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14/08/2008

De la télévision (suite)

Dans la note précédente, une commentatrice s’étonne de l’existence même de cette note, qui ne traite pas de littérature mais d’actualité (visiblement, c’est qu’elle n’était pas encore là pour lire ce blogue au moment de l’élection de Sarkozy, sinon elle serait habituée !). Mais c’est qu’il faut aussi savoir sortir de nos livres et regarder ce qui se passe autour de nous. Pas trop non plus, cependant, sinon on est emporter par le vent de l’actualité. Je ne dis pas cela pour la tenue de ce blogue mais pour notre existence en général. Nous sommes tellement envahis d’images et d’informations (par ailleurs souvent invérifiables, ce qui relativise grandement leur intérêt) que nous finirions par y perdre notre petite musique intérieure. Je veux dire par là qu’il faut certes vivre dans le monde, mais qu’il faut aussi être capables de conserver une distance entre lui et nous, sinon nous courons le risque de devenir des pantins qui s’agitent selon le vent de l’actualité.

D’un côté, nous ne pouvons être indifférents devant les événements de Palestine ou de Géorgie, mais de l’autre il faut se dire que nous n‘avons qu’une vie, qu’elle est courte, que c’est la nôtre et qu’il nous appartient donc de la gérer au mieux. En d’autres termes, si je suis jeune et sans emploi, c’est sans doute très beau d’aller manifester pour le droit des Palestiniens, mais que le bon sens m’oblige de trouver d’abord un emploi. Si je suis pensionné et que j’ai du temps libre, c’est très bien de lutter pour les sans-papiers, mais consacrer du temps à ses petits enfants est également important. Pleurer sur le sort des détenus de Guantanamo, emprisonnés souvent arbitrairement, est nécessaire, mais pleurer toute la journée au point d’en perdre mon équilibre intérieur n’a aucun sens. Il y aura toujours du malheur et des injustices sur cette terre, on n’y peut rien. Si j’attends que cela cesse pour décider d’être heureux ou simplement pour faire ce que j’aime (lire un livre, par exemple), alors j’aurai perdu ma vie.

Tout ceci étant dit, il est bon, cependant, de démonter de temps à autre la vaste machinerie que le pouvoir met en place pour nous influencer dans le sens qui l’intéresse. Ainsi, s’il y a peu de liberté d'expression en Chine, il ne faudrait pas s’imaginer que nous sommes totalement libres dans notre monde occidental. Bien au contraire, tout est faussé, biaisé, corrompu. Cela se sait mais se dit peu.

Ici, avoir la mainmise sur la télévision est très important pour Sarkozy. On a vu ce que cela donnait aux Etats-Unis au moment du déclenchement de la guerre en Irak. Si plus de 65% des Américains étaient convaincus du bien fondé de cette guerre, c’est qu’ils croyaient dur comme fer à l’existence de armes de destructions massive. Or, ils ne sont pas plus bêtes que nous. S’ils y ont cru, c’est qu’ils ont dû subir un matraquage médiatique pendant des mois, tandis qu’en France, comme Chirac était opposé à la guerre (forcément, c’était un ami de Sadam et la France avait des intérêts économiques là-bas ) nous avons reçu une information différente. Mais si demain Sarkozy, pour faire plaisir à Israël, décide qu’il faut se débarrasser de la menace iranienne, je suis persuadé que nous aurons droit à notre tour à une série d’émissions qui dénonceront les abus du pouvoir actuellement en place à Téhéran (justice islamique sommaire, droit des femmes inexistant, etc.).
Il est donc bon de savoir qui se cache derrière notre petit écran (dans la note précédente, j’ai d’ailleurs oublier de citer Christine Ockrent, qui travaille maintenant dans l’ombre et qui est une atlantiste pure et dure)

Nous sommes manipulés en permanence et c’est là, intellectuellement parlant, une situation qui me dérange fortement.

Ainsi, chaque fois que dans la presse je suis tombé sur des articles qui traitaient de dossiers que je connaissais bien, professionnellement parlant, la vérité était toujours tronquée. Tout n’était pas faux, bien entendu, mais on omettait certains éléments (par ignorance ou volontairement ?) ce qui permettait de tirer des conclusions qui, elles, étaient absolument fausses.

