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09/05/2008

Des réformes présidentielles

L’expérience montre que c’est surtout au cours de leur première année de mandat que les Présidents en exercice ont réalisé les réformes qu’ils avaient promis de faire lors de leur campagne électorale.

Ainsi, de Gaulle, revenu au pouvoir à la faveur d'un coup de force le 13 mai 1958, est élu président le 21 décembre 1958. A son actif, on retiendra :
- le référendum du 28 septembre 1958 sur la nouvelle Constitution
- à partir du 5 octobre 1958, le général gouverne par ordonnances (70 textes notamment sur le mode de scrutin et les réformes de structure (hôpitaux, défense....)
- le plan Pinay-Rueff (30 septembre 1958). L’économiste Jacques Rueff avait réuni des personnalités du monde des affaires (président de Péchiney, de la Société générale....), sous le patronage du ministre des Finances Antoine Pinay, pour décider des mesures à prendre en matière économique. Cela se traduira par une cure d'amaigrissement de l'administration), la suppression des indexations (notamment sur le blé) et la libération des échanges extérieurs.
-le 28 décembre 1958, dévaluation du franc de 17% et création du «nouveau franc»
- le 6 janvier 1959, une ordonnance prolonge la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans.
- autodétermination des Algériens (16 septembre 1959)

Georges Pompidou (élu le 15 juin 1969)

Après avoir surmonté avec sang-froid les événements de mai 68, il succède au général. Fils d'instituteur, normalien d'une immense culture, c'est à ce jour le seul président de la Ve République issu d'un milieu populaire.

- modernisation industrielle de la France
- premiers investissements dans le programme ferroviaire à grande vitesse (TGV)
- modernisation du téléphone et la construction d'autoroutes.
- création du Centre Pompidou (inauguré en 1977)

Valéry Giscard d'Estaing (élu le 19 mai 1974)

- ministère de la Condition féminine
-arrêt de l'immigration (3 juillet 1974) dans le but d’enrayer la montée du chômage
- majorité à 18 ans (5 juillet 1974). Erreur tactique puisque les 2,5 millions de jeunes qui pourront désormais voter donneront leur voix à Mitterrand en 1981.
- fin du monopole audiovisuel (7 août 1974). C’est le début du démantèlement de l’ORTF.
- indemnisation des chômeurs à 90% du dernier salaire pendant un an (14 octobre 1974)
- saisine du Conseil constitutionnel (21 octobre 1974). possibilité pour 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel
- gratuité de la contraception (26 octobre 1974)
- légalisation de l'avortement (28 novembre 1974)

François Mitterrand (élu le 10 mai 1981)

Sous le gouvernement de Pierre Mauroy, il concrétise de nombreuses promesses de campagne :
- augmentation de 20 ou 25% des allocations handicapés, familiales (+25%) et logement (1er juillet 1981)
- suppression de la Cour de sûreté de l'État (4 août 1981)
- autorisation des radios locales sans publicité (2 octobre 1981)
- blocage des prix pendant six mois (8 octobre 1981),
- abrogation de la loi «anticasseurs» (15 décembre 1981).
- abolition de la peine de mort (9 octobre 1981)
- impôt sur les grandes fortunes (30 décembre 1981)
- 39 heures et 5e semaine de congés payés (14 janvier 1982)
- nationalisations des grandes entreprises (13 février 1982)
- décentralisation administrative (3 mars 1982)
- retraite à 60 ans (25 mars 1982)

Mais le 11 juin 1982 survient un premier plan de rigueur...

Jacques Chirac (élu le 7 mai 1995)

- engagement en Bosnie (3 juin 1995)
- reprise des essais nucléaires (13 juin 1995)
- fin du service militaire obligatoire (22 février 1996)

A partir d’octobre 1995, Jacques Chirac annonce une politique de rigueur (en vue de la création de l’euro). De son côté, Alain Juppé tente une réforme du système de retraites (il renonce finalement suite aux grèves des cheminots).

