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09/10/2007

Rhétorique

Nous avons déjà parlé de l’oxymore. Il existe bien d’autres figures de style. D’ailleurs il conviendrait de distinguer les figures qui portent sur les mots eux-mêmes (la rime, l’allitération, les calembours) de celles qui portent sur le sens (les tropes en général). A côté de ces deux grandes catégories, on citera encore les figures de construction (inversion, par exemple) et les figures de pensée (allégorie, ironie, etc.).
Parmi les tropes, la métaphore, la métonymie et la synecdoque sont certainement les plus connues et les plus utilisées, ce qui ne nous empêchera pas de nous rafraîchir la mémoire.

- La métonymie (du grec metônumia, « changement de nom ») consiste à désigner un objet par le nom d'un autre objet, les deux ayant évidemment quelque chose en commun, ce qui permet d’en citer un pour faire penser à l’autre.

- le contenant pour le contenu (boire un verre pour boire ce qu'il y a dans ce verre. Le stade, pour désigner les personnes qui y sont présentes ),
- l'objet pour la personne (le violon, pour désigner le violoniste),
- le lieu pour l'objet fait dans ce lieu (un bordeaux pour un vin de Bordeaux),
- la matière pour l'objet (le fer pour l'épée, une petite laine pour un vêtement chaud),
- le nom propre pour un objet créé par la personne (lire un Camus pour un livre de Camus, acheter un Renoir pour un tableau de Renoir, voir un Truffaut, etc.)
- et la cause pour l'effet (les lauriers pour la gloire).
- la localisation pour l'institution qui y est installée (l’Elysée, Bercy, le qua d’Orsay etc.)


Remarquons en passant que dans l’expression « boire un verre », on ne peut plus parler de métonymie au sens propre (même si à l’origine c’en était bien une), tant la formule s’est généralisée.


La synecdoque (du grec sunekdokhê, « compréhension simultanée ») :
- la partie pour le tout (ou l’inverse) -une voile pour un bateau, une lame pour un couteau ou un escrimeur. Berne a condamné l’attentat pour désigner l’ensemble de la Suisse)
- le genre pour l'espèce (ou l’inverse) -la saison des lilas pour la saison des fleurs, les mortels pour les hommes
- le nom propre pour le nom commun -un judas pour un traître, un tartuffe pour un hypocrite, un harpagon pour un avare..


Remarquons que la différence entre synecdoque et métonymie n’est pas toujours facile à saisir. On pourrait d’ailleurs dire que toutes les synecdoques sont des métonymies puisqu’elles désignent un objet par un autre. En fait, la synecdoque désigne un objet qui est contenu dans celui qu’elle veut évoquer (la lame est une partie du couteau) ou l’inverse. C’est donc une figure de style plus réaliste, plus proche de l’objet évoqué, tandis que la métonymie a un côté plus fantastique (ainsi, l’expression des bruits de bottes pourrait très bien désigner un coup d’état durant lequel seuls les tanks et l’es avions ont joué un rôle déterminant).
Notons cependant que des expressions comme le fer (pour l’épée) ou le jean (pour un pantalon en jean), qui semblent des métonymies classiques (la matière pour l’objet) sont qualifiées par certains de synecdoque de la matière. Comme quoi rien n’est simple.


Une autre subtilité consiste à introduire la notion d’antonomase. Dans ce cas, un nom propre est utilisé comme non commun (ou l’inverse) : un roquefort, un bordeaux, un harpagon, un don juan (le tout sans majuscule). Or, nous avions cité les mêmes exemples plus haut tantôt à propos de la métonymie (un bordeaux) ou de la synecdoque (un tartuffe). Comme quoi, plus on veut faire de distinctions, plus il est difficile de s’y retrouver. Toute synecdoque n’est pas une antonomase, mais toute antonomase est une synecdoque (ou une métonymie). En fait, c’est une synecdoque si l'individu portant le nom propre fait partie de l'ensemble évoqué (Don Juan, par exemple, fait partie des séducteurs).

L’autre grande figure de style qu’il convient encore d’évoquer, c’est la métaphore. Celle-ci est fondée sur une ressemblance entre les termes et suppose donc une comparaison implicite. Le lien entre les deux termes est beaucoup moins étroit que dans la métonymie ou la synecdoque. On peut souvent insérer une expression telle que "semblable à", "pareil à" ou "comme" sans changer le sens. Ainsi, si je dis « c’est un lion », je désigne une homme qui est comme un lion. Il faut bien entendu qu’il y ait des propriétés communes aux deux termes pour que la comparaison puisse se faire (ici le courage, l’agressivité, etc.). D’un autre côté, un seul des termes doit être cité. Si je dis « Jean est rusé comme un renard », le mot « comme » établit un équilibre entre « Jean » et « renard ». On a alors affaire à une simple comparaison.

Certaines métaphores sont si courantes, qu’elles ne sont plus perçues comme telles. Ainsi « tête de clou », « bras de fauteuil », « tête de l’avion », « bouche d’égout ».

Lors d’une découverte scientifique, on emploiera une métaphore plutôt que de créer de nouveaux termes, par soucis d’économie. Ainsi en va-t-il d’Internet. Pour les locuteurs francophones, la Toile ressemble à un océan sur les vagues duquel on « surfe ». Du coup, on parlera de navigateur. Du côté anglophone, la même Toile est plutôt vue comme une prairie (d’où le terme « brouwser » : brouteur)

Notons que la métaphore n'est donc pas toujours immédiatement compréhensible puisqu’un des éléments de la comparaison est absent. Le lecteur doit donc deviner la relation établie par l’auteur. Il s’agit d’un jeu avec la langue et c’est peut-être ce qui la rend si intéressante.

Tout ceci étant dit, il est clair que plus vous vous initiez aux subtilités des figures de rhétorique, plus vous vous y perdez et plus vous avez conscience de votre ignorance car vous trouverez toujours des spécialistes pour établir des distinctions et des subdivisions de plus en plus subtiles.

C’est pourquoi nous passerons sous silence (afin de conserver tout de même quelques lecteurs) les autres figures de style (personnification, antithèse, répétition, hyperbole, litote, euphémisme). Les plus persévérants, cependant, peuvent nous en proposer une définition dans les commentaires…



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L'apogée de la rhétorique grecque: Démosthène, l'auteur des Philippiques