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12/02/2008

Français d'Angleterre

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Meurtre de Thomas becket












Nous avions rappelé l’autre jour qu’il fut une époque où le français était parlé en Angleterre, en gros depuis 1066 et jusqu’au XIV° siècle au moins. Mais quel français était ainsi parlé et par qui ?

On a la preuve que le «françois de France» était employé dans les actes et les documents royaux

En 1174, Guernes de Pont Sainte Maxence rédige à Londres la « Vie de Saint Thomas Becket ». Ce texte, rédigé en alexandrins, est important pour l’histoire de la formation de la langue française. Guernes est un écrivain anglo-normand. Il avait vu Becket guerroyer en Normandie :

En Normandie r’out sun seigneur grant mestier ;
Et jo l’vi sur Franceis plusur feiz chevaucher


Aussi, après l’assassinat de ce dernier, alla-t-il enquêter en Angleterre afin d’interroger des témoins qui l’avaient connu.

A Chanterbire alai ; la verité oï ;
Des amis saint Thomas la verité cueilli
Et de cels ki l’aveient dès s’enfance servi


On appréciera au passage sa démarche, assez rare pour l’époque, qui consiste à remonter à des sources fiables. Cela lui permettra de dresser des différents protagonistes des portraits assez exacts.

Mais ce qui nous intéresse ici, c’est ce vers :

Mis langage est boens, car en France fui nez

Cela suppose donc que deux français se côtoyaient en Angleterre : le bon français, celui parlé en France et un français moins bon, appris sur place par les enfants de l’aristocratie anglaise et qui eux n’avaient jamais mis un pied sur le continent (qu’ils soient d’origine française ou anglaise, d’ailleurs)

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Dans ses célèbres Contes de Canterbury écrits eux en anglais vers 1380, Geoffrey Chaucer (v. 1343-1400) nous éclaire sur ce désir des nobles d’acquérir le bon français, lequel permettait de faire valoir ses bonnes manières. En voici une traduction :


Elle avait pour nom Dame Églantine,Chantait à merveille hymnes et matines Qu’elle entonnait savamment par le nez. Elle parlait un françois des plus raffinés,Le françois qu’on apprend à Stratford-atte-BowCar elle ignorait du françois de Paris le moindre mot.

La ville de Stratford-atte-Bow était située près de Londres et on y apprenait le «françois d'Angleterre».Il existait donc bien deux français distincts : l'un correspondait à « une langue vernaculaire parlée spontanément, sans égard à la langue écrite, alors que l'autre était une langue seconde qu’on allait apprendre en France ».

On peut donc supposer que même si le français avait continué à être parlé et écrit en Angleterre,il se serait tellement singularisé par rapport à celui de Paris, qu’il serait devenu une autre langue (un peu comme le latin parlé dans la Romania s’était très vite écarté du latin de Rome. Le résultat en a été la diversité des langues romanes.)

Notons encore que se développa en Angleterre une série de traductions françaises de traités spécialisés, que ce soit sur la médecine, les mathématiques ou la religion.

Commentaires

Bonjour,

Je trouve ce message fort interessant, mais on oublierait jamais que pour parler un bon ou un mauvais français il faut aller à l'école...

salut.

Écrit par : formation français | 13/02/2008

Le fait d'être né "Français de France" n'empêche pas d'aller à l'école pour maîtriser au mieux sa propre langue, tout à fait.

Écrit par : Feuilly | 13/02/2008

Oh ! Je suis déçue ! Je croyais ouvrir une rencontre avec Sam Beckett et vous, là, c'est Thomas et une autre réflexion. Déjà j'avais convoqué son paquet de gitanes, son profil d'aigle, le temps, le temps de l'attente de Godot, les mots rares, sa modestie, son insatisfaction face à son oeuvre, sa perception rare de Giacometti, Picasso, Warhol, Bram Van Velde, Beuys, Bacon... et son oeuvre magique, toujours inachevée. Avez-vous parlé de lui quelque part ici ? dites vite avant de partir. Bon je vous pose quand même le cadeau pour votre voyage, ne l'oubliez pas !
"Que tout devienne noir, que tout devienne clair, que tout reste gris, c'est le gris qui s'impose, pour commencer, étant ce qu'il est, pouvant ce qu'il peut, fait de clair et de noir, pouvant se vider de celui-ci; de celui-là, pour n'être plus que l'autre."
L'Innommable

Écrit par : Christiane | 11/07/2008

Oui, j'aime bien Beckett, qui semble pousser très loin le non sens de toute chose. Je suis plsu réservé quant aux romans, qui sont d'étranges constructions.

Le gris? Le gris tient de tout et n'est d'aucun aprti. Ne vaut-il pas mieux des opinons plus tranchées? Evidemment, on choisit alors un camp et on néglige l'autre, d'où les oeillères qu'on nous reproche plus haut. Mais peut-on vraiment rester dans l'ente-deux et ne point prendre parti?

Écrit par : Feuilly | 12/07/2008

Le gris ? les gris sont autant de variations de la rencontre de la lumière et de l'ombre, du noir et du blanc et peuvent basculerdans le noir ou le blanc selon qu'on y force la lumière ou l'ombre. Mélangés aux pigments purs, ils sont à l'origine de tons cassés qu'on trouve beaucoup dans les Cézanne, les Staël, les Manet, les Picasso (Guernica), , les Morandi,
les héros fatigués,
la triste humanité,
les crépuscules,
les ombres, le doute,
la tristesse, la mélancolie,
les gravures de Dûrer, la chair des romans, votre blog quand vous serez parti...tantôt noirs...tantôt encore rayonnants d'un peu de lumière...
Pour une fois, nos mots sont désaccordés...

Écrit par : Christiane | 12/07/2008

Et puis Beckett dit "commencer par le gris", pour aller vers le noir ou le clair et il ajoute qu'il faut "se vider" pour cela... autant de mots que vous avez lus bien tardivement, bien rapidement, déjà tout à la fièvre de vos bagages, de votre départ... vous, d'habitude si lent... si attentif...Vous voilà une faim de cerf-volant escaladant le ciel. Je lâche, volontairement...le fil...de notre dialogue...

Écrit par : Christiane | 12/07/2008

J'ai été un peu rapide, certes. Mais tout de même, le gris, c'est le monde de l'entre-deux. certes, la vie est ainsi faites et rien n'est jamais ni tout à fait noir ni tout à fait blanc. On peu têtre athée et aimer le grégorien et les églises romanes, comm on peut ête chrétien et voter communiste (c'est plus rare). Mais bon, à rester dans cet entre-deux, on devient fade. il faut bien choisir son camp, même s'il ne nous satisfait qu'à quatre-vingt-dix pour cent.

Dans la philosophie des éléments, selon Bachelard, j'opte pour le feu. J'adore les rochers écrasés de soleil, dans le feu de midi et redoute les marécages ambigus, où le pied ne s'enfonce qu'avec précaution.

Écrit par : Feuilly | 13/07/2008

Voilà un gris que la lumière accorde à plus de témérité. Il laisse là son incertitude et pose un pied sur cette terre sèche et lumineuse où on lui dit que le soleil n'est pas blessure mais ensemencement de la joie.
Attendre la germination en saison prochaine...

Écrit par : Christiane | 13/07/2008

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