Manifestement donc, après une première année de pouvoir durant laquelle les Présidents successifs ont pu concrétiser une bonne partie de leurs projets de campagne électorale, le rythme se ralentit considérablement. A la fin, certains finissent même par prendre des décisions contraires, lesquelles constituent un véritable retour en arrière.

Au vu de cette expérience, on est en droit de se demander si le système Sarkozy a encore un avenir devant lui. Une année vient en effet de se terminer, on a vu beaucoup d’agitation dans tous les sens, mais finalement rien de bien probant. La tactique a été d’éviter de mener une réforme à fond avant de passer à la suivante (par crainte de l’opposition des citoyens sans doute). On a préféré attaquer de tous côtés et en ordre dispersé, afin de brouiller les pistes et de dérouter l’adversaire. Comment en effet s’opposer à des mesures partielles ou à des propos qui ne manifestent qu’une intention de réformes sans les réaliser vraiment ?

Sarkozy, en hyperactif né, s’est beaucoup agité, a touché un peu à tout, mais n’a encore rien terminé. De ce point de vue, il devient donc le Président le plus inefficace que la France ait jamais eu. Je ne discute pas ici de la pertinence de ses réformes (et à tout prendre je préfère qu’il laisse les choses en l’état où elles sont plutôt que de tout démanteler sans rien reconstruire ou en ne reconstruisant que pour le plus grand profit de quelques-uns). Non, ce dont je parle, c’est de l’incohérence du personnage, qui avait annoncé de nombreux changements et qui n’a pas tenu ses promesses ou alors fort partiellement. Le point le plus délicat, c’est évidemment celui du pouvoir d’achat.

Bien sûr, il n’est pas responsable de la mauvaise situation économique, ni de la hausse du prix du pétrole. Le problème, c’est qu’il s’est fait élire sur cela. On se souvient de ses propos sur les gens qui se lèvent tôt et qui méritent un salaire décent. Les gens se lèvent toujours aussi tôt, mais si leur salaire n’a pas diminué, cela a bien été le cas de leur pouvoir d’achat. D’où le mécontentement et la grogne. Ajoutez à cela quelques incohérences (les vacances sur un yacht, l’étalage de sa relation avec Carla, etc.), qui ont donné l’image d’un président profiteur et jouisseur qui se désintéressait du sort de ses électeurs, et vous comprendrez que l’état de grâce est passé en lisant les sondages qui plongent vertigineusement vers le bas.

Que peut-il bien faire pour redresse la barre ? Plus grand chose, il est trop tard. Ses réformes de fond ne sont pas encore entamées et déjà il n’a plus aucune popularité. Quand il passe à la télévision, on ne le regarde même plus, on admire la jolie frimousse de Carla en se disant qu’elle est finalement mieux que lui, plus distinguée, plus digne, plus intelligente aussi probablement. Ceux qui veulent aller plus loin peuvent même voir sur Internet les photos de la première dame en petite tenue ou sans tenue du tout. Triste manière de se consoler. Ceux qui avaient voté pour un président fort, qui allait rencontrer leurs problèmes quotidiens, en sont à se consoler avec de telles photos. Et quand les réformes vont enfin arriver, ce ne sera pas celles qu’ils attendaient. Ce sera pour voir l’âge de la retraite reculer, la pension diminuer, le droits sociaux régresser et le porte-monnaie s’alléger.

Dépassé, le pauvre Président essaie de se disculper en s’en prenant aux autres, à tous les autres : Chirac, Mitterrand, De Gaulle, tous y passent. Il n’y a que le Roi Soleil et Philippe le Bel qui n’ont pas été inquiétés. Et ne parlons pas de la presse ! Ah, les méchants journalistes qu’on a là, qui n’encensent pas assez le Président et qui ne parlent pas assez des déboires de l’opposition. Des goujats, vraiment. Et des ingrats, surtout, lui qui leur avait offert de si beaux postes !