Une autre preuve de manipulation. On sait que la mode est aujourd’hui aux privatisations (voir GDF et Suez). Et bien, il y a plus de quinze ans, j’avais entendu une émission dans laquelle un spécialiste parlait du prix de l’eau. Il expliquait que le public ne comprendrait pourquoi une ressource naturelle, qui appartenait finalement à tout le monde et qui (à l’époque) était relativement bon marché, allait voir son prix être multiplié par trois ou quatre simplement pour faire plaisir à des actionnaires privés. Il fallait, disait-il, prévoir une période de transition durant laquelle on influencerait l’opinion en lui parlant d’écologie, de préservation des sites naturels autour des sources, de traitement des eaux usées, etc. Et c’est exactement ce que l’on a fait. Autrefois, dans les villages, l’eau était gratuite. Quand les grandes compagnie d’état ont pris les choses en main, elle est devenue payante. Quand ces mêmes compagnies seront complètement privatisées, elle sera hors de prix. Et c’est bien via les médias qu’on nous conditionne pour que nous acceptions tous ces changements. Méfiance donc.

Commentaires

Ouh, là ! Encore ? Pourquoi cette suite étrange ? Pour nous ramener à beaucoup de modestie et à beaucoup de bon sens ? C'est vrai, notre regard dépend aussi de ce que nous vivons d'intime comme la maladie, la recherche d'un emploi, une peine de coeur... Tout peut vite se recentrer sur notre envahissante petite personne et sur nos besoins immédiats... mais au-delà il y a encore autre chose : "la petite musique intérieure"... Oh, elle ne fait pas de bruit, glissée dans cette chronique pamphlétaire et pourtant que de charme elle lui donne... comme un nombre d'or invisible, une clé musicale, un diapason interne qui donne la juste note à chacun de ces billets... Ce qui fait que c'est Feuilly qui parle et qui s'expose, une voix que l'on reconnaît et qui gagne en profondeur dans les méditations littéraires parce qu'il se sera, aussi, risqué dans l'arène publique...où il n'aime pas être manipulé ! Ah, ça non !!!
J'aime comme vous écrivez "blogue", ça me fait penser aux bogues des marrons et des châtaignes, à l'automne qui approche, aux ciels pluvieux (Ah, oui...vous n'aimez pas le gris !), aux longues promenades dans les bois avec toutes ces odeurs de champignons et de mousse, aux migrations d'oiseaux (cela me rend toujours un peu triste...), aux premières flambées dans l'âtre (hélas pas en ville, mais j'ai de bons souvenirs !). l'automne, c'est une belle saison d'écriture, n'est-ce pas ? Moissons tardives, vendanges, pressoirs, labours...
Vous disiez "petite musique intérieure"...

Écrit par : Christiane | 14/08/2008

Je me suis sans doute mal exprimé. Les exemples choisis (recherche d’un emploi, etc.) étaient finalement trop triviaux par rapport à ce que je voulais dire.

Je voulais suggérer qu’il ne faut pas perdre son être intime dans le grand brouhaha du monde. Certes, il ne faut pas vivre replié sur soi, mais il faut aussi savoir vivre pour soi de temps à autre (en dépit de toutes ces guerres et de toutes ces injustices) , sinon on risque de se perdre dans l’action (et les mots sont aussi ici une action).

L’être intérieur (ce que nous sommes vraiment) est ailleurs. Il faut parvenir à le saisir (et lui faire exprimer d’autres mots, des mots qui ne seront plus de combat, cette fois, mais intimes. Reflets de nous-mêmes, ils devraient dire l’humain et donc l’universel. Difficile, cependant, de ne pas tomber dans l’anecdotique ou l’insignifiant).

Pour le mot blogue, c’est le mot québécois, en fait. Il me plaît bien car il offre une alternative au mot anglais. Nos amis francophones d’outre-Atlantique sont souvent plus imaginatifs que nous pour ce qui est de la création de néologismes. Mais c’est vrai que cela à un côté « châtaignes ». Quant à l’automne, nous y sommes déjà, à voir ces tempêtes qui se succèdent. L’automne est beau dans sa splendeur de couleurs, mais il est triste aussi, car il marque la fin des illusions. Heureusement, la nature qui est généreuse nous gratifie à chaque fois d’un nouveau printemps. Dommage qu’elle ne fasse pas la même chose pour les individus.

