne à qui se confier (les réponses à ses lettres mettent six mois ou un an pour arriver, quand il y a une réponse, car il est de bon ton d'oublier celui qui est tombé en disgrâce), il s’adresse aux lecteurs de ses vers, c’est-à-dire à nous qui le lisons 2000 ans après (et cela sans même savoir si ses écrits seront sauvés). Il y a quand même dans tout cela quelque chose qui interpelle et c’est cela qui m’a intéressé.

Écrit par : Feuilly | 16/11/2009

J'entends bien...j'entends bien...
Nous lirons .

Écrit par : Bertrand | 16/11/2009

Le Magazine des livres de novembre-décembre n'est pas encore en kiosque à Tarbes. Il y a toujours le n° de septembre-octobre.
Qué penosos !

Écrit par : Michèle | 17/11/2009

Ceci dit, je ne l'ai jamais trouvé chez moi. Pourtant...

Écrit par : Feuilly | 17/11/2009

C'est curieux
J'ai cru un instant avoir la berlue
Me réjouissant déjà que tu avais écrit quelque chose sur "Tristes Portiques" de Claude Lévi-Strauss
C'est curieux d'avoir choisi ce titre qui risque de prêter à confusion...

Écrit par : Coumarine | 17/11/2009

Comme je l'ai dit plus haut, la confusion avec "Tristes tropiques" est manifestement voulue par l'éditeur.

Écrit par : Feuilly | 17/11/2009

Ca m'a plu assez, l'ensemble de cette discussion, et je suis contente d'avoir obtenu le lien vers le site des auteurs anciens... Puis-je vous faire un aveu? Je suis tellement peu l'actualité littéraire (commerçante) que je ne connais même pas Marie Darrieussecq. Si j'en ai entendu parler, je ne m'en souviens guère... Il y a peu, j'ai fait un effort et puisé dans les nouveautés, à la bibliothèque, et je ne me souviens ni du titre du livre, ni du nom de l'auteur, tout ce que je puis dire, c'est que ça ne valait pas grand-chose...

Écrit par : Pivoine | 22/11/2009

Je reviens du site du magazine où je suis allée un peu naviguer, par curiosité. J'ai creusé la page des vingt blogs que l'on nous conseille de lire (parce que nous sommes de pauvres imbéciles incapables de lire des blogs par nous-mêmes...) et j'en suis revenue un peu agacée. Non à cause de l'idée ou des blogs conseillés, vu qu'il y en a d'excellents là-dedans, mais à cause de cette course à ce qu'il faut avoir lu, avoir vu, connaître, lire, et aussi parce que finalement... C'est très sélectif ! C'est l'aristocratie de la pensée qui se penche vers le peuple, et le peuple n'atteindra jamais à l'adoubement de la pensée (mon Dieu! Qu'est-ce que j'écris bien o;)))

Écrit par : Pivoine | 22/11/2009

"C'est l'aristocratie de la pensée qui se penche vers le peuple"

C'est surtout une liste des blogues connus par celle qui fait l'article, non? Il y a d'excellents blogues qui ne s'y trouvent pas, à commencer par le mien (éclat de rire).

Mais c'est malheureusement comme cela que le public fonctionne. On lui donne à lire ce qu'il doit lire alors qu'en réalité ceux qu'on présente sont moins là pour leur valeur que parce qu'ils sont connus de l'auteur de l'article. Cela fausse tout, bien entendu.

Écrit par : Feuilly | 22/11/2009

Je viens de lire les quatre pages de ton article sur Ovide (retraduit par Marie Darrieussecq) dans le Magazine des livres que j'ai acheté cet après-midi.
Ton empathie avec le poète est telle que c'est comme si tu nous emmenais auprès de lui, à Tomes, dans le pays des Gètes.
Je crois que je vais finalement acheter cette traduction des Tristes et des Pontiques, par Darrieussecq. Même si je me régale à lire 0vide dans les traductions que tu as mises en lien. Je viens de lire le Livre I des Tristes, que j'entends différemment après ton article.
Merci.

Écrit par : Michèle | 26/11/2009

Les commentaires sont fermés.