Écrit par : Feuilly | 14/08/2008

L'automne, la fin des illusions ?.. Il faut habiter chaque saison de la vie avec joie et étonnement. L'automne offre une certaine douceur de vivre, une grande paix intérieure, l'âpreté de nos jugements fait place à plus d'accueil de la pensée de l'autre (Attention, je ne parle pas de vos colères intouchables !!!), une certaine gratitude pour ce corps qui nous a bien aidé à vivre mille joies et mille réconforts. Il faut aller dans le sens des rivières (La Moldau...Smetana), accepter ce qu'on ne peut pas refuser et en faire une joie. C'est comme pour l'écriture qui s'apaise tr révèle sa note bleue.
Alors, il ne faut pas vous parler d'automne ? Je ne voulais pas vous rendre mélancolique... Et puis, j'avais bien compris ce que vous vouliez dire, il n'y avait là rien de trivial, bien au contraire puisque vous avez été puiser dans ce qui ne vous concerne pas. Cela s'appelle du partage...
Bon, alors qu'est-ce que je fais ? Vous parler de l'Hiver ? C'est encore pire ! Du printemps ? Vous allez être nostalgique ! De l'été ? Vous dîtes qu'il est terminé !
Alors, je vais créer une saison rien que pour vous ! Fermez les yeux... Allez, travaillez un peu ! choisissez la lumière, les couleurs, ce qui pousse, ce qui se cueille, mettez-y des licornes, des fées, des lutins, des magiciens...
ça va mieux ? Alors...écrivez !

Écrit par : Christiane | 14/08/2008

Vous avez raison avec votre jugement sur l’automne. C’est une saison qui en effet offre une certaine douceur de vivre et qui peut déboucher sur une sorte de grand poème symphonique (Smetana). Accepter, c’est ne plus souffrir. Mais s’il y a de la douceur dans un tel sentiment, il y a de la résignation aussi.
« vous avez été puiser dans ce qui ne vous concerne pas. » Vous êtes quand même particulièrement perspicace, il n’y a pas à dire. Et ce n’est pas la première fois que je le constate.
C’est la forêt de Brocéliande que vous me proposez ? En automne alors.

Écrit par : Feuilly | 14/08/2008

Résignation ? Je crois juste avoir cessé de me battre contre ce que l'on ne peut pas changer. C'est allez dans le sens du temps qui passe
puis brouiller les cartes avec la création
c'est changer le cours du temps ou le percevoir différemment
et entrer dans la forêt de Brocéliande...
Si un moment du passé coïncide avec le présent, la durée s'efface. Si dans cet automne, par la magie du verbe, vous faites exister ce qui n'est plus, c'est le présent qui s'efface...
Bien sûr, ne pas regarder, alors, le journal télévisé quel que soit le présentateur ! Ecouter plutôt quelque musique aimée...

Écrit par : Christiane | 15/08/2008

Je n'ai pas le temps de lire vos échanges avec Christiane mais en ce qui me concerne je partage à 100% votre point de vue

"Ainsi, s’il y a peu de liberté d'expression en Chine, il ne faudrait pas s’imaginer que nous sommes totalement libres dans notre monde occidental."

Pour connaître un peu la Chine c'est ce que je ressens très profondément : à eux la dictature politique à nous celle du médiatiquement correct.

Je crois que c'est Coluche qui disait
la dictature c'est ferme ta gueule
la démocratie c'est cause toujours.

Nous nous prélassons dans l'illusion de la démocratie et de la liberté d'expression
mais il faudrait relire le mythe de la caverne !

Écrit par : Rosa | 19/08/2008

Nous nous croyons libres parce qu'on nous le dit tous les jours, alors qu'en réalité...

Écrit par : Feuilly | 19/08/2008

Moi j'ai aussi adopté la graphie québécoise de blogue que j'aime beaucoup et que je dois à mon amie québécoise, spécialiste de la langue française

http://chouxdesiam.canalblog.com/

Écrit par : Rosa | 19/08/2008

Blogue très intéressant, en effet. je retiens.

Écrit par : Feuilly | 19/08/2008

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